Germaine Poinso-Chapuis

1901 - 1981

Informations générales
  • Née le 6 mars 1901 à Marseille (Bouches-du-Rhône - France)
  • Décédée le 20 février 1981 à Marseille (Bouches-du-Rhône - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Bouches-du-Rhône
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Bouches-du-Rhône
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Bouches-du-Rhône
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Bouches-du-Rhône
Groupe
Mouvement républicain populaire

Biographies

Biographie de la IVe République

POINSO-CHAPUIS (Germaine, Marie, Joséphine)
Née le 6 mars 1901 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Décédée le 20 février 1981 à Marseille

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Bouches-du-Rhône)
Député des Bouches-du-Rhône de 1946 à 1956
Ministre de la santé publique et de la population du 24 novembre 1947 au 25 juillet 1948

Née à Marseille dans une famille d’origine ardéchoise, Germaine Chapuis est licenciée en droit et diplômée d’études supérieures de droit romain. Première femme lauréate, à Marseille, de la conférence du stage, elle s’inscrit au barreau de cette ville en 1921. Son militantisme très précoce l’oriente dans deux directions complémentaires : l’adhésion à la démocratie-chrétienne (et à son parti de l’époque, le Parti démocrate populaire) et une activité sociale soutenue en faveur de l’enfance en danger et des adolescents handicapés. Elle épouse en 1937 l’avocat Henri Poinso dont elle aura deux enfants. Sa brillante conduite au service de la Résistance, dans le service social et l’organisation des évasions du Mouvement de libération nationale lui vaut de nombreuses décorations – dont la médaille de la Résistance - et la reconnaissance des Marseillais qui l’élisent en mai 1945 au conseil municipal. Elle y demeurera jusqu’en 1959.
Ayant adhéré dès sa fondation au Mouvement républicain populaire (MRP), Germaine Poinso-Chapuis se présente le 21 octobre 1945, dans la première circonscription des Bouches-du-Rhône, à l’élection de l’Assemblée nationale constituante. En seconde position après Alexandre Chazeaux, directeur du journal Le Méridional, sa liste obtient 59 979 voix sur 392 666 suffrages exprimés et compte deux élus. Les résultats ne sont guère différents le 2 juin 1946, la poussée du MRP, réduite à quelques centaines de suffrages, étant ici peu sensible. Germaine Poinso-Chapuis, tête de liste, est réélue. Dans ces deux assemblées, son activité parlementaire est réelle. La députée de Marseille, membre de la commission de la justice et de la législation générale et de la commission de la famille, de la population et de la santé publique dépose trois propositions de loi, un rapport et une proposition de résolution, ces textes ayant en commun un caractère social. Son combat en faveur de la limitation des débits de boissons débute avec sa proposition de loi du 15 mars 1946. Elle présente son premier plan d’ensemble de lutte contre l’alcoolisme dans sa proposition de loi du 17 avril 1946. Elle n’intervient qu’à trois reprises sous la première Constituante, souhaitant notamment, comme rapporteur pour avis de la commission de la famille, la suppression de la tutelle administrative de la ville de Marseille.
Elle siège dans les mêmes commissions, lorsqu’elle est réélue à la deuxième Assemblée nationale constituante. Ses deux propositions de loi, ses trois rapports et ses deux propositions de résolution répondent aux mêmes préoccupations. Germaine Poinso-Chapuis veille notamment à proportionner rigoureusement tous les salaires moyens départementaux et par là les prestations familiales, aux salaires individuels réellement payés (3 septembre 1946). Elle poursuit son combat contre l’alcool, dans sa proposition de résolution du 21 septembre 1946. Ses interventions dans la deuxième assemblée élue sont pour soutenir le deuxième projet de constitution (29 août 1946) et pour suggérer une réforme du Conseil économique (2 octobre 1946). Elle vote, conformément à la discipline de son groupe, les grandes réformes de l’époque et, successivement, contre et pour les deux projets constitutionnels.
