Jean-Pierre Soisson
1934 - 2024
SOISSON (Jean-Pierre)
Né le 9 novembre 1934 à Auxerre (Yonne)
Décédé le 27 février 2024 à Auxerre (Yonne)
Député de l’Yonne de 1968 à 1974, en 1978, de 1986 à 1988 et de 1993 à 2012
Jean-Pierre Soisson nait le 9 novembre 1934 à Auxerre. Il est le fils de Denise Silve et de Jacques Soisson, propriétaire d’un grand magasin de lainage et tissus, et président de la chambre de commerce locale (la famille exerce le négoce depuis Louis XV…). Après des études secondaires au lycée Jacques-Amyot d’Auxerre (il y côtoie Guy Roux et Jean Vautrin), marquées par un prix de thème en latin lors du concours général, il réussit le concours d’entrée à l’Institut d’études politiques de Paris et s’inscrit à la faculté de droit de Paris alors que son père le voyait plutôt à HEC pour reprendre l’affaire familiale. Il entre par la suite à l’Ecole nationale d’administration et en sort en mai 1961 (promotion Lazare Carnot).
De septembre 1957 à juin 1959, cet étudiant mendésiste fait son service militaire en Algérie (c’est le seul élève de l’ENA à accomplir sa première année de stage sous les drapeaux) comme chef de harka dans la région de Douar Mélouane et sous-lieutenant de commando au 3e régiment de chasseurs d’Afrique (RCA) du colonel Argoud. Il se bat pendant deux ans sur les contreforts de l’atlas blidéen et se prend de passion pour ce territoire, comme le sous-lieutenant Chirac dans les Beni-Ouarsous à la frontière marocaine. De retour en Métropole en juillet 1959 (avec la croix de la Valeur militaire et trois citations), il retrouve l’ENA puis s’oriente en juin 1961 vers la Cour des comptes comme auditeur de 2e classe (il prête serment de magistrat en même temps que Pierre Joxe). Mais il obtient dès juin 1961 un détachement auprès du Premier ministre pour repartir à Alger, où il reste jusqu’à la fin juillet 1962 comme chargé de mission auprès du contrôleur financier. Réintégré à la Cour des comptes, il devient en octobre 1964 conseiller technique du secrétaire général de la Marine marchande Jean Morin. A partir de janvier 1966, il commence à participer aux cabinets ministériels, d’abord comme conseiller technique du secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre chargé de l’Information Yvon Bourges, qu’il suit en avril 1967 au secrétariat d’Etat des Affaires étrangères chargé de la Coopération. De mars à juin 1968, il assure les mêmes fonctions de conseiller technique auprès du ministre de l’Agriculture Edgar Faure. Le courant passe bien entre les deux hommes et Jean-Pierre Soisson songe pendant quelques temps à rejoindre le Parti radical mais Edgar Faure l’oriente vers la formule, plus porteuse d’avenir, du giscardisme. Le jeune haut fonctionnaire conservera de bonnes relations avec Edgar Faure et participera plus tard à son club du nouveau Contrat social. Tout en travaillant en cabinet ministériel, Jean-Pierre Soisson enseigne à Sciences-Po Paris comme maître de conférences de 1962 à 1968. Durant la guerre d’Algérie, il s’est marié avec Catherine Lacaisse. Deux enfants naitront de cette union.
Le haut-fonctionnaire se lance dans l’aventure électorale dans la seconde moitié des années 1960. Lors des législatives de mars 1967, il obtient, avec le soutien d’Edgar Faure, le droit de se présenter sous l’étiquette Républicains indépendants (RI) dans la 1ère circonscription de l’Yonne (cantons d’Aillant-sur-Tholon, Auxerre-Est, Auxerre-Ouest, Bléneau, Charny, Coulange-la-Vineuse, Courson-les-Carrières, Saint-Fargeau, Saint-Sauveur, Toucy). Bien qu’arrivé en tête au premier tour avec 30,9 % des voix, devant le modéré Louis Lalande (22,4 %), le communiste Guy Lavrat (22 %) et le radical Louis Périllier (20,6 %), le retrait du modéré et du communiste permet à Louis Périllier, investi par la FGDS et soutenu par l’ancien député socialiste Gérard Vée, de s’imposer au second tour avec 54 % des voix. Jean-Pierre Soisson, promu conseiller référendaire de 2ème classe à la Cour des comptes le 24 mai 1968, prend sa revanche à l’occasion des législatives anticipées de juin 1968, consécutives à la dissolution de l’Assemblée nationale. Profitant d’un contexte politique national plus favorable à la droite, le candidat RI, toujours soutenu par Edgar Faure (ministre de l’Agriculture) et avec pour suppléant, le commerçant Louis-René Aubin, arrive largement en tête au premier tour avec 34 % des voix, devant Louis Périllier (24,6 %), le communiste Guy Lavrat (16,1 %) et l’ancien ministre gaulliste Bernard Chenot (15,4 %). En dépit du retrait du candidat communiste, Jean-Pierre Soisson s’impose au second tour avec 54,6 % des voix.
Au Palais-Bourbon, il s’inscrit au groupe des Républicains indépendants et choisit la commission de la production et des échanges. Il fonde le Groupe d’étude parlementaire pour l’aménagement rural (GEPAR) dont il prend la présidence. Durant cette législature, le député de l’Yonne dépose deux propositions de loi, l’une relative à la création d’un comité chargé de proposer toutes dispositions tendant à l’amélioration de la situation matérielle des personnes âgées (avril 1969) et l’autre relative à l’abaissement de l’âge des députés et des sénateurs (juin 1970). Il participe activement à l’examen des projets de loi de finances lorsqu’il est question de l’équipement, du logement, de l’agriculture, des affaires sociales et de la sécurité sociale. Il s’engage dans les débats portant sur des sujets divers : enseignement supérieur (novembre 1968), réforme de la région et du Sénat (décembre 1968), droit syndical dans les entreprises (décembre 1968), aménagement du Bassin parisien (novembre 1969), assurance maladie et assurance vieillesse des travailleurs non-salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales (décembre 1969 et mars 1972), préparation du VIe Plan (juin 1970), habitations à loyer modéré (juin 1971), organisation des régions (avril 1972), sociétés de coopérative agricole (mai 1972), statut de l’ORTF (juin 1972)… Il vote en faveur du projet de loi portant création et organisation des Régions (la loi du 5 juillet 1972).
