Jean Pronteau

1919 - 1984

Informations générales
  • Né le 31 août 1919 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 13 juin 1984 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Charente
Groupe
Communiste
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Charente
Groupe
Communiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Charente
Groupe
Communiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Charente
Groupe
Communiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Charente
Groupe
Communiste

Biographies

Biographie de la IVe République

PRONTEAU (Jean, Sylvain, Albert)
Né le 31 août 1919 à Paris (14ème)
Décédé le 13 juin 1984 à Paris

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Charente)
Député de la Charente de 1946 à 1958

Issu d’une famille d’ouvriers, de salariés et de petits artisans parisiens, Jean Pronteau entreprend d’ambitieuses études grâce à l’obtention d’une bourse d’Etat. Après avoir obtenu son baccalauréat, il entre en hypokhâgne puis en khâgne au lycée Henri IV, avant de s’inscrire en sociologie et en urbanisme à la Sorbonne où il obtient son doctorat en philosophie qu’il enseigne quelque temps au lendemain de la seconde guerre mondiale comme assistant à l’Ecole des Hautes études, avant de s’installer comme ingénieur urbaniste, directeur d’éditions puis président-directeur-général de la Caisse nationale de l’énergie. Entre-temps, il appartient à la Résistance. Après avoir effectué son service militaire à l’Ecole de l’air de Versailles, s’être engagé volontairement en septembre 1939 et avoir combattu durant la campagne de France comme capitaine de réserve, Jean Pronteau entre en résistance dans les Charentes où il se trouva replié au lendemain de la défaite de mai-juin 1940. Il devient alors le colonel « Cévennes » dans les rangs des Forces françaises de Forces françaises de l’Intérieur – Francs tireurs et partisans français (FFI-FTPF), œuvre au sein du mouvement Combat, des Mouvements unifiés de la Résistance (MUR), dirige les maquis de l’Ouest. Il est promu, en 1944, chef national de l’Organisation civile et militaire des jeunes (OCMJ), puis responsable militaire national des Forces unies de la jeunesse patriotique (FUJP). Il est vrai qu’il avait adhéré au Parti communiste clandestin en 1942. Promu lieutenant-colonel honoraire à la Libération, élevé à la dignité d’officier de la Légion d’honneur à titre militaire et récipiendaire de la croix de Guerre avec palmes, Jean Pronteau a par ailleurs été désigné, le 8 novembre 1944, comme membre de l’Assemblée consultative provisoire au sein de laquelle il a appartenu aux commissions de la défense nationale, du travail et des affaires sociales, de la justice et de l’épuration et, enfin, de coordination des affaires musulmanes. Durant les travaux de cette Assemblée, il se révèle un parlementaire relativement actif. Il dépose, le 31 juillet 1945, encore âgé de vingt-cinq ans, un rapport au nom de la justice et de l’épuration, tendant à frapper de sanctions ceux qui ont remis aux organismes de déportation en Allemagne les noms et adresses des artisans. Il intervient en séance une demi-douzaine de fois pour prôner l’intégration des forces françaises de l’intérieur (FFI) dans l’armée des cadres, la plus généreuse rémunération de la presse résistante ou l’ampleur à conférer à l’épuration.
Candidat à la tête de la liste communiste, à l’élection de la première Assemblée nationale constituante en octobre 1945, Jean Pronteau, avec 36 517 des 153 282 suffrages exprimés, soit plus de 23,8% des voix, remporte, dans les Charentes, l’un des quatre sièges à pourvoir, les trois autres au Mouvement républicain populaire (MRP), à la SFIO et au candidat « d’union de la résistance ». Naturellement désigné comme secrétaire d’âge après la validation de son élection, il intègre la commission de la Constitution. Il dépose un rapport au nom de la commission précitée sur la composition et la compétence du conseil économique. Il intervient à cinq reprises en séance publique, en défendant trois amendements et en déposant une demande d’interpellation. Il remplit les fonctions de rapporteur en prenant part à la discussion des conclusions du rapport sur la composition et la compétence du Conseil économique. Il prend la parole à plusieurs reprises sur le budget de l’Éducation nationale ou bien encore sur les crédits accordés à l’aéronautique navale, singulièrement dans sa région charentaise. Favorable à l’ensemble des projets de loi de nationalisation, il donne sa voix aux partisans du premier projet constitutionnel d’avril 1946.
