Jean Roussel
1923 - 2015
ROUSSEL (Jean)
Né le 4 avril 1923 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Décédé le 5 septembre 2015 à Marseille (Bouches-du-Rhône)
Député des Bouches-du-Rhône de 1986 à 1988
Jean Marie Raymond Roussel est né le 4 avril 1923, dans une famille aisée de notables, à Marseille. Son père, Hubert Roussel, et son grand-père, Raymond Teisseire, y sont avoués. Dans ses jeunes années, Jean Roussel défend des convictions royalistes. Il est notamment membre de l’Action française. Réfractaire au Service du travail obligatoire (STO), Jean Roussel est arrêté par la Gestapo en 1944, mais réussit à s’échapper avant son transfert prévu en Allemagne. Il devient engagé volontaire.
A la Libération, Jean Roussel est inscrit au barreau comme avocat, puis reprend la charge d’avoué de son père. Il rejoindra à nouveau le barreau en 1971, lors de la fusion des professions d’avoué et d’avocat. Il poursuit également son engagement nationaliste en militant pour l’Algérie française. Il est à ce titre membre de l’Organisation de l’armée secrète (OAS), la principale organisation clandestine refusant l’indépendance de l’Algérie, qui n’hésite pas à user de méthodes violentes, impliquant le terrorisme. Jean Roussel est d’ailleurs arrêté en 1961 lors d’une visite du général de Gaulle à Marseille et inculpé pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Par ailleurs, il se marie avec Marie-Claude Abeille avec qui il aura trois enfants.
En vue de l’élection présidentielle de 1965, Jean Roussel s’engage dans les Comités Tixier-Vignancour, mouvement fondé pour soutenir la candidature de l’ancien député, rallié au régime de Vichy puis défenseur de l’Algérie française, l’avocat Jean-Louis Tixier-Vignancour. La campagne de ce dernier, dirigée par Jean-Marie Le Pen, est principalement axée sur la critique du général de Gaulle, accusé d’avoir « abandonné » l’Algérie française. Mais Jean-Louis Tixier-Vignancour n’obtient que 5,20 % des voix. Il appelle alors à voter pour le candidat de la gauche rassemblée autour du représentant de la Convention des institutions républicaines (CIR) François Mitterrand, contre le général de Gaulle, consigne de vote qui déplaît à nombre de ses partisans, farouchement anti-communistes. Jean Roussel est de ceux-là. Il adhère alors au Centre démocrate, parti de centre-droit, chrétien-démocrate, fondé par Jean Lecanuet à la suite de sa campagne présidentielle de 1965 où, avec 15,57 % des voix, il est une révélation politique. Jean Roussel est candidat lors des élections législatives de juin 1968 dans la 1ère circonscription des Bouches-du-Rhône mais, avec 9,49 % des voix, il est éliminé dès le premier tour. Son suppléant est Ronald Perdomo.
Jean Roussel milite lors de l’élection présidentielle de 1974 pour Valéry Giscard d’Estaing, candidat de la droite non-gaulliste et du centre-droit, élu au second tour face à François Mitterrand. En mai 1977, lorsqu’est fondé le Parti républicain pour soutenir l’action de Valéry Giscard d’Estaing, Jean Roussel en devient le secrétaire départemental dans les Bouches-du-Rhône. En dépit de sa fidélité envers le président de la République, il se montre très critique sur la politique sociétale de ce dernier, visant tout particulièrement la loi Veil sur l’avortement et la loi de 1975 sur la réforme du divorce créant le divorce par consentement mutuel. Il se présente sous l’étiquette Union pour la démocratie française (UDF) lors des élections législatives de 1978. A nouveau candidat dans la 1ère circonscription des Bouches-du-Rhône, il arrive second derrière le député gaulliste sortant Joseph Comiti (26,84 % des suffrages exprimés contre 25,30%). Mais le candidat socialiste Bastien Leccia les talonne avec 22,25 % des voix, ouvrant la possibilité d’un second tour avec une triangulaire. Pour éviter la victoire du candidat socialiste, qui dispose d’un bon réservoir de voix avec les 16,43 % du candidat communiste éliminé au premier tour, Jean Roussel décide de se retirer du second tour, permettant à Joseph Comiti d’être réélu avec 58,03 % des suffrages.