A l’automne 1968, Jean-Pierre Soisson intègre le bureau exécutif et le comité directeur de la Fédération nationale des Républicains indépendants (FNRI). En décembre de l’année suivante, il est promu secrétaire général adjoint du même parti (fonction qu’il conserve jusqu’en 1975), une ascension politique favorisée par son rapprochement précoce avec Valéry Giscard d’Estaing. C’est par fidélité à ce dernier qu’il a appelé à voter « non » au référendum de 1969. Il relaie les charges antigaullistes de Michel Poniatowski tout en s’efforçant d’en atténuer les effets, voire le désavoue quand celui-ci va trop loin. C’est ainsi qu’en juin 1972, il reproche publiquement à Michel Poniatowski d’avoir souhaité « une majorité rénovée élargie vers le centre » et va jusqu’à voter deux jours après contre un amendement de son groupe en faveur d’une chaine de télévision privée. A ses yeux, « la majorité ne doit en aucun cas se diviser ». Début 1973, avant les législatives, il écrit avec Bernard Stasi, membre du Centre démocratie et progrès (CDP) et Olivier Stirn (RI) un ouvrage à charge contre le Programme commun de la gauche, Le Piège, publié chez France-Empire. Depuis 1970 par ailleurs, le député de l’Yonne renforce son ancrage politique local, se faisant d’abord élire conseiller général du canton d’Auxerre-Ouest en mars 1970, puis remportant en mars de l’année suivante la mairie d’Auxerre où il succède à l’Indépendant Jean Moreau. Il conserve l’hôtel de ville pendant 27 ans, appliquant à la cité bourguignonne le style nouveau d’un gestionnaire moderne. Il recevra en 1986 une Marianne d’or pour son action en tant que premier édile.
Lors des législatives de mars 1973, c’est donc une figure du parti giscardien et un élu local bien implanté qui se représente dans la 1ère circonscription de l’Yonne. Avec l’aide de son suppléant, l’avocat de Sens (et futur conseiller général du canton de Bléneau), Marc Masson, Jean-Pierre Soisson s’impose dès le premier tour avec 53,5 % des voix face au socialiste Michel Bonhenry (19,9 %) et au communiste Guy Fernandez (16,2 %). Il reste fidèle au groupe RI et choisit la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, qu’il quitte en avril 1974 pour la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Dès mai 1973, le député de l’Yonne siège à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Le mois suivant, il devient secrétaire général du comité de liaison des élus. En mai 1973, il prend part aux débats qui suivent la déclaration du ministre de l’Agriculture et évoque les problèmes liés aux politiques agricoles communautaires. A l’automne 1973, il participe à l’examen du projet de loi de finances pour 1974 à propos des dossiers agricoles. Il approuve le projet de loi d’orientation du commerce et de l’artisanat (la loi dite Royer du 27 décembre 1973).
Président de la Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales depuis juillet 1973, vice-président du conseil régional de Bourgogne à partir de janvier 1974, membre de la présidence du Mouvement pour l’indépendance de l’Europe dès février 1974, Jean-Pierre Soisson, par ailleurs chargé par son parti de la préparation des cantonales de septembre 1973 et membre du bureau du groupe des RI début avril 1974, cumule les responsabilités. Il participe activement à la campagne présidentielle anticipée du printemps 1974 consécutive au décès de Georges Pompidou. Le député d’Auxerre soutient la candidature de Valéry Giscard d’Estaing dont il apparait alors comme un des principaux lieutenants. Il se rend notamment avec Anne-Aymone Giscard d’Estaing aux Antilles pour le compte du candidat RI. Le nouveau chef d’Etat le remercie en le faisant entrer au gouvernement de Jacques Chirac comme secrétaire d’Etat aux Universités. A plusieurs reprises, son nom avait été cité lors des remaniements ministériels des années 1970-1974 sans qu’il ne soit appelé au gouvernement, au contraire des « jeunes loups » de la majorité présidentielle progressivement intégrés. Bien que proche de Valéry Giscard d’Estaing et peu avare de ses protestations de loyauté à l’égard de Georges Pompidou, il se voyait souvent reprocher sa fougue brouillonne, son ambition impatiente, sa vivacité et ses initiatives jugées parfois mal calculées.
Lorsque Jean-Pierre Soisson entre au gouvernement, le grand public découvre cet énarque d’à peine quarante ans ayant réussi, comme Jacques Chirac, à passer de la technocratie à la politique. Les médias le montrent en élu bourguignon cultivant des airs d’enfant terrible avec des cheveux un peu trop longs. Les spécialistes notent que le Président a choisi à ce poste toujours sensible de l’enseignement supérieur quelques années après les remous de mai 68, un « politique » qui contrebalance le « technicien » qu’est René Haby à l’Education. Mais, après avoir été séduits dans un premier temps par ce nouveau secrétaire d’Etat dynamique, les présidents d’universités (devenues autonomes depuis la loi d’orientation Faure) s’agacent de la méthode un peu confuse de celui, qui multiplie, déclarations d’intention, idées, projets et ballons d’essai. Souhaitant occuper constamment le double terrain politique et médiatique, Jean-Pierre Soisson s’engage dans beaucoup de domaines à la fois : statut des enseignants, réorganisation des formations et des cycles universitaires, réforme de l’aide de l’Etat aux étudiants, « nouvelles relations » entre l’administration et les universités, « reconquête » de la recherche, coopération universitaire européenne… A l’arrivée, même si des réformes sont engagées, la modestie des résultats, liée au manque de moyens budgétaires, contraste avec la hauteur des ambitions. Le Bourguignon a certes renforcé une administration héritée de Joseph Fontanet et posé comme modèle durable le principe d’un dialogue avec ses différents interlocuteurs (conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, conférence des présidents d’université, conférence des associations étudiantes) mais cette logique de concertation a été affaiblie par le souci du secrétaire d’Etat de rester un politique, par son recul aussi sur le niveau de participation des étudiants aux instances universitaires et enfin par ses déclarations maladroites début 1975 sur la création des « grandes régions universitaires » (ce qui lui avait valu quelques jours plus tard un recadrage sans ménagement de Jacques Chirac avec lequel les relations sont d’emblée tendues). Il s’est aussi heurté au ministre René Haby sur le dossier délicat de la formation des enseignants du secondaire.
