André Marty
1886 - 1956
* : Un décret de juillet 1939 a prorogé jusqu'au 31 mai 1942 le mandat des députés élus en mai 1936
Les Archives départementales de Seine-Saint-Denis conservent un fonds André Marty, qui représente 3,5 mètres linéaires, sous la cote 281 J. Déposé par le Parti communiste français en 2005 à la suite d’un classement comme « archives historiques » par le ministère de la Culture, ce fonds est issu de la Bibliothèque marxiste de Paris qui l’avait recueilli en 1987 sous forme de neuf sacs en provenance de Prague. Couvrant la période 1917-1942, les documents permettent d’aborder différentes facettes du parcours d’André Marty : mutins de la Mer Noire, le PCF entre les deux guerres, la guerre civile espagnole et la Seconde Guerre mondiale. Leur consultation est soumise aux délais fixés par le code du patrimoine. De plus amples renseignements sont disponibles sur le site Internet des Archives départementales de Seine-Saint-Denis.
Un fonds André Marty est également conservé par le Centre d’histoire sociale du XXe siècle (Université Paris I / CNRS), sous la cote AM 1-48. Constitué de 48 boîtes et de 100 photographies et décrit dans un inventaire sommaire, il est issu d’un don en 1981. Les documents témoignent de la carrière politique d’André Marty de 1919 jusqu’à sa mort, en 1956. De plus amples renseignements sont disponibles sur le site Internet du Centre d’histoire sociale du XXe siècle.
L’Institut français d’histoire sociale détient au cœur de son fonds des documents relatifs à André Marty. Identifiés sous les cotes 14 AS 187 (1-2) et 14 AS 652, ces trois cartons issus d’un don de 1967 contiennent des lettres de recommandations écrites par André Marty entre 1949 et 1956 à la demande de ses électeurs, ainsi que deux albums de coupures de presse sur l’activité militante d’André Marty (1946-1952). Ces archives, dotées d’un instrument de recherche, sont librement communicables. Conservées par les Archives nationales, leur communication est assurée par l’Institut français d’histoire sociale.
Le musée de la Résistance nationale de Champigny conserve enfin 80 cartons de documents ayant trait à André Marty, cotés M3 à M16. Issus des archives personnelles d’André Marty conservées à Moscou puis à Prague et rapatriées en France en 1985, ils contiennent des archives datant de 1931 à 1943, notamment des chroniques et bulletins d’information radio produits pendant la Seconde Guerre mondiale ainsi que des documents relatifs aux Brigades internationales.
Né le 6 novembre 1886 à Perpignan (Pyrénées-Orientales).
Député de Seine-et-Oise de 1924 à 1928. Député de la Seine de 1929 à 1932 et de 1936 à 1940.
D'origine catalane, André Marty était le fils d'un condamné à mort par contumace de la commune narbonnaise. Il fit ses études au collège de Perpignan, obtint son baccalauréat et devint apprenti chaudronnier. Sa jeunesse fut marquée par le soulèvement des vignerons du Midi, en 1907, et par la mutinerie des soldats du 17e régiment d'infanterie, fraternisant avec la population. André Marty participa avec enthousiasme à ces manifestations, prenant part à l'assaut de la préfecture de Perpignan le 20 juin 1907, à la nouvelle de la fusillade de Narbonne. Il publia, en 1927, un récit détaillé de ces événements en lesquels il voyait la plus puissante action de masse de la paysannerie française depuis 1789.
En 1908, il s'engagea dans la marine en qualité de matelot-mécanicien. Ses voyages le menèrent en Chine, en Indochine, dans les Balkans et au Maroc. Scaphandrier volontaire, il dirigea en 1911 le renflouement du torpilleur Takou échoué dans la baie d'Along. Embarqué durant toute la guerre sur des unités combattantes en première ligne, il fut, le 1er juillet 1917, nommé ingénieur mécanicien de la marine. Il inventa un réchauffeur qui remédiait à une grave défectuosité des machines. A l'armistice, son navire faisant partie de l'escadre envoyée en Crimée pour lutter contre la Russie des Soviets, André Marty prit conscience de sa solidarité avec le mouvement révolutionnaire russe. Il a raconté dans son livre La révolte de la mer Noire, comment il se décida à s'opposer à la répression de ce mouvement et comment il invita l'équipage du Protêt à se mutiner, en avril 1919, dans le port d'Odessa, pour protester contre l'intervention de la France en Russie et obliger les navires de guerre français à quitter la mer Noire. Cette révolte a aussi pour motif les conditions de vie très pénibles des marins qui n'avaient pas eu de permission depuis deux ans et à qui l'armistice, au lieu d'apporter la démobilisation escomptée, n'offrait que le maintien sous les armes pour des raisons non comprises d'eux.