L’élection de l’Assemblée nationale, le 10 novembre 1946, ne modifie pas la représentation politique de la première circonscription des Bouches-du-Rhône. Malgré une perte de 7 000 suffrages, le MRP conserve ses deux sièges alors que le PCF en compte quatre, la SFIO deux et la droite un. Membre de la commission des affaires économiques (1946-1951), Germaine Poinso-Chapuis siège également à la commission de la famille, de la population et de la santé publique à partir de 1948 et jusqu’en 1951. Elle est désignée par la première des deux commissions pour faire partie, d’une part, de la sous-commission chargée de suivre et d’apprécier la mise en œuvre de la convention de coopération économique européenne et du programme de relèvement européen. D’autre part, elle fait partie de la commission chargée de procéder à une étude d’ensemble des divers régimes de prestations familiales. L’activité parlementaire de Germaine Poinso-Chapuis est extrêmement soutenue, puisqu’elle dépose presque quarante textes. Ses vingt propositions de loi, ses huit rapports, ses trois rapports spéciaux et ses huit propositions de résolution restent largement influencés par la question sociale : la lutte antialcoolique est très présente dans l’action de l’élue de Marseille. Elle s’intéresse aussi au statut des écoles (30 mai 1947) et au travail à mi-temps pour les femmes fonctionnaires ayant des enfants (30 juillet 1947). A plusieurs reprises, elle tente d’exposer sa volonté de créer une police féminine spécialisée dans la protection de l’enfance et de l’adolescence. L’abandon de famille la touche également et elle s’en fait l’écho dans sa proposition de loi du 3 janvier 1950. Le thème de la protection de l’enfance est récurrent : après la réforme de la filiation (proposition de loi du 1er avril 1950), elle combat les délits et crimes commis sur des enfants (proposition de loi du 11 mai 1950) et montre le bien-fondé de l’octroi d’une formation professionnelle à tous les enfants (proposition de loi du 6 juin 1950).
Ses interventions en séance s’inscrivent dans la défense des textes déposés, même si certaines d’entre elles ont un caractère plus juridique. A cet égard, elle est le rapporteur de la proposition de loi visant à régulariser la situation des entreprises réquisitionnées de Marseille (11 août 1947). Son combat de rapporteur pour l’interdiction du système de vente avec timbre-prime est reconnu de tous.
Elle entre le 24 novembre 1947 comme ministre de la santé publique et de la population dans le cabinet formé par Robert Schuman, première femme de l’histoire politique française à détenir un ministère à part entière. Elle dépose treize projets de loi portant sur les sujets les plus divers, parmi lesquels la vaccination obligatoire, le statut des personnels infirmiers, la protection de l’enfance. Son action ministérielle est plus précisément marquée par l’attention portée à la situation des étrangers au regard des prestations familiales (projet de loi du 15 janvier 1948), à réglementer l’exercice de la profession d’infirmiers (projet de loi du 17 mars 1948) et à organiser des établissements privés recevant des mineurs atteints de déficiences physiques ou psychiques (projet de loi du 13 mai 1948).
Mais son nom reste surtout associé au fameux « décret Poinso-Chapuis » du 22 mai 1948 qui habilite les associations familiales à recevoir des subventions publiques et à les répartir entre les familles nécessiteuses pour faciliter l’éducation de leurs enfants, quel que soit le type d’école d’inscription. Le décret, signé en fait à la demande expresse de Robert Schuman, ouvre une crise gouvernementale grave, les ministres socialistes déplorant une entorse à la laïcité de l’Etat. Edouard Depreux, ministre de l’éducation nationale, dénonce l’illégalité d’un texte ne portant pas sa cosignature. Saisi, le Conseil d’Etat conclut à sa légalité, mais exige une circulaire d’application signée des deux ministres. De fait, le décret n’est pas appliqué, du moins provisoirement. Mais le gouvernement Schuman en sort affaibli et à terme condamné. Quand André Marie forme le gouvernement suivant, Germaine Poinso-Chapuis est sacrifiée sur l’autel de la laïcité et remplacée par un autre MRP, Pierre Schneiter.