Le 12 janvier 1976, c’est donc un secrétaire d’Etat politiquement affaibli qui change de portefeuille ministériel pour passer à la Formation professionnelle dans un gouvernement Chirac remanié. Une nouvelle affectation qui relève plus d’un demi-purgatoire que d’une promotion. Il connait un autre revers quand il est battu par le socialiste Etienne Louis (un de ses cousins) aux cantonales de mars 1976 dans le canton d’Auxerre-Ouest, victime de l’effritement de la dynamique giscardienne après les deux premières années conquérantes de la « société libérale avancée ». Le maire d’Auxerre conserve néanmoins toute son autorité au sein de sa famille politique. Début 1975, il prend la vice-présidence de la FNRI et, à l’automne de la même année, devient vice-président du club « Agir pour l’avenir », sorte de club de sélection et de formation des candidats RI aux élections locales et nationales. Il s’agit pour lui de transformer la petite formation de notables qu’est la FNRI en un parti moderne capable d’appuyer politiquement l’action du Président. Lorsque Jacques Chirac quitte Matignon à la fin de l’été 1976, Jean-Pierre Soisson figure, dans le nouveau gouvernement emmené par Raymond Barre, comme secrétaire d’Etat chargé de la Jeunesse et du sport auprès du ministre de la Qualité de la vie Vincent Ansquer. A ce poste, le maire d’Auxerre donne mieux sa mesure. Les fédérations sportives et mouvements de jeunes apprécient cet homme vif, disert, bronzé et dynamique. Reconduit dans cette même fonction lors du remaniement gouvernemental en avril 1977, il démissionne de son poste le 1er juin 1977 après avoir lancé à Fréjus le 19 mai 1977 le Parti républicain (PR), dont il devient le secrétaire général.
L’intéressé avait hésité à cumuler les deux fonctions, ministérielle et militante, pour répondre aux pressions de son ami Claude Collard, président du Comité national olympique sportif français (CNOSF) qui souhaitait poursuivre une collaboration jugée efficace. Mais il a finalement préféré, en raison de l’importance de l’enjeu, se consacrer pleinement à la seule activité d’animateur de la campagne des législatives du printemps 1978 pour la droite giscardienne. Jean-Pierre Soisson avait déclaré à Fréjus : « Nous avons trois cents jours pour gagner ». Et de fait, en maintenant jusqu’au bout et dans le scepticisme général son pari de rassembler tous les giscardiens, libéraux, centristes et radicaux, il parvient à créer début février 1978 une Union pour la démocratie française (UDF). Cette formation permet au président de disposer d’un grand parti capable de rivaliser avec le Rassemblement pour la République (RPR) chiraquien, d’éviter à court terme une défaite de la majorité aux législatives du printemps 1978 et à plus long terme d’envisager la réélection de Valéry Giscard d’Estaing lors des présidentielles de 1981. Jean-Pierre Soisson prend la vice-présidence du nouveau parti.
Réélu maire d’Auxerre en mars 1977 face au socialiste Etienne Louis, Jean-Pierre Soisson est candidat à sa réélection lors des législatives de mars 1978 dans la 1ère circonscription de l’Yonne. Pour l’occasion, il publie chez Fayard un livre d’entretien avec Alain Duhamel et Patrick Poivre d’Arvor intitulé La Victoire sur l’hiver (Fayard). Sous l’étiquette UDF, il arrive largement en tête au premier tour avec 46,3 % des suffrages exprimés, devant le socialiste Etienne Louis (27,9 %) et le communiste Guy Fernandez (15,7 %). Mais Jacques Chirac, patron d’un RPR engagé dans un rapport de forces avec le pouvoir giscardien, a envoyé dans la circonscription un jeune gaulliste proche de Michel Jobert, Patrick Balkany, pour gêner le lieutenant de Valéry Giscard d’Estaing. Patrick Balkany se contente de 8,3 % des voix mais il contraint le député sortant à un second tour inattendu. Toujours secondé par son suppléant Marc Masson, Jean-Pierre Soisson l’emporte le 19 mars 1978 avec 56,2 % des voix face à son rival socialiste. Il démissionne toutefois pour rejoindre le gouvernement le 5 avril comme ministre de la Jeunesse, des sports et des loisirs. Fort de l’expérience acquise précédemment au secrétariat d’Etat à la Jeunesse et au sport, il se montre efficace, y compris sur le terrain de la communication. S’efforçant de développer le sport de haut niveau dans la perspective des Jeux olympiques de Moscou de l’été 1980, il affirme ne pas vouloir y envoyer « des gugusses qui se contenteraient de faire du shopping ».
