Anatole de Monzie

1876 - 1947

Informations générales
  • Né le 22 novembre 1876 à Bazas (Gironde - France)
  • Décédé le 11 janvier 1947 à Paris (Seine-Inférieure - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IXe législature
Mandat
Du 7 novembre 1909 au 31 mai 1910
Département
Lot
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
Xe législature
Mandat
Du 24 avril 1910 au 31 mai 1914
Département
Lot
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XIe législature
Mandat
Du 26 avril 1914 au 7 décembre 1919
Département
Lot
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XIVe législature
Mandat
Du 20 octobre 1929 au 31 mai 1932
Département
Lot
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XVe législature
Mandat
Du 8 mai 1932 au 31 mai 1936
Département
Lot
Groupe
Parti socialiste français
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XVIe législature
Mandat
Du 3 mai 1936 au 31 mai 1942 *
Département
Lot
Groupe
Union socialiste et républicaine

* : Un décret de juillet 1939 a prorogé jusqu'au 31 mai 1942 le mandat des députés élus en mai 1936

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 11 janvier 1920 au 24 décembre 1929

Biographies

Né le 22 novembre 1876 à Bazas (Gironde).

Député du Lot de 1909 à 1919.
Sénateur du Lot de 1920 à 1929.
Député du Lot de 1929 à 1942.
Sous-Secrétaire d'Etat à la Marine marchande du 22 mars au 9 décembre 1913.
Sous-Secrétaire d'Etat aux Transports maritimes et à la Marine marchande du 12 septembre au 16 novembre 1917.
Ministre des Finances du 3 au 17 avril 1925.
Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts du 17 avril au 11 octobre 1925.
Ministre de la Justice du 11 au 29 octobre 1925.
Ministre des Travaux publics du 29 octobre 1925 au 23 juin 1926.
Ministre des Finances du 19 au 23 juillet 1926.
Ministre de l'Education nationale du 3 juin 1932 au 30 janvier 1934.
Ministre des Travaux publics du 23 août 1938 au 5 juin 1940.

Fils d'un directeur des contributions directes d'origine périgourdine, issu d'une famille « de petite noblesse et d'ancienne fortune » - l'expression est de lui - A. de Monzie fit dans la vie une entrée fulgurante : une domestique peu attentive laissa sa voiture d'enfant se retourner, ce qui valut au bébé une fracture du col du fémur que le médecin ne jugea pas utile de réduire, plus confiant sans doute en la nature qu'en sa propre compétence. De Monzie boita toute sa vie et, comme Montaigne, comme Byron, comme Talleyrand, en fut marqué physiquement et moralement.

Elève au lycée d'Agen, il rafle les premières places dans toutes les disciplines littéraires. Bachelier, il quitte sa province pour côtoyer au collège Stanislas la fine fleur de la jeunesse bourgeoise. Il y retrouve celui à qui désormais il ne retirera plus son amitié : Henry de Jouvenel. Contraint de renoncer à son rêve - l'Ecole navale n'a que faire de boiteux! - Monzie, qui milite au mouvement socialiste, passe une licence ès lettres, avec la mention « philosophie », et songe au professorat. Cependant, son père, qui souhaitait pour son fils une place paisible - on ne peut pas dire que les dieux l'exaucèrent - le voyait avoué en province. A. de Monzie fit donc également son droit et s'inscrivit au barreau de Paris. Deuxième secrétaire de la conférence des avocats au concours de 1900, il obtient la même année le prix Cartier. Le hasard d'un brillant succès devant la 9e chambre correctionnelle le confirma dans cette carrière.

En 1902, le ministre de l'Instruction publique, Joseph Chaumié, ancien bâtonnier du barreau d'Agen et sénateur de Lot-et-Garonne, le prend à son cabinet comme chef adjoint et le nomme peu de temps après chef de cabinet. Monzie y découvre tous les rouages d'un grand ministère, dont il saura se souvenir lorsqu'il en prendra la tête. Il y gagne surtout le goût des affaires publiques.

