Louis Mexandeau

1931 - 2023

Informations générales
  • Né le 6 juillet 1931 à Wanquetin (Pas-de-Calais - France)
  • Décédé le 14 août 2023 à RENNAZ (Suisse)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ve législature
Mandat
Du 2 avril 1973 au 2 avril 1978
Département
Calvados
Groupe
Parti socialiste et radicaux de gauche
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIe législature
Mandat
Du 3 avril 1978 au 22 mai 1981
Département
Calvados
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIIe législature
Mandat
Du 2 juillet 1981 au 23 juillet 1981
Département
Calvados
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIIIe législature
Mandat
Du 2 avril 1986 au 14 mai 1988
Département
Calvados
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IXe législature
Mandat
Du 6 juin 1988 au 17 juin 1991
Département
Calvados
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Xe législature
Mandat
Du 2 avril 1993 au 21 avril 1997
Département
Calvados
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
XIe législature
Mandat
Du 1er juin 1997 au 18 juin 2002
Département
Calvados
Groupe
Socialiste

Biographies

Biographie de la Ve République

MEXANDEAU (Louis)
Né le 6 juillet 1931 à Wanquetin (Pas-de-Calais)
Décédé le 14 août 2023 à Rennaz (Suisse)

Député du Calvados de 1973 à 2002
Ministre des Postes, télécommunications et télédiffusion du 2 mai 1981 au 23 mars 1983
Ministre délégué, chargé des Postes, télécommunications et télédiffusion, du 24 mars 1983 au 15 novembre 1985
Ministre des Postes, télécommunications et télédiffusion du 16 novembre 1985 au 20 mai 1986
Secrétaire d’Etat aux Anciens combattants et victimes de guerre du 17 mai 1991 au 29 mars 1993

Louis Mexandeau naît, le 6 juillet 1931, dans une modeste famille d’agriculteurs habitant le petit village de Wanquetin, près d’Arras dans le Pas-de-Calais. Si la branche paternelle est poitevine, la lignée maternelle est ancrée dans l’Artois. En 1936, le jeune Louis a la douleur de perdre son père. La Seconde Guerre mondiale est très dure, la Wehrmacht administrant directement le Nord et le Pas-de-Calais devenus zone d’occupation spéciale relevant du commandement allemand de Bruxelles. La famille de Louis Mexandeau compte beaucoup de Résistants précoces, dont son beau-père Marcel Roussel qui, membre du réseau Shelburn, cache des pilotes britanniques. Il est déporté en février 1942. En historien, Louis Mexandeau reviendra en 2003 sur ces années difficiles dans un ouvrage paru au Cherche Midi, Nous, nous ne verrons pas la fin. Un enfant dans la guerre (1939-1945). Adolescent, il est scolarisé au lycée d’Arras comme interne et se montre un brillant élève.

A la Libération, Louis Mexandeau réussit le concours d’entrée à l’Institut d’études politiques de Paris mais doit interrompre ses études au bout d’un an, faute de pouvoir régler les frais de scolarité. Il retourne dans le Pas-de-Calais, travaille comme surveillant dans son ancien lycée tout en suivant une licence d’histoire à l’université de Lille. Ses responsabilités nationales dans le syndicat des surveillants d’internat lui permettent d’être affecté à Paris, au lycée Henri-IV puis au lycée Saint-Louis. Il reprend ses études et obtient en 1959 un Capes d’histoire-géographie. Il est nommé au lycée Janson-de-Sailly où il rencontre Jean Poperen. En 1960, il prépare l’agrégation d’histoire à la Sorbonne avec Louis Mermaz. Reçu, il se voit nommé l’année suivante professeur au lycée Malherbe de Caen. Il découvre à cette occasion la Normandie et le Calvados. Il reste en poste dans cet établissement jusqu’en 1968, avant d’être promu professeur de khâgne dans le même lycée. Il prépare ses élèves au concours de l’Ecole normale supérieure jusqu’en 1973.

