Fily-Dabo Sissoko

1900 - 1964

Informations générales
  • Né le 1er janvier 1900 à Horokoto (Mali)
  • Décédé le 30 juin 1964 à Kidal (Mali)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Soudan-Niger
Groupe
Républicains et Résistants
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Soudan-Niger
Groupe
Union républicaine et résistante
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Soudan
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Soudan
Groupe
Socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Soudan
Groupe
Socialiste
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 9 décembre 1958 au 15 juillet 1959
Département
Soudan

Biographies

Biographie de la IVe République

SISSOKO (Fily-Dabo)
Né le 15 mai 1900 à Horokoto (Cercle de Bafoulabé)
Décédé le 30 juin 1964 à Kidal (Soudan)

Membre de la première et de la seconde Assemblées nationales constituantes (Soudan-Niger)
Député du Soudan de 1946 à 1959
Sous-secrétaire d’Etat à l’industrie et au commerce du 5 au 11 septembre 1948

Fily-Dabo Sissoko est né en pays Malinké et est le descendant d'une longue lignée de chefs. Sa mère, Darama-Dialla Dabo, était considérée comme "une mère de famille élue d'Allah" et jouissait d'une grande renommée. Son père, Sirinam Sissoko, était le chef de tous les Malinkés de la région Niamba. Après avoir été à l'école primaire de Bafoulabé, Sissoko suit les cours de l'école de Kayes, destiné aux fils de chefs, de 1909 à 1911, année où il est admis à l'Ecole normale d'instituteurs de Saint-Louis du Sénégal, transférée en 1913 à Gorée. Il y obtient son certificat d'aptitude à l'enseignement (CAP) et son diplôme supérieur d'études primaires. En mai 1914, il est affecté comme moniteur à l'école régionale de Ouagadougou et, en 1919, il est nommé instituteur à Nara. Ecrivain, il publie plusieurs études, dont une enquête sur l'enfant noir de l'AOF, L'enfant Bambara, en 1931, et un Essai sur le totémisme soudanais en 1937. Chef de canton, son engagement en faveur de la France libre pendant la guerre lui vaut la médaille de la Résistance.
En octobre 1945, il est candidat à l'Assemblée nationale constituante dans la circonscription du Soudan-Niger, devant le collège des non-citoyens, sur une liste d'Union républicaine et résistante (URR). Avec 11 277 voix, soit 45,8 % des suffrages exprimés, il est élu au second tour et s'apparente au groupe communiste. Il entre à la commission du travail et de la sécurité sociale puis, en 1946, à celle des territoires d'outre-mer. Son activité législative en leur faveur est importante. Il dépose plusieurs propositions de loi en février et mars 1946, d'une part pour leur assurer l'égalité des droits, en alignant sur un pied d'égalité les pensions et retraites des anciens combattants et victimes de guerre avec ceux de la métropole, en supprimant toute forme de culture obligatoire pour les agriculteurs indigènes, et en abrogeant le code pénal indigène en AOF, AEF, Togo et Cameroun ; d'autre part, pour favoriser leur développement en nationalisant la banque d'Afrique occidentale, en installant un corps d'inspecteurs du travail dépendant directement du ministère de la France d'outre-mer, et en refondant l'enseignement public en AOF.
Aux élections de juin 1946 à la seconde Assemblée nationale constituante, Fily-Dabo Sissoko se représente au Soudan-Niger, toujours sur une liste URR. En fait, il est devenu le leader du parti soudanais progressiste (PSP), qui a la faveur du gouvernement français, à la différence des indépendantistes de l'Union soudanaise. Avec 17 032 voix, soit 67,4 % des voix, il est élu dès le premier tour. Il retourne à la commission des territoires d'outre-mer où il œuvre à nouveau en faveur de l'égalité des droits des anciens combattants et victimes de guerre.
En novembre 1946, il est à nouveau candidat au Soudan, à la tête d'une "Liste progressiste". Avec 60 759 voix, soit 64 % des suffrages exprimés, il est élu avec son colistier Jean Silvandre. Il s'inscrit au groupe S.F.I.O., est nommé à la commission de l'éducation nationale, à celle des pensions, puis retourne en janvier 1948 à celle des Territoires d'outre-mer, et entre à celle de la justice et de la législation en février 1948. Il est juré à la Haute Cour de Justice pour la session de 1948. Il siège également à la commission de la réforme administrative en 1950. Entre temps, du 5 au 10 septembre 1948, il est sous-secrétaire d'Etat au commerce et à l'industrie dans le cabinet Robert Schuman. Il fait en séance plusieurs interventions remarquées. Lors du débat sur l'Indochine, le 18 mars 1947, il estime que le sort de l'Union française tout entière est en jeu. Après avoir rappelé l'œuvre civilisatrice de la France - dont il dit être la preuve vivante - il s'inquiète de " l'éveil des nationalités "qui serait négligé." Ce sentiment nouveau, vous l'avez ressenti en 1214, lors d'une certaine bataille qui a nom Bouvines, déclare-t-il. Nous aussi, nous l'avons ressenti, à Verdun, à côté de vous. Nous l'avons ressenti pendant les jours fatidiques de juin 1940 et rappelez-vous toujours que c'est un noir qui, l'un des premiers, a crié avec le général de Gaulle : "Si la France a perdu une bataille, la France n'a pas perdu la guerre" et que se sont les T.O.M. qui ont aidé à la résurrection de la France. Cet éveil des nationalités n'est pas particulier à l'Indochine. Il surgit