François Perrin
1914 - 1964
PERRIN (François, Marius)
Né le 24 juillet 1914 à Le Bouchage (Isère)
Décédé le 18 juillet 1964 à Cannes (Alpes-Maritimes)
Député de l’Isère de 1958 à 1964
François Perrin naît quelques jours avant le début de la Première guerre mondiale dans une famille d’agriculteurs. Orphelin de père à l’âge de six ans, il effectue des études primaires puis entre comme ouvrier dans une entreprise de bâtiment située aux Avenières, à quelques kilomètres de son lieu de naissance. Après avoir effectué ses deux années de service militaire, il s’installe comme entrepreneur en maçonnerie au Bouchage. François Perrin devait rappeler souvent, après son entrée en politique, que rien ne lui avait été donné et qu’il était en quelque sorte « sorti du rang » par son énergie et son labeur.
Mobilisé le 27 août 1939, il est fait prisonnier pendant la campagne de France mais regagne ses foyers en août 1940, après quelques semaines seulement de captivité. Il fonde alors une famille, puis s’engage dans la vie publique. Il est élu conseiller municipal puis premier adjoint du Bouchage peu de temps après la Libération. En 1948, il accède à la mairie de sa commune natale. Très actif dans l’exercice de ses mandats locaux, il se distingue à l’attention des électeurs du canton de Morestel, qui l’élisent conseiller général à l’occasion des élections cantonales de mars 1949. Ses collègues le désignent comme secrétaire de l’Assemblée départementale dès cette date. Il siège parmi les modérés. En 1953, François Perrin choisit de quitter la petite commune rurale du Bouchage pour se porter candidat aux municipales à Morestel. Le succès de la liste qu’il conduit lui permet de devenir l’édile de ce chef-lieu de canton. Réélu conseiller général en 1955, il réussit à concilier la direction de son entreprise de BTP et ses multiples responsabilités : président du Syndicat des maires de Morestel, président de l’Hospice cantonal des vieillards, président départemental de l’habitat rural…
Le scrutin d’arrondissement, rétabli avec la Vème République, offre aux législatives une plus-value aux élus les mieux implantés. François Perrin décide de présenter sa candidature dans la septième circonscription de l’Isère à l’occasion des élections de novembre 1958. Il rend hommage au général de Gaulle dans sa profession de foi, mais critique la « flagornerie très électorale » de ceux qui entendent abriter leurs ambitions à l’ombre de l’homme du 18 juin. Très critique à l’égard des hommes et des institutions de la IVème République, le maire de Morestel se distingue en outre par son anticommunisme. Il se veut un « homme neuf, libre, indépendant » et se montre fidèle aux valeurs des Indépendants en dénonçant des maux qui ont pour noms « l’étatisme, le dirigisme (…) le collectivisme paralysant et ruineux ». Lui plaide au contraire en faveur d’un Etat qui s’en tienne à un rôle de coordination et de contrôle, sans concurrencer « les activités libres » : ce discours est entendu dans ce nord-est de l’Isère qui avait accordé au mouvement poujadiste 27,1% des suffrages aux élections législatives du 2 janvier 1956. François Perrin reçoit le soutien d’Aimé Paquet, député sortant de l’Isère et membre influent du Centre national des Indépendants et paysans (CNIP) : ce dernier définit son protégé comme un homme « bouillant et brillant ».
Confronté à six autres candidats, François Perrin arrive nettement en tête du premier tour des législatives en rassemblant 40,7% des suffrages exprimés. 66% des électeurs du canton de Morestel lui ont accordé leur confiance. François Perrin est élu député de l’Isère avec 56,6% des voix le 30 novembre 1958. Son succès n’est pas dû à une stratégie d’union de la majorité qui soutient le général de Gaulle, puisque Paul Ribeaud, candidat de l’UNR issu des Républicains sociaux, a choisi de se maintenir au second tour, provoquant une triangulaire avec le candidat communiste Henri Durand.
François Perrin s’inscrit au groupe des Indépendants et paysans d’action sociale (IPAS) à l’Assemblée nationale. Il siège à la Commission de la production et des échanges de 1958 à 1964.