Louis Mexandeau s’engage très tôt en politique. Etudiant communiste (il crée une cellule au lycée d’Arras puis à la faculté des lettres de l’université de Lille), il fréquente les rangs du Parti communiste français (PCF) entre 1952 et 1957. Il milite dans les années 1950 au Syndicat national de l’enseignement secondaire (SNES), et notamment dans la tendance « unitaire » proche du PCF. Secrétaire national des maîtres d’internat-surveillants d’externat (MI-SE) de 1955 à 1956, il siège à ce titre dans le bureau national du SNES. Opposé à l’envoi du contingent en Algérie, il signe avec trois autres surveillants au printemps 1956 une tribune libre dans l’Université syndicaliste intitulée « La guerre que nous ne voulons pas faire ». Ebranlé par les révélations du rapport Khrouchtchev puis par les événements de Hongrie en 1956, il prend certaines distances avec le Parti. Son mariage en 1960 avec Michèle Cusin, dont le père Gaston Cusin était un haut-fonctionnaire des douanes ayant travaillé dans les années 1930 dans les cabinets ministériels de Vincent Auriol puis de Léon Blum, favorise ce glissement vers le socialisme. Trois enfants (un garçon et deux filles) naissent de cette union. A Caen, libéré de tout engagement syndical, Louis Mexandeau continue de militer via le monde associatif culturel. Il fonde et dirige à partir de 1964 l’Association des amis du théâtre et de la Maison de la Culture (il conserve cette fonction jusqu’en 1968). Lors de la présidentielle de 1965, il soutient une pétition en faveur d’une candidature unique de la gauche.

C’est à l’occasion de cette campagne et d’un meeting tenu par François Mitterrand à Caen, le 19 novembre, que Louis Mexandeau fait la rencontre du leader socialiste. Immédiatement séduit par le charisme de ce dernier, le jeune enseignant décide de créer en janvier 1966 à Caen une fédération départementale de la Convention des institutions républicaines (CIR). Celle-ci participe quatre mois plus tard à la fondation de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS) dans le département. Même si les relations entre les éléments de la CIR et ceux de la FGDS sont médiocres, cela ne décourage pas Louis Mexandeau de s’engager dans le combat électoral. Candidat sans succès aux cantonales de 1967 dans le canton de Caen-Ouest, il fait de nouveau de la figuration lors des législatives de juin 1968 dans la 1ère circonscription du Calvados où, crédité de seulement 10 % des voix au premier tour, il se retire en faveur du communiste Jean Goueslard, finalement vaincu par le député gaulliste sortant, Henri-François Buot. La crise de mai ayant sonné le glas de la FGDS, Louis Mexandeau relance localement la CIR et siège au bureau politique national de la Convention de 1969 à 1971. C’est sous cette étiquette qu’il est candidat aux cantonales du printemps 1970 dans le canton de Caen-Ouest mais il échoue face au nouveau maire de Caen, le Républicain indépendant (RI) Jean-Marie Girault, qui a remplacé Jean-Marie Louvel après sa mort.

Les municipales de mars 1971 à Caen sont l’occasion pour les deux hommes de mesurer leur rapport de force électoral. Louis Mexandeau fait partie de la liste conduite par André Paysant du Groupe d’action municipal (GAM) qui bat la liste communiste au premier tour. Si Jean-Marie Girault est facilement élu, la campagne permet à l’énergique socialiste, Louis Mexandeau, de se faire connaître dans la ville et de s’imposer au sein de la gauche non communiste du Calvados. Après le congrès d’Epinay, qui voit la formation du nouveau Parti socialiste (PS) conduit par François Mitterrand, Louis Mexandeau devient assez logiquement le premier secrétaire fédéral PS du département (poste qu’il occupe jusqu’en 1973). C’est sous cette étiquette qu’il se présente aux législatives de mars 1973 dans la 1ère circonscription du Calvados (cantons de Caen-Ouest, Caen-Est, Bourguébus, Douvres-la-Délivrande). Le député sortant, Henri-François Buot, arrive en tête du premier tour avec 36,3 % des suffrages exprimés mais Louis Mexandeau (aidé par son suppléant, l’instituteur et conseiller municipal d’Hérouville-Saint-Clair, Daniel Wilmart-Rousseau), avec ses 22 % des voix, ne se trouve pas dans une situation inconfortable. Dans le cadre du Programme commun, il peut compter sur le soutien des voix communistes de Jean Goueslard (15 %), sans oublier les 9 % des voix des deux petits candidats d’extrême gauche, tandis que son rival gaulliste n’est pas certain du bon ralliement des électeurs s’étant prononcés en faveur du candidat réformateur André Mathieu (15,5 %). Au second tour, après une campagne très dynamique, Louis Mexandeau s’impose de justesse avec 50,3 % des suffrages exprimés. Sa victoire traduit aussi l’évolution sociologique de cette circonscription, autrefois bastion de droite, et qui, à la faveur de l’arrivée de nombreux ouvriers de l’industrie automobile, a glissé vers la gauche.

