Hégésippe Ibéné
1914 - 1989
- Informations générales
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- Né le 8 avril 1914 à Sainte-anne (Guadeloupe - France)
- Décédé le 28 mai 1989 à Sainte-anne (Guadeloupe - France)
1914 - 1989
IBENE (Hégésippe)
Né le 8 avril 1914 à Sainte-Anne (Guadeloupe)
Décédé le 22 mai 1989 à Sainte-Anne
Député de Guadeloupe de 1973 à 1978
Hégésippe Ibéné est né le 8 avril 1914 à Sainte-Anne, dans la ville d’où sont originaires ses parents, issus de la paysannerie locale. Elève du lycée Carnot de Pointe-à-Pitre jusqu’à l’obtention de son baccalauréat, il quitte son île natale pour accomplir ses études supérieures à Bordeaux, à la faculté de droit. Il y obtient une licence. Il épouse Marguerite Amat, le 14 mars 1939, union de laquelle naissent ses trois enfants. Il est mobilisé en septembre 1939, alors qu’éclate le second conflit mondial, et après avoir été en Martinique, il rentre dans ses foyers en 1941. Il commence alors une carrière d’avocat à la Cour d’appel de la Basse-Terre. Six années durant, il sera bâtonnier de l’Ordre. Il appartient aussi à l’Ordre départemental des avocats de la Guadeloupe.
Il s’investit personnellement dans sa commune de Sainte-Anne, ville fondée à la fin du XVIIe siècle, et qui devint rapidement la paroisse la plus riche et la plus peuplée de la Grande-Terre. Elle en fut d’ailleurs le chef-lieu avant l’établissement de Pointe-à-Pitre comme l’un des hauts lieux de la période esclavagiste. Après la fin du règne des « notables blancs », avec l’élection de Maurice Satineau, natif de Baie-Mahault, à la tête du mouvement schoelchériste, le rythme de la vie politique municipale s’accélère. A la mort des premiers magistrats successifs Saint-Pierre Phirmis (1960-1965) et Albert Lazard (1965-1970), Hégésippe Ibéné, adhérent aux Jeunesses socialistes dès 1934, cofondateur du Parti communiste guadeloupéen en 1943, fondateur de la fédération communiste de la Guadeloupe en 1944, conseiller général de Pointe-à-Pitre depuis 1946 et premier adjoint au maire de Sainte-Anne, prend la succession, par intérim, du maire défunt en 1970. Il est élu en son nom à la tête de la commune, l’année d’après, aux élections municipales du mois de mars 1971. Il conserve ce poste jusqu’en 1989. Membre-fondateur du club de la Juventus de Sainte-Anne, il préside, dans ses fonctions de maire, plusieurs associations culturelles, et dirige le journal local L’Etincelle.
Dès le scrutin législatif des 5 et 12 mars 1967, il est candidat aux élections législatives dans la première circonscription de Guadeloupe. Cette partie du territoire guadeloupéen regroupe les communes d’Anse-Bertrand, de La Désirade, du Gosier, du Moule, de Petit-Canal, de Pointe-à-Pitre, de Port-Louis, de Saint-François et de Sainte-Anne. Il n’y rassemble que 5 743 des 18 114 suffrages exprimés au premier tour, et 11 248 voix au second. L’agent de fabrique Paul Valentino est élu député. A la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale, au lendemain des évènements de mai 1968, il est candidat à nouveau, dans la même circonscription législative. Secondé par le conseiller général et maire Charles Edwige, son suppléant en cas de victoire, Hégésippe Ibéné, membre du Parti communiste guadeloupéen, indépendant du Parti communiste français depuis 1958, obtient 7 516 des 17 783 suffrages exprimés, au soir du premier tour. La semaine suivante, il rassemble 10 788 bulletins, ce qui ne lui assure pas la victoire. Le docteur Jean Léopold Hélène, conseiller général et maire du Gosier, enlève le siège de Paul Valentino, avec 14 497 voix.
