Pierre Pranchère
1927 - 2023
PRANCHÈRE (Pierre, Benjamin)
Né le 1er juillet 1927 à Brive (Corrèze)
Député de la Corrèze de 1956 à 1958
Pierre Pranchère est fils d’un cheminot qui participa activement à la grande grève de 1920. A l’âge précoce de 16 ans, il prend part à la Résistance dans sa région d’origine. Il adhère au parti communiste. Au lendemain de la Libération, il occupe d’importantes fonctions au sein de diverses organisations de jeunesse. En 1946-1947, il est secrétaire fédéral à l’organisation de l’Union de la jeunesse républicaine de France (UJRF). En 1947, il est élu secrétaire départemental des jeunes de la Confédération générale de l’agriculture (CGA). En 1953, il accède au poste de secrétaire de la fédération communiste de Corrèze. Après avoir tenté sa chance dans divers scrutins locaux, il se présente aux législatives du 2 janvier 1956, second de la liste communiste dirigée par le député sortant Jean Marie Goudoux. Cette liste affronte sept adversaires : trois listes de centre gauche apparentées dans le cadre du Front républicain, des listes CNIP et MRP, enfin une liste poujadiste apparentée à une liste dite d’action civique de défense des consommateurs et des intérêts familiaux. Dans leurs professions de foi, les candidats communistes regrettent que la SFIO ait refusé leurs propositions, c’est-à-dire soit un apparentement, soit une liste commune. Ils dénoncent les « honteux maquignonnages » qui amènent les socialistes à faire cause commune avec les « cléricaux » de la liste dirigée par « le RPF Bounaix ». L’apparentement poujadiste ne recueille que 12 203 suffrages tandis que l’alliance de Front républicain obtient 63 862 voix pour 135 319 suffrages exprimés. La majorité absolue n’étant pas atteinte, malgré le retrait in extremis de la liste MRP, les quatre sièges du département sont répartis à la proportionnelle. Arrivée largement en tête du scrutin, avec 36,7 % des suffrages exprimés, mais en recul par rapport à 1951, la liste communiste a deux élus. Les deux autres députés sont le radical Queuille et le socialiste Montalat.
Pierre Pranchère est nommé membre de la commission de la défense nationale et y siège durant les deux années de la législature écourtée. Au nom de cette dernière commission, il cosigne trois rapports. Dans chacun d’entre eux, il défend les conditions des personnels ouvriers des arsenaux, des agriculteurs rappelés sous les drapeaux et des anciens combattants. De plus, le député communiste de la Corrèze dépose une proposition de résolution et trois propositions de loi. Là encore, ces textes se rapportent aux personnels des établissements militaires de l’Etat, à l’aide à apporter aux agriculteurs et à la condition des soldats combattants. A cet égard, sa proposition de loi du 23 mai 1956 vise à accorder une permission de quinze jours aux soldats du contingent après trois mois de séjour en Afrique du Nord. En séance, celui qui est nommé secrétaire d’âge de l’Assemblée nationale par trois fois (janvier et octobre 1956 ; octobre 1957) intervient à onze reprises, essentiellement sur les questions militaires et agricoles. Son intérêt est porté aussi bien sur les allocations de chômage des ouvriers auxiliaires des ponts et chaussées (20 avril 1956) que, plus fréquemment, sur les crédits militaires. Dans les débats budgétaires, il se singularise par ses prises de positions sur le régime des permissions (26 janvier 1956) et de démobilisation. Ainsi, le 6 décembre 1956, il défend à la tribune, l’attribution d’une prime de démobilisation aux militaires rappelés ou maintenus sous les drapeaux. Il n’oublie pas la mémoire de la guerre dans son département ; le 23 mai 1958, il défend l’extradition du général Lammerding, « responsable des crimes commis à Tulle et à Oradour-sur-Glane ». Par les textes sur lesquels il s’exprime, il se fait le défenseur attitré des ouvriers de la manufacture d’armes de Tulle.
Durant toute la législature, il vote à l’unisson de son parti.
Aux législatives de novembre 1958, Pierre Pranchère se présente comme candidat communiste dans la première circonscription de la Corrèze (Tulle). Il est confronté à trois concurrents. Au premier tour, il obtient 15 549 voix pour 44 422 suffrages exprimés. Au second tour, il est battu par le socialiste Montalat : il recueille 18 087 voix contre 24 247 à ce dernier. Il ne retrouve son siège à l’Assemblée nationale qu’en 1973.
PRANCHÈRE (Pierre)
Né le 1er juillet 1927 à Brive-la-Gaillarde (Corrèze)
Décédé le 30 décembre 2023 à Tulle (Corrèze)
Député de Corrèze de 1956 à 1958 et de 1973 à 1978
[Voir notice de la IVe République].