Arrêté le 16 avril 1919, Marty est transféré sur le croiseur Waldeck-Rousseau, où il fomente une nouvelle révolte. A la Chambre des députés, des interpellations socialistes sur ces événements se déroulent du 10 au 17 juin 1919. Condamné le 5 juillet 1919 par le conseil de guerre siégeant à bord du cuirassé Condorcet à vingt ans de travaux forcés, à la dégradation militaire et à vingt ans d'interdiction de séjour, André Marty est dégradé le 8 juillet 1919 et voit sa peine commuée en quinze ans de détention le 17 juin 1921. Il purge sa peine à la Maison centrale de Nîmes, à la Maison de force de Thouars et à la Maison centrale de Clairvaux.
Le parti communiste français fait en sa faveur une violente campagne et, d'octobre 1921 à juin 1923, c'est quarante-deux fois qu'il est élu ou réélu, malgré l'annulation des élections par le conseil de préfecture. Il est notamment élu conseiller municipal à Paris, conseiller général dans les Pyrénées-Orientales, dans le Nord ; le 27 mai 1923, il est élu dans chacun des dix conseils d'arrondissement de la Seine.
André Marty est libéré le 17 juillet 1923 et bénéficie d'une grâce amnistiante trois jours plus tard. Il s'inscrit au parti communiste le 26 octobre 1923 et collabore régulièrement à l'Humanité dont il sera le directeur adjoint en 1934 1935.
Le 11 mai 1924, il est élu député de Seine-et-Oise sur la liste du bloc ouvrier-paysan, avec 63.430 voix.
A la Chambre des députés, il est membre de la commission de l'administration générale, départementale et communale, de la commission de la marine militaire, de celle de la marine marchande. Il dépose une proposition de loi ayant pour objet de supprimer le code de justice militaire et les conseils de guerre, ainsi que les établissements pénitentiaires militaires. Il intervient, lors de la discussion budgétaire, pour exposer des problèmes de la marine de guerre moderne et la nécessité de donner aux marins des conditions de vie plus humaines, aux ouvriers des arsenaux des salaires plus élevés.
En janvier 1925, André Marty est élu membre du comité central du parti communiste, mandat qui lui sera renouvelé en juin 1926.
Son action contre la guerre du Maroc lui vaut, entre février 1926 et décembre 1927, cinq condamnations à des peines allant de six mois à dix ans de prison, pour provocation de militaires à la désobéissance dans un but de propagande anarchiste.
Arrêté le 12 août 1927 et emprisonné à la Santé, il est libéré à la suite du vote, le 3 novembre 1927, d'une proposition de résolution requérant sa mise en liberté. Mais le 24 août 1927, André Marty, de la prison de la Santé, avait adressé au maréchal Foch une lettre qui lui valut une nouvelle con damnation. Le 11 janvier 1928, la Chambre repousse une proposition de résolution interdisant l'arrestation pendant la durée de la session des députés antérieurement libérés et Marty est de nouveau arrêté, le 25 janvier, pour purger une peine de cinq ans d'emprisonnement.
Le 3 février 1929, il est élu député de Saint-Denis au second tour, au cours d'une élection partielle, avec 8.318 voix contre 7.681 à Gustave Gautherot, candidat du « Redressement français ». Le 7 février, la Chambre repousse, à la demande du gouvernement, une demande de suspension de sa détention.
En octobre 1929, il est élu conseiller municipal du XIIIe arrondissement de Paris ; pendant près de six ans, il sera le seul conseiller municipal communiste parisien.
Le 15 janvier 1931, la Chambre adopte, par 270 voix contre 258, une proposition de résolution, signée notamment par Marcel Cachin et Doriot, décidant que « MM. André Marty et Jacques Duclos, députés de la Seine, seront mis immédiatement en mesure de remplir leur mandat ». André Marty qui a déjà passé près de huit années en prison, peut enfin quitter Clairvaux.
Aux élections législatives du 8 mai 1932, où il se représente à Saint-Denis, il n'obtient que 7.738 voix et est battu par Barthélemy, maire de Puteaux, qui en obtient 10.887.
Il appelle à la lutte contre le traité de Versailles et contre l'armement du pays.
Réélu conseiller municipal de Paris en avril 1935, il est nommé, le 20 août 1935, membre du comité exécutif de l'Internationale communiste.
Le 26 avril 1936, il est élu député de Paris dans la 2e circonscription du XIIIe arrondissement, au premier tour, avec 9.205 voix sur 18.150 votants, son principal adversaire, Junot, n'obtenant que 4.572 voix.