Lors des présidentielles de mai 1981, Jean-Pierre Soisson apporte son soutien à Valéry Giscard d’Estaing en s’occupant de la campagne du président sortant en Outre-Mer. La défaite giscardienne fait du maire d’Auxerre une des figures de la nouvelle opposition parlementaire de droite. Il conserve en effet son siège de député lors des législatives anticipées de juin 1981, consécutives à la dissolution de l’Assemblée nationale par le nouveau président de la République François Mitterrand. Candidat UDF, il frôle la réélection dès le premier tour avec 49,7 % des suffrages face au socialiste Michel Bonhenry (38,6 %) mais ce dernier, qui peut compter sur les désistements des candidats du Parti communiste français (PCF) Guy Fernandez (10 %) et du Parti socialiste unifié (PSU) Daniel Laprade (1,5 %) aborde le second tour avec des réserves de voix. De fait, le socialiste s’incline de justesse avec 49,2 % des voix face au député sortant. Au Palais-Bourbon, Jean-Pierre Soisson s’inscrit au groupe UDF et siège à la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Durant cette législature, il dépose une proposition de loi en février 1986 relative à la nomination de conseillers référendaires à la Cour des comptes. Cet opposant modéré au nouveau président Mitterrand manifeste ses désaccords avec la politique du gouvernement lors de l’examen des projets de loi de finances (déplorant régulièrement l’aggravation des déficits, l’accentuation de l’inflation, l’alourdissement de la pression fiscale et administrative de nature selon lui à décourager l’initiative privée). Il participe aux débats relatifs à certains textes de loi : droits et libertés des communes (septembre 1981), nationalisations (octobre 1981), réforme de la planification (juin 1982), organisation des régions d’outre-mer (décembre 1982), répartition des compétences entre les communes, départements, régions et Etat (juin 1983), réforme de la formation professionnelle et modification du code du travail (octobre 1983), organisation et promotion des activités physiques et sportives (avril 1984), limites d’âge dans la fonction publique et le secteur public (juin 1984), organisation régionale du tourisme (décembre 1984), évolution de la Nouvelle-Calédonie (mai 1985), congés de conversion (juillet 1985)… Il vote en septembre 1981 en faveur de l’abolition de la peine de mort (la loi du 9 octobre 1981). Il s’oppose au projet de loi Defferre relatif aux droits et libertés des communes, des départements et des régions (la loi du 2 mars 1982). Il approuve le projet de loi relatif aux prestations de vieillesse, d’invalidité et de veuvage (la loi du 13 juillet 1982).
Jean-Pierre Soisson renforce son ancrage politique local en récupérant dès 1982 son siège de conseiller général du canton d’Auxerre sud-ouest perdu en 1976. Il siège à l’assemblée départementale (dont il est le premier vice-président) jusqu’en juin 1988, avant de démissionner conformément à la loi sur le cumul des mandats. En 1983, il entre au conseil régional de Bourgogne dont il est là-aussi vice-président. Au printemps 1985, il est nommé président du comité de coordination des programmes régionaux d’apprentissage et de formation professionnelle continue. Passionné par le sujet, il publie l’année suivante chez Fayard un ouvrage intitulé L’Enjeu de la formation professionnelle, préfacé par Raymond Barre. Facilement réélu maire d’Auxerre en mars 1983, Jean-Pierre Soisson apparait comme l’un des champions de l’opposition libérale à une gauche au pouvoir affaiblie par son échec face au chômage. Celui qui est secrétaire national du Parti républicain depuis novembre 1981, montre une fois de plus son sens politique en prenant ses distances avec Valéry Giscard d’Estaing pour se rapprocher de Raymond Barre (dès 1978, il avait suggéré que ce dernier prenne la tête de l’UDF créée la même année). Partisan déclaré du renouveau de la vie politique, Jean-Pierre Soisson s’était singularisé en février 1982 par une lettre aux élus UDF appelant à un « élan nouveau ». Deux ans plus tard, dans les colonnes du Monde, il déclare souhaiter que l’opposition fasse son « congrès d’Epinay » (allusion au congrès d’où était né le nouveau Parti socialiste mitterrandien). Peu après, il clarifie ses intentions en se ralliant publiquement à Raymond Barre dont il devient un des conseillers écoutés, en particulier sur la question des Dom-Tom. Lors des législatives en mars 1986, Jean-Pierre Soisson fait partie des chevau-légers du barrisme, jamais avare d’une phrase aiguisée pour servir son champion. Tête de liste de l’opposition UDF-RPR dans l’Yonne, il est réélu député, devient membre du groupe de l’Union du Centre (UDF) et siège à la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.
Au Palais-Bourbon, Jean-Pierre Soisson est membre du comité de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et siège comme membre titulaire au comité directeur du Fonds d’investissement pour le développement économique et social des territoires d’outre-mer. Il intervient sur des sujets variés : mesures d’ordre économique et social (avril 1986, il insiste à cette occasion sur le rôle de la formation en alternance et de l’apprentissage dans la lutte pour l’emploi, sur la nécessité du dialogue social et sur l’importance de l’incitation fiscale à l’investissement), réforme du régime juridique de la presse (octobre 1986), aménagement du temps de travail (mai 1987), modification du code du travail et apprentissage (juillet 1987). Il prend part à l’examen des projets de loi relatifs à la Nouvelle-Calédonie (juillet 1986 et novembre 1987). Il vote en faveur du projet de loi relatif aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France (la loi du 9 septembre 1986).
Réélu conseiller régional de Bourgogne en mars 1986 (il reprend la vice-présidence de l’assemblée régionale aux côtés d’un autre notable giscardien, Marcel Lucotte), nommé le mois suivant président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, Jean-Pierre Soisson, toujours très médiatique, incarne cette droite néo-libérale en vogue au milieu des années 1980. En mars 1987, il crée, avec l’aide de Bernard Fournier, président du syndicat parisien des restaurateurs de métiers, l’association « Liberté et avenir du tourisme ». Cette organisation, résultant de la fusion des associations « Défense et avenir du tourisme » et « Tourisme et liberté », se donne comme but de rassembler les parlementaires, les élus des zones touristiques, les responsables d’associations, les dirigeants des organisations professionnelles et les représentants de la presse, pour relayer l’action de Jean-Jacques Descamps, secrétaire d’Etat au Tourisme. En décembre 1987, le député-maire d’Auxerre est nommé membre du conseil national de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l’emploi, une instance consultative chargée de conseiller le gouvernement sur ces questions sociales et économiques. Une nomination d’autant plus importante que le Premier ministre, Jacques Chirac, entend relancer cette instance restée en sommeil depuis plusieurs années. Délégué UDF aux Dom-Tom et membre, dès décembre 1987, de l’Académie des sciences d’outre-mer (élu au fauteuil de l’ancien résident général en Tunisie Louis Périllier), Jean-Pierre Soisson suit enfin de près le délicat dossier calédonien où, tout en défendant la cause loyaliste, il reste plus mesuré que ses homologues du RPR.
