Robert Richoux
1914 - 1983
RICHOUX (Robert)
Né le 18 juin 1914 à Fumay (Ardennes)
Décédé le 5 avril 1983 à Nancy (Meurthe-et-Moselle)
Député de la Meurthe-et-Moselle de 1968 à 1973
Robert Richoux naît quelques semaines avant le début de la Première guerre mondiale à Fumay, cité frontalière de la Belgique. Il grandit dans une famille modeste : son père travaille d’abord dans les carrières d’ardoise de Fumay, avant d’entrer à la Compagnie des chemins de fer de l’Est en qualité de cheminot, puis de s’installer comme commerçant. Robert Richoux se destine, lui, à l’enseignement. En 1932, il entre comme maître d’internat à l’Ecole pratique du commerce et de l’industrie de Charleville et obtient parallèlement son brevet de capacité pour l’enseignement primaire. Incorporé dans l’armée en octobre 1936, il est affecté au 507ème régiment de chars de Metz, et y sert sous les ordres du colonel de Gaulle. Le caporal Richoux est renvoyé dans ses foyers en octobre 1938 et occupe alors son premier poste d’instituteur à Longwy, en Moselle. Mobilisé en mars 1939, il est nommé sergent en août et n’est démobilisé qu’à la fin juillet 1940, après la défaite française. Il retrouve alors ses fonctions dans l’enseignement primaire à Longwy. En 1941, il suit une formation à la Faculté des lettres de Nancy et décroche son certificat d’aptitude à l’enseignement secondaire. Affecté au collège d’enseignement général de Longwy, il enseigne ensuite en lycée dans la même ville, jusqu’en 1968. Très dynamique, Robert Richoux organise des voyages d’études en France et à l’étranger pour ses élèves, fonde un club archéologique et donne des cours du soir pour adultes dans le cadre du Centre universitaire de coopération économique et sociale (CUCES). En 1947, il est élu conseiller municipal de Longwy et siège à l’Assemblée communale pendant vingt quatre ans, notamment comme quatrième (1953-1959), puis comme premier adjoint au maire (1959-1971). Il fonde l’Association d’aide aux personnes âgées du « Pays-Haut » -cette expression désigne le nord de la Meurthe-et-Moselle- au début des années 1960 et est administrateur de la caisse primaire de Sécurité sociale et de la caisse vieillesse de Meurthe-et-Moselle. Il appartient en outre à l’armée de réserve avec le grade de maréchal des logis-chef.
Très investi dans le milieu associatif et dans la vie municipale à Longwy, Robert Richoux est témoin de la perte de la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle par la majorité après la démission du député sortant Joseph Nou, en 1964. Le candidat de l’Union pour la nouvelle République (UNR), Charles Grein, est en effet défait par le communiste Louis Dupont lors de l’élection partielle des 24 et 31 mai 1964. Dans ce secteur où l’industrie sidérurgique bascule dans une crise durable, la reconquête de ce siège est considérée comme une priorité par les gaullistes et leur « patron » en Meurthe-et-Moselle, le député Roger Souchal. Le jeune Jacques Trorial, membre du corps préfectoral et du cabinet de Roger Frey au ministère de l’Intérieur, sollicite l’investiture de l’Union des démocrates pour la Vème République à la fin de l’année 1966. Originaire du Pays-Haut, il choisit Robert Richoux comme suppléant. Dans sa profession de foi électorale, Jacques Trorial parle de Robert Richoux comme d’un homme qui « donne l’exemple depuis vingt ans du dévouement le plus désintéressé ». Le candidat gaulliste entend œuvrer à la « seconde industrialisation » du nord de la Meurthe-et-Moselle, en y implantant « de nouvelles industries diversifiées ». Il se définit lui-même comme un « gaulliste de gauche » et souhaite devenir « le député des travailleurs ». Le 12 mars 1967, Jacques Trorial défait le député sortant Louis Dupont grâce au soutien de 50,7% des électeurs.
Dès le lendemain de ce succès, Jacques Trorial est pressenti pour entrer au Gouvernement. Il siège cependant au Palais-Bourbon sous la troisième législature de la Vème République (1967-1968) et sollicite le renouvellement de son mandat, avec Robert Richoux comme suppléant, après les événements de mai 1968 et la dissolution de l’Assemblée nationale. Le député sortant de la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle est réélu le 30 juin 1968 avec 55,7% des suffrages exprimés.
Lors de la formation du gouvernement de Maurice Couve de Murville, Jean-Marcel Jeanneney est un temps envisagé au ministère de l’éducation nationale. Il souhaite s’adjoindre les services d’un secrétaire d’Etat pour conduire la réforme de l’enseignement supérieur et avance le nom de Jacques Trorial. Ce dernier est nommé secrétaire d’Etat à l’éducation nationale le 12 juillet 1968 mais auprès d’Edgar Faure, Jean-Marcel Jeanneney étant finalement chargé d’organiser le référendum sur la réforme régionale et du Sénat. Robert Richoux remplace alors Jacques Trorial sur les bancs de l’Assemblée nationale.