Le député de l’Isère s’implique peu dans le travail législatif et ne prend la parole qu’à deux reprises dans l’hémicycle sous la première législature. Ses deux interventions abordent des questions qui intéressent le monde rural. Le 28 octobre 1959, il prend part au débat sur la suppression de la taxe locale et insiste sur la complexité d’un impôt qui défavorise les petites communes. Le 24 novembre 1961, il attire l’attention du Gouvernement et de ses collègues parlementaires sur les difficultés que connaissent les artisans à façon de l’Isère. Le maire de Morestel insiste alors sur l’importance de l’artisanat pour le maintien d’un tissu économique dynamique en milieu rural.
Sans partager l’engagement de beaucoup de ses amis du groupe des Indépendants en faveur de l’Algérie française, François Perrin évolue du soutien au gouvernement à la prise de distance, puis à l’opposition ponctuelle entre 1958 et 1962. Il approuve le programme exposé par Michel Debré au Palais-Bourbon (16 janvier 1959) et la déclaration de politique générale du même Premier ministre en octobre 1959, vote la loi sur l’enseignement privé (23 décembre 1959) et accorde les pouvoirs spéciaux au gouvernement pour ramener l’ordre en Algérie après la semaine des barricades (2 février 1960). Troublé par les modalités du règlement de l’affaire algérienne et par l’interprétation de la Constitution dans un sens trop défavorable au Parlement, il s’abstient volontairement lors du vote sur le programme du gouvernement de Georges Pompidou (27 avril 1962). Il refuse de désavouer l’ancien président du Conseil Georges Bidault, héritier désigné du général Salan à la tête de l’OAS, et s’abstient lors du scrutin sur la levée de son immunité parlementaire (5 juillet 1962). Comme son collègue isérois Aimé Paquet ou Paul Reynaud, il vote la motion de censure dont l’adoption provoque le renversement du gouvernement Pompidou le 4 octobre 1962.
Au moment de solliciter le renouvellement de son mandat parlementaire en novembre 1962, François Perrin ne cherche pas à faire oublier son opposition au gouvernement de Georges Pompidou. Une majorité de Français a approuvé l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel, mais le député sortant de l’Isère affirme s’être déterminé en fonction des avis –hostiles ou réservés quant à l’applicabilité en l’espèce de la procédure référendaire- du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel. François Perrin rappelle qu’il est souvent intervenu à Paris en faveur de ses mandants et a su rester disponible pour ceux qui voulaient l’entretenir de leurs difficultés. Il se propose d’œuvrer en faveur du rétablissement de la franchise de bouilleurs de cru aux agriculteurs et s’engage à examiner les lois sur un mode « objectif, sans passion ». L’entrepreneur en maçonnerie, qui a obtenu l’investiture des Indépendants, rassemble 12833 voix (34,9%) au premier tour de scrutin. Ce résultat témoigne qu’une partie des électeurs modérés qui l’avaient soutenu en 1958 ont choisi d’exprimer leur soutien au pouvoir gaulliste en se prononçant en faveur de Raymond Jacquet, candidat gaulliste « parachuté » dans l’Isère (23,2% des suffrages exprimés). Les électeurs du canton de Bourgoin placent d’autre part le communiste Charly Bonin en tête du premier tour (32,4%). Une très forte hausse de la participation est observée le 25 novembre 1962 : elle profite au candidat du PCF et surtout à François Perrin. Ce dernier est en effet réélu député de l’Isère avec 44,5% des suffrages dans le cadre d’une triangulaire.
A l’issue des élections législatives, le Centre national des Indépendants et Paysans n’est plus en mesure de former un groupe à l’Assemblée nationale : il n’y dispose plus désormais que de 29 sièges. Six députés rejoignent alors le groupe du Centre démocratique, que domine le MRP, quatre choisissent celui du Rassemblement démocratique, situé au centre gauche. Comme la majorité de ses collègues issus du CNIP, François Perrin amorce un ralliement à la majorité en s’inscrivant au groupe des Républicains indépendants.
Il n’a guère le temps de se montrer plus actif au Palais Bourbon que sous la première législature. Entre 1962 et 1964, il intervient à deux reprises dans l’hémicycle, les 30 et 31 octobre 1963, sur des questions d’infrastructures, puis de construction. Le conseiller général et maire de Morestel disparaît brusquement à l’été 1964, peu avant de fêter ses cinquante ans. Son suppléant Maurice Cattin-Bazin, maire de Saint-Albin-de-Vaulserre, lui succède alors comme représentant de la septième circonscription de l’Isère à l’Assemblée nationale.