En 1904, il est élu conseiller général du Lot où il représente le canton de Castelnau-Montratier. L'année suivante, il est désigné comme commissaire de l'instruction publique à l'Exposition internationale de Liège. Il suit Chaumié du ministère de l'Instruction publique à celui de la Justice où il devient son directeur de cabinet. Là encore, il regarde et il apprend.

Dans son fief du Lot, le jeune de Monzie n'est plus un inconnu. Il représente déjà, à gauche, l'opposition au député en place, Munin-Bourdin. En 1906, dans l'arrondissement de Cahors, Monzie parvient à faire 11.757 voix contre lui, qui en recueille 13.438, assez pour être élu. Trois ans après, la mort de son adversaire lui ouvre la voie de la Chambre des députés. Il obtient cette fois 16.077 suffrages sur 20.408 votants. Il sera réélu sans difficultés au premier tour le 24 avril 1910 et le 28 avril 1914, avec une majorité confortable.

A. de Monzie siège à gauche, mais il n'est pas homme à se laisser docilement coller une étiquette. Qu'il ait oscillé perpétuellement entre le radicalisme et le socialisme est une évidence, mais hors des appareils des partis et des œillères des doctrinaires. Il est de tempérament foncièrement indépendant, aussi bien à l'égard des dogmes que de l'argent ou des honneurs.

Très rapidement, le jeune député va étancher sa soif d'apprendre, de prendre part, d'agir. Rien ne lui est indifférent et il va le prouver dès sa première intervention qui portera sur... la hausse des sucres.

Membre de la commission de l'administration générale, puis des finances, A. de Monzie s'impose par la diversité de ses dons. Le 18 mars 1913, le 4e ministère Briand est renversé et Barthou est chargé de former un nouveau gouvernement. Il propose à Monzie un portefeuille et, qui plus est, un portefeuille qui n'a jamais existé auparavant : un sous-secrétariat d'Etat à la Marine marchande.

« Terrien suspect à bon droit d'incompétence », comme il l'écrit lui-même, Monzie va marquer son passage de son empreinte. Il transforme en administration d'Etat les seize écoles de l'enseignement maritime, réforme leurs programmes et crée le livret d'études maritimes. Ce fut lui qui ouvrit au Havre l'Institut maritime destiné à remplacer l'Ecole supérieure de navigation ; il crée encore un « Office des transports », un « Office des pêches » et soumet aux chambres un projet de code maritime. Cette œuvre, il la reprendra en 1917, quand Ribot et Painlevé lui confieront le même département ministériel. C'est alors qu'il fonde la Ligue navale dont il sera le premier président.

En fait, la politique étrangère l'attire. Il expose à chaque occasion les deux volets de sa doctrine : la diplomatie de la présence et la théorie de la non-ingérence.

La présence de la France, il aura deux fois l'occasion de la prôner. D'abord, à propos du Vatican. Depuis 1904, avant même la loi de séparation, la France n'a plus d'ambassadeur au Saint-Siège, alors que d'autres nations, même protestantes comme la Grande-Bretagne entretiennent avec la Papauté des relations diplomatiques normales. De Monzie réclame à la tribune le rétablissement de notre ambassade à Rome, estimant que ce ne serait ni déjuger, ni bafouer le législateur de 1905.

A gauche, ses idées sont diversement appréciées. Le 16 novembre 1919 il est battu aux élections législatives. Mais il entre à la mairie de Cahors, et devient président du Conseil général du Lot.

Exclu du Parlement, il retrouve le barreau et très brillamment. Caillaux doit à son éloquence d'être acquitté, le 22 avril 1920, devant le Sénat érigé en Haute Cour.

Le 11 janvier 1920, il est élu sénateur du Lot par 440 voix sur 595 votants. Il sera réélu le 6 janvier 1924, améliorant encore son « score » de près de cinquante voix.

