Aymeric Simon-Lorière

1944 - 1977

Informations générales
  • Né le 30 juin 1944 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 21 avril 1977 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ve législature
Mandat
Du 2 avril 1973 au 21 avril 1977
Département
Var
Groupe
Union des démocrates pour la République

Biographies

Biographie de la Ve République

SIMON-LORIÈRE (Aymeric, Alain, André, Gérard)
Né le 30 juin 1944 à Paris
Décédé le 21 avril 1977 à Paris

Député du Var de 1973 à 1977

La trajectoire en politique d’Aymeric Simon-Lorière peut à juste titre être qualifiée de météoritique : elle reste en effet marquée du double sceau de la brièveté et de l’exceptionnel.
Issu d’une famille d’industriels parisiens – il compte parmi ses ancêtres Hippolyte Marinoni, patron de presse et inventeur de l’imprimante rotative - il grandit dans un milieu favorisé et semble appelé à un brillant avenir. Ses études supérieures ont pour cadres la Faculté de droit et de sciences économiques et l’Institut d’études politiques de Paris. Il est remarqué très jeune par plusieurs responsables de l’UDR et rejoint le cabinet du ministre de la défense Michel Debré en qualité d’attaché parlementaire, en 1970. Dès l’année suivante, Aymeric Simon-Lorière conquiert son premier mandat électif en emportant la mairie de Sainte-Maxime, dans le Var. C’est en effet dans ce département que le jeune collaborateur ministériel envisage son avenir. Le Var connaît alors une profonde mutation démographique : les nouveaux habitants en sont moins prisonniers de la tradition « rouge » du département, tandis que les rapatriés d’Afrique du Nord rejettent encore un gaullisme identifié à l’abandon de l’Algérie en 1962.
Le maire de Sainte-Maxime n’a pas vingt-huit ans quand il décide de se porter candidat à la députation dans la troisième circonscription du Var, où le général Pouyade ne se représente pas. Il reçoit l’investiture de l’Union des Républicains de Progrès (URP), qui regroupe l’UDR et les Républicains indépendants. Sa profession de foi électorale peut être considérée comme un modèle d’efficacité. Le candidat s’y présente comme le défenseur des commerçants « victimes de la mutation de la Société » comme des travailleurs de l’arsenal de Toulon. Il voit sa jeunesse comme une garantie de « chaleur humaine », d’accessibilité et de dynamisme. Enfin, il accorde un soin particulier aux rapatriés en affirmant que « le temps de l’apaisement est venu » pour les anciens de l’OAS, ajoutant qu’au début des années 1960, « il n’y avait pas de bons ou de mauvais Français, il n’y avait que des gens sincères ». Trois candidats lui disputent les voix des conservateurs ou des modérés. L’ancien député Henri Fabre, en rupture avec le gaullisme, représente la menace la plus sérieuse sur ce terrain. Il a reçu le soutien du Mouvement réformateur de Jean-Jacques Servan-Schreiber. Quant aux forces de gauche unies par le Programme commun, elles présentent deux candidats : le communiste Maurice Delplace, conseiller général du canton de Toulon-IV, et l’agrégé de géographie Jean-Paul Ferrier. Aymeric Simon-Lorière arrive en tête au premier tour avec 27,3% des suffrages exprimés, devant le candidat du PCF (26%) et Henri Fabre (21,4%). Dans une circonscription qui avait préféré François Mitterrand au général de Gaulle à une majorité de 51,6% en décembre 1965, le candidat gaulliste reste seul en lice, à la veille du 11 mars 1973, pour affronter Maurice Delplace. Le soutien de 52,6% des électeurs lui permet de devenir député du Var.
Secrétaire d’âge de l’Assemblée, Aymeric Simon-Lorière s’inscrit au groupe de l’Union des démocrates pour la République (UDR). Ses votes devaient toujours se conformer à la discipline de groupe jusqu’en 1977, qu’il s’agisse de soutenir le gouvernement de Pierre Messmer (12 avril 1973), d’approuver la réduction du mandat présidentiel à 5 ans (16 octobre 1973) et l’extension de la saisine du Conseil constitutionnel (10 octobre 1974) ou de légaliser l’interruption volontaire de grossesse (28 novembre 1974).
