Jacques Piot

1925 - 1980

Informations générales
  • Né le 3 février 1925 à Saint-fargeau (Yonne - France)
  • Décédé le 2 septembre 1980 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ve législature
Mandat
Du 2 avril 1973 au 2 avril 1978
Département
Yonne
Groupe
Union des démocrates pour la République
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
VIe législature
Mandat
Du 19 mars 1978 au 2 septembre 1980
Département
Yonne
Groupe
Rassemblement pour la République

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 2 octobre 1968 au 11 mars 1973

Biographies

Biographie de la Ve République

PIOT (Jacques, Léon, Joseph)
Né le 3 février 1925 à Saint-Fargeau (Yonne)
Décédé le 2 septembre 1980 à Paris

Sénateur de l’Yonne de 1968 à 1973
Député de l’Yonne de 1973 à 1980

Jacques Piot naît à Saint-Fargeau, au cœur de la Puisaye, où son père est installé comme notaire. Il fréquente l’Institution Saint-Joseph à Gien puis le lycée public de Sens. C’est à 18 ans à peine qu’il rejoint la Résistance, avant de s’engager à l’été 1944 dans le 1er bataillon de parachutistes, dit « premier bataillon de choc ». Il combat jusqu’à l’armistice en Allemagne et est démobilisé en 1946. Ses états de service lui valent d’être décoré de la croix de guerre 1939-1945. Jacques Piot effectue ses études supérieures à la Faculté de droit de Paris dans la deuxième moitié des années 1940. Il travaille ensuite comme clerc de notaire, avant de s’installer à la tête de sa propre étude à Chéroy, dans le nord-ouest de l’Yonne. Cette commune du Gâtinais compte alors un peu plus de 500 habitants. En 1955, le jeune notaire devient secrétaire général de la fédération yonnaise du Centre national des indépendants et paysans (CNIP), dominée par les personnalités de Jean Moreau et de Jean Chamant. En mars 1959, Jacques Piot entre au conseil municipal de Chéroy en qualité d’adjoint au maire. Ses qualités d’administrateur le conduisent rapidement à d’autres fonctions. Il est en effet élu président du syndicat des communes du Gâtinais en octobre 1959, puis conseiller général du canton de Chéroy en 1964. Ce parcours de notable local se double de responsabilités partisanes. Jacques Piot, qui a suivi Jean Chamant dans son soutien à Valéry Giscard d’Estaing lors de l’éclatement du CNI en 1962, devient secrétaire général de la fédération des Républicains indépendants dans l’Yonne en 1967. Le 22 septembre 1968, il est élu sénateur de l’Yonne. Quoique membre des Républicains indépendants, il s’apparente au groupe UDR du Sénat puis le rejoint pleinement à partir de mai 1971. Sa carrière politique se déroule désormais au sein des formations politiques qui se réclament du gaullisme. Une telle évolution n’est pas isolée, puisque Jean Chamant lui-même devait être élu sénateur de l’Yonne sous l’étiquette du RPR en 1977.
Le jeune sénateur de l’Yonne se signale à l’attention de ses collègues par son goût du travail législatif et son sérieux. Ils lui valent de devenir secrétaire du Sénat, puis vice-président de la Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et de l’administration général du Sénat. Il est désigné comme rapporteur de textes importants comme la loi « anti-casseurs », qui suscite d’importantes réserves au Sénat. Cette loi est pensée par le gouvernement et le garde des Sceaux René Pleven comme un instrument de lutte contre les mouvements gauchistes. Elle crée notamment un délit de participation à des manifestations interdites et est promulguée le 8 juin 1970, malgré les critiques de la gauche et d’une partie des modérés. Jacques Piot soutient les gouvernements de Jacques Chaban-Delmas et de Pierre Messmer entre 1968 et 1973. Il approuve notamment la création des régions (séance du 29 juin 1972). Il devait du reste siéger au Conseil régional de Bourgogne dans les années 1970.