Le 9 avril 1924, fidèle à sa théorie de la présence, il interpelle Poincaré, alors président du Conseil et ministre des Affaires étrangères, sur la nécessaire reprise des relations diplomatiques et commerciales avec la Russie des soviets, à laquelle Clemenceau, cinq ans auparavant, avait opposé son veto. Le 28 octobre de la même année, un accord est signé entre les représentants des deux Etats. Herriot propose à Monzie l'ambassade de France à Moscou, qu'il refuse comme il avait refusé déjà de représenter notre pays au Vatican. Il se contentera de présider, jusqu'en 1927, la commission des affaires russes.

La pondération, l'ambiance ouatée de la Haute Assemblée et ses lambris dorés ne conviennent pas à son tempérament bouillonnant. Il s'y ennuie et démissionne au profit d'un siège de député. Elu le 20 octobre 1929 dans la circonscription de Figeac par 9.826 voix sur 14.778 votants, il sera réélu à la Chambre le 1er mai 1932 au premier tour et le 3 mai 1936 au second.

C'est pourtant comme sénateur qu'il entame sa grande carrière ministérielle. En avril 1925, la situation financière est peu brillante. Le Parlement, anesthésié par des formules enchanteresses du genre « L'Allemagne paiera », n'est guère conscient du drame. La guerre de 1914-1918 a été sanglante et ruineuse : il faut payer la facture. Herriot fait appel à de Monzie rue de Rivoli. Le 6 avril, le nouveau ministre des Finances expose son plan d'assainissement : « revigorer les finances nationales sans écraser d'impôts les citoyens, éviter que l'Etat ne dévore les contribuables sous prétexte de les protéger ». Il prétend y parvenir « en amortissant ou en rachetant une partie de la dette intérieure, grâce au produit d'une contribution volontaire correspondant à un prélèvement minimum de 10 % sur le capital. Au cas où les contribuables ne s'exécuteraient pas, la contribution deviendrait obligatoire. La limite de l'émission des billets par la Banque de France était portée de 41 à 45 milliards ». La Chambre, réveillée en sursaut de son lourd sommeil, renâcle. Quatre jours après, le cabinet Herriot tombe.

Painlevé lui donne le portefeuille de l'Instruction publique et des beaux-arts. Ce premier passage à l'Instruction publique fut de courte durée, de même que celui qu'il fit place Vendôme. Tout juste eut-il le temps de se déclarer partisan du juge unique, au moins en première instance, mais en vain.

L'année suivante le ramène aux Finances avec le second cabinet Herriot. Il reste 60 millions en caisse et Moreau, le gouverneur de la Banque de France, annonce au gouvernement que, si la convention relative à l'emprunt Morgan n'est pas votée par le Parlement, il coupera les crédits du Trésor dès que son compte sera épuisé, c'est-à-dire vraisemblablement le lendemain soir. Il n'en faut pas plus pour condamner à mort le ministère. De Monzie n'aura donc fait rue de Rivoli que deux apparitions « en catastrophe ».

A dire vrai, c'est à l'instruction publique - ou plutôt à l'Education nationale puisque c'est avec lui que ce grand ministère change de titre - que Monzie accomplit l'essentiel de sa tâche. Sa grande idée ? Celle des grands radicaux qui l'ont précédé, celle qu'il avait déjà exposée en 1906 dans Les réformes scolaires, à savoir l'école unique, l'Université une et indivisible, comme la République.

Cette idée généreuse, qui posait l'épineux problème du monopole et qui en faisait un cheval de bataille politique, implique la gratuité de l'enseignement secondaire, la sélection, l'orientation, la prolongation de la scolarité. Il dépose plusieurs projets de loi qui séduisent le Parlement plus qu'ils ne le convainquent.

