Georges Kuntz
1892 - 1980
KUNTZ (Georges)
Né le 4 novembre 1892 à Uttwiller (District de Basse Alsace - Empire allemand)
Décédé le 21 octobre 1980 à Bouxwiller
Député du Bas-Rhin de 1958 à 1962
C’est au nord d’une Alsace devenue allemande à l’issue de la guerre franco-prussienne que Georges Kuntz voit le jour. Il grandit dans un univers germanophone et est sujet de l’empereur Guillaume II jusqu’à l’âge de 26 ans. Il se destine très tôt à l’enseignement et fréquente notamment l’école d’instituteurs de Strasbourg avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Il est probable qu’il ait combattu sous l’uniforme allemand pendant ce conflit, sans qu’on puisse l’affirmer de manière définitive. Devenu citoyen français en novembre 1918, il se marie à Imbsheim, à moins de dix kilomètres de son village natal. Georges Kuntz reste fidèle à sa région d’origine dans l’Entre-deux-guerres. Il y exerce comme instituteur puis directeur d’école. Il s’efforce de venir en aide à ceux de ses compatriotes alsaciens que menace le régime nazi après la défaite de juin 1940. A la Libération, Georges Kuntz œuvre « pour le maintien de la paix et de la compréhension entre les habitants » de l’arrondissement de Saverne, ce qui signifie qu’il réprouve les excès de l’épuration, comme il devait le rappeler dans sa profession de foi électorale en 1958. Il est élu conseiller général par le canton de Bouxwiller en 1945 et conserve ce mandat pendant 25 années consécutives.
Georges Kuntz déploie une importante activité sur le terrain du syndicalisme agricole dans les années 1940 et 1950. Ce directeur d’école possède en effet des terrains sur lesquels il pratique l’apiculture. Il est la principale personnalité de la Confédération générale de l’agriculture française dans le Bas-Rhin au début de la IVe République. Cette organisation, créée dans la clandestinité en 1943, puis officiellement en 1945 au moment où disparaît la Corporation paysanne, a pour ambition de regrouper les différentes organisations agricoles. La volonté de maintenir l’unité des différents mouvements agricoles (associations de coopératives, syndicats d’agriculteurs ou de salariés agricoles) se heurte très vite à la FNSEA d’Eugène Forget et de René Blondelle.
Le parcours politique de Georges Kuntz témoigne de la difficulté du PRL, puis des Indépendants, à prendre pied en Alsace après la Deuxième guerre mondiale. Les démocrates chrétiens et les gaullistes y captent l’essentiel de l’électorat conservateur. Maire de Bouxwiller depuis peu, Georges Kuntz est candidat en 6ème position sur une liste de la droite modérée aux élections de la seconde Assemblée constituante dans le Bas-Rhin, le 2 juin 1946. Celle-ci ne rassemble que 6,9% des voix, dans un contexte marqué par le succès du MRP dans le département. L’échec se nuance d’un succès personnel pour Georges Kuntz. Le canton de Bouxwiller, dont il est l’élu, accorde en effet 29,4% de ses suffrages à la liste sur laquelle il figure. Georges Kuntz n’est pas candidat aux élections législatives du 10 novembre 1946. La liste « d’Union des Indépendants, paysans et des républicains nationaux » qu’emmène le conseiller économique Alexandre Jesel dans le Bas-Rhin pour les élections législatives du 17 juin 1951 porte en revanche son nom en seconde position. Seuls 8% des Bas-Rhinois se prononcent en faveur de cette liste, qui ne bénéficie pas de son apparentement avec le MRP (41,9%) et n’obtient aucun élu. La popularité de Georges Kuntz permet aux Indépendants de réaliser un de leurs meilleurs résultats dans le canton de Bouxwiller (38,1%). Moins de 5 ans plus tard, l’ancien directeur d’école conduit une troisième campagne nationale. Il figure derrière le maire de Schiltigheim Georges Ritter et celui de Sélestat, Albert Ehm sur une liste d’ « Union des indépendants et paysans ». Malgré un résultat modeste (8,7%), Georges Ritter est élu député du Bas-Rhin à la faveur de l’apparentement conclu avec le MRP (42,9%) et les Républicains sociaux (7,1%).