A l’approche des élections législatives de mars 1973, Gaston Perrot, ancien maire de Sens et député sortant UDR de la troisième circonscription de l’Yonne, fait connaître son intention de se retirer. Le canton de Chéroy, où Jacques Piot a été réélu en 1970, est situé dans cette circonscription. C’est avec l’investiture de l’Union des républicains de progrès, soit de l’UDR et des Républicains indépendants, qu’il s’y porte candidat. Le jeune sénateur ne s’explique pas sur ce souhait de siéger désormais à l’Assemblée nationale dans sa profession de foi. Ses documents électoraux, s’ils évoquent le « péril communiste » ou décrivent les réformateurs de Jean-Jacques Servan-Schreiber et Jean Lecanuet comme les « candidats de la division et de l’impuissance », mettent pourtant l’accent sur des enjeux locaux plus que nationaux. Jacques Piot déclare vouloir y travailler « avec la participation étroite de tous les élus des régions de Sens, de Joigny, de Mirgennes » et dans la concertation. La circonscription a, selon lui, besoin de nouvelles infrastructures pour pouvoir attirer des usines et des ateliers « générateurs d’emplois nouveaux ». Il souhaite également y construire plus de logements à loyers modérés, ainsi que de nombreux équipements publics (écoles, collèges, crèches). Outre Jacques Piot, deux candidats se distinguent par la qualité de leur implantation dans la 3ème circonscription de l’Yonne : le conseiller général communiste Jean Cordillot, ancien député sous la IVème République, fidèle adversaire de Gaston Perrot dès les législatives de novembre 1958, et le nouveau maire de Sens Etienne Braun, soutenu par le Mouvement réformateur. Jacques Piot arrive en tête du premier tour avec 34% des suffrages exprimés. Il obtient jusqu’à 52,3% des voix dans « son » canton de Chéroy. Seul le canton de Sens-Nord lui préfère Jean Cordillot ; 32,1% des électeurs y déposent un bulletin communiste dans l’urne, contre 26,6% en faveur de Jacques Piot. Une semaine plus tard, 56,6% des voix se portent sur le notaire yonnais, qui est élu député contre Jean Cordillot.
Jacques Piot démissionne alors de son mandat de sénateur et s’inscrit au groupe de l’UDR à l’Assemblée nationale. Ce juriste de formation et parlementaire déjà chevronné y rejoint la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il devait être porté à la vice-présidence de cette Commission en avril 1975 et conserver cette responsabilité jusqu’à sa mort. Jacques Piot intervient à trente huit reprises dans l’hémicycle et dépose trois propositions de lois au cours de la 5ème législature.
Il s’impose comme un des meilleurs spécialistes de l’Outre-mer français et en particulier des territoires situés dans l’Océan pacifique. Peu après son élection à l’Assemblée nationale, il défend par exemple un projet de loi qui modifie le régime des indemnités dont bénéficient les membres de l’Assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna. Le texte prévoit le passage de simples indemnités de séjour à des indemnités mensuelles. Il autorise également le cumul de cette indemnité avec le traitement de fonctionnaire ou les revenus de chef de village ou de chef coutumier, contrairement aux dispositions appliquées en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Après discussion, le projet de loi est adopté à l’unanimité, le 26 avril 1973. Le 13 décembre 1976, il invite également ses collègues à adopter un projet de loi relatif à l’organisation de la Nouvelle-Calédonie et de ses dépendances. Rapporteur de ce texte pour la Commission des lois, il salue dans ses dispositions « un effort de clarification et de simplification formelle », puisque « les textes épars qui constituent (…) la charte de ce territoire » y sont enfin rassemblés. L’élu bourguignon rejette la perspective d’une autonomie interne qui « impliquerait la volonté délibérée d’accéder à l’indépendance » au profit d’une « autonomie de gestion ». Il s’agit en particulier de renforcer les pouvoirs du conseil de gouvernement, en lui accordant la maîtrise d’une partie de son ordre du jour ainsi