La loi sur la « gémination » devait aboutir plus vite. Il s'agissait tout simplement de jumeler les écoles primaires de garçons et de filles dans les petites communes, c'est-à-dire en pratique de confier à l'institutrice la classe des petits tandis que l'instituteur faisait la classe aux grands, au lieu de les contraindre l'un et l'autre à mener de pair quatre ou cinq divisions. Le passage d'A. de Monzie à l'Education nationale est marqué aussi par certaines réalisations dont le caractère était plus spécifiquement culturel. En mars 1933, il crée un comité d'honneur en vue de la réalisation d'un « inventaire total d'une civilisation à une époque déterminée ». L'œuvre gigantesque fut interrompue par la guerre de 1939, au grand désespoir de son fondateur. A. de Monzie fut plus heureux avec le Bureau universitaire de statistique qu'il crée personnellement, en liaison avec l'Union nationale des étudiants de France, la Confédération des travailleurs intellectuels et la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement secondaire. C'était une des premières tentatives - hardies à l'époque - d'utilisation des statistiques à des fins sociales.

En 1938, il revient au ministère des Travaux publics dans le 3e cabinet Daladier. Il fait face à la grève des dockers, se consacre à l'amélioration des transports et au développement de la production industrielle. Il reste surtout le centre de la diplomatie française, accumulant peut-être plus de rapports et de notes d'information, recevant sans doute plus d'ambassadeurs et de hauts fonctionnaires de la Carrière que le ministre des Affaires étrangères en titre.

La guerre de 1939, A. de Monzie la voyait venir depuis longtemps. Rêvant des Etats-Unis de l'Europe occidentale, contrepoids nécessaire au bloc germano-slave, il veut consolider les rapports entre la France et l'Italie pour essayer de détacher Mussolini de Hitler.

On le retrouve une dernière fois en 1940 ministre des Travaux publics dans le cabinet de Paul Reynaud.

Un mois plus tard, il vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.

Homme politique brillant, avocat de talent, riche d'une culture quasi universelle, de Monzie collabora à de nombreux journaux ou revues politiques : La France, La Petite République, Le Journal, Le Petit Journal, Paris-Midi, La Revue politique et parlementaire, etc..

Il laissa surtout à la postérité une liste impressionnante d'ouvrages, la plupart liés à sa vie publique.

Il était chevalier de la Légion d'honneur.




Né le 22 novembre 1876 à Bazas (Gironde)
Décédé le 11 janvier 1947 à Paris

Député du 1909 à 1919 et de 1929 à 1942
Sénateur du Lot de 1920 à 1929
Sous-secrétaire d'Etat aux transports maritimes et à la marine marchande du 12 septembre au 16 novembre 1917
Ministre des finances du 3 au 17 avril 1925
Ministre de l'instruction publique et des beaux-arts du 17 avril au 11 octobre 1925
Ministre de la justice du 11 au 29 octobre 1925
Ministre des travaux publics du 29 octobre au 23 juin 1926
Ministre des finances du 19 au 23 juillet 1926
Ministre de l'éducation nationale du 3 juin 1932 au 30 janvier 1934
Ministre des travaux publics du 23 août 1938 au 5 juin 1940

(Voir première partie de la biographie dans le Dictionnaire des parlementaires français, 1889-1940, Tome VII, p. 2509 à 2511)

Maintenu dans ses fonctions de maire de Cahors pendant l'Occupation, Anatole de Monzie publie, en 1941, Ci-devant, ouvrage très critique à l'égard de la politique menée de 1938 à 1940. Subissant un temps l'attraction du maréchal Pétain, il s'en détache et se replie dans une certaine amertume, qu'il exprimera dans La Saison des Juges. Il s'éteint à Paris, dans le septième arrondissement, le 11 janvier 1947, à la suite d'une douloureuse maladie.

Sa sépulture à Saint-Jean-de-Lespinasse porte cette épitaphe qu'il avait lui-même choisie, « Crois, fais et passe ». Une stèle a été élevée à sa mémoire à Saint-Céré.

Son collaborateur, Louis Planté, lui a consacré un livre : Anatole de Monzie, un grand seigneur de la politique.