Membre du bureau politique du PR, il soutient logiquement la candidature de Raymond Barre lors des présidentielles du printemps 1988. Réélu président de la République, François Mitterrand dissout l’Assemblée nationale. Jean-Pierre Soisson se représente donc dans la première circonscription de l’Yonne pour ces législatives anticipées de juin 1988. Avec le soutien de son suppléant, Serge Franchis, son adjoint à la mairie (chargé du logement et de la rénovation urbaine) et conseiller général du canton d’Auxerre-Est, il frôle la réélection dès le premier tour avec 48,6 % des suffrages. Au second tour, il s’impose facilement avec 57,9 % face au socialiste Jean-Paul Rousseau. Au Palais-Bourbon, Jean-Pierre Soisson s’apparente au groupe de l’Union du Centre (UDF). Alors qu’il faisait partie de l’opposition de droite de 1981 à 1984, l’UDF Jean-Pierre Soisson surprend l’opinion en renonçant à son mandat parlementaire pour entrer, le 28 juin 1988, dans le 2ème gouvernement de Michel Rocard comme ministre d’ouverture aux côtés des centristes Michel Durafour (Fonction publique et réformes administratives) et Jean-Marie Rausch (Commerce extérieur). Il est nommé ministre du Travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. Dès le lendemain du 8 mai, Jean-Pierre Soisson avait été vu à l’Elysée où il jouait un rôle d’intermédiaire dans les tentatives de débauchage d’éléments libéraux et centristes. Interrogé par ses camarades du PR sur le sens de cette étonnante visite au président de la République, l’intéressé avait répondu qu’il était venu remettre au chef de l’Etat son rapport de président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations… Si ce choix est dénoncé par une partie de l’ancienne majorité (à commencer par Valéry Giscard d’Estaing qui lui déclara qu’il serait « le ministre du chômage »), l’esprit de consensus semble déjà ancré chez l’intéressé dont les origines, comme le parcours de formation, sont marquées par la culture de l’ouverture. Elevé dans la tradition radicale (son grand-père fut président du Cercle républicain d’Auxerre), Jean-Pierre Soisson est entré en politique aux côtés d’Edgar Faure avant de connaître le giscardisme et sa logique de « décrispation ». Lorsqu’il a lancé le Parti républicain en 1977 à la demande du chef de l’Etat, le maire d’Auxerre a cité André Malraux dans sa déclaration fondatrice… En 1987, il a fait sensation en expliquant qu’il souhaitait, en cas de victoire de Raymond Barre à la présidentielle de l’année suivante, l’entrée de socialistes au gouvernement. Celui qui, dès 1977, se présente comme « un homme de la rencontre », croit « à la voie moyenne pour la France » à l’image de Valéry Giscard d’Estaing désireux de convaincre « deux Français sur trois ». Il adhère à la vertu du dialogue et à la possibilité de dépasser les clivages partisans. Dans une déclaration à L’Yonne républicain au lendemain de sa nomination, il affirme ainsi : « Les Français ont choisi l’équilibre. La question n’est pas de savoir qui l’emportera de la gauche ou de la droite mais qui l’emportera de ceux qui veulent prolonger l’affrontement entre les deux moitiés de la France et de ceux qui aspirent à une nouvelle donne (…) On ne peut vouloir l’ouverture en paroles et la refuser dans les actes ». Fondamentalement modéré, le délégué UDF pour les Dom-Tom a d’ailleurs surpris ses amis politiques en développant au sujet du « Caillou » une ligne d’équilibre, répétant qu’il fallait « veiller aux préoccupations de la minorité » (allusion aux revendications des kanaks). Devant le groupe UDF de l’Assemblée, il a manifesté son hostilité à la décision unilatérale du gouvernement de faire coïncider la date des élections régionales en Nouvelle-Calédonie avec le premier tour de l’élection présidentielle. Un positionnement finalement proche de celui du Président de la République qui répétait qu’il fallait « absolument sortir de la logique de l’affrontement » sur ce territoire ultramarin.
Joue aussi sans doute son intérêt ancien pour la formation professionnelle, un thème se prêtant plus qu’un autre à la recherche du consensus politique. La première loi sur le sujet, datant de 1971, n’avait-elle pas associés les noms de Michel Debré, Jacques Delors, Jacques Chaban-Delmas et Marcel Rigout ? Ce dernier, en février 1984, a d’ailleurs accepté d’intégrer dans sa loi rectificative un amendement présenté par Jean-Pierre Soisson. Le rapport de ce dernier en 1984 sur la formation professionnelle a été très apprécié par Michel Rocard, qui partage la conviction de Jean-Pierre Soisson selon lequel la formation professionnelle doit être à la Ve République ce que l’école primaire a été à la IIIe République. Ce rapprochement avec le gouvernement de gauche s’explique aussi par le dépit de l’intéressé devant le sectarisme des autres responsables du PR qui l’ont ostracisé après ses prises de position en faveur de Raymond Barre. Les bonnes relations qu’entretiennent François Mitterrand et Jean-Pierre Soisson (dont la circonscription de l’Yonne est proche de celle de l’ancien responsable socialiste dans le Morvan) ont pu jouer un rôle. D’ailleurs le chef de l’Etat a promis, durant l’entretien à l’Elysée le 9 mai, que le député sortant de l’Yonne ne se verrait pas opposer d’adversaire socialiste aux législatives anticipées alors même que le candidat socialiste avait obtenu 52 % des voix dans la circonscription lors du second tour de la présidentielle (les socialistes locaux s’étant émus de cette décision de la rue de Solférino, Jean-Pierre Soisson devra néanmoins affronter le patron de la fédération PS départementale, Jean-Paul Rousseau). Par ailleurs, le nouveau ministre et le chef du gouvernement partagent un même esprit d’ouverture et de rassemblement œcuménique.