que de nouvelles compétences en matière d’administration des biens et d’organisation des services du territoire. Ce texte, qui prive l’Assemblée territoriale et le haut-commissaire du Gouvernement de certaines prérogatives, ouvre la voie à une série de dispositions législatives concernant la Nouvelle-Calédonie dans la seconde moitié des années 1970. Aussi Jacques Piot plaide-t-il par exemple devant ses collègues pour une modification du régime communal (séances des 20 avril et 29 juin 1977) ou une augmentation de la représentation parlementaire (6 octobre 1977) de l’Île. C’est encore en qualité de rapporteur qu’il prend part au débat sur l’intégration des fonctionnaires de police du cadre complémentaire de Nouvelle-Calédonie dans la police nationale (8 décembre 1977). Le député de l’Yonne est désigné comme rapporteur pour avis du budget des départements d’outre-mer pour 1975 et 1976, puis du budget des territoires d’outre-mer pour 1977 et 1978.
Jacques Piot s’illustre sur un autre terrain au début de la 5ème législature. Il lui revient en effet de défendre la réduction à cinq ans du mandat présidentiel lors du débat du 16 octobre 1973. Rapporteur du projet de loi constitutionnelle, il juge raisonnable de permettre au chef de l’Etat de « fonder plus souvent la légitimité de ses pouvoirs » et repousse un usage trop fréquent du référendum à cette fin pour des raisons pratiques. Le maire de Chéroy ne considère pas qu’une « nécessaire concomitance doive s’établir » entre les scrutins législatifs et présidentiels. L’Assemblée nationale aurait, selon lui, à pâtir de cette coïncidence des dates, l’élection présidentielle l’emportant de beaucoup en importance aux yeux des Français. Le plaidoyer de Jacques Piot pour le quinquennat se caractérise par sa brièveté. Le rapporteur du projet de loi intervient de surcroît très peu dans les débats, laissant souvent au président de la Commission des lois, Jean Foyer, le soin de répondre aux opposants. Un amendement du centriste Guy Dollez précisant que le mandat présidentiel ne pourrait être renouvelé qu’une fois est ainsi repoussé, malgré le soutien de la gauche.
L’élu bourguignon, notaire de profession, s’intéresse au droit successoral, dont relèvent deux des propositions de lois qu’il dépose entre 1973 et 1978. Il est en outre désigné comme rapporteur par la Commission d’enquête sur la gestion du paquebot « France », symbole des chantiers navals nationaux, en novembre 1974. Ce député très actif est chargé d’une mission temporaire auprès du garde des Sceaux Jean Lecanuet de décembre 1974 à juin 1975. Il y est responsable de la création d’un comité des usagers de la Justice, dont il prend ensuite la présidence.
La voix de Jacques Piot ne manque pas aux gouvernements Messmer, Chirac puis Barre. S’il a soutenu certains des projets « libéraux » du président Giscard d’Estaing comme l’extension de la saisine du Conseil constitutionnel (10 octobre 1974) ou la création du divorce par consentement mutuel (4 juin 1975), il vote cependant contre la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse, à l’instar d’élus gaullistes comme Olivier Guichard, le 28 novembre 1974. Cette manifestation de désaccord avec l’exécutif est la seule à s’exprimer publiquement au cours de la législature.
Le maire de Chéroy est réélu conseiller général lors de cantonales pourtant très difficiles pour la majorité en mars 1976. Il devient secrétaire de la fédération RPR de l’Yonne en décembre 1977. Un autre élu du département, le jeune Jean-Pierre Soisson, apparaît à l’époque comme un des plus fervents soutien du président Giscard d’Estaing. Jacques Piot, qui préside la Commission des affaires économiques du Conseil régional de Bourgogne depuis 1974, sollicite le renouvellement de son mandat parlementaire aux élections de mars 1978. Il adopte un discours très anticommuniste dans sa profession de foi et invite les électeurs à rejeter « le chaos » auquel conduirait « l’aventure du collectivisme ». Jean Cordillot, candidat à toutes les élections législatives depuis 1958, lui apporte la réplique au nom du Parti communiste, tandis que Roger Lassale, conseiller général de Pont-sur-Yonne, représente le Parti socialiste. Largement en tête au premier tour (45,6% des suffrages exprimés), Jacques Piot défait Jean Cordillot le 19 mars 1978 et est réélu député par 55,1% des électeurs de la 3ème circonscription de l’Yonne.
