Antoine Lacroix
1901 - 1983
LACROIX (Antoine)
Né le 9 mai 1901 à Saint-Hilaire (Allier)
Décédé le 13 avril 1983 à Moulins (Allier)
Député de la Seine du 30 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Antoine Lacroix naît le 9 mai 1901, dans la commune auvergnate de Saint-Hilaire (Allier), au sein d’une famille ouvrière de la mine, enracinée dans le bocage bourbonnais. Après l’obtention du certificat d’études, puis du baccalauréat, il accomplit de brillantes études qui le conduisent à l’Ecole normale d’instituteurs (1917-1920), à la faculté des sciences de Clermont-Ferrand (1920-1921), puis à la faculté de médecine de Paris. Il en ressort en 1927 avec un doctorat, puis entre à l’internat pour quatre ans, dans les hôpitaux de la région parisienne. Qualifié en chirurgie générale, il est interne à l’asile des convalescents à Saint-Maurice, à l’Hospice Paul Brousse à Villejuif, puis à la clinique de Paris-Sud où il accède aux fonctions de chirurgien-chef, à partir de 1927. Avec le professeur Charles Platon, il est l’auteur d’un ouvrage reconnu, intitulé « Le Sauvetage de la femme. Prophylaxie et hygiène gynécologique ». Entre-temps, le 11 août 1925, il a épousé Juliane Fayt.
De 1940 à 1944, Antoine Lacroix est chirurgien-chef des Corps Francs. Il se distingue au sein de la résistance intérieure, à Libération-Nord et au Mouvement de Libération Nationale (M.L.N.). Il ressort de cette période troublée avec de multiples décorations : il est officier de la Légion d’honneur, titulaire de la médaille de la résistance et croix de guerre 1939-1945.
La carrière politique d’Antoine Lacroix débute avec l’après-guerre. Son implantation électorale se superpose à son implantation professionnelle. Il est élu conseiller général socialiste du quatrième secteur de la Seine, le 23 septembre 1945, et le reste jusqu’au 8 mars 1959. Deux années plus tard, le 27 octobre 1947, il est élu conseiller municipal puis maire du Kremlin-Bicêtre, fonction qu’il conserve jusqu’à la veille de sa mort, en 1983.
Fort de son ancrage personnel dans le département de la Seine, Antoine Lacroix est candidat aux premières élections législatives de la Cinquième République, dans la 52ème circonscription du département séquanais, qui regroupe les cantons d’Arcueil, de Cachan, de Gentilly, du Kremlin-Bicêtre et de Villejuif. Il est secondé par son suppléant et ami, le journaliste Jacques Carat, maire de Cachan. Le conseiller général de la Seine fonde son engagement sur son implantation vieille de 35 ans au Kremlin-Bicêtre, et dans les alentours immédiats de la ville. Dans sa profession de foi, il ne cache pas, s’il est élu député, son souhait d’étendre, à l’échelle nationale, ce qu’il a réalisé aux plans local et départemental. C’est vrai, d’une part, du logement social et des actions municipales en faveur des « économiquement faibles ». Président de la Caisse départementale auxiliaire des prêts, il est à l’initiative de la réalisation de nombreux pavillons individuels, et y favorise l’accession des familles à la copropriété. Il est, à ce titre, le fondateur de l’association « Unir et bâtir ». D’autre part, sa candidature aux élections législatives est justifiée par son action sociale, en matière d’enseignement et d’entraide. Il préside, pour la France, l’Amitié internationale, The World Friendship Federation, développant les échanges de jeunes entre les nations européennes. Il est également administrateur de la société coopérative « Terre et famille ». Enfin, il a fondé, dans son département, l’Union des groupes de défense des hospitaliers dont l’un des buts est de renforcer le climat d’amitié entre les administrés et le personnel de l’Hôpital.
