Noël Barrot
1903 - 1966
Né le 24 décembre 1903 à Saint-Etienne (Loire)
Décédé le 8 juin 1966 à Paris (7e)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Haute-Loire)
Député de la Haute-Loire de 1946 à 1958
Noël Barrot était le fils d'Antoine Barrot, pharmacien à Saint-Etienne qui avait épousé Melle Coron, fille d'un marchand de grains. Antoine Barrot ayant été frappé d'une hémiplégie, son épouse dut vendre la pharmacie et racheter une officine à Yssingeaux vers 1924. Noël Barrot effectue sa scolarité secondaire au collège Saint-Louis à Saint-Etienne, tenu par les frères des Ecoles chrétiennes, et ses études de pharmacie à la Faculté de Lyon. Pendant cette dernière période, il participe aux activités de la Maison des étudiants catholiques de Lyon, dirigée par les Jésuites et à celles de la Jeune République issue du Sillon de Marc Sangnier, lequel marqua durablement les orientations politiques du futur député de la Haute-Loire.
Après avoir obtenu son diplôme de docteur en pharmacie en 1928, Noël Barrot s'établit comme pharmacien à Yssingeaux et y épouse Marthe Pivot, elle-même pharmacienne et fille de Charles Pivot pharmacien à La Tour du Pin (Isère). Dès son arrivée à Yssingeaux, il crée le cercle Ozanam, cercle de réflexion chrétienne et d'animation culturelle. Le cercle est fermé fin 1942, sur ordre du préfet de Vichy, car il était devenu un centre d'opposition à la politique de collaboration du gouvernement, Noël Barrot ayant, dès 1941, manifesté ses sentiments gaullistes. Parmi les autres œuvres sociales que Noël Barrot anime à cette époque, on doit citer l'Association des petits bergers des Cévennes, destinée à placer à la campagne des enfants de milieu modeste et qui sert de couverture pour sauver des enfants juifs dont les parents sont persécutés. Noël Barrot s'engage de plus en plus activement dans la Résistance : il appartient à l'Armée secrète et approvisionne en médicaments les maquis des Forces Françaises de l'Intérieur. Aussi est-il désigné comme président du Comité de libération d'Yssingeaux, puis comme adjoint au maire dans la délégation municipale nommée par le préfet en octobre 1944. Enfin, il est élu maire, avec toute sa liste, aux élections municipales de mai 1945 (mandat qu'il détient jusqu'en octobre 1947). Placé en seconde position sur la liste « républicaine d'action sociale » pour les élections à la première Assemblée nationale Constituante, Noël Barrot est élu avec deux autres colistiers, Paul Antier et Jean Deshors, avec 66576 suffrages contre 21 446 voix à la liste communiste qui obtient le 4e siège.
Après la validation de son élection, Noël Barrot est nommé membre de la Commission des territoires d'outre-mer et de celle du ravitaillement. Le 15 janvier 1946, il dépose une proposition de loi portant statut des laboratoires d'analyses médicales et intervient sur ce point dans la discussion du budget de la population. Son appartenance au conseil national de l'Ordre des pharmaciens à partir de 1946 le rend en effet particulièrement sensible à ces problèmes.
Aux élections pour la seconde Assemblée nationale Constituante, une scission s'est produite entre les anciens colistiers de 1945. Paul Antier et Jean Deshors d'une part sont à la tête d'une liste « républicaine d'action sociale et paysanne » (45 550 voix et deux sièges) tandis que Noël Barrot, d'autre part, dirige une liste MRP homogène (29 555 voix et un élu). Pendant la durée de la seconde Assemblée Constituante, Noël Barrot appartient à la Commission de la famille, de la population et de la santé publique ainsi qu'à celle des territoires d'outre-mer. Il dépose un rapport sur la proposition de résolution de M. Bade tendant à inviter le gouvernement à faciliter la distribution et l'utilisation de la pénicilline.
Les élections législatives du 10 novembre 1946 mettent en présence, en Haute-Loire, les mêmes personnalités que les élections précédentes. La liste MRP de Noël Barrot arrive en deuxième position (avec 28 243 voix) derrière celle de Paul Antier (39 211 voix), qui obtient deux élus et avant la liste communiste (22 796 suffrages et un élu). Pendant la première législature de la Quatrième République, Noël Barrot appartient de nouveau à la Commission de la famille, il entre à celle de la production industrielle à partir de 1949 et à celle de la presse en 1950 et 1951 ; il est nommé, le 15 juillet 1947, juré de la Haute Cour de justice. Il participe activement à la vie de ces commissions, puisqu'il ne dépose pas moins de 22 rapports, propositions de loi ou de résolution, principalement consacrés à l'hygiène publique ou à la pharmacie. Le plus important de ces textes est une proposition de loi tendant à rendre au ministère de la santé publique et de la population les prérogatives dont on l'a successivement dessaisi, en rattachant à celui-ci le service des fraudes alimentaires et le service de l'hygiène scolaire et universitaire relevant alors, respectivement, du ministère de l'agriculture et de celui de l'éducation nationale.