Son activité parlementaire reste très soutenue à la fin des années 1970. Rapporteur du budget des territoires d’outre-mer pour 1978 et 1979, il fait figure d’expert des questions ultra-marines. Il est désigné par la Commission des lois comme rapporteur d’un projet de loi modifiant les modes d’élection de l’Assemblée territoriale et du conseil de gouvernement de Nouvelle-Calédonie au printemps 1978 ou d’un texte tirant les conséquences juridiques de la déclaration d’indépendance des Nouvelles-Hébrides (décembre 1979).
Les questions de sécurité et de libertés publiques valent à Jacques Piot d’accéder à une certaine notoriété sous la 6ème législature. La société française voit alors croître l’exigence de sécurité des citoyens, dans un contexte de médiatisation d’affaires criminelles impliquant des enfants (affaires Christian Renucci, affaire Patrick Henry) ou des hommes d’affaires (enlèvement du baron Empain en janvier 1978). Le garde des Sceaux Alain Peyrefitte est décidé à répondre à cette demande sociale en modifiant le droit pénal. A l’automne 1978, il défend ainsi au nom du gouvernement un projet de loi relatif à l’exécution des peines d’emprisonnement. Jacques Piot en est le rapporteur. Le 3 octobre 1978, le parlementaire yonnais dénonce la surenchère de l’opposition, qui parle d’une « loi d’exception » et met l’accent sur l’octroi au détenu d’une possibilité de recours pour violation de la loi contre les décisions du juge d’application des peines. La principale disposition du texte crée un régime de sûreté à destination des détenus condamnés pour des crimes ou des délits impliquant une menace à l’intégrité physique d’autrui, qu’il s’agisse d’assassinat, de torture, de coups et blessures, de proxénétisme, de prise d’otages, de séquestration ou de trafic de drogue par exemple. Membre du conseil supérieur de l’administration pénitentiaire depuis juin 1973, Jacques Piot est à nouveau chargé d’une mission de six mois auprès du ministre de la justice le 18 octobre 1978 : jusqu’en avril 1979, il travaille en effet à une possible réforme du régime carcéral. Alain Peyrefitte et Jacques Piot se retrouvent lors de l’examen de la loi dite Sécurité et liberté dans l’hémicycle, en juin 1980. Le député de l’Yonne présente ce texte, très critiqué par la gauche, comme une réponse au sentiment d’insécurité des citoyens. L’extension des prérogatives de la police en matière de contrôle d’identité lui paraît justifiée par un souci d’efficacité. Le principe de l’individualisation de la peine par le juge se trouve en outre limité, dès lors que la loi Sécurité et liberté restreint les possibilités de sursis, de peine de substitution et de circonstances atténuantes. Jacques Piot consacre beaucoup de temps et d’énergie à la défense de ces dispositions législatives au printemps et à l’été 1980.
Il s’éteint à son domicile parisien dans la nuit du 1er au 2 septembre 1980. C’est à l’occasion de la séance publique du 2 octobre que ses collègues députés rendent hommage à cet élu respecté, qui n’avait guère connu l’échec que lors d’une municipale partielle à Sens en janvier 1979. Le président Chaban-Delmas salue alors en Jacques Piot « un bon législateur, un véritable défenseur de la justice », un travailleur « infatigable » qui « avait tout naturellement pris le parti de la tolérance et du dialogue » et « supportait mal les querelles personnelles ».
Jacques Piot était le beau-père d’Henri de Raincourt, qui devait être élu sénateur de l’Yonne en 1986.