Louis Mexandeau, qui a renoncé à son métier d’enseignant pour mieux se consacrer à son mandat de député (il continue toutefois de militer au SNES au sein de la tendance « Démocratie et Université »), s’inscrit au groupe du Parti socialiste et des radicaux de gauche et rejoint la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Elu en septembre 1973 conseiller général PS du canton de Caen II, le nouveau député du Calvados se fait au Palais-Bourbon l’avocat de sa circonscription. Il défend une industrie locale de plus en plus menacée par la crise (il est vice-président, à partir de juin 1974, de la commission d’enquête sur la situation de l’énergie en France). Il appelle de ses vœux l’électrification de la ligne Paris-Cherbourg et n’oublie pas de dénoncer la pollution en baie de Seine. Membre suppléant du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche à partir de mai 1976, Louis Mexandeau s’intéresse prioritairement aux questions d’éducation dont il est spécialiste au sein du PS. Chaque année, lors de l’examen du projet de loi de finances en novembre, il participe aux débats lorsqu’il est question du budget de l’enseignement, de l’université et de la recherche. Il prend une part active aux discussions sur le projet de loi relatif à l’éducation en juin 1975 et suit le dossier de l’apprentissage (juin 1977). Ce député, particulièrement actif lors des questions d’actualité, questions au gouvernement, questions orales avec ou sans débat, dépose deux propositions de loi, la première pour inscrire l’espéranto dans l’enseignement secondaire comme langue facultative (mai 1975) et la seconde relative à la sous-traitance (décembre 1975). S’il se montre très impliqué sur les questions d’enseignement, il intervient également sur d’autres sujets à l’occasion de l’examen de projets de loi : IVG (décembre 1973 et novembre 1974), évolution de l’ORTF (juillet 1974), mesures en faveur des handicapés (décembre 1974), protection de la nature (avril 1976). Louis Mexandeau s’abstient lors du vote du projet de loi Royer d’orientation du commerce et de l’artisanat (la loi du 27 décembre 1973). Il soutient le projet de loi dite Simone Veil relatif à l’interruption volontaire de grossesse. Il vote en faveur du projet de loi portant réforme du divorce (la loi du 11 juillet 1975). Durant cette législature, le député profite de quelques moments de loisirs pour publier en 1972 un livre d’histoire, Les Capétiens (Marabout).

Louis Mexandeau, qui a soutenu François Mitterrand lors de la campagne présidentielle de 1974, s’affirme désormais comme le patron de la gauche socialiste dans le Calvados. A ce titre, il essaie de s’emparer de Caen lors des municipales du printemps 1977. Même s’il mène officiellement une liste d’union de la gauche, le député socialiste doit compter avec des communistes locaux peu désireux de le soutenir. En définitive, le giscardien Jean-Marie Girault reste aux commandes de l’hôtel de ville. Au sein du PS, Louis Mexandeau est de plus en plus reconnu comme un expert des questions éducatives. En février 1975, il devient délégué national à l’Education. François Mitterrand, dont il est désormais très proche, lui confie comme mission de rallier le corps enseignant à la gauche socialiste et de préparer, pour les législatives de 1978 et la présidentielle de 1981, un programme de réformes dans le monde de l’enseignement. Dans cette perspective, il publie avec Roger Quilliot, début 1977, chez Flammarion une plateforme programmatique, Libérer l’Ecole. Une des propositions consiste à intégrer les établissements privés catholiques dans un service public unifié laïc. Ce texte explosif suscite beaucoup de remous dans les médias qui parlent du « rapport Mexandeau » en caricaturent parfois le contenu. Les rocardiens le critiquent en sous-main dans l’optique du combat pour l’investiture du futur candidat PS à l’élection présidentielle de 1981.