Ses interventions dans les débats sont centrées sur les mêmes thèmes. Chaque année notamment, il prend part à la discussion du budget de la santé publique et de la population. Le 29 juillet 1948, il dénonce l'insuffisance des crédits alloués et la concurrence néfaste qui existe entre la Sécurité sociale et les services relevant de ce ministère. Aussi plaide-t-il pour la mise en oeuvre d'une véritable réforme hospitalière. Il expose le plan de réorganisation en cours d'élaboration, qui hiérarchise les divers types d'hôpitaux selon le degré de spécialisation et le rayonnement géographique. Ce plan suppose au préalable une réforme de la législation hospitalière donnant au ministre le pouvoir de réaliser cette rationalisation d'ensemble qui se heurte à de nombreux intérêts locaux. Noël Barrot développe de nouveau ces thèmes le 23 mars 1949. Il y ajoute des remarques critiques sur les effets négatifs causés par certaines mesures d'économie décidées sur les laboratoires de recherche et insiste sur les problèmes causés par l'état sanitaire médiocre des travailleurs d'origine nord-africaine et sur les difficultés financières des communes rurales qui ne peuvent faire face aux dépenses d'adduction d'eau potable. Le 12 juin 1950, il insiste sur la nécessité d'une réforme hospitalière et sur l'insuffisance des crédits prévus pour la modernisation des hôpitaux comme pour la recherche pharmaceutique. Enfin, le 4 mai 1951, il revient à la charge, réclamant une réorganisation administrative d'ensemble faisant cesser la dualité nocive entre hygiène publique et hygiène sociale, santé publique et sécurité sociale, cette dernière relevant du ministère du travail.
Aux élections du 17 juin 1951, Noël Barrot conduit à nouveau la liste du MRP. Dans sa profession de foi, il souligne l'oeuvre accomplie par l'Assemblée sortante et dénonce les hommes de la Troisième République qui « ont conduit la France aux abîmes » et la conjonction des extrêmes qui s'oppose au relèvement de la France par leur opposition systématique. Il vante aussi les préoccupations sociales de son parti, le MRP, directement inspirées par la doctrine sociale de l'Eglise et qui vient en aide à « tous les faibles et à tous les petits de la société française ». Sa liste arrive, une fois encore, en seconde position derrière celle de Paul Antier, avec 17,7 % des voix et Noël Barrot est réélu avec 21346 suffrages. Dans la nouvelle assemblée, il retrouve ses fonctions de commissaire à la famille et siège, en outre, à partir de 1955, à la Commission de la France d'outre-mer. Son activité parlementaire est tout aussi intense que dans la précédente législature puisqu'il dépose 20 textes principalement consacrés aux problèmes de santé publique. Le plus important est son rapport du 28 août 1954 relatif à la réforme hospitalière. Ses interventions orales relèvent des mêmes sujets. Le 30 octobre 1953, il participe aux débats en tant que rapporteur du projet de loi de réorganisation des hôpitaux de Marseille. Le 6 avril 1954, il intervient dans la discussion générale d'un projet de loi relatif aux oeuvres en faveur des étudiants. Le 1er décembre 1954, il insiste sur l'insuffisance des crédits consacrés au traitement des alcooliques et à l'enfance inadaptée, demande une prime de rendement pour les fonctionnaires départementaux du ministère et souhaite la mise en œuvre d'une Communauté européenne de la santé (dite « pool blanc »).
Mais il s'intéresse aussi aux problèmes des déséquilibres économiques régionaux, si sensibles dans son département. Ainsi, le 29 mars 1955, il dénonce les iniquités du système fiscal, notamment à l'égard des commerçants et les handicaps que certaines taxes constituent pour le développement économique des départements situés au sud de la Loire. Il s'inquiète aussi du sort des descendants des agriculteurs dont les exploitations sont trop petites. Il préconise une politique d'aménagement du territoire qui ne se limiterait pas à la décentralisation des grosses entreprises mais contribuerait à la naissance de petites entreprises dans les départements ruraux et absorberait le surplus de main-d’œuvre libéré par la modernisation agricole. Il demande au gouvernement de prendre des mesures d'encouragement en ce sens en exonérant les nouvelles entreprises de l'impôt sur les salaires. Il conclut en évoquant les possibilités offertes par le développement du tourisme social à la ferme, qu'il conviendrait de faciliter par des dispositions juridiques.
