Pierre Koenig
1898 - 1970
- Informations générales
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- Né le 10 octobre 1898 à Caen (Calvados - France)
- Décédé le 2 septembre 1970 à Paris (Hauts-de-Seine - France)
1898 - 1970
Né le 10 octobre 1898 à Caen (Calvados)
Décédé le 2 septembre 1970 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine)
Député du Bas-Rhin de 1951 à 1958
Ministre de la défense nationale et des forces armées du 19 juin au 15 août 1954 et du 23 février au 6 octobre 1955
Fils d'un facteur d'orgues d'origine alsacienne, Pierre Koenig fait ses études au collège Sainte-Marie puis au lycée Malherbe de Caen et s'engage, à dix-sept ans, en 1916. Décoré de la médaille militaire, il est nommé sous-lieutenant le 3 septembre 1918. Ayant opté pour la carrière militaire, il sert en Silésie, dans les Alpes, en Allemagne puis au Maroc à l'état-major de la division de Marrakech. Il participe en 1940 à l'expédition de Norvège. Du réduit breton, il gagne l'Angleterre et se met aux ordres du général de Gaulle.
En septembre, il participe à la tentative malheureuse de Dakar puis au ralliement du Gabon à la France libre et est nommé commandant militaire du Cameroun. Général de brigade en juillet 1941, il fait campagne en Syrie puis en Libye où il s'illustre à Bir-Hakeim (26 mai -11 juin 1942), brillante action de retardement de l'Afrika Korps dans sa marche vers Tobrouk. Général de division et chef d'Etat-major, il doit procéder à l'intégration des unités giraudistes dans les Forces françaises libres. Il participe à la libération de la France comme commandant des Forces françaises de l'intérieur. Promu général de corps d'armée en juin 1944, il est nommé gouverneur militaire de Paris le 21 août, à la veille de la libération de la capitale.
Chargé de « réceptionner » le maréchal Pétain - auquel il refusa de serrer la main - à la frontière franco-suisse le 26 avril 1945, il est nommé en juillet commandant en chef des forces françaises en Allemagne pour succéder au général de Lattre. Il occupe ce poste jusqu'à la fondation de la République fédérale en 1949 et devient vice-président du Conseil supérieur de la guerre le 31 janvier 1950. Promotion flatteuse, certes, mais à un poste dont l'importance est très diminuée depuis la création du comité des chefs d'état-major en 1944. Tenu en suspicion par le personnel politique de la IVe République en raison d'une fidélité assez ostensible au général de Gaulle, mal acceptée par la haute hiérarchie militaire qui ne le considère pas comme un des siens, Koenig va se laisser tenter, non sans hésitations, par une carrière parlementaire. A l'instar d'autres officiers généraux (de Monsabert, Billotte, Corniglion-Molinier...), cette reconversion vise à remédier aux carences du régime comme à l'absence de perspectives d'une carrière militaire jugée décevante.
Ayant opté pour le département du Bas-Rhin, auquel le rattachent ses origines familiales, Koenig se présente à la tête d'une liste du Rassemblement du peuple français et fait campagne contre les partis de la « troisième force » partiellement regroupés dans un apparentement MRP-Indépendants. Le scrutin du 17 juin 1951 lui est nettement favorable, sa liste obtenant 31 % des suffrages (94 970 sur 305 890) et trois sièges sur neuf. Les listes apparentées n'ayant pas obtenu la majorité absolue, les autres sièges se répartissent entre le MRP (cinq élus) et le PCF (un élu). Son élection est contestée, mais la validation est votée le 26 juillet 1951.
Rapidement intégré au milieu parlementaire, Pierre Koenig est porté à la présidence de la Commission de la défense. Il se révèle d'emblée un député fort actif, concentrant ses efforts sur la modernisation de l'armée de terre et la lutte contre le projet de Communauté européenne de défense. Lors du débat sur les crédits de la défense nationale, les 11 et 12 juin 1952, il critique longuement les insuffisances de l'armée de terre, au regard de l'encadrement comme de l'armement. Il dépose également de nombreuses propositions visant à l'amélioration de la condition des personnels militaires. Son hostilité au projet gouvernemental de la CED (qui devient traité le 27 mai 1952) s'affirme lors d'une interpellation du 13 février. Koenig défend un ordre du jour déposé par le RPF qui, rejetant le projet gouvernemental, exige la formation d'une confédération européenne préalable à toute communauté de défense. Cet ordre du jour, qui annonce le plan Fouchet de 1961, est rejeté par 472 voix contre 122.