Les législatives du printemps 1978 se présentent sous un jour difficile pour Louis Mexandeau depuis la dénonciation par les communistes du Programme Commun. De fait, le député sortant, aidé par sa suppléante, l’adjointe au maire d’Hérouville-Saint-Clair, Pierrette Jaffré, doit affronter au premier tour non seulement le candidat de l’Union pour la démocratie française (UDF) Jean-Marie Girault, qui arrive en tête avec 44,2 % des suffrages exprimés, mais aussi un candidat communiste Joël Metzger (12,8 %). La campagne du deuxième tour est très intense, Louis Mexandeau mobilise tous ses réseaux politiques, syndicaux et associatifs, joue de la polémique autour de l’enseignement public unifié pour souder la gauche face à une droite locale proche de l’enseignement privé. Il finit par s’imposer de peu avec 50,9 % des suffrages exprimés. Au Palais-Bourbon, il retrouve le groupe PS et la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il est vice-président, en décembre 1980, de la commission d’enquête sur la langue française. Toujours très intéressé par les questions touchant à l’éducation, il est rapporteur pour avis du projet de loi de finances pour 1981 sur le budget de l’Université (octobre 1980). Il dépose deux propositions de loi, l’une relative à l’éducation continue, au congé-éducation et au crédit-éducation (juin 1979) et l’autre relative à la vie scolaire et à la décentralisation (octobre 1980). L’enseignement est également très présent dans ses interventions lors des questions au gouvernement (non-remplacement des maîtres en congé, rentrée scolaire, calendrier scolaire, concours du CAPES, enseignement de l’histoire-géographie…). Mais le député s’implique aussi sur d’autres dossiers : relations administration/public, crise dans l’industrie, contrats à durée déterminée, situation de l’emploi et du chômage… Louis Mexandeau vote contre le projet de loi relatif à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (la loi du 6 janvier 1978). Il vote également contre le projet de loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes (la loi du 2 février 1981 dite Peyrefitte).

Au sein du PS, Louis Mexandeau ne cache pas son soutien inconditionnel à François Mitterrand et ses profondes réserves envers Michel Rocard. En juin 1978, il signe avec Pierre Joxe, Louis Mermaz et Claude Estier un manifeste, « l’appel des 30 », très hostile envers l’ancien patron du PSU. Le socialiste du Calvados se montre également très combattif lors du congrès de Metz en avril 1979 qui voit les délégués investir François Mitterrand pour la présidentielle de 1981 après une féroce bataille de courants. Si l’on met souvent en avant le soutien de leaders comme Laurent Fabius, Lionel Jospin et Jean-Pierre Chevènement pour expliquer la victoire mitterrandienne, l’appui de Louis Mexandeau, très influent dans les milieux enseignants, n’a pas été secondaire. A l’issue du congrès, il entre au comité directeur du PS et il est confirmé, en octobre, comme délégué national à l’Education nationale. Il rejoint le comité central de la LICRA en novembre 1979 et joue un rôle important dans le dispositif de campagne de François Mitterrand lors de la présidentielle de mai 1981.