Redevenue députée, Germaine Poinso-Chapuis déploie à nouveau une intense activité parlementaire, tant par le nombre impressionnant des textes déposés (28, entre janvier 1949 et juin 1951) que par la fréquence de ses interventions en séance, dans le cadre notamment des discussions budgétaires. De surcroît, sa fonction de vice-présidente de l’Assemblée nationale (en 1949 et 1950) la conduit à présider 68 séances.
Ses votes sont conformes à la discipline du groupe MRP, généralement favorable aux gouvernements successifs.
En vue des élections du 17 juin 1951, le MRP conclut un large apparentement de type « Troisième force » allant des socialistes à la droite. Au terme d’une campagne très anticommuniste et plus discrètement antigaulliste, les sièges sont répartis à la proportionnelle, les listes apparentées n’ayant pas obtenu la majorité absolue. La liste MRP qu’elle conduit à nouveau pâtit de la poussée du RPF et, avec 23 641 voix – soit 8,1 % des 295 674 suffrages exprimés -, n’obtient qu’un élu alors que le RPF en compte deux, le PCF et la SFIO conservant respectivement quatre et deux élus.
Dans la nouvelle Assemblée, pour la durée de la législature, Germaine Poinso-Chapuis siège à nouveau à la commission des affaires économiques, dont elle est secrétaire de 1953 à 1955, et à la commission de la famille, de la population et de la santé publique. Son activité parlementaire demeure des plus soutenues. Durant la législature, elle ne dépose pas moins de soixante-douze textes dont dix-neuf rapports, cinq rapports supplémentaires, trente-sept propositions de loi et sept propositions de résolution, trois avis et un avis complémentaire. Ces textes ont un caractère essentiellement juridique (droit des personnes), économique (réglementation des ententes) et social (allocations familiales, répression de l’ivresse publique, protection maternelle et infantile, handicapés physiques). Certaines initiatives poursuivent une action politique déjà entamée, comme la lutte contre l’alcoolisme (limitation des débits de boissons : proposition de loi du 7 septembre 1951 et rapports du 5 février 1953, du 22 octobre 1953 et du 24 août 1954, proposition de résolution du 10 août 1954), la volonté de donner une formation professionnelle à tous les enfants (proposition de loi du 20 juillet 1951), la réforme de la filiation (proposition de loi du 27 juillet 1951) et l’organisation de l’adoption (proposition de loi du 18 mai 1953).
Outre une participation annuelle à la discussion budgétaire, ses trente interventions portent sur ces mêmes domaines. Elle intervient longuement dans la discussion d’une proposition de loi instituant l’échelle mobile des salaires, au mois de septembre 1951. Comme rapporteur, elle s’investit dans la discussion du projet de loi relatif au contrôle des ententes professionnelles (juin-juillet 1952) et sur la limitation des débits de boissons au titre de la protection de la santé publique (octobre 1955). Elle prend part le 17 juin 1954 au débat d’investiture de Pierre Mendès France où elle exprime les réticences et les inquiétudes du MRP qui se sont traduites par une abstention volontaire du groupe. Elle soutient de ses votes le gouvernement Edgar Faure mais, le 29 novembre 1955 s’abstient volontairement alors que l’ensemble du groupe MRP vote la confiance.
L’Assemblée ayant été dissoute, Germaine Poinso-Chapuis se représente le 2 janvier 1956. Mais la double percée de la gauche au profit de la SFIO qui gagne un élu et du poujadisme la prive de son siège. Cet échec électoral met fin à sa carrière parlementaire, sans suspendre, pour autant, ses multiples activités dans des associations juridiques et sociales, françaises ou internationales. De 1973 à 1980, elle préside le Centre technique national de l’enfance inadaptée. Elle est membre du Conseil économique et social, de 1977 à 1981. Son engagement au service de l’enfance handicapée s’est poursuivi jusqu’aux derniers temps de sa vie. Elle était officier de la Légion d’honneur, commandeur de la Santé publique et titulaire de nombreuses autres décorations dont la croix du combattant volontaire, la reconnaissance polonaise et la médaille de l’éducation surveillée.
Germaine Poinso-Chapuis disparaît le 20 février 1981 à Marseille, à la veille de ses quatre-vingt ans.