Louis Noguères

1881 - 1956

Informations générales
  • Né le 4 octobre 1881 à Laval (Mayenne - France)
  • Décédé le 5 mai 1956 à Bages (Pyrénées-Orientales - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XVIe législature
Mandat
Du 10 avril 1938 au 31 mai 1942 *
Département
Pyrénées-Orientales
Groupe
Socialiste
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Pyrénées-Orientales
Groupe
Socialiste
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Pyrénées-Orientales
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Pyrénées-Orientales
Groupe
Socialiste

* : Un décret de juillet 1939 a prorogé jusqu'au 31 mai 1942 le mandat des députés élus en mai 1936

Biographies

Né le 4 octobre 1881 à Laval (Mayenne).

Député des Pyrénées-Orientales de 1938 à 1942.

Né d'une mère nîmoise et d'un père catalan, c'est au hasard de la carrière judiciaire de celui-ci, que Louis Noguères dut de voir le jour à Laval et de faire ses études à Angers, à Chambéry, puis au Havre où il devient bachelier.

Il s'attaque alors à la Sorbonne et à la Faculté de droit de Paris où il acquiert rapidement la licence ès lettres (1900), un diplôme supérieur d'histoire et la licence en droit, tout en prenant, en 1904, la présidence de l'Association générale des étudiants de Paris. L'amitié de Jaurès, dont il est très jeune le collaborateur - il écrit le tome VI (Consulat et Empire) de son Histoire socialiste - et dans l'intimité duquel il vit, va l'orienter sans retour vers le socialisme militant.

Le 4 août 1914, Louis Noguères, bien que sa santé l'ait exempté de service, s'engage dans l'infanterie : blessé et cité, il reçoit la Légion d'honneur. Il passe ensuite dans l'aéronautique, organisation générale et personnel de l'aviation.

Inscrit depuis 1903 au barreau de Paris, il se donne à cette vocation avec la fougue, la passion et la combativité qui seront les caractéristiques de toute sa vie et lui garderont une étonnante jeunesse d'esprit. Doué d'une puissance de travail et d'assimilation remarquables, il se fera rapidement un nom : ses plaidoiries pour Bajot dans l'affaire Philippe Daudet et pour le député Garat dans l'affaire Stavisky entre autres, contribueront à asseoir sa réputation. Il est en outre l'avocat de la C.G.T. et de plusieurs grandes organisations ouvrières.

Conseiller municipal puis maire de Thuir en 1930 et conseiller d'arrondissement, il est élu en 1934 au Conseil général des Pyrénées-Orientales, dont il devient un rapporteur écouté.

Dès 1931, il tente d'entrer au Palais Bourbon à l'occasion d'une élection partielle dans la circonscription de Céret : en troisième position au premier tour avec 2.336 voix sur 13.494 votants contre 5.822 voix à Joseph Parayre, il ne peut, au scrutin de ballottage du 1er février, empêcher celui-ci d'être élu alors qu'il ne gagne lui-même qu'un millier de voix supplémentaires. L'année suivante, au renouvellement législatif de mai 1932, il se trouve, dans la même circonscription et contre le même adversaire, moins bien placé : à peine 2.000 voix sur 15.898 votants au premier tour ; il n'insiste pas. Aux élections générales d'avril mai 1936, il change de circonscription et se présente dans celle de Perpignan contre le radical François Delcos ; c'est encore un échec : 3.627 voix sur 15.753 votants. L'élection au Sénat du député de Céret, Joseph Parayre, va enfin, en 1938 lui ouvrir les portes du Palais Bourbon.

En tête au premier tour avec 5.751 voix sur 15.484 votants contre 4.643 au radical-socialiste Demonte, 3.654 au communiste Terrat et 1.217 à Vigo, Noguères l'emporte brillamment au scrutin de ballottage, le 10 avril 1938, avec 9.705 voix sur 12.716 votants contre 2.008 à Vigo, seul maintenu et 1.002 bulletins nuls.

Sous le chapeau à larges bords rendu célèbre par Léon Blum, l'œil sombre mais d'une vivacité extrême sous les sourcils noirs, la moustache abondante et le menton moucheté d'un léger bouc, la lavallière au vent, Louis Noguères apporte à la Chambre la flamme de son midi catalan.