Le nouveau président de la République ayant dissout l’Assemblée nationale, Louis Mexandeau se présente en juin 1981 aux législatives anticipées dans la 1ère circonscription du Calvados. Bénéficiant de la dynamique de la présidentielle, il frôle la réélection dès le premier tour avec 49 % des suffrages exprimés. Au deuxième tour, il confirme son avance en battant nettement son rival, le candidat du Rassemblement pour la République (RPR) Lucien Nelle, avec 59,6 % des voix. Mais Louis Mexandeau ne siège pas longtemps à l’Assemblée nationale puisqu’il a été sollicité, dès le 22 mai, pour rejoindre le gouvernement de Pierre Mauroy comme ministre des PTT (une décision qui surprend dans la mesure où l’intéressé se voyait plutôt à l’enseignement). Sa suppléante, Eliane Provost, médecin du travail, le remplace donc au Palais-Bourbon. Le 24 mars 1983, au sein du 3ème gouvernement Mauroy, Louis Mexandeau devient ministre délégué auprès du ministre de l’Industrie et de la recherche (Laurent Fabius), chargé des PTT. Il reste à cette fonction le 23 juillet 1984 dans le nouveau gouvernement Fabius, mis en place pour relancer le pouvoir de gauche après l’échec des européennes de juin. A la tête de ce ministère de 1981 à 1986, Louis Mexandeau s’efforce de moderniser la poste et les télécommunications dans un contexte budgétaire difficile en raison de la crise économique. Soucieux de trouver des crédits, il augmente les tarifs postaux et téléphoniques. Il arbitre de manière équilibrée entre les branches postes et télécommunications. Il doit batailler contre le corps des ingénieurs habitués à dominer avenue de Ségur. De fait, les affrontements sont fréquents entre le ministre et la direction générale des télécommunications (DGT), sur le câble de télévision (la DGT craint que les câbles en fibre optique que défend le ministre ne lui échappent et ne favorisent une dérèglementation) ou sur le rachat des activités télécommunications de Thomson par la CGE. Louis Mexandeau poursuit l’équipement téléphonique du pays engagé depuis les années 1970 et soutient la carte-mémoire et le projet Minitel en 1982.

Ministre influent ayant les faveurs du chef de l’Etat, Louis Mexandeau pense pouvoir emporter la mairie de Caen lors des municipales de mars 1983. Mais il est victime du début du reflux de la vague socialiste, sous l’effet de l’échec du gouvernement de Pierre Mauroy face au chômage. La liste PS qu’il mène est éliminée dès le premier tour avec seulement 35,8 % des voix. Le maire sortant, Jean-Marie Girault, est facilement réélu. Ce nouveau revers est un avertissement politique et Louis Mexandeau en tire les leçons. Il est reconduit au conseil général du Calvados en 1985 mais dans un canton redessiné. Au demeurant, il abandonne l’assemblée départementale l’année suivante au profit du Conseil régional de Basse-Normandie. Louis Mexandeau participe aux législatives de mars 1986 organisées au scrutin départemental proportionnel de liste. Tête de liste PS et Parti radical dans le Calvados, il est facilement élu et retrouve le Palais-Bourbon après la mise en place d’un gouvernement de cohabitation dirigé par Jacques Chirac. A l’Assemblée nationale, Louis Mexandeau siège au groupe socialiste et s’inscrit à la commission de la production et des échanges. Il est membre de la délégation parlementaire pour la communication audiovisuelle (juin 1986) et de la commission de la télématique (avril 1987). Cet élu de gauche s’oppose aux initiatives de la nouvelle majorité de droite, comme la suppression administrative de licenciement (juin 1986), la réforme du régime juridique de la presse (juin 1986) ou les actions engagées en matière de lutte contre les atteintes à la sûreté de l’Etat (décembre 1986). Ancien ministre des PTT et par ailleurs spécialiste des questions d’éducation, il suit les débats portant sur ces deux terrains, notamment lors de l’examen des projets de loi de finances. Il s’intéresse toujours à la question de l’emploi des travailleurs handicapés (mai 1987). Il vote contre le projet de loi relatif aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France (la loi du 9 septembre 1986). De mai 1987 à juillet 1988, Louis Mexandeau, secrétaire national adjoint du PS, se voit nommé au sein du parti « responsable national de la préparation du bicentenaire de la Révolution ».