Sa dernière intervention de la législature se produit le 10 mai 1955, en tant que rapporteur pour avis de la Commission de la famille, à propos du Deuxième plan de modernisation. Noël Barrot y souligne l'insuffisance des crédits consacrés à l'équipement sanitaire du pays de 1946 à 1954. Il note aussi que les mesures prévues pour la lutte anti-alcoolique prennent du retard, ce qui encombre indûment les hôpitaux de patients relevant de centres de traitement spécialisés. Il réclame une aide de l'Etat aux établissements privés à but non lucratif et une politique d'hébergement pour les personnes âgées qui n'ont souvent comme recours que « la salle commune d'un hospice délabré, véritable antichambre de la mort ».
Lors du renouvellement du 2 janvier 1956, six listes sont en présence en Haute-Loire et la loi sur les apparentements ne s'applique pas. Une fois de plus, la liste MRP de Noël Barrot arrive en seconde position derrière celle de Paul Antier. Mais son score en voix et en pourcentage est inférieur à celui de 1951 du fait du succès de la liste de Front républicain formée par la SFIO et le parti radical et de la concurrence de la liste poujadiste dont la tête de liste talonne Noël Barrot (17 709 voix contre 17 752 à ce dernier).
Noël Barrot est nommé, le 25 janvier 1956, questeur de l'Assemblée nationale, fonction qu'il occupera jusqu'à son décès. Ces nouvelles charges administratives ne l'empêchent pas de rester un parlementaire actif. Pendant la courte législature 1956-58, il dépose 15 textes consacrés presque tous aux problèmes de santé publique. Les deux plus importants sont son rapport sur la réforme hospitalière et son avis sur les mesures sociales liées à la création du Fonds national de solidarité.
Le 29 novembre 1956, lors de la discussion du budget du ministère de la santé, il se félicite de la fusion des deux directions d'hygiène du ministère et souhaite que les textes élaborés par la Commission de la famille sur la réforme hospitalière viennent en discussion rapide. Celle-ci a lieu un an plus tard, le 3 décembre 1957, et Noël Barrot en est le rapporteur. Son exposé très complet remplit sept pages des débats parlementaires, où il reprend les principales idées évoquées au cours des années précédentes et tirées des expériences étrangères : planification nationale de l'équipement, coordination régionale, coexistence du secteur privé et du secteur public, unification des divers types d'établissements de soins, suppression de la fonction d'hébergement des hôpitaux, mission de réadaptation, séparation de la politique hospitalière et de la gestion, effort immense d'équipement. Les graves problèmes affrontés par le régime en 1958 repousseront à plus tard la mise en œuvre de ces projets.
Sur le plan purement politique, Noël Barrot suit tout au long de la Quatrième République les positions de son parti : fervent européen, il défend la CED. Ouvert à la décolonisation en Afrique, il reste en même temps attaché à l'Algérie française mais soutient Pierre Pflimlin puis le général de Gaulle pour résoudre la question. Parallèlement à ses activités parlementaires, Noël Barrot participe aux travaux du conseil de l'Ordre des pharmaciens, est vice-président du syndicat des pharmaciens de la Haute-Loire et anime, avec Jules Catoire, le groupe de spiritualité des Assemblées. Il est le père de trois enfants (deux filles et un fils, Jacques, qui lui succédera au Parlement).
BARROT (Noël, Max, Alfred)
Né le 24 décembre 1903 à Saint-Etienne (Loire)
Décédé le 8 juin 1966 à Paris
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Haute-Loire)
Député de la Haute-Loire de 1946 à 1966
À l’occasion du premier scrutin législatif de la Cinquième République, l’arrondissement du Puy-Yssingeaux (Haute-Loire) ne désigne pas un député inexpérimenté à l’Assemblée nationale. Bien au contraire, Noël Barrot a déjà accompli treize années de mandat au Palais-Bourbon, durant lesquelles il s’est fortement investi dans le domaine de la santé publique et de l’hygiène sociale. Auteur d’une trentaine de rapports sur ces questions, il y porte un grand intérêt, de par son propre métier. Pharmacien, comme son épouse, il est membre du Conseil de l’ordre de la profession depuis 1946. Il s’est attaché en particulier au projet d’une vaste réforme hospitalière dont il a été le rapporteur, mais dont la mise en œuvre a été différée par les événements de mai 1958. Il combat vivement l’instabilité ministérielle de la Quatrième République et la rend responsable du manque d’autorité de l’Etat. Il précise, qu’à titre personnel, il n’a refusé la confiance qu’au seul gouvernement qu’il n’avait pas investi: celui de Pierre Mendès France.