Il fait tout de suite partie de la commission des comptes et des économies puis de celle de la législation civile et criminelle, mais les événements ne lui permettent de siéger que tout juste deux ans. Ses préoccupations seront celles du socialiste (accidents et conditions du travail), de l'avocat (amnistie) et du représentant d'un département à la fois vinicole (défense des vins de Banyuls) et limitrophe d'une Espagne déchirée par une guerre civile dont les conséquences ne sont pas sans l'inquiéter.

Le 10 juillet 1940, à Vichy, en refusant avec 79 autres de ses collègues d'accorder au maréchal Pétain les pouvoirs constituants que celui-ci demande Louis Noguères va « engager » le reste de sa carrière.




Né le 4 octobre 1881 à Laval (Mayenne)
Décédé le 5 mai 1956 à Bages (Pyrénées-Orientales)

Député des Pyrénées-Orientales de 1938 à 1942
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Pyrénées-Orientales)
Député des Pyrénées-Orientales de 1946 à 1951

(Voir première partie de la biographie dans le Dictionnaire des parlementaires français, 1889-1940, Tome VII, p. 2570, 2571)

Louis Noguères figure parmi les quatre-vingts députés qui refusent de voter les pleins pouvoirs au maréchal Pétain le 10 juillet 1940. Viscéralement hostile aux valeurs de la « Révolution nationale », il est immédiatement considéré par Vichy comme un homme à surveiller de près : déchu de ses mandats de maire (le 23 décembre 1940) et de conseiller général (le 6 février 1941), il se voit assigné à résidence en Corrèze par une décision du ministère de l'intérieur en date du 1er mars 1941. Cette mise à l'écart ne l'empêche pas de prêter main-forte aux mouvements de résistance contre l'occupant allemand. Le 24 février 1944, des hommes de la Gestapo se rendent à son domicile en vue de l'éliminer ; prévenu quelques minutes auparavant, il parvient in extremis à leur échapper et se réfugie dans l'Aveyron, où il anime et réorganise la presse clandestine régionale (Libération, Le Populaire du Languedoc, Vaincre).

A la Libération, Louis Noguères retrouve la place éminente qui était la sienne dans la vie politique locale et nationale : maire de Thuir, président du Conseil général des Pyrénées-Orientales et membre de l'Assemblée consultative provisoire, il conduit la liste de la SFIO dans les Pyrénées-Orientales aux élections du 21 octobre 1945 pour la première Assemblée nationale constituante. Avec 40 771 voix sur 106 614 suffrages exprimés, la liste emporte l'un des trois sièges à pourvoir ; les deux autres sièges vont au communiste Léo Fi-guères et au radical François Delcos.

Membre de la Commission du règlement et de la Commission de la Constitution, Louis Noguères devient le 5 février 1946 président de la Haute cour de justice, en remplacement de Marcel-Edmond Naegelen, appelé par Félix Gouin à prendre le portefeuille de l'éducation nationale. Elu par 300 voix sur 308 suffrages exprimés, il impose vite son autorité à la tête de cette juridiction chargée de se prononcer sur le sort de quatre-vingt cinq ministres et hauts fonctionnaires du gouvernement de Vichy, inculpés pour intelligence avec l'ennemi, atteinte à la sûreté extérieure ou complot contre la sécurité intérieure de l'État.

Les audiences de la Haute cour sont suivies par l'opinion publique avec un intérêt inégal : aucune ne se compare en intensité à celles des procès Pétain et Laval. Artisan d'une justice qu'il souhaite « rapide mais pas sommaire », Louis Noguères s'acquitte de sa tâche avec une détermination qui lui vaut l'admiration de beaucoup et l'animosité de certains : sans surprise, les communistes lui reprochent sa clémence, tandis que les ex-Vichyssois et les partisans de la « réconciliation nationale » fustigent la rigueur de ses positions.

Avec ses collègues socialistes, Louis Noguères vote les nationalisations et soutient, le 19 avril 1946, le premier projet de Constitution de la IVe République ; le texte est cependant rejeté lors du référendum du 5 mai, ce qui entraîne la convocation d'une nouvelle Assemblée.

