Jean Miriot
1924 - 2020
MIRIOT (Jean)
Né le 16 avril 1924 à Villars-lès-Dombes (Ain)
Décédé le 16 octobre 2020 à Lyon (Rhône)
Député du Rhône de 1958 à 1962
Jean Miriot est né le 16 avril 1924 à Villars-lès-Dombes dans l’Ain. Il était agent de recherches textiles. Décoré de la Croix de guerre avec palmes ainsi que de la Rosette de la Résistance, Jean Miriot se lance en politique dans l’ombre de Jacques Soustelle, député du Rhône en 1951, secrétaire général du Rassemblement du peuple français (RPF) de 1947 à 1951 et ancien gouverneur de l’Algérie de 1955 à 1956. Jean Miriot sera d’une fidélité sans faille, notamment lorsque Jacques Soustelle se présente aux élections législatives de 1967 à Lyon.
Ancien organisateur du service d’ordre du RPF à Lyon, Jean Miriot anime le comité lyonnais de l’Union pour le salut et le renouveau de l’Algérie française (USRAF), le plus actif de métropole. Cette Union, lancée en mars-avril 1956, permet de coordonner de multiples initiatives individuelles, dont l’écho restait jusque-là limité par l’absence d’une structure capable de propager les idées des hérauts de l’Algérie française. L’initiative en revient à Pierre Picard, bras droit de Jacques Soustelle. Les moyens d’action utilisés par l’USRAF sont variés : diffusion de tracts et d’affichettes avec des slogans comme « Les fellaghas sont les nervis du fascisme égyptien » ou « Perdre l’Algérie, c’est mettre au chômage un ouvrier français sur cinq », la diffusion de bulletins ou encore l’organisation de tournées de conférences par des orateurs du mouvement. Dans le domaine des publications, l’activité de l’USRAF a été particulièrement dynamique, avec le bulletin La Vérité sur l’Algérie, puis le magazine de Soustelle, Voici pourquoi. Pour Jacques Soustelle et ses fidèles, dont Jean Miriot, il s’agit de constituer un gouvernement de salut public permettant de faire pression sur le régime, de préférence avec le général de Gaulle à sa tête, bien que la finalité ultime soit davantage le maintien de l’Algérie française que son retour au pouvoir. Cela permet de comprendre a posteriori la dissidence de Jacques Soustelle et celle de Jean Miriot à sa suite avec la famille gaulliste, dans la mesure où l’appartenance à celle-ci était pour eux conditionnée en 1958 au maintien de l’Algérie française.
Jean Miriot est ainsi le secrétaire du comité départemental de l’Association nationale pour l’appel au général de Gaulle dans le respect de la légalité républicaine, créée le 16 mai 1958, soit trois jours après la crise du 13 mai, qui s’appuie largement sur les réseaux des anciens délégués départementaux du RPF. Son président national est le général Laurent. Selon ses statuts, l’Association a « pour but de mettre en lumière et faire connaître par tous les moyens légaux le désir profond qui anime le pays de voir le général de Gaulle devenir le chef du gouvernement de la République ; de réaliser une large union des Français de bonne volonté en rejetant tout recours à la violence et à l’illégalité, conformément aux déclarations constantes et récemment répétées du général de Gaulle, et de regrouper toutes les initiatives inspirées par le même esprit ». Elle a donc une double mission : assurer le retour au pouvoir de De Gaulle par des moyens légaux (excluant les actions plus « musclées ») et servir de pôle de regroupement à des mouvements ou des associations soutenant son action.
Jean Miriot est ainsi candidat aux élections législatives sous l’étiquette de l’Union pour la nouvelle République (UNR) dans la 1ère circonscription du Rhône. Dans ses engagements de campagne, il cite quatre fois le nom de Jacques Soustelle, sans doute pour donner du poids à son propos, il conclut son exhortation en faisant de son mentor le « président » de l’UNR, sans autre précision, alors que les secrétaires généraux successifs du parti depuis 1958 sont, en réalité, Roger Frey et Albin Chalandon. De plus, les tentatives de Jacques Soustelle pour rapprocher l’UNR des partisans de l’Algérie française d’autres partis politiques, comme Georges Bidault du Mouvement républicain populaire (MRP) ou André Morice du Centre républicain, ont été condamnées le 16 octobre 1958 par le comité du parti gaulliste et par le général de Gaulle lui-même. Maintenir l’Algérie française et « relever moralement » le pays sont les motivations premières du vote gaulliste selon Jean Miriot.
Au premier tour, Jean Miriot arrive en tête avec 45,2 % des suffrages exprimés. Il bat largement le candidat communiste, Georges Revel, avec 76,1 % des suffrages exprimés au second tour. A l’Assemblée nationale, il est membre de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales le 27 janvier 1959 et cesse d’y appartenir le 6 mai 1960. Il rejoint ensuite la commission de la Défense nationale et des forces armées le 11 octobre 1960.