Ayant voté les lois Marie et Barangé favorables à l'enseignement primaire privé, Koenig s'abstient volontairement lors des investitures d'Edgar Faure (17 janvier 1952) et d'Antoine Pinay (6 mars) et adopte la même attitude lors de la première tentative de Pierre Mendès France le 4 juin 1953. Cette démarche conciliante, liée sans doute à un certain désenchantement de son expérience parlementaire, prépare en fait son ralliement à la IVe République. Il est pressenti par le groupe gaulliste (l'URAS Union républicaine d'action sociale - depuis la mise en congé du RPF par le général de Gaulle) comme candidat de recours lors de l'élection présidentielle de décembre 1953. De Gaulle donne son accord, mais Koenig renonce finalement à se lancer. Il soutient de ses votes le gouvernement Laniel, tout en émaillant ce soutien d'un certain nombre de réserves sur les suites à donner au manquement à la discipline du maréchal Juin (séance du 1er avril 1954) ou sur la politique indochinoise du gouvernement (séance du 9 juin). Il refuse finalement sa confiance au cabinet Laniel et vote l'investiture de Mendès France.
Ce ralliement lui ouvre la voie du portefeuille de la défense nationale où il entend tout à la fois imposer ses vues modernisatrices et torpiller de l'intérieur la ratification du traité de CED. Mais sa situation ministérielle n'est guère mieux assurée que son influence parlementaire. Il est d'une part à demi désavoué par le général de Gaulle qui, dans une déclaration du 22 juin, dénonce « les combinaisons du système » ; il est d'autre part frustré de la plénitude de son ministère par la haute main que conserve le Président du Conseil sur les questions de défense et par la nécessaire mais inconfortable cohabitation avec les secrétaires d'Etat aux trois armes (terre, air, marine). Réduit à des besognes techniciennes, Koenig doit, contre son gré, trouver un terrain d'entente avec son collègue « cédiste » Bourgès-Maunoury en vue d'un compromis négociable avec les partenaires de la France, préalable à la ratification du traité de la CED. Mission impossible, qui débouche sur la rédaction d'un catalogue des points de désaccord. Mendès France communique au gouvernement un nouveau texte que le conseil des ministres adopte le 13 août 1954, base des discussions de Bruxelles des 19-22 août. Le général Koenig donne alors sa démission, le 14 août, avec deux autres ministres gaullistes, Jacques Chaban-Delmas et Maurice Lemaire. Il est provisoirement remplacé rue Saint-Dominique par le député indépendant Emmanuel Temple. C'est tout naturellement qu'il vote, le 30 août 1954, la question préalable qui équivaut au rejet de la CED. Mais comme beaucoup de gaullistes, il vote le 12 octobre la ratification des accords de Londres qui autorisent le réarmement de l'Allemagne fédérale et son entrée dans l'OTAN.
Peu favorable au discours de Carthage (31 juillet) sur l'indépendance tunisienne et inquiet de l'évolution de la situation en Algérie, Koenig joue un rôle important dans l'offensive qui emporte le gouvernement Mendès France. Alors que Chaban-Delmas souhaitait temporiser, c'est le général qui fait voter la majorité des députés gaullistes contre le président du Conseil le 5 février 1955. Il est par la suite étroitement associé aux consultations préalables à la désignation de son successeur. Après avoir milité, sans succès, pour une solution Pinay, il se rallie à Edgar Faure et négocie la participation des gaullistes à son gouvernement. Lui-même retrouve le portefeuille de la défense, délesté cette fois-ci des secrétaires d'Etat aux trois armes. Le nouveau ministre entend durablement imprimer sa marque à la modernisation de l'armée française. Mais il est loin de faire l'unanimité dans la haute hiérarchie militaire ; Koenig n'est pas saint-cyrien, il n'est pas sorti de l'école de guerre, il n'est pas breveté d'état-major. Il doit également composer avec le ministre délégué à la présidence du Conseil, Gaston Palewski, à qui revient le dossier du nucléaire et qui dirige, en fait, la coordination des mesures de défense. A son corps défendant, le général doit consentir une réduction des dépenses militaires (qui passent de 7,5% du PNB en 1954 à 6,3 % l'année suivante), et éprouve le plus grand mal à la défendre devant l'Assemblée nationale. L'envoi de renforts en Algérie, surtout après les massacres du Constantinois le 20 août 1955, et notamment d'unités modernes intégrées à l'OTAN suscitent la mauvaise humeur de nos alliés occidentaux, la France étant accusée de sacrifier la défense européenne à celle de l'Afrique du Nord. Homme de foucades plus que de dossiers, le général Koenig aura, au total, peu marqué de son empreinte le ministère de la défense.