Le 30 novembre 1958, il est réélu député, au deuxième tour de scrutin, dans la première circonscription de son département, avec 26 571 voix sur 53 097 suffrages exprimés. Investi par le Mouvement républicain populaire (MRP), comme candidat de la démocratie chrétienne de France et de l’Action rurale, familiale et sociale, il a dû affronter, au second tour, trois candidats. À cette occasion, il bat l’un des députés sortants, Paul Antier, pourtant bien implanté dans le bassin yssingelais : le maire d’Yssingeaux, Marie Kaeppelin, est la candidate suppléante de ce dernier. Noël Barrot, avec l’aide de son suppléant Jean Prunayre, fait la différence, en réalisant son meilleur score à Saint-Didier-en-Velay (2450 voix).
Avec le nouveau régime, ses sujets de prédilection restent les mêmes. Son souhait de mettre en œuvre une communauté européenne de la Santé, dite « pool blanc », dénote une décision longuement réfléchie sur des thèmes que ses convictions européennes renforcent. Figure du MRP, ancien résistant et membre de l’Armée secrète, il a été sensible au gaullisme pendant la guerre et a « suivi, bien souvent depuis treize ans », le général de Gaulle et sa politique. Il apporte donc sa confiance à Charles de Gaulle, président du Conseil désigné, le 1er juin 1958 et vote en faveur du projet de loi relatif aux pleins pouvoirs, le lendemain. Logiquement, il en fait de même avec le projet de loi concernant la révision constitutionnelle. Avec son parti, il approuve l’ensemble du projet de loi sur les pouvoirs spéciaux.
Noël Barrot déploie une activité très intense au Palais-Bourbon. Elu questeur en 1956, le député de la Haute-Loire devient, au fil des années, un parlementaire « consulaire », estimé par ses collègues, comme par ses adversaires politiques. Sa reconduction dans les fonctions administratives de la Questure à dix reprises (jusqu’en 1966) en témoigne, alors que l’Assemblée nationale, présidée par Jacques Chaban-Delmas, est d’abord une Chambre gaulliste. Après son élection, en janvier 1959, Noël Barrot choisit la commission de la défense nationale et des forces armées, mais n’y siège que quelques mois. Dès octobre 1959 et jusqu’en 1961, il est membre de la commission des lois, aréopage en plus grande adéquation avec ses centres d’intérêt. Fidèle à son action passée et à son caractère d’ « homme social », il définit son idéal politique par la mise au service de l’homme des « biens spirituels et matériels, dans la liberté et avec le maximum de justice » (Noël Barrot 1903-1966. Images et témoignages pour le 20ème anniversaire de sa mort, Le Puy-en-Velay, 1986). Celui qui souhaite « servir en chrétien » intervient à la tribune dans le débat sur la réorganisation de la sécurité sociale et, notamment, sur la fixation des honoraires médicaux (juillet 1960). Il y a pour lui nécessité d’éviter l’étatisation de la médecine et d’assurer, de manière optimale, le remboursement des assurés sociaux. Il pointe également la menace du double secteur, s’interroge sur les avantages sociaux accordés aux médecins « conventionnistes » et se prononce pour des révisions périodiques de la convention-type. Ses interventions en séance publique sont plus ponctuelles. Ses propos sont particulièrement remarqués, à l’occasion de la discussion du projet de loi relatif à l’utilisation thérapeutique du sang humain. À ce titre, le 21 juillet 1961, il intervient en faveur de la non-application du texte aux sérums antimicrobiens et antitoxiques d’origine humaine. Plusieurs questions propres au débat budgétaire lui tiennent à cœur. Le projet de loi de finances pour l’année 1962 lui donne l’occasion de les défendre, lors de la discussion du budget du ministère du travail. Il suggère au gouvernement le remboursement des frais de déplacement des médecins ruraux et regrette vivement le retard apporté à l’application de la loi de 1957 sur les handicapés physiques. Il retrouve la commission de la défense nationale et des forces armées durant la dernière année de la législature. Il soutient de ses votes le gouvernement de Michel Debré, dans lequel trois élus du MRP ont été appelés, dont Joseph Fontanet, un proche de Noël Barrot.