Fort de son élection comme maire de Sainte-Anne, en 1971, Hégésippe Ibéné tente sa chance une troisième fois, dans la première circonscription de la Guadeloupe. Il se présente, cette fois-ci expressément, au nom du Parti communiste guadeloupéen, au comité central duquel il appartient. Arrivé premier des sept candidats en lice au premier tour, avec 10 851 voix, soit 48,8% des suffrages exprimés, le maire de Sainte-Anne manque d’être élu. Le second tour est cependant l’occasion donnée aux voix non communistes très éparpillées de se retrouver autour de la candidature du député sortant, investi par les gaullistes de l’Union des républicains pour le progrès (U.R.P.), et dans la campagne électorale duquel, les forces communistes et socialistes ont été associées à une « épidémie (….), véritable fléau comparable à la lèpre ». Hégésippe Ibéné manque à nouveau la victoire. Avec 49,7% des voix, il s’incline face à son adversaire, mais momentanément. En effet, saisi, le Conseil constitutionnel annule l’élection, dans sa décision du 25 octobre 1973. Lors de l’élection législative partielle des 2 et 9 décembre suivant, la victoire espérée par le conseiller général de Sainte-Anne est effective. A la suite d’un meilleur résultat de premier tour – il obtient 11 470 voix -, il rassemble sur son nom 13 946 des 24 752 suffrages exprimés la semaine suivante. Il devance Léopold Hélène de plus de 3 000 voix : il est élu député de la première circonscription de Guadeloupe.
A son arrivée à l’Assemblée nationale, qui prend acte de son élection le 14 décembre 1973, il s’apparente au groupe communiste. Il est membre de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Au cours de son mandat, son activité législative est soutenue. Il pose deux questions au gouvernement, relatives aux problèmes ultramarins, et deux questions orales sans débat, sur les mêmes thèmes. S’il ne présente aucune proposition de loi en son nom, il intervient à vingt-et-une reprises en séance publique, exclusivement sur des thèmes ultramarins. Dès le 20 décembre 1973, il prend part à la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la Convention européenne des droits de l’homme. Rappelant que les départements d’outre-mer ont été déclarés partie de l’Europe, il démontre les insuffisances de la Convention quant au droit du travail. Il fait entendre les intérêts de la Guadeloupe, à l’occasion des projets de loi de finances, lorsque le budget du ministère de l’outre-mer est à l’ordre du jour des travaux du Parlement. Ainsi, le 13 novembre 1974, dans le P.L.F. pour 1975, il regrette l’impuissance du secrétariat d’Etat à résoudre les problèmes fondamentaux liés à ces territoires français. Pour lui, la vocation des Antilles n’est pas d’enrichir les maîtres de l’import-export. Il poursuit sa condamnation du colonialisme lors des débats budgétaires pour 1976, le 13 novembre 1975, pour 1977, le 19 novembre 1976, et pour 1978, le 3 novembre 1977.
Elu, par ailleurs, conseiller régional en 1973, au titre de ses fonctions de parlementaire, il développe sa défense de l’Outre-mer dans l’ensemble de ses déclarations en séance publique, même si, communiste, il combat fréquemment la politique gouvernementale menée en la matière. Dans la discussion du projet de loi relatif à l’extension de l’allocation logement aux D.O.M., le 23 mai 1975, il défend le système de la « parité globale ». En face de ce qu’il qualifie de « persistance du fait colonial », il condamne « l’énorme différence entre les allocations touchées en France et celles reçues dans les D.O.M. » A ce propos, il défend un amendement qui est retiré. Même lorsque le texte d’initiative gouvernementale sur le divorce arrive en discussion, il lie son propos avec la situation en Guadeloupe, en rendant Bonaparte responsable du désordre des foyers conjugaux de l’île. Il rappelle, à ce propos, les « vertus exceptionnelles » de la femme guadeloupéenne, et « la très grande résistance du mari » à payer la pension alimentaire.
Par ailleurs, le projet de loi, portant orientation préliminaire du VIIe Plan, lui donne l’occasion, le 3 juin 1975, de signifier devant ces collègues la position « défavorisée » des départements d’Outre-mer dans le Marché commun, alors que les pays qui y sont associés jouissent d’avantages « consentis ». A la suite de l’éruption de la Soufrière, en Guadeloupe, en octobre 1976, le député de Sainte-Anne réagit à la déclaration que le gouvernement fait, à ce propos, le 7 du mois. Il souhaite mettre l’Etat devant ses responsabilités, en indiquant que l’alerte avait été prévue plusieurs mois à l’avance. A cette suite, notamment en raison des difficultés dues au déplacement du tiers de la population, il souhaite l’extension à la Guadeloupe de la législation française sur le chômage. Plus avant, l’élu communiste fait aussi entendre sa voix, le 29 juin 1977, dans les débats autour du texte que le gouvernement propose en vue de l’organisation de la Polynésie française. Les problèmes de la démocratisation de la vie locale doivent être pris en compte, selon le maire de Sainte-Anne et, au plan économique, l’hypertrophie du secteur tertiaire doit être réellement prise en considération. Mais le texte du gouvernement reçoit le soutien d’Hégésippe Ibéné et du groupe communiste.