Retraité de l’enseignement, Georges Kuntz est largement sexagénaire lorsque se produisent les événements du printemps 1958. Le passage au scrutin d’arrondissement pour les élections législatives de novembre 1958 semble favorable aux candidats les mieux implantés. Après trois échecs au scrutin de liste, Georges Kuntz se présente donc dans la 6ème circonscription du Bas-Rhin, qui comprend « sons » canton de Bouxwiller. Dans sa profession de foi électorale, il se décrit en homme « libre de toutes attaches partisanes », dont les « conceptions chrétiennes et sociales » sont bien connues dans l’arrondissement de Saverne. Il n’hésite pas à parler de « guerre d’Algérie » à une époque où le Gouvernement évoque encore des « opérations de maintien de l’ordre », et souhaite que ce conflit trouve rapidement son terme. Georges Kunst propose en outre que l’allemand –qui est l’expression écrite de l’alsacien- soit enseigné aux enfants des anciens départements annexés dès l’école primaire, pour tenir compte du caractère frontalier de ces territoires et de leur bilinguisme de fait. 10166 voix (27,9% des suffrages exprimés) se portent sur son nom au premier tour de scrutin, contre 12152 (33,3%) pour l’ancien sénateur gaulliste Alfred Westphal et 12520 (34,3%) pour le maire MRP de Saverne, Joseph Wolff. La gauche n’est en effet représentée que par le communiste Marcel Wencker (4,6% des voix). Bien qu’il ait obtenu moins de voix que ses deux concurrents, Georges Kunst maintient sa candidature, ce qui provoque le retrait de Joseph Wolff, pourtant arrivé en tête. Le 30 novembre 1958, Georges Kunst est élu député du Bas-Rhin face à l’UNR Alfred Westphal. Une majorité des voix démocrates chrétiennes s’est reportée sur sa candidature, ce qui lui autorise une victoire confortable (54,4% des suffrages exprimés).
Il s’apparente au groupe des Républicains populaires et du centre démocratique de l’Assemblée nationale. et siège à la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il n’intervient pas dans l’hémicycle entre 1958 et 1962. Le 18 novembre 1959, Georges Kuntz dépose en revanche une proposition de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale. Le texte tend à en compléter la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes. Le député du Bas-Rhin observe en effet, dans l’exposé des motifs de cette loi, qu’ « on rencontre un certain nombre de spécialités où la syllabe lac (latin du mot « lait ») est employée sans que la plus petite quantité de lait rentre dans le produit composé. Il note de même que « des étiquettes avec des ruches et des abeilles recouvrent des produits à base de farines dans lesquels il n’y a pas un gramme de miel ». L’objectif des dispositions législatives envisagées est d’empêcher ce type de pratique en les assimilant à des fraudes. La proposition de loi de Georges Kuntz ne devait pas aboutir.
Le député du Bas-Rhin, bien qu’apparenté, respecte la discipline de vote du groupe des Républicains populaires et du centre démocratique sous la 1ère législature. Il approuve le programme du gouvernement Debré (16 janvier 1959) comme le règlement définitif de l’Assemblée nationale (3 juin 1959) et la déclaration de politique générale du Premier ministre (15 octobre 1959). Il soutient la loi Debré sur le financement de l’enseignement privé (23 décembre 1959), accorde les pouvoirs spéciaux au Gouvernement pour ramener l’ordre en Algérie après la semaine des barricades (2 février 1960), se prononce en faveur du programme du gouvernement Pompidou (27 avril 1962), mais ne prend pas part au scrutin sur la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault, ancien président du MRP (5 juillet 1962). Le 4 octobre 1962, il s’associe à la motion de censure qui renverse le gouvernement de Georges Pompidou.
Les élections législatives de novembre 1962 présentent une physionomie particulièrement complexe dans la 6ème circonscription du Bas-Rhin. Un ancien concurrent MRP de Georges Kuntz, le maire de Saverne Joseph Wolff, accepte en effet de devenir son suppléant. Charles Blessig, suppléant de Georges Kuntz depuis novembre 1958, choisit pour sa part de se présenter aux suffrages des Bas-Rhinois sous son propre nom. Le sortant affronte en outre le maire gaulliste de Diemeringen, Alfred Westphal, déjà candidat quatre ans plus tôt. Georges Kuntz arrive en tête du premier tour de scrutin avec 40,8% des suffrages exprimés. Dans un département qui a approuvé à une très forte majorité (76,3%) l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel, le 28 octobre 1962, le vote de Georges Kuntz en faveur de la motion de censure du 4 octobre est toutefois mal compris par les électeurs. Le 25 novembre 1962, l’UNR Alfred Westphal emporte en effet une victoire très nette (59,2%) sur Georges Kuntz, qui n’a gère gagné que 365 voix entre les deux tours.
Le maire de Bouxiller est âgé de 70 ans au moment de cette défaite. Il conserve ses mandats locaux jusqu’à la fin des années 1960, puis se retire de la vie politique active. Il décède à l’automne 1980. Georges Kuntz était chevalier de la Légion d’honneur, officier de l’Instruction publique et du Mérite agricole.