Dans l’immédiat, le 28 juin, le nouveau ministre de Michel Rocard, annonce sa démission du Parti républicain dont il était l’un des co-fondateurs et ancien secrétaire général. A Auxerre, la décision du maire d’entrer au gouvernement suscite des tensions dans le milieu politique local. La fédération socialiste se déchire entre ceux, de tendance rocardienne, comme Michel Bonhenry, qui soutiennent cette initiative, et ceux qui, relevant des courants Poperen et Mauroy, comme Jean-Paul Rousseau, se montrent hostiles à cette opération. Le RPR Jean-Louis Hussonois, adjoint du maire et élu en 1983 sur la liste d’union conduite par Jean-Pierre Soisson, envisage de monter une liste dissidente lors des municipales de 1989. Mais chez les 45 000 habitants d’Auxerre, la promotion gouvernementale de « JPS », selon la formule locale, passe plutôt bien. Très populaire depuis son élection à l’hôtel de ville dix-sept ans plus tôt, Jean-Pierre Soisson est « l’enfant du pays ». Les habitants apprécient qu’il se rappelle les prénoms des nouveau-nés, des succès scolaires des jeunes, des deuils familiaux. De fait, l’intéressé, qui disait aimer les gens, n’est pas avare d’une poignée de main avec les habitants qui le tutoient volontiers dans la rue. Sa nomination au ministère du Travail est enfin de nature à rassurer des Auxerrois inquiets du chômage croissant dans une ville dépourvue d’université et victime du déclin de ses grandes entreprises (la famille Soisson elle-même avait dû vendre ses grands magasins au groupe Printemps). Cette stratégie de passer de la gauche de la droite à la droite de la gauche est en tous cas validée par les électeurs d’Auxerre lors des municipales de mars 1989, où le ministre d’ouverture est facilement réélu maire, profitant d’un accord trouvé à la mi-février avec la section socialiste d’Auxerre pour présenter une liste commune, « de rassemblement et d’ouverture », avec le maire sortant.
Durant la campagne des municipales, Jean-Pierre Soisson crée une nouvelle formation politique, France unie, supposée rassembler des éléments du centre-droit désireux, comme lui, d’appuyer la politique du gouvernement. Ce petit club, dont il est le secrétaire général, reprend dans son nom le thème de campagne de François Mitterrand lors des présidentielles du printemps 1988, « la France unie ». Pour donner de l’écho à cette opération, Jean-Pierre Soisson publie en 1990 chez Belfond un ouvrage, Les Mémoires d’ouverture, où il retrace son itinéraire politique, du compagnonnage avec Edgar Faure à la majorité présidentielle de François Mitterrand. Il y pourfend ce qu’il appelle « le centrisme d’effacement » et présente ce qui a été perçu comme une « trahison » comme une fidélité envers lui-même. France unie, qui se veut un « pont » entre droite et gauche, réussit à rallier quelques éléments démocrates-chrétiens, radicaux de gauche et même socialistes. Grenadier-voltigeur de Valéry Giscard d’Estaing hier, sherpa de François Mitterrand désormais, Jean-Pierre Soisson tente de refaire une UDF mais pour le président socialiste en lui amenant des centristes comme Michel Durafour et Jean-Marie Daillet, des radicaux comme Emile Zuccarelli, des gaullistes de gauche comme Jean Charbonnel. Mais Jean-Pierre Soisson ne parvient pas à l’été 1991 à créer un groupe parlementaire distinct de celui de l’Union du centre (UDC) et la formation décline vite après les législatives de 1993.
A l’Assemblée, le ministre du Travail, qui a su conserver dans son cabinet des anciens de l’équipe de Philippe Séguin, parvient parfois à casser les clivages partisans en présentant avec succès des projets consensuels sur le travail précaire et le licenciement. Alors que l’ancien secrétaire d’Etat aux Universités avait agacé par sa précipitation et sa communication trop spontanée, le nouveau ministre sait désormais prendre son temps et jouer du silence. Il peut donc, à l’occasion, faire ce pour quoi il a été nommé : élargir la majorité sur ses marges du centre-droit. Persuasif, séducteur, il réussit en novembre 1988 à faire largement adopter son budget du Travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. Mais les majorités au Palais-Bourbon restent fragiles et Jean-Pierre Soisson en fait l’amère expérience dès octobre 1990, quand les députés rejettent son projet de loi sur l’intéressement et la participation. Tous les groupes de l’opposition, centristes et communises compris, ont fait front contre le texte (289 contre 284). Le fait que le centriste, Bruno Durieux, qui avait soutenu le projet auprès de ses collègues, soit apparu ensuite dans la liste du gouvernement Rocard remanié comme ministre délégué à la Santé, a agacé l’opposition et contribué à cette défiance. Pas une seule voix des groupes RPR et UDF n’a manqué pour voter contre et les 38 députés sur les 40 du groupe UDC ont agi de même. Même si par la suite certains députés enregistrés comme ayant voté « non » (Raymond Barre, Christine Boutin, Jean-Paul Virapoullé, Gérard Grignon…) indiqueront qu’on avait voté contre leur gré et leurs instructions, la règle de l’Assemblée veut qu’on ne revienne pas sur un scrutin.
Au printemps 1991, Jean-Pierre Soisson se retrouve en échec sur le front du chômage. Pendant deux ans et demi, il a obtenu de bons résultats (le nombre de chômeurs diminue de 40 000 en 1988, puis de 60 000 en 1989, les créations d’emplois se multiplient, de l’ordre de 800 000 en trois ans), profitant aussi d’une bonne conjoncture économique internationale et des efforts de ses prédécesseurs (Michel Delebarre et Philippe Séguin). Cette bonne séquence lui a permis de prôner, face aux patrons et aux syndicalistes, les mérites de la modernisation négociée et de la gestion prévisionnelle des emplois. Mais la situation se retourne début 1991 sous l’effet notamment de la Guerre du Golfe qui renchérit le coût de l’énergie et de l’augmentation très forte des taux d’intérêts sous l’effet de la réunification de l’Allemagne qui exige d’importants investissements. En mars 1991, le nombre de chômeurs atteint la barre fatidique des 2,6 millions, inquiétant le gouvernement quant aux prochaines échéances électorales. Alors que Jean-Pierre Soisson s’était efforcé de lutter contre le chômage par la seule vitalité des entreprises, il doit se résoudre, comme d’autres avant lui, à privilégier le traitement social du problème. Dès février 1991, l’objectif annuel des contrats emploi solidarité (CES) passe de 300 à 400 000, le gouvernement tolère les dérogations et facilite les renouvellements. Il préconise également le développement des « emplois de proximité » et annonce un nouvel allègement des charges sociales. Mais l’ensemble reste insuffisant et le ministre comme son directeur de cabinet, Michel de Virville, comprennent qu’ils vont bientôt être rendus responsables de leurs mauvais résultats.