Au cours de son mandat, Jean Miriot va peu à peu, comme tous les partisans de l’Algérie française, se trouver en porte-à-faux avec la politique algérienne du général de Gaulle. En effet, dès sa conférence de presse du 20 mars 1959, le président de la République annonce les grandes lignes de son discours du 16 septembre en faveur de l’autodétermination. Ce choix divise les responsables de l’UNR. Dès novembre 1958, la direction du parti a d’ailleurs demandé aux candidats à la députation de rester vagues sur l’Algérie, en évoquant simplement « la recherche de la paix », ou encore « la promotion économique et sociale de l’Algérie ». En mars 1959, à l’occasion des élections municipales, il n’est plus question de mentionner l’Algérie, sauf pour inviter les Français à faire confiance au chef de l’Etat. Dès le printemps 1959, Jean Miriot, à l’instar de Jacques Soustelle, alors ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé du Sahara, des DOM-TOM et de l’Energie atomique du gouvernement Debré depuis le remaniement du 13 février 1959, se trouve sur la défensive, conscient de la fragilité de sa position mais décidé à dénoncer la gestion du parti menée par l’équipe d’Albin Chalandon. Jean Miriot voit et comprend l’évolution en cours, ainsi que la volonté du général de Gaulle de mettre fin au plus vite à un conflit entravant, selon ce dernier, le développement et la modernisation économique de la France. Néanmoins, Jacques Soustelle tente de reprendre la main lors du comité central du 17 juin 1959, en vain. Il décide de ne plus y siéger. Ses partisans au Parlement se mobilisent. Le 26 juin 1959, le député Raymond Dronne déclare qu’il faut « déchalandonner l’UNR ». Selon le journaliste gaulliste Jean-José Marchand, les « activistes », autrement dit les soustelliens, sont 80 au sein du groupe UNR composé de 206 élus. Jean Miriot figure parmi eux aux côtés de députés de premier rang tels que Pascal Arrighi, Pierre Battesti, Jean-Baptiste Biaggi, le colonel Robert Thomazo.
Le départ des « intégrationnistes » s’opère en plusieurs temps. Au sein de la fédération UNR du Rhône, comptant près d’un millier d’adhérents à la fin de 1959, la majorité, avec Jean Miriot et Charles Béraudier, député du Rhône, suppléant de Jacques Soustelle, fait bloc derrière ce dernier, qui ne ménage pas sa peine pour rallier les compagnons à sa cause. Au lendemain de sa démission du gouvernement, en février 1960, il déclare devant les militants de l’UNR : « Pour ma part, je me tiendrai d’une façon inflexible à la ligne que je me suis tracée. […] J’ai fait mon devoir en m’élevant contre une politique de répression qui frappe souvent des gaullistes et en tout cas des patriotes ». Jean Miriot l’assure à nouveau de son soutien indéfectible. La fédération UNR du Rhône devient ainsi autonome en mai 1960, avec pour secrétaire départemental l’ancien ministre, bien qu’il ait été officiellement exclu du parti le 25 avril 1960. Par solidarité, Jean Miriot, Pierre Picard, député de Seine-et-Oise, Charles Béraudier et René Moatti, député de la Seine, quittent le groupe UNR de l’Assemblée nationale le 5 mai 1960, lequel est pour ainsi dire « purgé » des partisans de l’Algérie française les plus en vue. Jean Miriot s’inscrit alors au groupe du Regroupement national pour l’unité de la République rassemblant les 66 députés d’Algérie, dont Ahmed Djebbour, le 15 décembre 1960. Cela n’induit pas, chez Jean Miriot, un vote systématique en opposition avec la politique du général de Gaulle. Par exemple, au sujet de la Communauté française, lors de la séance du 10 mai 1960, Jean Miriot et René Moatti votent le projet « par discipline gaulliste ». En revanche, pour ce qui touche à la question algérienne, Jean Miriot est d’une obstination de fer. Le 9 novembre 1961, il vote en faveur de l’amendement « Salan », visant à ramener la durée du service militaire à 18 mois et, pour contrebalancer les manques d’effectifs depuis la dissolution des Unités territoriales après la Semaine des barricades, à appeler sous le drapeau des citoyens français des départements d’Algérie. Enfin, Jean Miriot prend part à une discussion sur une motion de censure du gouvernement en faveur de laquelle il vote, le 5 juin 1962, au sujet de la situation en Algérie, près d’un mois avant le referendum sur l’indépendance, du problème des harkis, ainsi que de l'état d'esprit de l'armée. Cette motion, soutenue avec force par les partisans de l’Algérie française, notamment par René Cathala, député de la Haute-Garonne, et Jean-Marie Le Pen, député de la Seine, est en définitive rejetée.
Jean Miriot vote le 4 octobre 1962 la motion de censure dont l’adoption entraîne le renversement du gouvernement de Georges Pompidou, et ensuite, la dissolution de l’Assemblée nationale.
Il fait partie des 20 parmi les 30 démissionnaires ou exclus de l’UNR qui se représentent aux élections législatives des 18 et 25 novembre 1962. Marqués toutefois du sceau de l’antigaullisme, ils doivent affronter des candidats investis par la coalition UNR-Union démocratique du travail (UDT). Seuls trois dissidents sont réélus en 1962. Jean Miriot se présente sans étiquette dans sa 1ère circonscription du Rhône. Il affronte René Caille, candidat gaulliste. Ce dernier, dans sa profession de foi en vue du second tour, ne tranche pas net avec Jean Miriot, se contentant de se prévaloir d’une assurance de stabilité que ne pouvait plus promettre, selon lui, le « soustellien ». Jean Miriot est battu, au second tour, par René Caille, et également devancé par Georges Revel, candidat du PCF.
Jean Miriot est entré en politique sous l’influence déterminante de Jacques Soustelle avec qui les liens sont indéfectibles. Pour cette raison, il noue son destin politique national au sien, donc à celui de l’Algérie française. Il n’entre toutefois pas en clandestinité comme son mentor, ne se compromettant pas dans l’Organisation armée secrète (OAS). Il poursuit une activité politique locale en tant qu’adjoint au maire de Lyon chargé de la circulation sous le mandat de Francisque Collomb (1976-1989) et comme vice-président de la communauté urbaine de Lyon. Durant toute cette période, Jean Miriot est à la tête de la Société anonyme de construction de la ville de Lyon.