Soutien de François Mitterrand lors de la campagne présidentielle du printemps 1988, Louis Mexandeau se présente lors des législatives anticipées de juin 1988, organisées après la dissolution de l’Assemblée nationale. Il est le candidat du PS dans la nouvelle circonscription de Caen-Est connue pour être sociologiquement favorable à la gauche. De fait, le socialiste est facilement élu dès le premier tour avec 52,8 % des suffrages exprimés, loin devant le RPR Yves Lessard (25,5 %). Ne pouvant entrer au gouvernement en raison de l’hostilité de Michel Rocard, Louis Mexandeau reste au Palais-Bourbon où il siège dans le groupe PS et dans la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, dont il est rapporteur spécial de 1988 à 1991 pour le budget de l’équipement et des transports routiers. Il siège à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques et remet à ce titre, en avril 1990, un rapport sur l’industrie des semi-conducteurs. Durant cette législature, le député du Calvados s’intéresse à des sujets divers : conditions de séjour et entrée des étrangers en France (juin 1989), formation des personnels enseignants (avril 1990), statut de Renault (avril 1990), aménagement du territoire (mai 1990). Louis Mexandeau approuve la loi du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion (RMI).

Membre du bureau exécutif du PS à partir de juillet 1988, le député du Calvados, membre du courant Jospin, devient ce même mois secrétaire national du PS à la formation (il conserve cette fonction jusqu’en mars 1990). Sur un plan local, les municipales du printemps 1989 sont l’occasion d’une nouvelle déconvenue pour Louis Mexandeau. S’il parvient à franchir la barre du premier tour, il échoue au second face à l’inamovible maire de Caen, Jean-Marie Girault. Député et conseiller régional, le socialiste normand retrouve le gouvernement quand, après le départ de Michel Rocard, Edith Cresson forme un gouvernement le 17 mai 1991. Elle appelle Louis Mexandeau comme secrétaire d’Etat aux Anciens combattants. Il est reconduit à ce poste en avril 1992, quand Pierre Bérégovoy succède à Edith Cresson. Le député de Caen cède donc son siège à sa suppléante, Dominique Robert, conseillère générale et conseillère municipale de Caen. A ce poste ministériel qui ne correspond pas forcément à ses compétences mais qui résulte davantage de la nécessité politique de satisfaire tous les courants du PS et de récompenser les proches du Président, Louis Mexandeau se montre assez discret. Lors du congrès de Rennes du PS en mars 1990 qui voit la dispersion du parti en trois grands courants (Jospin, Fabius et Rocard), cette figure de la gauche socialiste (qui regrettait publiquement que le mot « prolétaire » ait été banni des programmes du PS) soutient Lionel Jospin contre Laurent Fabius. Il conserve le contrôle de sa fédération du Calvados même si son influence commence à y être contestée. En mars 1992, chef de file des socialistes lors des régionales, il ne parvient pas à empêcher une déroute électorale pour un PS englué dans l’échec face à la crise et à la multiplication des affaires. Acteur du PS, il en est aussi l’historien et publie, en 1990, une Petite histoire du parti socialiste. Première partie, des origines au Congrès d'Epinay.

Lors des législatives de mars 1993, organisées dans un contexte difficile pour la majorité, Louis Mexandeau se représente dans la 2e circonscription du Calvados. Il arrive de peu en tête au premier tour avec 27,5 % des suffrages exprimés face au RPR Yves Lessard (26,9 %). Avec l’aide de son suppléant, François Geindre, conseiller régional et maire d’Hérouville-Saint-Clair, le député sortant s’impose au second tour avec 55,1 % des suffrages exprimés grâce à un bon report des voix communistes et écologistes. Louis Mexandeau s’inscrit au groupe socialiste et à la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Il profite des questions au gouvernement pour interroger le gouvernement de droite sur les délocalisations et fermetures d’industries (avril et juin 1993), les salaires et l’emploi (juin 1995), les contrats emploi-solidarité (novembre 1995). Toujours intéressé par les questions relatives aux télécommunications, il participe aux débats portant sur les projets de loi d’ouverture des télécommunications (novembre 1995) et sur l’entreprise nationale France Télécom (juin 1996). Il prend part aux discussions sur le projet de loi quinquennal relatif au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle (septembre-octobre 1993), sur les projets de loi relatifs à l’imprimerie nationale (novembre 1993) et à la Banque de France (novembre 1995). Il s’implique dans l’examen du projet de loi de finances pour 1994 sur les questions d’éducation, d’enseignement et de recherche (novembre 1993). Il vote contre le projet de loi relatif aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale (la loi du 22 juillet 1993).