Le 3 septembre 1936, il réclame au Vélodrome d'Hiver des avions et des canons pour l'Espagne. D'août 1936 à février 1939, il est l'organisateur et l'animateur des Brigades internationales comme représentant direct du ministre de la Défense de la République espagnole. Ces brigades internationales groupaient 35.000 hommes, dont 8.500 volontaires français. Marty y manifeste un comportement extrêmement brutal, faisant exécuter un grand nombre de volontaires pour des motifs futiles.
A la Chambre, le 17 février 1939, il demande à interpeller sur « l'orientation ouvertement franquiste - donc mussolinienne et hitlérienne - de la politique française depuis la conquête de la Catalogne par les troupes italiennes et allemandes ».
Le 22 juin 1939, il demande à interpeller sur « les causes de la catastrophe du sous-marin Phénix, sur lesquelles un silence absolu persiste ».
En août 1939, Marty part pour l'U.R.S.S. Dans une lettre ouverte à Léon Blum, directeur du Populaire, Marty défend le pacte germano-russe et critique l'intervention française en faveur d'une « Pologne réactionnaire, contre-révolutionnaire ». Sa lettre, publiée dans les Cahiers du bolchevisme en janvier 1940, se termine par les mots « A bas la guerre impérialiste ». Une information est ouverte contre lui en décembre 1939, à la suite de tracts de propagande signés par lui. Déchu de la nationalité française par un décret en date du 27 janvier 1940, il est déchu de son mandat parlementaire le 20 février 1940.
Né le 6 novembre 1886 à Perpignan (Pyrénées-Orientales)
Décédé le 22 novembre 1956 à Toulouse (Haute-Garonne)
Député de la Seine-et-Oise de 1924 à 1928
Député de la Seine de 1929 à 1932 et de 1936 à 1940
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Seine)
Député de la Seine de 1946 à 1955
(Voir première partie de la biographie dans le Dictionnaire des parlementaires français 1889-1940, Tome VII, p. 2391 à 2393)
Nommé au secrétariat du Komintern en août 1935, André Marty est délégué auprès du gouvernement républicain espagnol en août 1936, chargé d'organiser les Brigades internationales sur la base d'Albacete. Cet épisode, clos en novembre 1938, a suscité des jugements contradictoires mais a indéniablement renforcé sa stature dans les rangs du parti communiste. Rappelé à Moscou en août 1939, il se fait d'emblée le porte-parole intransigeant du pacte germano-soviétique. Sa Lettre ouverte à Léon Blum, datée du 5 septembre et diffusée clandestinement en France, dans laquelle il dénonce le « caractère impérialiste et anti-ouvrier » de la guerre, lui vaut une condamnation par défaut à quatre ans de prison. Ses rapports avec Maurice Thorez, déjà tendus, ne cessent de s'aigrir durant leur séjour commun en Union soviétique. Marty ne se résigne pas à cet exil forcé qui cadre mal avec l'image du combattant en première ligne qu'il a toujours voulu accréditer, et ne cesse de multiplier les démarches pour obtenir son retour en France. Celui-ci lui est finalement accordé en septembre 1943, après la dissolution du Komintern en mai.
A Alger, où il a été finalement envoyé, André Marty retrouve le groupe des 27 députés communistes déchus de leur mandat en 1939, récemment libérés des camps où les avait internés le gouvernement de Vichy. Il le transforme en délégation du Comité central dont il s'attribue le secrétariat. Nommé à l'Assemblée consultative provisoire, dont il préside le groupe communiste, il se signale moins par ses interventions - peu nombreuses et sans portée politique - que par un sens aigu du compromis pour négocier l'entrée des communistes François Billoux et Fernand Grenier dans le Comité français de libération nationale (CFLN), aux fonctions que leur assigne le général de Gaulle.
De retour dans la capitale le 3 septembre 1944, il entre au Secrétariat du parti, responsabilité confirmée au Xe congrès tenu à Paris en juin 1945. Il est alors en troisième position dans la hiérarchie du PCF, derrière Thorez et Duclos, ce qui lui permet de superviser des domaines les plus divers : l'implantation du parti à Paris, l'Algérie et les questions coloniales, la formation des cadres, les organisations de jeunesse etc. Son caractère difficile, tour à tour colérique et vindicatif, lui aliène la sympathie de nombreux cadres et militants, mais sans que ces sentiments puissent pour l'heure s'exprimer publiquement.
