Camille Krantz
1848 - 1924
- Informations générales
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- Né le 24 août 1848 à Dinozé (Vosges - France)
- Décédé le 30 avril 1924 à Paris (Seine - France)
1848 - 1924
Né le 24 août 1848 à Dinozé, commune d'Arches (Vosges), mort le 30 avril 1924 à Paris (7e).
Député des Vosges de 1891 à 1910.
Ministre des Travaux publics du 1er novembre 1898 au 5 mai 1899.
Ministre de la Guerre du 6 mai 1899 au 21 juin 1899.
La carrière politique de Camille Krantz est celle d'un « notable » et d'un technicien que ses activités successives et ses compétences amènent tout naturellement à solliciter un mandat parlementaire.
Il appartenait en outre à une vieille famille vosgienne, originaire de Sarre-louis, attachée depuis longtemps aux affaires publiques : un ancêtre avait été « fontainier du Roi » Stanislas Leczinski, un oncle, Sébastien Krantz, représentant à l'Assemblée Nationale de 1871 et sénateur inamovible, un cousin, le vice-amiral Jules Krantz, ministre de la marine en 1889. Ayant grandi dans un milieu industriel actif et prospère, son grand-père, ses oncles dirigeaient les papeteries de Dinozé, Docelles et Ranfaing que son père représentait à Paris -, il fut destiné à l'Ecole polytechnique d'où il sort dans les premiers en 1870. Après la guerre, où il sert en qualité de lieutenant au 8e régiment d'artillerie dans les Vosges, en Alsace et en Franche-Comté, il est ingénieur des Manufactures des tabacs de l'Etat; mais il adjoint rapidement une spécialisation de juriste à ses connaissances techniques, devient maître des requêtes au Conseil d'Etat, puis professeur de droit administratif à l'Ecole des Ponts-et-Chaussées.
C'est à la faveur d'une élection partielle qu'il obtint son premier mandat de député, le 22 février 1891. Le représentant de la 1re circonscription d'Epinal, Brugnot, ayant été élu sénateur le 4 janvier, Camille Krantz enleva le siège au premier tour avec 7.349 voix contre 2.465 à son concurrent Hondaille, sur 14.984 inscrits et 10.090 votants. Jusqu'en 1910, il devait toujours l'emporter dans la même circonscription, avec la même aisance, dès le premier tour.
Aux élections générales du 20 août 1893, il ne laissait que 432 voix à son adversaire Parisot, candidat agricole, et totalisait 6.935 suffrages sur 15.057 inscrits et 9.191 votants. Le 8 mai 1898, le même adversaire ne réunissait que 933 voix face aux 8.309 bulletins de Camille Krantz, sur 15.742 inscrits et 10.422 votants.
Victoire presque aussi brillante, le 22 avril 1902 : 8.728 voix contre 2.428 à M. Lapicque, radical, sur 15.778 inscrits et 11.640 votants.
Et si, le 8 juillet 1906, la compétition était plus serrée, il distançait tout de même très largement son principal concurrent, Gilbert Renaud, radical, avec 7.965 suffrages contre 4.410 sur 16.320 inscrits et 13.050 votants.
Camille Krantz entre dans cette Chambre de la 5e législature avec un programme fermement républicain et nettement libéral. Quoiqu'il n'ait jamais manifesté de sympathie particulière pour Waldeck-Rousseau, il aurait pu cependant se définir comme lui : « républicain modéré, mais non modérément républicain ».
En 1891, il est le rapporteur d'une commission chargée d'examiner les pétitions des porteurs de titres du Canal de Panama et conclut en demandant que les pouvoirs publics n'interviennent pas pour essayer de sauver l'affaire.
Par son activité parlementaire débordante au cours de la 6e législature, il tente de faire passer dans les faits cette politique de ferme modération et de sage progrès qu'il promettait à ses électeurs. Technicien des problèmes économiques et financiers certes, Camille Krantz ter mine la 6e législature avec une influence politique qui déborde largement celle d'un rapporteur général. Membre influent du groupe des républicains progressistes, il est à la charnière d'une majorité fluctuante oscillant entre le conservatisme et le radicalisme.
Quand s'ouvre la 7e législature, il est une des personnalités marquantes de la Chambre, qui l'élit comme troisième vice-président, le 9 juin 1898. A la tête de 250 républicains progressistes, fort des 3.000.000 de voix obtenues aux élections, il est, pendant deux ans, l'un de ceux dont dépend la vie des fragiles combinaisons ministérielles. Dans un discours incisif, il s'oppose d'emblée, le 30 juin 1898, au cabinet radical homogène d'Henri Brisson, qui ne survit pas longtemps à la défiance qu'il lui manifeste. Sa présence au sein d'une équipe constituée par Poincaré le 16 juin 1899 contribue - sa - franchise ne lui valant pas que des amis - à faire échouer la tentative, tandis que Waldeck-Rousseau voit, le 19 juin, son premier essai condamné, notamment par l'exclusive qu'il a lancée contre Millerand.