Au sein du PS, Louis Mexandeau se montre un mitterrandien orthodoxe, très réservé à l’égard des réformateurs accusés de fragiliser l’héritage d’Epinay ou envers ceux qui ne seraient pas assez à gauche du parti. A l’automne 1993, lors du congrès du Bourget, il soutient la motion de Louis Mermaz pourtant minoritaire au sein du PS (sauf dans la fédération du Calvados). A partir d’octobre 1993, il siège au Conseil national (ex-comité directeur). En juin 1994, il participe à la mise en minorité de Michel Rocard au profit du nouveau secrétaire général Henri Emmanuelli. Ce passionné d’histoire devient alors également responsable des études historiques sur le Parti socialiste. Lors de la campagne présidentielle d’avril-mai 1995, il soutient Lionel Jospin. A l’occasion des municipales de juin 1995, Louis Mexandeau tente pour la quatrième fois de battre le maire sortant de Caen, le sénateur centriste Jean-Marie Girault mais cette nouvelle tentative se solde une fois de plus par un échec. Celui-ci fragilise la position de Louis Mexandeau au sein de la fédération PS du Calvados. Son ancien suppléant, le maire d’Hérouville-Saint-Clair, François Geindre, brigue l’investiture du parti pour les prochaines législatives.

Lorsque l’Assemblée nationale est dissoute en 1997, Louis Mexandeau, qui s’est entendu avec François Geindre en lui proposant la tête de liste aux régionales de 1998, se représente dans la 2e circonscription du Calvados. Arrivé nettement en tête au premier tour avec 32,3 % des voix, le député sortant bat facilement sa rivale RPR, Brigitte Le Brethon (adjointe de Jean-Marie Girault et vice-présidente du conseil général du Calvados), en totalisant au second tour 62,6 % des suffrages exprimés. Il a bénéficié d’un bon enracinement local et d’une dynamique politique nationale favorable. Il rejoint le groupe PS et la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Il est membre titulaire du comité pour la commémoration des origines « De la Gaule à la France » (juillet 1997). Moins actif durant cette législature que pendant les précédentes, il est chaque année rapporteur spécial du projet de loi de finances pour les budgets relatifs à l’agriculture et à la pêche. Il approuve le projet de loi d’orientation et d’incitation relatif à la réduction du temps de travail (la loi du 13 juin 1998). Il vote également en faveur de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (la loi du 15 novembre 1999). Il soutient la proposition de loi constitutionnelle relative à l’égalité entre les femmes et les hommes (la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999).

Devenu un « historique » de la rue de Solférino, Louis Mexandeau continue de siéger au bureau national du PS alors qu’il n’en est plus membre depuis de nombreuses années. François Hollande trouve une solution pour justifier sa présence : il le promeut « membre associé » du BN en tant que président de la commission « Mémoire » du parti… Au sein du PS du Calvados, Louis Mexandeau semble dans un premier temps retrouver son ascendant en évinçant, fin 1997, le maire d’Hérouville-Saint-Clair, François Geindre, de la tête de liste des régionales au profit d’une fidèle, Laurence Dumont. Il avait préalablement écarté un autre rival, le député socialiste Philippe Duron, lui aussi professeur d’histoire. Mais Louis Mexandeau perd finalement le contrôle de la fédération départementale en 2000. Ayant arraché néanmoins l’investiture du PS pour les municipales de 2001, il tente une ultime fois de s’emparer de Caen que brigue l’héritière de Jean-Marie Girault, la RPR Brigitte Le Brethon. A priori, l’opération semble possible tant le maire sortant a multiplié les échecs en fin de mandat (projet de tramway avorté, échec de la transformation du district en communauté d’agglomération…) et a peiné à adouber un dauphin. Mais la candidate néo-gaulliste l’emporte face à Louis Mexandeau dont la liste ne rassemble que 42,1 % des suffrages exprimés au deuxième tour. Cette cinquième défaite d’affilée aux municipales ébranle son image dans les rangs de la gauche. Relatant la campagne du socialiste, le quotidien Libération titre de manière caustique « Mexandeau, futur maire de Caen depuis 1977 ».