Dès lors, et même si Jean-Pierre Soisson part avant d’avoir mené à bien cette réforme de la formation professionnelle qui lui tenait tant à cœur, il n’est pas mécontent, fin mars 1991, d’abandonner le portefeuille trop exposé du Travail pour celui, moins périlleux, de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration dans le nouveau gouvernement d’Edith Cresson. D’autant que le changement s’accompagne d’une promotion puisque le maire d’Auxerre devient pour la première fois ministre d’Etat. A ce nouveau poste, Jean-Pierre Soisson, toujours convivial et chaleureux, use de ses talents de négociateur. Il réussit à rétablir le dialogue avec les syndicats de fonctionnaires (CFDT, FEN, CFTC, FGAF-Autonomes), un enjeu de taille tant les six millions d’agents actifs et retraités de l’Etat représentent une part non négligeable de l’électorat de la majorité. Il les amène à signer un accord salarial pour 1991 et 1992, met au point sa charte de la Fonction publique et installe une commission du Renouveau du service public. La Première ministre Edith Cresson ayant décidé de délocaliser certains services publics en province, Jean-Pierre Soisson se voit chargé de négocier avec les syndicats le volet social d’accompagnement. Il fait enfin adopter une loi sur l’ouverture de la fonction publique française aux ressortissants européens. En revanche, sur les grands chantiers de la modernisation (négociations sur les conditions de travail et la mobilité), il s’est heurté aux résistances des syndicats et aux réticences de Bercy.
Le 28 mars 1992, Jean-Pierre Soisson renforce son ancrage politique local en prenant la présidence du Conseil régional de Bourgogne. Cette élection s’accompagne toutefois d’une violente polémique car l’intéressé, qui a présenté sa candidature seulement au troisième tour de scrutin, est accusé par une partie de la gauche et les rangs de la droite d’avoir profité de voix frontistes. Refusant de céder à la demande d’Edith Cresson et de Laurent Fabius de procéder à une nouvelle élection à la présidence de région pour lever le doute, Jean-Pierre Soisson estime qu’il a été élu démocratiquement contre le candidat de droite, Dominique Perben, en profitant simplement de divisions dans les rangs RPR et UDF, et dénonce ce qu’il appelle « l’ère du soupçon et de la délation ». Il ne veut pas démissionner sous la pression, estimant que cette décision accréditerait l’idée d’une compromission avec le Front national. A ceux qui lui rétorquent que le conseil régional sera ingouvernable puisque la gauche y est majoritaire, Jean-Pierre Soisson rétorque qu’il entend poursuivre en Bourgogne la logique de rassemblement expérimentée à l’Assemblée et faire de la région « un laboratoire de l’ouverture » en faisant travailler ensemble les socialistes, les écologistes et les réformistes de l’UDF. Reste que le scrutin a jeté le soupçon sur cet homme qui avait fait du rejet de l’extrémisme la principale motivation de son ralliement en 1988 à la majorité présidentielle. A 57 ans, le voici pris entre les feux d’un PS qui resserre les rangs et d’une opposition en ordre de combat. Au même moment, une autre figure de l’ouverture, le maire de Metz, Jean-Marie Rausch, s’empare de la présidence de la région Lorraine. Sommé par la Première ministre Edith Cresson de choisir entre la présidence de région et son portefeuille ministériel (alors que François Mitterrand, acquis au maintien de l’intéressé au gouvernement et à la région, lui avait déclaré : « Quand on tient la Bourgogne, on la garde »), Jean-Pierre Soisson opte pour la Bourgogne. Dominique Perben l’accuse de « quitter le gouvernement avant que le bateau ne coule ».
Jean-Pierre Soisson réintègre le gouvernement, le 2 octobre 1992, comme ministre de l’Agriculture et du développement rural dans le gouvernement dirigé par Pierre Bérégovoy. Il s’agit pour le Bourguignon d’assurer à la gauche le renfort du plus grand nombre possible de voix centristes pour éviter le renversement du gouvernement entre l’ouverture d’une périlleuse nouvelle session parlementaire et les prochaines législatives du printemps 1993. Aux yeux de François Mitterrand, il ne faut pas que le pouvoir s’enferme dans un pré carré de gauche qui se rétrécit d’élection en élection. N’ayant pu mobiliser des personnalités crédibles de la mouvance écologiste, il se tourne vers les anciennes figures de l’ouverture de 1988. Chef de file du mouvement France unie, le maire d’Auxerre a tenté de réunir un groupe de parlementaires non-inscrits, de socialistes indépendants, de gaullistes de gauche et centristes réformistes. Mais même si ses efforts n’ont pas totalement abouti, les liens tissés avec ces élus ont permis de faire voter de nombreux textes des gouvernements Rocard et Cresson. Le score honorable d’une membre de France unie, la socialiste Huguette Bouchardeau, à l’élection au « perchoir » du successeur de Laurent Fabius, le 22 janvier 1992, montre qu’il existe encore un espace pour ces dynamiques d’ouverture. Sur ces considérations, Jean-Pierre Soisson décide en octobre 1992 de créer un nouveau parti, le Mouvement des Réformateurs (MDR), à partir de la fusion entre France unie, l’Association des démocrates de Michel Durafour et Jacques Pelletier, et le club Performances et partage animé par René Ricoll. Il en devient le secrétaire général. La nomination à l’Agriculture de Jean-Pierre Soisson début octobre 1992 constitue enfin une réponse à l’inquiétude du monde paysan, exprimée lors du référendum de Maastricht du 20 septembre 1992 où le « non » avait été massif dans la France rurale. Avec ce politique aux qualités relationnelles éprouvées, François Mitterrand entend apaiser les campagnes avant des échéances électorales importantes. L’intéressé le comprend qui déclare d’emblée avoir reçu du Premier ministre la mission d’être « mieux à l’écoute du monde rural ». Le nouveau ministre manque de temps pour engager de grands chantiers mais il s’investit dans l’aménagement de l’espace rural et défend les intérêts français à Bruxelles ou lors des négociations du GATT. Il revient à l’automne 1993 sur ces quelques mois passés au ministère de l’Agriculture dans un ouvrage publié chez Albin Michel, Politique en jachère.