En novembre 1958, Pierre Pranchère est candidat pour le Parti communiste aux élections législatives dans la 1ère circonscription de la Corrèze (Tulle). Solidement implanté, il arrive en tête au premier tour, mais il est battu au second tour du scrutin par le candidat de la SFIO, Jean Montalat qui l’emporte avec 24 247 voix, soit 55,13% des suffrages exprimés. Il est battu comme de très nombreux députés communistes sortants en raison de l’opposition de son parti au général de Gaulle, mais également de la modification du mode de scrutin, désormais uninominal majoritaire à deux tours.
Aux élections suivantes, Pierre Pranchère subit les mêmes revers. En 1962, avec 16 732 voix, il est à nouveau vaincu par Jean Montalat, qui l’emporte contre lui dans le duel du second tour avec 23 032 voix, soit 57,92% des suffrages exprimés. Devenu membre du Comité central du Parti en 1964, il est toujours le candidat du PCF aux législatives en 1967 dans la première circonscription de la Corrèze, mais il se retire du second tour pour éviter une triangulaire : il avait obtenu 15 928 voix contre 17 286 à Jean Montalat et 11 150 voix au candidat gaulliste Jean Brugeaud. Jean Montalat est ainsi réélu au second tour avec 30 722 voix, soit 72,29% des suffrages exprimés. Lors des élections de juin 1968, un scénario identique conduit Pierre Pranchère, qui a obtenu 14 584 voix au premier tour, à se retirer une nouvelle fois du second tour au terme duquel Jean Montalat est réélu avec 24 186 voix, soit 64,67% des suffrages exprimés, loin devant Jean Lachaud (13 213 voix), candidat gaulliste de l’Union pour la défense de la République (UDR).
Néanmoins, Pierre Pranchère est candidat pour le PCF aux élections législatives de 1973, mais dans une configuration différente après la signature du Programme commun de la gauche en 1972. De surcroît, le député sortant, Jean Vinatier, qui a remplacé au Palais-Bourbon Jean Montalat décédé en cours de mandat, se représente comme « candidat socialiste soutenu par le Mouvement réformateur » mais sans l’investiture du PS.
Rappelant sa profession de « cultivateur », Pierre Pranchère domine donc le premier tour en recueillant 32% des suffrages exprimés (14 409 voix) contre 10 249 voix pour Jean-Louis Langlais de l’Union des républicains de progrès-Centre, démocratie et progrès (URP-CDP), 9 905 voix pour le maire radical de Tulle Georges Mouly et 3 636 voix pour Jean Vinatier. Pierre Pranchère l’emporte cette fois au second tour du scrutin, dans le cadre d’une triangulaire avec 20 335 voix soit 43,63% des suffrages exprimés, face à Jean-Louis Langlais (14 835) et Georges Mouly (11 436). Son suppléant est alors Louis Chastang, un militant communiste retraité de la SNCF et domicilié à Uzerche en Corrèze.
En septembre de la même année, Pierre Pranchère confirme son implantation territoriale. Il est élu conseiller général du canton de La Roche-Canillac, mandat qu’il conserve jusqu’en 1985.
Au Palais-Bourbon, Pierre Pranchère est membre du groupe communiste. Dans un premier temps, il siège à la commission de la Défense nationale et des forces armées, avant de rejoindre en juillet 1974 la commission des Finances, de l’économie générale et du Plan. Il est également en mai 1973 membre de la commission spéciale chargée d'examiner en deuxième lecture le projet de loi relatif au statut du fermage et du métayage.
Il est rapporteur spécial des crédits budgétaires de l’agriculture pour les projets de loi de finances et plus spécifiquement sur les dépenses en capital pour les projets de loi de finances pour 1975 et pour 1977, sur le Fonds d’orientation et de régularisation des marchés agricoles (FORMA) dans le cadre du projet de loi de finances pour 1976 et sur le FORMA et l’Office national interprofessionnel du bétail et des viandes (ONIBEV) lors de l’examen du projet de loi de finances pour 1978.
Au cours de la législature, le député de la Corrèze présente plusieurs propositions de loi touchant l’agriculture alors qu’ont lieu, en avril 1973, à Luxembourg d’importantes négociations sur les prix agricoles européens et que s’ouvre en septembre le Nixon Round : en mai 1973, quelques jours seulement après son élection, Pierre Pranchère propose la création d’un type nouveau de prêts spéciaux du crédit agricole à 2% destiné à l’installation des jeunes agriculteurs et au développement des exploitations familiales ; en juin 1973, pour prolonger le versement des allocations familiales pour les jeunes jusqu’au terme de leur apprentissage ; en novembre 1973, pour faire bénéficier les jeunes agriculteurs et les artisans ruraux de permissions à l’occasion des travaux agricoles.