Dès le début de son mandat, il rejoint la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale. Il investit toute son énergie dans le travail législatif et manifeste une sensibilité « sociale » qui le distingue au sein du groupe UDR, et le rapproche du président de l’Assemblée nationale Edgar Faure. Il devait du reste appartenir au Comité d’étude pour un nouveau contrat social animé par l’ancien président du Conseil, et y diriger des travaux de réflexion sur l’indexation de l’épargne. Rapporteur du projet de loi relatif à l’amélioration des conditions de travail des salariés quelques mois à peine après son élection, il plaide en faveur d’« une profonde transformation des rapports sociaux pour éviter une crise de l’entreprise » en France. Regrettant que les moyens de l’Inspection du travail ne lui permettent pas d’assurer l’ensemble de ses missions, il souhaite en outre que le travail de nuit, lorsqu’il n’est pas justifié techniquement, puisse être proscrit au niveau européen. Défenseur de la valeur « travail », il juge indispensable que les salariés bénéficient de plus de « liberté » et que leur soient confiées des responsabilités, dans l’intérêt des entreprises elles-mêmes (22 novembre 1973). Le benjamin de l’Assemblée est choisi comme rapporteur pour avis du budget du ministère du travail et de l’emploi pour 1974, et assume cette responsabilité pendant quatre années consécutives. Il utilise cette tribune pour traduire avec fidélité les sentiments de la Commission à laquelle il appartient, mais ne manque pas d’insister sur des thèmes qui lui tiennent à cœur, comme la protection des salariés contre le chômage, l’amélioration des conditions de travail dans les usines fonctionnant « à la chaine » ou la lutte contre la flexibilité des horaires de travail (22 novembre 1974).
Le député du Var s’intéresse également aux questions d’éducation et prend la parole dans l’hémicycle le 19 juin 1974 au sujet de la réforme du baccalauréat. Hostile à un examen « couperet », il invite le ministre René Haby à réfléchir à une évolution sur le modèle britannique, qui se fonde sur le contrôle continu. Favorable à une libéralisation de l’information, il argumente en faveur d’une égalité des temps de parole entre majorité et opposition à la télévision française, dans un article que publie le journal France Soir le 1er décembre 1974. Rapporteur à la même époque de la loi portant création du Centre national d’art et de culture portant le nom de Georges Pompidou, Aymeric Simon-Lorière voit dans ce projet de « très grande ampleur » le moyen de faire de la France « le premier centre mondial de création artistique ». Il désamorce les critiques des conservateurs en notant que « si l’on avait pas entamé les travaux de Beaubourg, jamais nous n’aurions pu nous rendre compte de la beauté de l’église de Saint-Merri ». Il salue le choix des architectes Piano et Rogers et évoque un bâtiment « remarquable » « qui ne passe pas à côté de l’époque » et « utilise à plein la technologie ». Le Centre national d’art et de culture est alors pensé comme un ensemble original, qui rassemble « une bibliothèque populaire et démocratique », « la première de France mais aussi d’Europe », un département d’arts plastiques, un centre de création industrielle ayant « pour objet d’appliquer l’art à la vie quotidienne » et l’Institut de recherche et de coordination acoustique-musique (IRCAM) confié à Pierre Boulez. Aymeric Simon-Lorière, qui défend ce projet avec enthousiasme, préconise cependant que sa réalisation fasse l’objet d’un suivi budgétaire très rigoureux (3 décembre 1974). Le 18 avril 1975, il est du reste chargé par le ministère des affaires culturelles du contrôle permanent de l’emploi des crédits inscrits au budget du Centre Pompidou.