dans la conscience des peuples - qui toujours l'ont porté en eux - lorsque leur évolution, leur mûrissement, le fait éclater", conclut-il en évoquant Madagascar, l'Algérie, le Maroc, l'AEF et l'AOF. Pour réussir l'Union française, la France a donc "le devoir impérieux de se maintenir en Indochine", car celle-ci est menacée par "un impérialisme qui méprise les valeurs héritées de la Révolution française". Il appelle donc à négocier avec un représentant qualifié du Vietnam. Il défend aussi le statut des chefs indigènes d'Afrique noire, dont il est le descendant (9 août 1947), parce que la société indigène noire, musulmane ou animiste, est attachée aux rites religieux que respectent les chefs indigènes. Or déclare-t-il, " l'irréligion n'a pas encore fait son apparition chez nous et nous ne voulons pas, d'ailleurs, que cela se produise ". Il vote le statut de l'Algérie en août 1947 avec le groupe socialiste, et prend une part active aux discussions sur le code du travail en 1950 et 1951.
Depuis 1949, Fily-Dabo Sissoko est membre du conseil général du Soudan, où il siègera jusqu'en 1955, et qu'il préside à partir de 1953. Aux élections de juin 1951, il mène la liste du PSP, apparentée à la SFIO. Dans sa profession de foi, il défend le maintien du Soudan dans l'Union française au moyen de réformes progressistes et d'une "franche collaboration" entre toutes les populations, et s'en prend violemment au R.P.F. qu'il soupçonne de vouloir rétablir le travail forcé et l'indigénat. Avec 201 866 voix, soit 59,7 % des voix, il est élu avec deux de ses co-listiers, le député sortant Jean Silvandre, et Hamadoun Dicko, alors que la liste concurrente du Rassemblement démocratique africain (RDA), avec 34,1 %, n'obtient qu'un seul siège. Fily-Dabo Sissoko siège alors à la commission de la justice et de la législation. Avec le groupe socialiste, il s'oppose à la loi Marie-Barangé favorable à l'enseignement privé (septembre 1951), et ratifie la création de la CECA (décembre 1951). Mais lors de la querelle de la Communauté européenne de défense (CED) qui déchire le parti socialiste, il rejoint le camp des indisciplinés en repoussant le projet (août 1954). Ses interventions en séance sont nombreuses. Le 27 mai 1953, en particulier, il interpelle le gouvernement de Mendès France en demandant que soient relevés les prix des produits d'outre-mer, et en exprimant la crainte que la construction européenne ne se fasse au détriment de l'Union Française. Parallèlement, il est nommé au Grand Conseil de l'AOF, et membre de la délégation française à l'ONU.
En janvier 1956, Fily-Dabo Sissoko se sépare de Jean Silvandre, qui constitue une liste socialiste à part, et mène la liste du PSP. Son programme demeure l'intégration du Soudan dans l'Union française grâce à des réformes administratives, économiques et sociales. Avec 161 911 voix, soit 37,3 % des suffrages exprimés, il est élu avec son second, Hamadoun Dicko, mais est devancé par la liste d'Union soudanaise, qui obtient 49,7 % des voix et deux députés. Il s'inscrit à nouveau au groupe socialiste, revient à la commission de la justice et de la législation et, en février 1956, retrouve celle des Territoires d'outre-mer. Directeur des journaux France-Tropiques et Vérité, il entre à celle de la presse en octobre 1957. En séance, il exprime l'inquiétude grandissante des élus d'outre-mer face à la construction européenne (juillet 1957). Absent en mars 1956 lors du vote des pouvoirs spéciaux en Algérie, il accorde leur renouvellement aux gouvernements successifs en juillet et novembre 1957.
En janvier 1957, il préside le congrès constitutif du Mouvement socialiste africain (MSA) et, en juillet 1957, quitte les députés socialistes pour adhérer à son groupe parlementaire. Puis au début de 1958, il devient le vice-président du parti du regroupement africain des fédéralistes. En son nom, le 16 mai, il défend sans restriction le gouvernement républicain de Pierre Pflimlin et condamne l'insurrection civile et militaire en Algérie. Le 20 mai, il prononce un vibrant éloge du général de Gaulle, "un homme que nous avons placé au-dessus des humains vulgaires, que nous avons placé dans les cieux, dans notre panthéon héroïque", en déplorant que certains veuillent le manipuler. Mais il affirme être certain que le Général "ne prêtera jamais son bras ni sa voix à des factions d'où qu'elles viennent, quels que soient les motifs qui les animent". Aussi lui accorde-t-il l'investiture le 1er juin 1958, et les pleins pouvoirs le lendemain. En vertu de l'article 91, alinéa 8 de la Constitution du 4 octobre et de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-974 du 17 octobre 1958, son mandat est prolongé jusqu'au 14 juillet 1959, le temps que les dispositions nécessaires à l'application des articles concernant la Communauté entrent en vigueur
Après la proclamation de l'indépendance du Mali, le 22 septembre 1962, Fily-Dabo Sissoko entre dans l'opposition au régime de Modibo Keita. Arrêté, il est condamné à mort, mais sa peine est commuée en détention à perpétuité. Il serait mort au cours d'une tentative d'évasion, le 30 juin 1964, à l'âge de soixante-quatre ans. Membre du conseil scientifique de l'Institut français d'Afrique noire, il publie, jusqu'à la fin de sa vie en prison, de nombreux articles, ouvrages et poèmes, et contribue ainsi au rayonnement de la culture malinké.