Après l’élection présidentielle de 1981 et la victoire de François Mitterrand, Jean Roussel est de nouveau le candidat de l’UDF dans la 1ère circonscription des Bouches-du-Rhône. Avec 23,47 % des voix, il arrive en troisième position au soir du premier tour, derrière le candidat gaulliste Hyacinthe Santoni (28,49%) et le candidat socialiste Michel Pezet (33,81%). Comme trois ans plus tôt, Jean Roussel se retire pour faire barrage à la gauche, permettant la victoire de Hyacinthe Santoni par 52,37 % des voix. A l’échelle nationale, la gauche obtient la majorité des sièges.
Lors des élections municipales de 1983, Jean Roussel est candidat sur les listes du chef de file de la droite rassemblée, Jean-Claude Gaudin. Il figure précisément sur la liste du 1er secteur conduite par Hyacinthe Santoni. Le secteur est remporté par la liste de la gauche conduite par le député Marius Masse et la ville par le maire sortant Gaston Defferre, mais Jean Roussel est néanmoins élu au conseil municipal.
Jean Roussel commence à prendre quelques distances avec son parti. Lors des élections cantonales de mars 1985, il se présente dans le canton de Marseille-Notre-Dame-du-Mont contre le conseiller général sortant, et député, Hyacinthe Santoni. Jean Roussel reçoit alors le soutien à la fois du Centre des démocrates sociaux (CDS), un parti membre de l’UDF, mais aussi… du Front national (FN), parti d’extrême-droite mené par Jean-Marie Le Pen. D’abord groupuscule marginal, le FN connaît depuis quelques mois une certaine progression, particulièrement visible dans certaines zones, notamment le sud-est. Jean Roussel peut également compter sur le soutien d’un ami, l’influent avocat Ronald Perdomo, patron local du FN. Selon lui, il a convaincu Jean Roussel d’adhérer au FN dès le mois de janvier 1985 mais ce ralliement aurait été tenu secret. Ce n’est que le soir de la victoire de Jean Roussel aux élections cantonales, le 17 mars 1985, que l’annonce est faite. Triomphant de Hyacinthe Santoni dans son propre fief, Jean Roussel devient alors le tout premier conseiller général du Front national, et plus encore, le premier élu de ce parti au scrutin uninominal à deux tours.
Un an plus tard, aux élections législatives de mars 1986 au scrutin proportionnel dans le cadre départemental, Jean Roussel est troisième sur la liste FN des Bouches-du-Rhône conduite par l’ancien résistant et ancien député de Corse, Pascal Arrighi. Son nom et son visage n’apparaissent pas sur la profession de foi, qui se compose d’un texte de la main de Jean-Marie Le Pen et du programme national du FN. Avec 22,53 % des voix, la liste FN se hisse en seconde position, devant la liste UDF de Jean-Claude Gaudin (21,64%) et derrière la liste socialiste conduite par Gaston Defferre (25,85%). Le FN obtient quatre élus dans le département. Jean Roussel fait son entrée à l’Assemblée nationale en compagnie de son ami Ronald Perdomo, qui était deuxième sur la liste FN des Bouches-du-Rhône. Membre du groupe Front national, il siège à la commission de la production et des échanges.
Jean Roussel dépose en juin 1987 une proposition de loi tendant à l’amélioration de l’indemnisation des rapatriés d’Algérie.
Il pose en juin 1986 une question au gouvernement, s’inquiétant de l’avenir de la marine marchande française dans un contexte de surcapacités mondiales et de recours accru aux pavillons de complaisance.
L’avocat intervient sur plusieurs projets de loi à caractère juridique : le projet de loi « Méhaignerie » tendant à favoriser l’investissement locatif en juillet 1986 ; le projet de loi relatif à la famille en novembre 1986 ; le projet de loi relatif à l’autorité parentale en mai 1987.