Robert Richoux s’inscrit au groupe de l’Union des démocrates pour la République (UDR) de l’Assemblée nationale en septembre 1968. Il en démissionne en avril 1971, en raison des conflits qui l’opposent à la formation gaulliste en Meurthe-et-Moselle. Après l’élection de Georges Pompidou en juin 1969, Jacques Trorial ne retrouve pas en effet de portefeuille ministériel dans le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas, en juin 1969. Il ne demande pas à son suppléant Robert Richoux de démissionner : une élection partielle serait en effet hasardeuse dans cette circonscription qui a voté à 52,4% pour François Mitterrand au second tour de l’élection présidentielle de décembre 1965. En 1971, Jacques Trorial et Robert Richoux s’affrontent directement à l’occasion des élections municipales à Longwy. La liste de l’ancien secrétaire d’Etat, soutenue par l’UDR, emporte la victoire, mais Jacques Trorial lui-même n’est pas élu. La rupture est dès lors consommée entre l’ancien député et son suppléant. C’est à cette époque que Robert Richoux quitte l’UDR. Il reste député de la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle jusqu’à la fin de la quatrième législature, mais siège au Palais-Bourbon comme non inscrit jusqu’à l’automne 1972, puis y rejoint le groupe Progrès et démocratie moderne (PDM). Il appartient d’abord à la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale, mais sa rupture avec l’UDR l’amène à la quitter au printemps 1971 pour celle des affaires culturelles, familiales et sociales.
Le député de la Meurthe-et-Moselle s’intéresse surtout aux questions sociales et y consacre l’essentiel de son activité législative entre 1968 et 1973. Le 3 juin 1971, il dépose deux propositions de lois sur le bureau de l’Assemblée nationale. L’une dispose que les veuves de salariés français se voient reconnaître un droit à pension avant d’avoir atteint l’âge de la retraite. A cette époque, en cas de décès de leur conjoint, les femmes de moins de 65 ans ne peuvent percevoir aucune pension. Le second texte prévoit la mensualisation des pensions d’invalidité et de retraite servies par le régime général de Sécurité sociale, qui étaient jusque-là payées trimestriellement. C’est pour défendre les deux propositions de lois déposées quelques mois plus tôt que Robert Richoux prend la parole dans l’hémicycle pour la première fois, le 4 novembre 1971. Il souligne à cette occasion que l’article 40 de la Constitution, qui frappe d’irrecevabilité toute proposition de loi créant ou aggravant une charge publique, ne peut être opposé aux textes qu’il a rédigés. A la fin de l’année 1972, Robert Richoux est chargé d’un rapport sur la proposition de loi d’Emmanuel Aubert, député des Alpes-Maritimes, en faveur d’une pension nationale de retraites assurant un minimum de ressources garanti. Le parlementaire lorrain se préoccupe également du statut des professions de santé et plaide en faveur d’un encadrement législatif plus précis de la profession d’infirmier et d’infirmière. Il dépose du reste une proposition de loi en ce sens le 27 juin 1972.
Elu local pendant de nombreuses années, Robert Richoux a constaté l’inégalité des citoyens dans l’exercice des mandats électifs. Dans les communes de tailles moyenne ou modeste, les recettes communales ne prévoient pas de recettes destinées à compenser les préjudices subis par les élus salariés du fait de leur mandat. Il entend remédier à ce problème en déposant une proposition de loi le 2 juin 1971. Le député du « Pays-Haut » intervient en outre auprès des autorités pour que la violente crise de l’industrie sidérurgique soit compensée au mieux par l’Etat. Le 17 novembre 1972, il adresse, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, une « pressante requête » au gouvernement, afin qu’il mette « tout en œuvre pour faciliter l’implantation d’usines et d’entreprises dans les secteurs les plus touchés par la restructuration de la grosse industrie » de la région de Longwy. Il dresse un tableau très sombre de la situation économique du nord de la Meurthe-et-Moselle et parle de « vision apocalyptique » pour évoquer ce que ressentent certains Lorrains face à la fermeture des usines de Villerupt. Cette intervention semble en effet nourrie par l’inquiétude et par l’émotion.
L’ancien suppléant de Jacques Trorial appartient à la majorité sous la quatrième législature de la Vème République. Il approuve la loi « Faure » d’orientation de l’enseignement supérieur (10 octobre 1968) comme la loi dite « anti-casseurs » (4 juin 1970) ou la réforme du service national (10 juin 1970). Son départ du groupe UDR à l’Assemblée nationale n’a guère de conséquences sur son soutien à l’exécutif. Il vote ainsi la loi portant création des régions (27 avril 1972) et souscrit aux objectifs présentés par le Premier ministre Jacques Chaban-Delmas dans sa déclaration de politique générale du 24 mai 1972.
La situation politique de la septième circonscription de Meurthe-et-Moselle est très confuse à la veille des élections législatives de mars 1973. Le député sortant Robert Richoux y sollicite le renouvellement de son mandat sans souffrir de la concurrence de Jacques Trorial, dont il était le suppléant cinq ans plus tôt, et qui est désormais candidat dans le XVIème arrondissement de Paris contre le général Stehlin. Robert Richoux se présente comme le « candidat de la majorité présidentielle » mais n’est soutenu officiellement ni par les gaullistes, ni par les Républicains indépendants. Le conseiller général et maire de Longuyon Robert Drapier, qui se définit comme « de Centre gauche » apparaît proche des Réformateurs de Jean-Jacques Servan-Schreiber et Jean Lecanuet. Le premier tour marque un échec très sévère pour Robert Richoux, qui rassemble à peine 9,2% des suffrages exprimés, contre 36,7% pour le communiste Antoine Porcu et 18,5% pour Robert Drapier. Ce dernier est finalement élu député de la Meurthe-et-Moselle à une courte majorité (50,1%) au second tour.
Robert Richoux se retire alors de la vie publique. Il meurt au début des années 1980, à Nancy. L’ancien parlementaire était chevalier du mérite social et titulaire des Palmes académiques.