Tête de liste du PCF dans le 1er secteur (Paris rive-gauche) du département de la Seine, sa liste obtient le 21 octobre 1945 115 657 voix sur 429 633 suffrages exprimés et trois sièges sur les dix à pourvoir. Il en va de même aux élections du 2 juin 1946 avec 120 586 voix sur 434 358 suffrages exprimés. Aux deux Assemblées nationales constituantes, il est inscrit à la commission de l'intérieur et de l'Algérie. En raison de ses multiples activités dans le parti, ses interventions sont à peu près inexistantes, réduites à un hommage vibrant aux « Français et Françaises tombés en Espagne dans les rangs de l'armée régulière de la République espagnole. »
André Marty est aisément réélu le 10 novembre 1946 député de la Seine à l'Assemblée nationale avec 128 941 voix sur 433 260, soit près de 30 % des suffrages exprimés. Il retrouve la Commission de l'intérieur et siège à la commission de la justice et de la législation. Son activité parlementaire est beaucoup plus intense, après qu'il eut refusé en janvier 1947 un portefeuille ministériel que lui proposait Maurice Thorez dans le gouvernement Ramadier. Il dépose plusieurs propositions de loi ou de résolution en faveur des combattants d'Espagne, de diverses catégories d'ouvriers et même en faveur de l'enseignement de la langue catalane dans les universités de Toulouse et de Montpellier. En séance, il se révèle un orateur incisif, parfois brutal, comme en témoignent ses multiples interjections dans la longue obstruction parlementaire que déclenchent les communistes pour empêcher l'adoption de la loi, finalement votée le 4 décembre 1947, sur la protection de la liberté du travail (séances des 29 novembre et 3 décembre notamment). Auparavant, il est longuement intervenu dans la discussion du projet de loi portant statut organique de l'Algérie en développant un tableau sans nuances de la misère des masses algériennes, des méfaits d'une sous-industrialisation volontairement entretenue, ainsi que des scandales et prévarication dont l'administration se rendrait coupable (séance du 20 août 1947). En termes toujours accusateurs du gouvernement et du patronat, il intervient fréquemment en faveur du personnel de la SNECMA (Société nationalisée à la libéra tion et implantée dans le département de la Seine), ainsi qu'en faveur des ouvriers des arsenaux, des conducteurs de la RATP et des cheminots de la SNCF.
Aux élections du 17 juin 1951, André Marty conduit à nouveau la liste du PCF dans le 1er secteur du département de la Seine. Malgré un net recul (102 160 voix et 25,7 % des suffrages exprimés), la liste conserve ses trois élus. Il est nommé à la Commission de l'intérieur et à la commission des moyens de communication et du tourisme. Son activité parlementaire revêt une intensité bien moindre que dans la législature précédente. Ses interventions se réduisent à des revendications exclusivement sociales, en faveur des travailleurs de la SNCF et des Postes notamment. Car la disgrâce est en vue, perceptible dès 1951, rendue publique l'année suivante.
L'histoire n'a sans doute pas livré tous les secrets de l'affaire Marty, qui fut aussi une affaire Tillon. Une sourde et ancienne animosité à l'égard de Maurice Thorez (alors en convalescence à Moscou) et de sa compagne Jeannette Vermeersch (dont il avait critiqué le « parachutage » dans le deuxième secteur du département de la Seine à la Libération) est peut-être la principale raison de son exclusion. S'y ajoutent tout un ensemble de griefs plus ou moins fantaisistes réunis par son accusateur Léon Mauvais : d'avoir minimisé le rôle de l'Union soviétique pendant la guerre ; d'avoir sous-estimé le danger américain et surestimé, par la suite, le danger gaulliste ; d'avoir manifesté un faible empressement à s'associer aux initiatives du Mouvement de la paix. Mais surtout d'avoir rencontré, hors des sphères du parti, Charles Tillon en mai 1951 et d'avoir ensuite nié cette entrevue, ce qui prête à l'accusation le travail fractionnel. Exclu du Bureau politique et du Comité central le 7 décembre 1952, du groupe parlementaire communiste le 29 décembre, il est exclu de sa cellule par le Comité fédéral de la Seine le 3 janvier 1953. Entre-temps Etienne Fajon a dénoncé dans L'Humanité « les liaisons policières de Marty », accusations toute stalinienne qui avaient déjà servi contre Paul Nizan, et que reprend par la suite Jacques Duclos.
Siégeant parmi les non-inscrits, André Marty demeure député. S'il participe encore à quelques scrutins, il n'intervient plus publiquement en séance et cesse de paraître à l'Assemblée nationale en 1955. Retiré près de Perpignan, il se rapproche un temps des milieux libertaires et trotskistes qu'il avait si vivement combattus. Il publie en 1955 L'Affaire Marty, plaidoyer contre lequel le parti déclenche une violente campagne. Il meurt à Toulouse le 22 décembre 1956.