Cette seconde expérience gouvernementale va du reste être écourtée en raison d'une opposition croissante à la politique marocaine d'Edgar Faure. Alors que Koenig avait protesté, comme député, contre la déposition du Sultan Mohammed Ben Youssef, le 20 août 1953, il se révèle deux ans plus tard comme l'un des plus virulents opposants à son rappel. On a vu là l'influence de son entourage, notamment du très politique général Lecomte. C'est au cours de la conférence d'Aix-les-Bains (22-26 août 1955) qu'il entre ouvertement en conflit avec le président du Conseil. La conférence ayant conclu à la nécessaire restauration du Sultan déchu, et au départ de son successeur Ben Arafa, Koenig remet sa démission le 6 octobre, remplacé par le général Billotte, député gaulliste de la Côte d'Or.
A nouveau candidat dans le Bas-Rhin aux élections du 2 janvier 1956, il prend la tête d'une liste d'Union démocratique des Républicains sociaux apparentée au MRP et à l'Union des Indépendants et paysans. Sa liste n'obtient que 7,1 % des voix contre 31% en 1951. Malgré cette déperdition considérable, l'apparentement majoritaire en voix, lui permet de retrouver son siège, sept autres revenant au MRP et un aux Indépendants. Il retrouve, mais comme simple membre, la Commission de la défense nationale, mais son activité parlementaire est beaucoup plus réduite que dans la précédente législature, et ne s'attache qu'à des aspects très secondaires de la vie militaire.
Koenig vote le 31 janvier 1956 l'investiture de Guy Mollet mais s'abstient volontairement lors du vote des pouvoirs spéciaux en Algérie (12 mars) et sur la politique algérienne du gouvernement (25 octobre). L'une de ses rares interventions publiques à la tribune réside dans une âpre critique de la conduite de l'affaire de Suez (séance du 16 octobre). Son attitude à l'égard de la IVe République devient de plus en plus distante. Fréquemment absent ou en congé, il vote contre la ratification des traités de Rome (9 juillet 1957), participe à la chute du gouvernement Bourgès-Maunoury (30 septembre) et ne prend pas part au vote d'investiture du gouvernement Gaillard (5 novembre 1957). Il s'abstient volontairement sur le projet de loi-cadre en Algérie (31 janvier 1958), vote la chute du gouvernement Gaillard (15 avril) et contre l'investiture de Pierre Pflimlin le 13 mai. C'est donc tout naturellement qu'il se rallie au général de Gaulle lors des votes des 1er et 2 juin. Mais ce ralliement est sans lendemain. Les relations entre le chef de la France libre et le héros de Bir-Hakeim demeurent distantes. De Gaulle pardonne mal à Koenig son ralliement au régime honni de la IVe République. Il n'apprécie pas non plus ses convictions « Algérie française » trop affirmées, les trop nombreuses présidences de sociétés qu'il cumule, ses liens étroits avec l'Etat d'Israël. La carrière parlementaire et politique du général Koenig s'arrête à l'orée de la Ve République. Une carrière décevante au total comme l'a bien démontré l'étude approfondie de Philippe Vial, « Un ministre paradoxal, le général Koenig, 1954-1955 », in Militaires en République, Publications de la Sorbonne, 1999.
Décédé le 2 septembre 1970, Pierre Koenig a été élevé à la dignité de maréchal de France, sur proposition du ministre Charles Hernu, le 16 juin 1984.