Henri Joannon
1901 - 1985
Né le 17 avril 1901 à Montmarault (Allier)
Décédé le 10 mars 1985 à Saint-Flour (Cantal)
Membre de la première Assemblée nationale constituante (Cantal)
Fils et petit-fils de pharmacien, Henri Joannon étudie au collège mariste Saint-Joseph à Montluçon puis à l'Université de Lyon où il obtient un diplôme de pharmacien et une licence en sciences. Il reprend l'officine familiale de Murat en 1928, et s'occupe en parallèle de l'organisation de sa profession (comme secrétaire du syndicat des pharmaciens du Cantal) et de la vie catholique de sa région : scoutisme et secours catholique notamment.
Mobilisé en août 1939 dans le Service de santé des armées, il est démobilisé à la suite de la défaite en juin 1940 ; il retourne alors à Murat où il retrouve sa pharmacie et devient conseiller municipal jusqu'en 1943, date à laquelle il est révoqué. En effet, ses activités de résistance (notamment l'établissement d'états civils pour des Juifs et des réfractaires et le soin à des maquisards blessés) valent à Henri Joannon un ordre d'arrestation lancé en février ou mars 1943 par le Haut commissaire de la jeunesse et des sports à Vichy, arrestation à laquelle il parvient à se soustraire.
Arrêté le 24 juin 1944, il est amené à la prison de Clermont puis déporté en juillet au camp de Neuengamme, près de Hambourg, dont les Anglais le libèrent en avril 1945. Atteint du typhus, il est rapatrié à Paris où une hospitalisation prolongée le guérit. Il sera fait chevalier de Légion d'honneur.
A son retour de Paris, Henri Joannon décide de prendre part à l'action publique, et se présente à l'élection pour l'Assemblée constituante, en deuxième position sur la liste républicaine d'action paysanne et sociale qui arrive en tête avec 30 182 des 88 083 suffrages exprimés. Toutefois ce bon score, qui permet à la tête de liste d'être le seul élu au quotient, est insuffisant pour obtenir deux mandats, et seul Camille Laurens est élu. Mais l'invalidation de celui-ci, le 20 décembre 1945, fait d'Henri Joannon un constituant. Ce remplacement est officiellement validé le 7 février 1946.
A l'Assemblée, Henri Joannon est nommé membre de la Commission des pensions civiles et militaires et des victimes de la répression. Son activité législative, réduite à quatre mois, est malgré tout intense, puisqu'il ne dépose pas moins de quatre propositions de résolution à caractère général et social : il souhaite par exemple rendre obligatoire pour chaque canton d'avoir au moins une assistante sociale diplômée (7 mars 1946), ou accorder une retraite à tout Français et à toute Française âgés de plus de soixante-cinq ans et touchant moins de quinze mille francs de revenus (5 avril 1946).
Il intervient également à la tribune sur des questions d'organisation municipale et sur des propositions de loi relatives à la constitution et à la déclaration des droits, pour défendre trois amendements de son cru, dont l'un concerne l'inscription de la liberté de l'enseignement au titre de droit fondamental. Henri Joannon, se défendant de vouloir en France un catholicisme d'Etat comme celui qui existe en Espagne, apporte une défense philosophique (« La liberté de l'enseignement est un corollaire de la liberté de conscience, laquelle dérive du libre arbitre. [...] Les autres libertés, la liberté de la presse, la liberté de réunion, figurent bien dans la Déclaration des droits. ») et surtout pragmatique de la liberté de l'enseignement : « J'ai des enfants, vous l'avez deviné. Je jugerais de la dernière inconvenance d'aller m'occuper des enfants des autres, mais je n'entends pas qu'on vienne s'occuper d'éduquer les miens. » Il rappelle enfin l'expérience des régimes totalitaires : « J'arrive d'un pays où il n'y a qu'une jeunesse ; ce pays, c'est l'Allemagne. Il n'y avait là-bas qu'une école, et je déclare que, s'il y a aujourd'hui quelques Allemands à qui nous puissions rendre hommage, ce sont précisément ces catholiques allemands, ces pasteurs allemands, ces communistes et ces socialistes qui ne sortaient pas de l'école officielle ou qui avaient résisté à son influence. »
Henri Joannon vote contre le texte présenté au suffrage des constituants le 19 avril 1946.
Non candidat en 1946 pour la deuxième Assemblée nationale constituante, non plus que pour la première législature de la Quatrième République, Henri Joannon se représente sans succès, le 17 juin 1951, aux suffrages de ses concitoyens, de même qu'en 1954 pour une élection partielle afin de remplacer Alphonse. Dommergue, député - maire de Saint-Flour, décédé, et en 1956 pour la troisième législature. Ses tentatives similaires au cours de la Cinquième République en 1958 et en 1962 ne seront pas davantage couronnées de succès.
Reprenant son travail de pharmacien, il continue à animer l'action catholique dans le Cantal, en devenant le président diocésain du Secours catholique et de l'enseignement libre de 1949 à 1958 ; il est aussi président des déportés politiques et résistants du Cantal et assume des fonctions locales nombreuses, par exemple la présidence de la société folklorique de jeunes gens et jeunes filles. De 1960 à 1972, Henri Joannon assume à nouveau une charge de conseiller municipal. Il cesse son activité de pharmacien en 1966.
Il décède le 10 mars 1985 à Saint-Flour.