Le tropisme gaullien de ce démocrate-chrétien, ami et soutien de Robert Schuman, trouve cependant ses limites, le 4 octobre 1962, lorsqu’il choisit de voter la motion de censure qui précipite la chute du jeune gouvernement de Georges Pompidou. Il se prononce « contre », au référendum du 28 octobre suivant, sur l’élection du président de la République au suffrage universel.
Les élections législatives des 18 et 25 novembre 1962, provoquées par la dissolution de l’Assemblée nationale, le conduisent une nouvelle fois au Palais-Bourbon. Réélu au deuxième tour de scrutin, face à trois des cinq candidats présents au premier, il obtient 21 085 voix sur 49 243 suffrages exprimés, ce qui n’est qu’une victoire relative sur son principal adversaire, Eugène Pébellier, maire et conseiller général du Puy. Noël Barrot consolide cependant ses positions à Yssingeaux où il devance en nombre de voix le maire de la cité ponote, pourtant suppléé par la première magistrate yssingelaise. Ce même automne, le 9 décembre 1962, à la suite de sa victoire législative, il fait son entrée à l’assemblée départementale, comme conseiller général du canton d’Yssingeaux.
Comme il l’a fait en début et en fin de législature précédente, Noël Barrot choisit la commission de la défense nationale et des forces armées. Il y siège, cette fois-ci, deux ans et demi, jusqu’au début de l’année 1965. Réélu questeur de l’Assemblée nationale, il manifeste une activité moins soutenue en fin de législature. Une de ses interventions est particulièrement remarquée, lors de la discussion, en deuxième lecture et dans sa partie législative, du projet de loi portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraites. Le 14 décembre 1964, il prend la parole pour dénoncer la procédure du vote bloqué, dont il estime qu’elle est utilisée de manière excessive. Inscrit dès 1962 au groupe parlementaire du Centre démocratique dans lequel siègent les députés du MRP, il réinvestit la commission des lois de l’Assemblée nationale aux printemps 1965 et 1966. Il consacre alors son activité de commissaire à la situation des hôpitaux publics et intervient en séance, à ce sujet, le 29 avril 1966, en exposant ses idées réformatrices à Jean-Marcel Jeanneney, ministre des affaires sociales du troisième cabinet Pompidou. Sa prise de distance avec la politique du général de Gaulle est désormais sensible. Justifiant ses choix par la volonté de n’être ni « intransigeant », ni « servile », « ni de suivre aveuglément l’homme qui dirigea les destinées du pays, si grand, si prestigieux soit-il », il souhaite un Parlement « respectable et respecté » (Noël Barrot 1903-1966. Images et témoignages pour le 20ème anniversaire de sa mort, Le Puy-en-Velay, 1986). C’est sur le plan européen et international que son comportement se démarque le plus de la politique gaullienne. Noël Barrot souligne la nécessité de l’Alliance atlantique et soutient le désarmement général. Il marque cependant une entière adhésion, qu’il qualifie de courageuse, à la politique « libérale » du chef de l’Etat en Algérie.
Au milieu des années Soixante, le député de la Haute-Loire redevient maire d’Yssingeaux (1965), après avoir été réélu au conseil général l’année précédente (8 mars 1964) et y avoir été porté à la présidence, quelques jours plus tard (18 mars 1964).
Le 8 juin 1966, à l’Assemblée nationale, ce notable et parlementaire avisé, dont l’humanisme a rendu la personnalité très attachante, s’effondre, victime d’une crise cardiaque. Son éloge funèbre est prononcé le 14 juin 1966 dans l’hémicycle. À la demande des amis politiques du défunt, son fils Jacques, jeune conseiller municipal d’Yssingeaux, prend la succession de son père au conseil général (1966) et à la députation (1967). Il représente la première circonscription de la Haute-Loire jusqu’en 2004, avant son départ pour la Commission européenne. Entre-temps, il aura assuré plusieurs fonctions ministérielles, dans la lignée des travaux de son père, en devenant notamment ministre de la santé (1979-1981) et ministre du travail et des affaires sociales (1995-1997). En voyage officiel en Haute-Loire, en 1984, le président François Mitterrand rend hommage à son ancien collègue. Reçu au Puy-en-Velay par Jacques Barrot, président du Conseil général, il lance : « Je n’oublierai jamais votre père. C’était un juste ».