Attentif à la situation sociale qui se dégrade rapidement à la suite du choc pétrolier de l’automne 1973, Pierre Pranchère pose en novembre 1975 une question au gouvernement sur la situation de l’entreprise Proutrex à Argentat, et demande pour les salariés la garantie de l’emploi. La dimension politique de la question d’un élu d’opposition du même département que le Premier ministre, Jacques Chirac, n’échappe pas aux observateurs.
Spécialiste de l’agriculture et issu d’un département où le communisme rural est très fort, Pierre Pranchère défend en séance publique les positions de son groupe en faveur notamment de l’installation des jeunes agriculteurs et de la défense des exploitations familiales. Il prend ainsi la parole en mai 1973, à l’occasion de la déclaration du ministre de l’Agriculture sur les décisions intervenues au niveau communautaire, ainsi qu’en octobre 1976 à l’occasion du débat qui suit la déclaration de politique générale du gouvernement, quelques semaines après le remplacement de Jacques Chirac par Raymond Barre. Entretemps, il est intervenu sur ces mêmes thématiques lors de l’examen en juin 1975 du projet de loi portant orientation préliminaire du VIIe plan.
Le député de la Corrèze défend, en décembre 1976, les intérêts de son territoire lors de l’examen de la proposition de loi relative à la mise en valeur pastorale dans les régions d'économie montagnarde. Il prend aussi la parole pour donner les positions de son groupe sur les questions fiscales, tant à l’occasion des projets de loi de finances que des projets de loi de finances rectificative, que lors de l’examen en juin 1976 du projet de loi sur l’imposition des plus-values, qui suscite certaines réserves de la part de son groupe pour la petite épargne.
Pierre Pranchère intervient également sur les questions de politique étrangère et de défense. En juin 1975, à l’occasion de la déclaration du gouvernement sur ce domaine, l’ancien résistant se fait le porte-parole de l’émotion ressentie unanimement après l’annonce de la fin de la célébration chaque année de la victoire du 8 mai 1945 par le président de la République. En mai 1976, à l’occasion de l’examen de la loi de programmation militaire pour les années 1977-1982, il critique la stratégie de défense de l’Exécutif, qu’il estime, comme son groupe, éloignée des besoins de la défense nationale et mise au service d’exigences stratégiques étrangères. Il déplore dans un clin d’œil aux gaullistes la fin de la stratégie de défense tous azimuts.
Lors des élections législatives de 1978, Pierre Pranchère est battu par le candidat du Rassemblement pour la République (RPR) Jean-Pierre Bechter, qui l’emporte de justesse au second tour avec 26 073 voix, soit 50,42% des suffrages exprimés, grâce au soutien de Jacques Chirac dans un contexte pourtant difficile pour la majorité sortante.
En juin de l’année suivante, Pierre Pranchère est élu député européen sur la liste présentée par le PCF, qui obtient 19 sièges au Parlement avec 4 153 710 voix, soit 20,52% des suffrages exprimés. Il siège à la commission de l’Agriculture. Il est réélu pour ce mandat, lors des élections de 1984, étant placé en 7e position sur la liste communiste. À nouveau candidat en 1989, mais cette fois-ci 14e sur la liste du PCF, il n’est pas réélu.
Aux élections législatives de juin 2002, critique vis-à-vis des nouvelles orientations du Parti communiste impulsées par Robert Hue devenu président du Parti en 2001, Pierre Pranchère est suppléant de Jean-Paul Chailloux qui se présente avec l’étiquette de la Fédération nationale des associations pour la renaissance communiste (FNARC) qu’il a contribué à fonder. Ils sont éliminés dès le premier tour avec 537 voix, soit 1,08% des suffrages exprimés. En 2004, Pierre Pranchère prend part à la création du Pôle de renaissance communiste en France, dont il est membre de la présidence nationale. Il est à nouveau suppléant d’un candidat aux élections législatives en 2007, Alexis Lacroix, dans la deuxième circonscription de la Corrèze. Ils sont éliminés au premier tour après avoir obtenu 162 voix.
Au cours de sa vie, l’ardent patriote n’a cessé de se consacrer à la mémoire de la Résistance notamment en tant que secrétaire général du collectif Maquis de Corrèze. Il est décoré de la Croix de guerre 1939-1945, qui distingue les personnes citées pour fait de guerre au cours de la Seconde guerre mondiale, et de la Croix du combattant volontaire qui récompense les personnes ayant spontanément servi dans une unité combattante à partir de la guerre 1939-1945.
Pierre Pranchère est décédé à l’âge de 96 ans, le 30 décembre 2023, à Tulle dans sa région d’origine. Il était père de six enfants et marié à Marcelle Sage-Pranchère. À son décès de nombreux hommages lui sont adressés, son rôle dans la Résistance continuant à être unanimement salué.