Elu conseiller général du canton de Toulon-V en septembre 1973, membre du Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur depuis novembre 1973, le benjamin de l’Assemblée nationale ne perd pas de vue les intérêts de sa circonscription dans l’hémicycle. Le 2 octobre 1974, il interroge le gouvernement sur les perspectives de transfert de la préfecture du Var de Draguignan à Toulon, principale ville du département. Quelques semaines plus tard, il prend la parole pour évoquer les problèmes d’emploi dans le Var (11 décembre 1974). Membre du groupe d’études parlementaire sur la protection de la nature à partir de juin 1973, Aymeric Simon-Lorière s’y intéresse surtout à l’aménagement des littoraux et à la protection des espaces maritimes, questions qui regardent directement sa région d’élection.
Le 29 mai 1975, il devient secrétaire général adjoint de l’Association des maires de France. Tout semble sourire à ce « jeune loup » se réclamant du gaullisme social jusqu’au 15 décembre 1975.
Victime d’un grave accident de la route à proximité de Toulon, Aymeric Simon-Lorière échappe de peu à la mort, mais souffre de dix-sept fractures, dont plusieurs du crâne, et d’un enfoncement de la cage thoracique. Il subit de multiples opérations, mais fait preuve d’un courage et d’une détermination qui impressionnent jusqu’aux médecins. Sans attendre d’être complètement rétabli, il se fixe un nouveau défi en annonçant son intention de briguer la mairie de Toulon contre le sortant Maurice Arreckx. Il consacre beaucoup de son temps et de son énergie à préparer sa campagne électorale, mais fait son retour dans l’hémicycle à l’occasion du débat sur le projet de loi de finances pour 1977 (15 novembre 1976). Les articles de presse sont nombreux à commenter alors cette « résurrection ».
Les élections municipales de 1977 à Toulon participent du climat d’affrontement entre les deux formations de la majorité sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing. Comme à Paris où Jacques Chirac affronte le giscardien Michel d’Ornano, un membre du RPR – cette formation politique a succédé à l’UDR en décembre 1976 - y affronte en effet un soutien direct du chef de l’Etat. Contrairement à l’ancien Premier ministre, Aymeric Simon-Lorière ne réussit pas cependant à devancer le candidat des Républicains indépendants au premier tour. Il prend la parole pour la dernière fois au Palais-Bourbon le 20 avril 1977, afin de s’inquiéter de l’avenir de la sidérurgie française et d’interroger le gouvernement sur le dépôt de bilan de l’entreprise Sud-Acier. De nombreuses raisons militent, selon lui, pour une prise de participation publique dans les compagnies sidérurgiques de taille moyenne à la fin des années 1970.
Le 21 avril 1977, le corps sans vie d’Aymeric Simon-Lorière est retrouvé à son domicile parisien. L’enquête de police conclut à un suicide par balles. La mort de cet espoir du RPR suscite incompréhension et émotion au sein de sa famille politique. Le président du groupe gaulliste à l’Assemblée nationale, Claude Labbé, décrit le défunt comme un homme d’un « grand courage » et d’ « une vive intelligence », qui se distinguait par son « extraordinaire capacité de travail » comme par « une élégance un peu désinvolte ». Jacques Chirac salue « un compagnon fidèle, dont l’ardeur et le dynamisme (…) resteront un exemple pour chacun ». Le 3 mai 1977, Edgar Faure, président de l’Assemblée nationale, prononce l’éloge funèbre de son « ami » Aymeric Simon- Lorière dans l’hémicycle. L’ancien président du Conseil y trouve l’occasion de réfléchir sur le destin de ces jeunes hommes pressés à qui la vie réserve une fin tragique : « Peut-être tant de hâte s’explique-t-elle par la perception confuse d’un décret qui leur mesure le temps. La singularité du cas de Simon-Lorière fut sans doute que son extraordinaire vitalité, déjouant et perturbant les grands mécanismes secrets, lui donna de stupéfiante façon une seconde chance, mais selon le thème immuable qui fut si souvent traité par les écrivains philosophes (…), une seconde chance ne pouvait pas faire un second destin ».