Le rejet de ce dernier texte conduit à la désignation d’une seconde Assemblée constituante dont l’élection intervient en juin de la même année. Confirmé en première position de la liste « d’union républicaine et résistante », il obtient 45 573 des 156 879 voix exprimées, soit un peu plus que 29% des suffrages, tandis que sa liste gagne deux des quatre sièges en jeu, socialistes et démocrates-chrétiens se répartissant les deux autres à pourvoir. Une fois son élection validée le 13 juin 1946, il retrouve la commission de la Constitution. Il est proclamé secrétaire de l’Assemblée nationale constituante. De nouveau, il dépose un rapport sur une proposition de loi relative à la composition et au fonctionnement du Conseil économique au sujet duquel il répond aux amendements d’un certain nombre de députés de droite.
L’adoption du second projet de Constitution, pour lequel il avait voté, permet l’élection de la première Assemblée nationale de la Quatrième République. Toujours placé en tête de la liste communiste, Jean Pronteau recueille 50 545 des 150 074 suffrages exprimes, soit près de 33,7% des voix, et ne conserve qu’un seul des deux élus précédemment gagnés, l’autre étant récupéré par le Rassemblement des gauches républicaines (RGR), la SFIO et le Mouvement républicain populaire (MRP) conservant chacun le sien. Une fois son élection validée, le 29 novembre 1946, il rejoint les commissions des affaires économiques (1946-1947), des affaires étrangères (1946-1950), des Finances (1948-1949), de la France d’Outre-mer (1949-1951) et des immunités parlementaires (1951). Il dépose une proposition de loi, deux propositions de résolution, un rapport sur un texte d’initiative parlementaire et un rapport supplémentaire. En intervenant à quarante et une reprises durant son mandat, il s’affirme comme l’un des parlementaires les plus actifs du groupe communiste. En cinq années, il défend au moins sept amendements et dépose une motion préjudicielle, cinq demandes d’interpellation et deux rappels au règlement. Si ses textes ont trait à des sujets de rayonnement régional ou d’intérêt sectoriel, ses interventions se font plus politiques. En effet, les affaires coloniales sont souvent mises à la question par ce secrétaire d’âge de l’Assemblée nationale (1947-1948 ; 1951-1952), dont l’orientation idéologique traduit naturellement les préférences anticoloniales ou la proximité avec l’Union soviétique. Il dénonce ainsi la préparation par le gouvernement d’une guerre contre l’URSS (2 mars 1949) ou appuie l’amendement visant à limiter, sinon interdire, la vente de coca-cola en France et en Algérie. Il critique la politique du Résident général au Maroc (20 mai 1948) et prend indirectement parti pour les nationalistes tunisiens (juin 1949). Il n’hésite pas à mettre en cause les diverses autorités au pouvoir, dont le ministre de l’intérieur Jules Moch (29 novembre 1950). Durant cette première législature, Jean Pronteau vote à l’unisson de ses collègues communistes. Il s’oppose à la confiance posée le 4 mai 1947, qui conduit au départ des communistes du gouvernement, s’abstient sur le statut de 1947 de l’Algérie, contre le plan Marshall, contre le pacte atlantique, contre les conventions collectives de travail, les apparentements et le renouvellement de l’Assemblée nationale. Il vote l’investiture de Léon Blum, mais s’oppose ensuite à l’ensemble des gouvernements.