Les derniers mois de l’année 1977 sont marqués par une succession d’intervention du député de la première circonscription de la Guadeloupe sur des thèmes très différents, en lien avec les départements d’Outre-mer : projet de la loi de réforme du Code électoral, le 6 décembre 1977, au cours duquel il défend un amendement – repoussé par la suite – sur les conditions d’utilisation, par les groupements politiques locaux de T.O.M. et des D.O.M., des antennes de la radio télévision française ; projet de loi instituant le complément familial dans les départements d’outre-mer, le 6 décembre 1977, lors duquel il regrette les restrictions du gouvernement relatives à l’application des avantages sociaux dans les D.O.M., et s’interroge, dans un amendement lui aussi repoussé, sur les conditions d’attribution du complément familial ; projet de loi relatif à la protection de la maternité dans les D.O.M., le 6 décembre 1977, soutenu par le groupe communiste, au cours duquel un autre des ses amendements est défendu, puis rejeté, et qui vise à pallier l’insuffisance du montant de la prime octroyée aux femmes attendant un enfant. Enfin, le 7 décembre 1977, il défend un amendement – repoussé également - dans la discussion du projet de loi relatif aux dispositions prévues par le projet de loi sur la généralisation de la sécurité sociale aux D.O.M.
Au cours de son mandat, Hégésippe Ibéné illustre, par ses votes, son rôle d’opposant à la politique gouvernementale. Aussi, le 6 juin 1974, vote-t-il contre la déclaration de politique générale du gouvernement Chirac. Il en fait de même, le 10 octobre 1974, au Congrès de Versailles, alors que la représentation nationale adopte l’ensemble du projet de loi constitutionnelle portant révision de l’article 25 de la Constitution relatif à la durée des pouvoirs de chaque assemblée. Comme ses collègues de la gauche, il soutient et vote pour le projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse, défendu par la ministre de la santé, Simone Veil, et mis au vote dans la troisième séance du 28 novembre 1974. Son soutien est aussi entier à la réforme du divorce, adoptée le mercredi 4 juin 1975. En revanche, il vote contre la réforme constitutionnelle de l’article 7 de la Constitution, du mardi 8 juin 1976, illustration de l’opposition systématique de la part des communistes à tout texte relatif à la Constitution de la Ve République qu’ils ont toujours combattue. Logiquement, Hésésippe Ibéné ne donne pas sa voix à Raymond Barre, lorsque le chef du gouvernement demande un vote de confiance sur le programme de son gouvernement, le 28 avril 1977. Enfin, comme la représentation nationale à sa presque unanimité, il approuve le projet de loi relatif à l’élection des représentants à l’Assemblée des Communautés européennes, dans la deuxième séance du 21 juin 1977.
Hégésippe Ibéné est candidat au renouvellement de son mandat, aux élections législatives du mois de mars 1978. Au soir du premier tour, secondé par un nouveau suppléant, le professeur Ernest Moutoussamy, il ne parvient pas à mener la bataille en tête. Il est deuxième, derrière José Moustache, maire d’Anse Bertrand, avec 9 778 voix, soit 36,2% des suffrages exprimés. Il est largement battu au second tour par le major du premier, en ne rassemblant que 13 003 des 32 724 suffrages exprimés (39,7% des voix). Le vainqueur en obtient 19 721. L’abstention est forte et s’élève à 42,3% des voix.
Entre-temps, aux élections municipales du mois de mars 1977, Hésésippe Ibéné est réélu maire de Sainte-Anne. A la suite de l’annulation des élections municipales pour irrégularité, il est à nouveau candidat et réélu au mois d’avril suivant. Il conserve son mandat de maire au scrutin de 1983, mais est battu en mars 1989.
Ce passionné de football et de natation, sport dans lequel il a brillé en 1937, disparaît deux mois plus tard, le 24 mai 1989, à l’âge de 75 ans.