Charles Scheer
1871 - 1936
Né le 24 avril 1871 à Strasbourg (District de Basse Alsace - Empire allemand), mort le 5 février 1936 à Strasbourg (Bas-Rhin).
Député du Haut-Rhin de 1919 à 1928.
Plus que de politique proprement dite, Charles Scheer se préoccupa du sort de sa province natale : né en 1871 dans une Alsace annexée par l'Allemagne, il fut de ceux qui, à partir de 1919, cherchèrent à redonner à cette province sa place dans la France victorieuse.
Après avoir fait ses études secondaires au gymnase protestant de Strasbourg jusqu'en 1889, Charles Scheer se consacre pendant cinq ans à la théologie, d'abord dans sa ville natale puis à Berlin et enfin à Paris. Il était pasteur à Mulhouse depuis 1898 lorsque survint la Première Guerre mondiale au cours de laquelle les Allemands l'expulsèrent.
En 1919, il se présenta aux élections législatives dans le Haut-Rhin, sur une liste d'union nationale : il obtint 60.161 voix sur 98.322 votants. Aux élections de 1924, succès comparable : 59.370 voix sur 113.830 votants lui assurèrent d'emblée la majorité absolue.
Pendant les huit ans que dura sa vie parlementaire, Charles Scheer s'intéressa certes aux problèmes posés par l'enseignement mais c'est en tant que membre de la commission d'Alsace-Lorraine qu'il joua un rôle important.
En séance publique, il prit rarement la parole mais, le 12 décembre 1921, il prononça un discours passionné : au cours de la discussion budgétaire, certains députés s'étaient déclarés partisans de réduire les crédits consacrés aux services d'Alsace-Lorraine et ils avaient proposé une réforme administrative visant à une assimilation complète des deux régions de l'Est au reste du pays. C'est alors qu'intervint Charles Scheer pour souligner le malaise que ne manquerait pas d'entraîner une telle politique. Il fit ressortir que la population d'Alsace-Lorraine bénéficiait, dans certains domaines, de lois allemandes plus avantageuses que celles auxquelles étaient soumis les autres Français : en matière d'assurances sociales, notamment, Bis-Marck avait accordé aux ouvriers des garanties appréciables qu'il convenait de préserver.
Quant au commissariat général dont certains proposaient la suppression, il fallait, au contraire, le conserver. Aux yeux de l'orateur, il constituait l'instrument qui permettait de mener une politique d'assimilation progressive. En effet, loin de préconiser un quelconque séparatisme, Charles Scheer voulait seulement que l'on évitât de bousculer trop brutalement la mentalité de citoyens qui, bien que Français de cœur, n'étaient pas prêts à abandonner les avantages matériels apportés par l'annexion allemande.
Tout en s'opposant à une assimilation juridique qui n'aurait pas correspondu à la situation réelle des provinces de l'Est, le député du Haut-Rhin ne cessa de déplorer la méfiance dont les gouvernants français paraissaient faire preuve à leur égard depuis la fin de la guerre : pourquoi aucun Alsacien ne participait-il à l'action gouvernementale ? Il s'agissait là d'une maladresse de nature à renforcer d'éventuelles tendances particularistes ou pro-allemandes 1 « Faites confiance à l'Alsace ! Ce dont elle a besoin, c'est d'une politique de patience, car l'Alsace est française ! » Charles Scheer exprimait ainsi une de ses convictions les plus profondes : celle qui, sans doute, l'avait décidé à jouer un rôle politique.
Une telle ardeur n'empêcha pas Charles Scheer de subir un échec aux élections de 1928 : au premier tour du scrutin uninominal, il n'obtint que 5.063 voix sur 23.995 votants, contre 7.140 au candidat socialiste Grunbach qui triompha sans peine au second tour.
Ainsi prit fin l'activité parlementaire de Charles Scheer qui mourut huit ans plus tard dans sa ville natale.