Candidat aux élections législatives du 17 juin 1951, la liste « d’union résistante et antifasciste pour l’Indépendance nationale, la Liberté et la Paix » qu’il conduit arrive largement en tête avec 31,5% des suffrages, soit 46 779 des 148 611 voix exprimées et obtient l’un des quatre sièges à pourvoir, comme les gaullistes, ainsi que les socialistes et le Rassemblement des gauches républicaines (RGR) dont l’apparentement avec le Mouvement républicain populaire (MRP) et les Indépendants, dépourvus de tout élu, ne parvient pas à réunir une majorité de suffrages. Jean Pronteau voit ainsi son élection validée le 11 juillet suivant et retrouve les commissions des affaires économiques (1951-1954) et des immunités parlementaires (1951-1952). Son activité au Palais-Bourbon, avec le dépôt de six propositions de loi et trois propositions de résolution, en font de nouveau l’un des parlementaires les plus présents dans le débat parmi les élus communistes. De surcroît, il intervient à cinquante-trois reprises en séance publique, en défendant onze amendements, deux sous-amendements et en déposant sept demandes d’interpellation. Il fait cinq rappels au règlement et dépose, le 9 novembre 1951, une motion de censure contre le gouvernement, en critiquant le relèvement du prix de l’essence. Secrétaire d’âge de l’Assemblée nationale (1953-1955), il prend part à la discussion d’un rapport portant révision de la Constitution, en opposant la question préalable, le 16 juillet 1953. Ses initiatives ont trait, certes, à des problèmes attenant aux chemins de fer, à la chasse, à la sécurité sociale, aux sinistrés ou aux carburants, mais se distingue surtout par ses prises de parole, hostiles aux différentes investitures des présidents du Conseil successifs dont il dénonce l’absence d’antifascisme et l’hostilité à la laïcité. Il interpelle le gouvernement sur sa politique marocaine et s’oppose aux décisions fiscales des gouvernements de droite. Il prend également part à la discussion relative à l’agrément ministériel de l’ancien fonctionnaire vichyste André Boutemy. La véhémence de ses propos lui valant un certain nombre de rappels à l’ordre en séance. Il conteste la politique de « Reynaud et Pleven » qu’il juge « réactionnaires » et auxquels il reproche « le plan Marshall, la subordination aux USA » et prône la « nécessité de faire la paix en Indochine », le 3 juin 1953. Partisan de la Constitution de 1946, il en décrie, selon lui, les dérives, « le révisionnisme réactionnaire, l’attaque lancée contre les libertés démocratiques et le fossé entre le pays ». Il y voit une sorte d’« analogie du régime avec la Monarchie de juillet », comme le « retour du Sénat réactionnaire » (16 juillet 1953). Il lance, à cette occasion, un appel aux socialistes au rejet commun. Il se fait parfois l’avocat d’une réforme des institutions, prônant le maintien du ministre de l’intérieur en cas de vacance gouvernementale, après confirmation de l’Assemblée nationale et de son président. Il s’oppose à René Pleven à propos de l’attitude du PCF vis-à-vis de l’Indochine, le 27 octobre de la même année, et s’oppose sans cesse à la militarisation de ce conflit (passim). Les altercations avec la droite sont nombreuses et les injures en « collaborationnisme » ou « bellicisme » fusent, Pronteau ayant pris parti pour Ho Chi Minh, comme il le rappelle le 1er juin 1954. Il manifeste également, au nom du groupe communiste, son refus de la Communauté européenne de défense (CED), signe, selon lui, de « la course aux armements, la concentration des entreprises et l’accroissement du chômage », « l’augmentation de salaire, le remembrement et la réduction de la durée de service militaire » restant lettre morte (6 août 1954). La discussion des accords de Paris offre à nouveau à Jean Pronteau l’occasion de réaffirmer la position des communistes sur ces questions. Comme à son habitude, le PCF fait entendre les raisons de son opposition aux accords contrevenant aux directives « Moscovites ». Le reste de ses interventions est largement dicté par des préoccupations sociales et ouvrières. Il vote contre les lois Marie et Barangé, contre la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier (CECA), l’adoption de l’échelle mobile des salaires, pour le premier cessez-le-feu en Indochine, contre la mise en place de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), pour les accords de Genève, pour l’adoption de la motion Aumeran, c’est-à-dire contre la Communauté européenne de défense (CED), contre les accords de Londres, contre les accords de Paris, contre la proclamation de l’état d’urgence en Algérie. À l’exception de l’investiture de Pierre Mendès France auquel il accorde sa confiance, il vote contre tous les gouvernements de la seconde législature de la Quatrième République.