Les législatives du printemps 2002 constituent pour le socialiste normand le scrutin de trop. Celui-ci, qui refuse d’abandonner la vie politique active, s’accroche à sa circonscription parvenant à empêcher le parachutage de Jack Lang lors des journées parlementaires de septembre 2001. A ceux qui lui reprochent son dernier échec aux municipales, il rétorque que « Caen est à droite depuis Guillaume le conquérant ». Dans « sa » circonscription, il s’oppose à un candidat UDF, Rodolphe Thomas, qui s’était emparé à la surprise générale en 2001 de la municipalité d’Hérouville-Saint-Clair, à la faveur de la division entre les clans Mexandeau et Geindre. Ce jeune maire de 40 ans, proche de Jean-Louis Borloo, arrive en tête du premier tour avec 33,8 % des suffrages exprimés, Louis Mexandeau ne totalisant que 31,7 %. Le candidat de droite l’emporte au second tour avec 51 % des suffrages exprimés, profitant à l’évidence de la lassitude de l’électorat de gauche devant les tensions internes du PS local et le refus de l’un des « derniers dinosaures de la Mitterrandie », selon la formule de Libération, d’accepter le renouvellement générationnel. Il reste conseiller municipal d’opposition à Caen jusqu’en mars 2008.

Sans totalement renoncer à la vie politique (fin 2006, il alerte les socialistes sur les risques de la candidature de Ségolène Royal à la présidentielle de l’année suivante) qu’il suivait de loin en participant aux congrès de sa fédération, Louis Mexandeau se recentre sur d’autres activités. Il écrit plusieurs livres d’histoire, consacrés notamment au Parti socialiste (Histoire du Parti Socialiste : 1905-2005, Tallandier, 2005, François Mitterrand. Le militant : Trente années de complicité, Le Cherche Midi, 2006, Jean Jaurès et Jules Guesde, le discours de deux méthodes, Le Passager clandestin, 2007). Dans son ouvrage sur François Mitterrand, l’auteur revient sur la relation privilégiée entretenue avec l’ancien chef d’Etat depuis la présidentielle de 1965. Avec Pierre Joxe, Claude Estier, Charles Hernu et Louis Mermaz, il appartenait au « premier cercle des fidèles ». Il était de ceux qui, « après chaque revers électoral repartaient de plus belle, à l’assaut de la droite, avec la conviction que François Mitterrand était le seul à pouvoir faire gagner la gauche ». Les initiés savaient que « Mex » ou « Loulou », comme l’appelaient ses proches, organisait chaque année depuis le 10 mai 1981 le repas d’anniversaire de cette victoire avec quelques invités soigneusement triés, agrémentant le banquet par son interprétation de la chanson de Montéhus « Salut à vous braves soldats du 17ème ». Membre du comité d'honneur de la Société d'études jaurésiennes, Louis Mexandeau participe aux travaux de l’Académie des sciences, arts, et belles-lettres de Caen. En avril 2018, son discours enflammé d’ancien mitterrandien au congrès d’Aubervilliers lui vaut encore une ovation de la salle. Il s’éteint le 14 août 2023 à Rennaz, dans le canton de Vaud en Suisse, où il a été transporté à la suite d’une infection pulmonaire contractée alors qu’il séjourne dans son chalet de Saint-Gingolph en Haute-Savoie. Il était officier de la Légion d’honneur.