Entre-temps, cependant, la constitution du 4e cabinet Dupuy, tentant ce juste équilibre entre les modérés et les radicaux, qui caractérisait la nuance politique de Camille Krantz, l'avait mis à la tête du ministère qu'il connaissait le mieux, celui des Travaux publics (1er novembre 1898) où il eut la délicate mission de concilier l'esthétique et les perspectives de Paris avec les bouleversements entraînés par l'Exposition de 1900. Puis, à la démission de Freycinet, quatrième ministre de la guerre à résigner son portefeuille pour n'avoir pu concilier la révision du procès Dreyfus avec « l'honneur de l'armée », il n'hésita pas, le 6 mai 1899, au moment ou l'affaire était totalement politisée, à accepter le ministère de la Guerre. Passant pour antidreyfusard par ses attaches avec l'Ecole polytechnique, sa nomination fut diversement appréciée.
C'est pendant ce court ministère que le 12 mai, il signe la mise en position de non-activité, par retrait d'emploi, du commandant Cuignet (il avait accusé Du Paty de Clam d'avoir été l'auteur principal du faux Henry) pour avoir livré- à la publicité une correspondance échangée par Freycinet et Delcassé et relative à l'Affaire. Mais le 1er juin, c'est à lui également que revient de faire incarcérer le même Du Paty de Clam, sous l'inculpation de faux.
Quelques mois après, puis cinq ans plus tard, en 1903, il s'expliquera encore sur ces mesures prises au pire moment de l'Affaire et que, manifestement, il n'avait pas arrêtées sans de graves débats de conscience.
L'arrivée au pouvoir de Waldeck-Rousseau marque un tournant dans sa vie politique. S'il se refuse à lui accorder sa confiance le 26. juin 1899 (il s'abstient dans le scrutin), c'est qu'il sait que s'ouvre l'ère d'une majorité virtuellement axée sur le radicalisme, et que sa place n'est plus dans cette majorité-là. Face à la montée des radicaux et des socialistes, il se sent faire figure, au moins en matière sociale, de quasi-conservateur. Il apporte encore cependant sa compétence à de nombreux textes sur les chemins de fer, notamment ceux d'Algérie.
Président de la commission de l'armée en 1901, il s'oppose, à ce titre, en février 1902, à la réduction envisagée du service militaire à deux ans et préconise plutôt le maintien du temps de l'obligation légale avec la possibilité de faire passer le plus d'hommes possible dans la disponibilité après la deuxième année. En 1904 puis en 1905, il ne cesse de combattre ce texte auquel il refuse sa caution, alors qu'il est adopté par 519 voix contre 32. « Derrière cette loi, dit-il, c'est le désarmement. »
Entre-temps il avait perdu, en novembre 1902, la présidence de cette commission.
Président de la commission du régime des boissons pendant la 9e législature - il avait déposé un volumineux rapport sur la question en 1902 -, il intervient encore activement sur les fraudes, les bouilleurs de cru, le mouillage, les abus du sucrage.
En 1908 et 1909, le projet Caillaux d'impôt cédulaire sur la rente le trouve toujours irréductible.
Le recrutement des officiers, les effectifs de l'armée, l'organisation de l'enseignement technique retiennent encore son attention en 1909, mais c'est un homme politique un peu désabusé et présenté par la fédération républicaine qui affrontait les élections le 24 avril 1910.
Il fut battu avec 5.609 voix, tandis que Cuny en totalisait 8.151 sur 17.188 inscrits et 14.039 votants.
Sollicité plus tard pour un mandat sénatorial, il se refusa à entrer en compétition avec son ami Méline. Il se consacra dès lors à l'administration d'affaires privées. Il était en effet : président du conseil de la Société éclairage, chauffage, force motrice ; président du conseil de l'Ouest-Lumière ; président du conseil de la Compagnie générale du Maroc ; administrateur du Comptoir national d'escompte de Paris ; administrateur de la Land Bank of Egypt ; administrateur des Chemins de fer de Chan-Si en Chine; administrateur de la Société marseillaise de crédit ; administrateur des Accumulateurs Tudor ; président du conseil de la Société de constructions métalliques de Dinozé ; président du conseil de la Vosgienne agricole.
La fin de sa vie fut assombrie par la mort de deux de ses fils tués à l'ennemi, en 1914 et 1916.
A ses activités parlementaires, C. Krantz avait joint celles de conseiller municipal de Saint-Laurent et conseiller général d'Epinal. Il était officier de la Légion d'honneur depuis le 2 avril 1894.