Au soir du premier tour, le 23 novembre 1958, Antoine Lacroix arrive en deuxième position, à dix mille voix de la candidate communiste Marie-Claude Vaillant-Couturier, députée sortante ; il devance cependant de 2 000 voix Jacques Veyssière, le candidat gaulliste. C’est dire que l’issue du second tour reste incertaine, la victoire du maire du Kremlin-Bicêtre ne tenant qu’à la constitution d’un vaste front anti-communiste. La campagne de l’entre-deux-tours est vive, Antoine Lacroix déclarant vouloir « libérer notre banlieue de la tyrannie stalinienne ». Son appel est entendu et, le 30 novembre 1958, il bat largement l’ancienne vice-présidente de l’Assemblée nationale, avec près de 4 500 voix d’avance sur les 52 000 suffrages exprimés. A son arrivée au Palais-Bourbon, Antoine Lacroix est nommé membre de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et y siège toute la législature. Le 20 juin 1961, il est nommé, également, membre de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif au droit de préemption dans les zones à urbaniser en priorité (Z.U.P.) et dans les zones d’aménagement différé. Par ailleurs, il dépose une proposition de loi tendant à mieux organiser l’institution des districts urbains dans les grandes agglomérations, le 19 juin 1959. Au cours de son mandat, le député socialiste de la Seine intervient à huit reprises en séance publique. Ses prises de parole sont en relation directe avec ses centres d’intérêt professionnel. En effet, il intervient dans la discussion des textes liés aux questions sanitaires et sociales. Le 14 mai 1959, il souligne l’encombrement des hospices et des hôpitaux psychiatriques. A l’occasion de la discussion du budget pour 1961, le 9 novembre 1960, il met l’accent sur le nécessaire développement de l’aide à domicile pour les personnes âgées. L’année suivante, la discussion du budget pour 1962 le conduit à regretter le taux élevé de la journée d’hôpital par rapport aux maisons de santé conventionnées. La réforme hospitalière lui tient à cœur et, à ce titre, il défend la présence du chef de service à plein temps dans l’établissement. Enfin, il insiste sur l’aide à apporter aux infirmières, et notamment à leurs écoles et à leur formation.
Les initiatives parlementaires d’Antoine Lacroix sont aussi remarquées en matière de développement urbain de la région de Paris. Lors de la discussion du projet de loi s’y rapportant, le 16 décembre 1960, il dépose cinq amendements au texte du gouvernement. Il craint, en effet, qu’il soit porté atteinte à l’autonomie des collectivités locales, et dénonce le montant des loyers et des cotes mobilières dans la région parisienne. Enfin, comme c’est le cas dans ses fonctions de conseiller général, il prend une part active à la discussion des textes en lien avec l’éducation et la formation étudiante. Le 2 juillet 1959, il pointe l’insuffisance de la loi de programme relative à l’équipement scolaire et universitaire et souhaite, notamment, un rapprochement de l’enseignement technique avec l’industrie. Le 27 octobre 1961, il pose une question orale avec débat au ministre de l’éducation nationale, au sujet du logement des étudiants. Il se penche sur le cas des maîtres d’internat, et suggère l’attribution de logements pour les étudiants dans les habitations à loyer modéré (H.L.M.).
Les votes effectués par Antoine Lacroix, au fil de ces premières années de la Cinquième République, renforcent son caractère d’opposant au régime, même s’il distingue son opposition à la politique menée de celle qu’il pourrait manifester envers le général de Gaulle. Au contraire, il perçoit le fondateur du nouveau régime comme un facteur de stabilité. Cependant, le 16 janvier 1959, il vote contre le programme présenté par le Premier ministre Michel Debré. De même, il rejette le texte sur l’enseignement privé, le 23 décembre de la même année. Il se montre favorable au projet de loi sur les pouvoirs spéciaux, le 2 février 1960, mais reste opposé à la réforme constitutionnelle du 11 mai de la même année. Il désapprouve le programme proposé par le gouvernement de Georges Pompidou, le 27 avril 1962, et vote logiquement la motion de censure contre ledit cabinet, le 4 octobre 1962.
A l’occasion du scrutin législatif consécutif à la dissolution de l’Assemblée nationale, en cet automne 1962, Antoine Lacroix est candidat à sa succession dans la 52ème circonscription de la Seine, avec son suppléant, Jacques Carat, devenu entre-temps conseiller général de Cachan. Il est cependant battu dès le premier tour par son ancienne rivale et ancienne députée de la Seine, Marie-Claude Vaillant-Couturier, devenue Madame Vogel. L’écart est sévère et sans appel : 25 500 voix se sont portées sur la candidate victorieuse, alors que le député sortant n’a obtenu que 10 000 suffrages.
Antoine Lacroix demeure jusqu’à sa mort maire du Kremlin-Bicêtre. Il continue à exercer sa profession jusqu’en 1972, date à laquelle il prend sa retraite pour des raisons de santé. L’année précédente, au congrès d’Epinay, il a donné sa démission du parti socialiste, et s’est rapproché de la majorité présidentielle. Il devient président de la fédération du Val-de-Marne du mouvement démocrate-socialiste de France, futur Parti social-démocrate (P.S.D.) que préside Max Lejeune, et qui devient l’une des composantes de l’Union pour la Démocratie Française (U.D.F.). C’est d’ailleurs sous cette étiquette qu’en 1983, il a été réélu avec sa liste, au second tour du scrutin municipal, en obtenant 55% des suffrages exprimés.
L’ancien député et maire socialiste du Kremlin-Bicêtre, devenu premier magistrat centriste de la ville, disparaît le 13 avril 1983, à quelques semaines de son 82ème anniversaire.