Aux élections législatives de 1988, au scrutin uninominal à deux tours, Jean Roussel est candidat pour le FN dans la nouvelle 3e circonscription des Bouches-du-Rhône, englobant le centre-nord de la ville de Marseille. Il arrive en seconde position au premier tour avec 29,37 % des voix, derrière le candidat socialiste et député sortant du département Philippe Sanmarco (32,73%) mais devant le candidat UDF Jean Roatta (24,45%). Ce dernier, qui peut pourtant se maintenir, décide de se retirer. La question de l’attitude à adopter face au FN divise alors la droite. Si certains prônent un désistement en faveur du candidat de gauche pour faire perdre le FN, plusieurs cadres de l’UDF, dont Jean-Claude Gaudin, négocient des accords de désistements locaux avec le parti d’extrême-droite. Cependant, Philippe Sanmarco est élu au second tour, sur le fil, avec 18 501 voix contre 18 184 pour Jean Roussel. Lors des élections municipales de mars 1989, Jean Roussel est tête de liste pour le FN dans le 1er secteur de Marseille. La tête de liste municipale est l’ancien député Gabriel Domenech. La liste de Jean Roussel termine en troisième position au premier tour, avec 14,99 % des voix. Au second tour, elle en obtient 15,70 %, ce qui permet à Jean Roussel de retrouver le conseil municipal de la cité phocéenne.
En décembre 1989, à la suite du départ de Jean-Claude Gaudin de l’Assemblée nationale pour rejoindre le Sénat, une élection législative partielle est organisée dans la 2e circonscription des Bouches-du-Rhône, qui englobe les 7e et 8e arrondissements de Marseille. L’épouse de Jean Roussel, Marie-Claude, candidate investie par le FN, est battue de peu au second tour par le candidat de l’UDF, Jean-François Mattei.
Malmené par le président du conseil général Lucien Weygand, Jean Roussel démissionne de son mandat de conseiller général en 1991 pour provoquer une élection partielle et faire un coup d’éclat. Mais c’est un semi-échec : il ne bat que de 24 voix Renaud Muselier, jeune figure montante au niveau local du Rassemblement pour la République (RPR). L’année suivante, lors des élections cantonales de mars 1992, Jean Roussel est sévèrement battu par Renaud Muselier (66,94 % des suffrages exprimés contre 33,06%).
Jean Roussel est à nouveau candidat pour le FN aux élections législatives de 1993. Avec 24,56 % des suffrages exprimés, il devance le député sortant Philippe Sanmarco, éliminé au premier tour avec 16,59 % des voix, mais est distancé de près de dix points par Jean Roatta (34,35%). Ce dernier s’impose au second tour avec 66,68 % des voix.
Jean-Marie Le Pen améliore encore son score aux élections présidentielles de 1995, avec 15 % à l’échelle nationale. Il arrive en tête dans sept départements, incluant les Bouches-du-Rhône (21,43%). A Marseille, le patron du FN termine également en tête, avec 22,32 % des voix. Lors des élections municipales de juin 1995, Jean Roussel n’est pas candidat. En revanche, son épouse Marie-Claude est tête de liste dans le 2° secteur. Sa liste termine seconde au premier tour (25,35%), puis troisième au second tour (21,87%), ce qui lui assure tout de même une entrée au conseil municipal. Avec une moyenne de 19,02 %, les listes FN, conduites par Ronald Perdomo, obtiennent neuf élus au conseil municipal de Marseille.
Jean Roussel se retire progressivement de la vie politique et s’éloigne peu à peu du FN, qui est agité par des turbulences internes. Les tensions deviennent fortes entre le président du FN Jean-Marie Le Pen et son numéro deux, Bruno Mégret. Le 13 décembre 1998, les proches de Bruno Mégret convoquent un congrès national extraordinaire pour prendre le contrôle du parti. Mais, la Justice, saisie par Jean-Marie Le Pen, rend caduques ses résultats. Bruno Mégret rompt alors avec le FN, suivi par une majorité de cadres du parti et d’élus. Un congrès extraordinaire dissident est organisé les 23 et 24 janvier 1999 à Marignane, dont le maire Daniel Simonpieri, par ailleurs conseiller général du canton de Marignane, est un soutien de Bruno Mégret. Ce dernier y fonde le Front national-Mouvement national (FN-MN). Jean Roussel et sa femme rejoignent alors le nouveau parti. Mais la dynamique est éphémère. Candidat à l’élection présidentielle de 2002, Bruno Mégret n’obtient que 2,34 % des voix, tandis que Jean-Marie Le Pen en obtient 16,86 et se qualifie pour le second tour.
Retiré, dès lors, de la vie publique, Jean Roussel décède le 5 septembre 2015, à l’âge de 92 ans, dans le sixième arrondissement de Marseille.