Jean Pronteau conduit à nouveau la liste communiste à l’occasion des élections législatives du 2 janvier 1956. A cette occasion, le PCF recueille 47 563 des 160 101 exprimés, soit 29,7% des voix et regagne un second siège au détriment de la SFIO, tandis que le Rassemblement des gauches républicaines (RGR) conserve son siège et que les Indépendants en conquièrent un. Après la validation de son élection le 20 janvier 1956, il est nommé membre de la commission des finances, dans laquelle il siège deux années (1956-1958). Il est aussi membre suppléant de la commission des immunités parlementaires (1956-1958). Il rend un seul rapport, le 14 février 1958, sur le projet de loi de finances pour 1958, relatif au budget annexe de l’Imprimerie nationale. Au cours de ce dernier mandat, il intervient à six reprises, en défendant, notamment, un amendement rectifié, le 2 mai 1956. Il participe aux débats sur la loi de finances de 1958 et intervient encore sur des sujets politiques. Il critique la politique du gouvernement dans la crise de Suez le 2 août 1958 et s’en prend violemment à lui dans ses choix en matière algérienne. Il critique sa « politique catastrophique », la « poursuite de la guerre, la militarisation de l’économie et les privilèges accordés aux grandes entreprises » (21 novembre 1956). Le 14 novembre 1957, il réclame à nouveau « la négociation de la paix en Algérie, la pratique d’une politique de progrès social », fustige « le coût économique de la guerre », source selon lui d’une inflation galopante. Il vote les pouvoirs spéciaux en Algérie, s’oppose à la Communauté économique européenne (CEE) et à l’Euratom, au projet d’institutions en Algérie, pour la proclamation de l’état d’urgence. Il vote la confiance à Guy Mollet, mais la lui retire par la suite et s’oppose de façon systématique à ses successeurs, exception faite de Pierre Pflimlin sur l’investiture duquel il s’abstient volontairement. Partisan d’une révision partielle des institutions, il est rappelé à l’ordre, le 27 mai 1958, dans la discussion d’une proposition de résolution tendant à la révision de la Constitution. Il s’oppose le 1er juin au retour du général de Gaulle et refuse de donner sa voix, le lendemain, à l’octroi des pleins pouvoirs comme à la révision constitutionnelle.
Il se représente aux élections législatives de novembre 1958 dans la Charente mais, avec seulement 24,8% des voix, il est battu au second tour par le candidat gaulliste. Conseiller municipal d’Angoulême de 1947 à 1953, il a joué jusqu’au début des années 1960 un rôle prépondérant au sein du PCF. En 1953, après l’exclusion d’André Marty, il déclare ne « rien avoir en commun avec ce monsieur ». L’année suivante, il fonde la revue Economie et Politique qu’il dirige jusqu’en 1961. C’est à travers cette revue que l’on a pu mesurer son évolution idéologique. Il s’éloigne progressivement de la ligne du Parti en matière de paupérisation et développe des analyses originales sur les classes sociales, puis sur le gaullisme. En liaison avec des hommes comme Marcel Servin, Laurent Casanova et Maurice Kriegel-Valrimont, il prend fait et cause pour le processus de déstalinisation, ce qui lui vaudra son exclusion du comité central à l’occasion du XVIe Congrès de mars 1961, tandis que Casanova et Servin sont renvoyés à la base.
Après avoir participé à diverses tentatives de regroupement de communistes oppositionnels et suscité, en 1968, une démarche d’intellectuels auprès du bureau politique pour protester contre le manque d’ouverture du Parti à l’égard du mouvement étudiant, il quitte de facto le PCF. Il est exclu formellement par sa cellule après s’être élevé contre le fonctionnement du PCF, « inspiré du modèle soviétique », et contre l’accession de Georges Marchais au poste de secrétaire général adjoint. Il professe alors que le communisme n’a d’autre avenir en France que durablement minoritaire à gauche. Il rejoint ainsi le Parti socialiste (PS) en 1973. En 1981, il devient secrétaire national chargé des études au sein du Parti, fonctions qu’il occupe jusqu’à sa mort, le 13 juin 1984.