Les élections se tiennent le 2 juin. Louis Noguères conduit de nouveau la liste socialiste, qui recueille 28 273 voix sur 106 721 suffrage exprimés ; les socialistes et les radicaux pâtissent de l'apparition d'une liste du MRP, conduite par Pierre Lafont, mais les trois députés sortants sont réélus. Réélu à la tête de la Haute cour de justice, Louis Noguères préside notamment les audiences du procès intenté à l'ancien ministre de Vichy, Pierre-Etienne Flandin. Le verdict prononcé par la juridiction - cinq années de dégradation pour indignité nationale, peine aussitôt relevée pour services rendus à la Résistance - suscite la colère des jurés communistes, qui décident de pratiquer la politique de la chaise vide. L'épisode entraîne une mise au point ferme de la part du ministre de la justice, Pierre-Henri Teitgen, qui vient apporter son soutien à la Haute cour : « la justice politique, ce n'est pas la politique, ses méthodes, ses moyens, appliqués à une œuvre de justice, c'est la justice, ses principes, ses règles essentielles, appliquées à l'activité politique ».

Louis Noguères ne prend pas part au vote du second projet de Constitution voté par l'Assemblée le 28 septembre 1946 et ratifié par référendum le 13 octobre ; il présente sa candidature aux élections législatives qui suivent quatre semaines plus tard. Dans un scrutin marqué par une légère baisse de la participation, la liste socialiste enregistre un nouveau recul, avec 23 939 voix sur 102 433 suffrages exprimés. Il est néanmoins reconduit.

Réélu le 18 décembre à la présidence de la Haute cour, Louis Noguères mesure l'ampleur de la tâche qui lui reste à accomplir : soixante-neuf affaires sont encore pendantes devant la juridiction, visant quinze accusés en fuite, vingt-quatre accusés détenus ou hospitalisés, et trente accusés en liberté provisoire. Le fonctionnement de la juridiction est cependant perturbé par l'attitude des jurés communistes, qui, en se retirant brusquement du procès Marquet, déclenchent à la fin du mois de janvier 1948 une nouvelle crise, qui se solde cette fois par la démission collective de Louis Noguères et de ses vice-présidents, Maurice Guérin, Paul Theeten et Edgar Faure. La situation n'est débloquée qu'après le vote par le Parlement d'une nouvelle loi, promulguée le 19 avril 1948, qui modifie les règles de fonctionnement de la juridiction ; dix jours plus tard, Louis Noguères retrouve la présidence de la Haute cour, qu'il occupe jusqu'à ce que celle-ci cesse définitivement ses activités, le 1er juillet 1949.

Louis Noguères renoue ensuite avec une activité parlementaire plus traditionnelle. Son autorité morale lui vaut d'être sollicité par ses pairs pour intervenir à l'occasion de certains grands débats. Ainsi c'est lui qui porte la parole du groupe socialiste lors des débats sur la motion préjudicielle déposée par Louis Terrenoire au cours de la discussion du projet de loi « portant amnistie de certains faits de collaboration », et qui vise notamment à mettre fin au régime de détention du maréchal Pétain pour lui substituer un régime d'assignation en résidence surveillée. « Vouloir modifier aujourd'hui le mode de détention, qu'est-ce que cela signifie ? » s'interroge-t-il à la tribune de l'Assemblée le 9 novembre 1950. « Cela signifie que la peine qui a été prononcée, qui est devenue la détention perpétuelle, serait modifiée. Cette peine a été prononcée pour crime de haute trahison. Et vous demandez qu'on assigne un domicile, c'est-à-dire qu'on prenne une mesure de police utilisée contre des hommes considérés par le gouvernement, à tort ou à raison, comme susceptible de troubler l'ordre public. Vous sentez bien que vous touchez là le fond du problème et que l'Assemblée ne peut pas se substituer à un organe de jugement, qu'elle n'a qualité, ni pour le faire, ni pour demander au gouvernement de le faire. Qui a qualité pour le faire ? Aux termes de l'article 35, il n'existe qu'un seul pouvoir dans l'Etat qui puisse modifier le caractère d'une peine : c'est le Président de la République, agissant en conseil supérieur de la magistrature ».

Quelques mois avant la fin de la législature, le 5 janvier 1951, Louis Noguères dépose une proposition de loi, tendant à instituer une procédure de demande en révision des arrêts rendus par la Haute cour de justice.

Louis Noguères ne se représente pas aux élections du 17 juin 1951, choisissant de se consacrer à ses fonctions à la mairie de Thuir et à la présidence du Conseil général des Pyrénées-Orientales.

Constamment réélu dans le canton de Thuir, il décède le 5 mai 1956 à Bages.

Il était l'auteur de plusieurs ouvrages de témoignage ou de réflexions sur la guerre ; Le Véritable procès du maréchal Pétain ; Siegmaringen, la dernière étape ; La Haute Cour de la Libération.