Lors des législatives de mars 1993, Jean-Pierre Soisson se présente sous l’étiquette de son parti, le MDR, dans la première circonscription de l’Yonne. Il arrive largement en tête au soir du premier tour avec 37,1 % des suffrages exprimés devant son adversaire du Parti républicain, Pierre Bordier (22,3 %). Le bon score du candidat Front national (FN), Claude Moreau (13,6 %), révèle la poussée frontiste en Bourgogne. Au second tour, le député sortant, toujours soutenu par son suppléant Serge Franchis, s’impose facilement avec 63 % des suffrages exprimés, obtenant le meilleur résultat d’une majorité en pleine déroute. La droite ayant remporté ces législatives, Jean-Pierre Soisson ne peut rester au gouvernement. Il démissionne de la présidence de la région Bourgogne (où le RPR Jean-Pierre Bazin lui succède à la mi-avril) pour se concentrer sur ses mandats de député-maire et sur la direction du Mouvement des Réformateurs. Au Palais-Bourbon, il est d’abord non inscrit puis rejoint le groupe République et liberté, et choisit la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.
Au Palais-Bourbon, Jean-Pierre Soisson est secrétaire de deux missions d’information commune (sur l’application de la loi quinquennale relative à l’emploi en février 1994, sur les modalités de la mise en œuvre de la révision constitutionnelle en mars 1996) et siège dans celle sur la sécurité sociale (octobre 1995). Il dépose une proposition de loi relative à la sauvegarde des documents d’Etat (février 1995). L’examen chaque automne du projet de loi de finances, comme les débats consécutifs à des déclarations de ministres, sont l’occasion pour lui d’aborder des sujets qui lui sont chers : aménagement du territoire, agriculture, sécurité sociale, formation professionnelle, affaires étrangères, question européenne, fonctionnement de la vie politique… Il participe aux discussions portant sur des textes de loi relatifs au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle (octobre 1993), aux chantiers du grand stade de Saint-Denis et du Grand Louvre (octobre et novembre 1993), au nouveau code pénal (décembre 1993), à la reconnaissance de la qualité des produits agricoles et alimentaires (décembre 1993), au corps humain et à la modification du code civil (avril 1994), au développement des emplois de service aux particuliers (janvier 1996), au financement de l’apprentissage (février 1996), à l’emploi dans la fonction publique (décembre 1996), à l’apprentissage dans le secteur public non industriel et commercial (février 1997), à l’immigration (février 1997) et au renforcement de la cohésion sociale (avril 1997). Il vote contre le projet de loi relatif aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale (la loi du 22 juillet 1993).
Même si la défaite de la gauche aux législatives du printemps 1993 a sonné le glas de l’opération d’ouverture, Jean-Pierre Soisson ne renonce pas à sa logique de centralité politique. En septembre 1993, il fonde le mouvement centriste « Bourgogne Avant-Centre » (le nom de l’organisation fait écho à sa passion pour le football et l’équipe locale de l’AJ Auxerre). En juin de l’année suivante, il crée et préside le club de réflexion « Interface ». A l’Assemblée, Jean-Pierre Soisson tente, dès l’automne 1993, de rassembler une vingtaine de députés non-inscrits (dont Jean Royer, Bernard Tapie et Jean-Louis Borloo) dans le « groupe des Indépendants ». Il leur promet l’absolue liberté de vote quel que soit le sujet traité dans l’hémicycle et une indépendance politique totale vis-à-vis des autres groupes parlementaires. Le maire d’Auxerre croit encore pouvoir participer « à un renouveau de la gauche » que Michel Rocard semble, selon lui, pouvoir conduire. Mais l’affaiblissement confirmé du PS et du courant rocardien contrarie ses espoirs.
Lors de la campagne présidentielle du printemps 1995, Jean-Pierre Soisson, après avoir soutenu l’idée d’une candidature au centre qui aurait pu être portée par Raymond Barre ou Valéry Giscard d’Estaing, apporte son appui à Jacques Chirac. A ses yeux, le maire de Paris aurait « la force de caractère, la volonté et l’enthousiasme sans lesquels la France ne peut être gouvernée ». Sur le fond, il justifie son ralliement en notant que le candidat néo-gaulliste défend des positions proches des siennes sur la lutte contre l’exclusion et le chômage de longue durée, la construction européenne, la monnaie unique et l’ouverture de l’Union européenne aux pays de l’Est. Réélu à la mairie d’Auxerre le 18 juin 1995, Jean-Pierre Soisson, admis à la retraite de la Cour des comptes à l’automne de la même année, prend la présidence en juin 1996 du Centre national de la fonction publique territoriale (un établissement public exerçant des missions de formation et de gestion au bénéfice des collectivités territoriales) et siège dans le conseil national des missions locales chargées de l’insertion professionnelle des jeunes. Il préside également à partir d’octobre 1996 le comité pour les liaisons autoroutières entre Troyes et Bourges. Jacques Chirac et Alain Juppé ayant décidé de dissoudre l’Assemblée nationale en février 1997, des législatives anticipées sont organisées fin mai. Jean-Pierre Soisson se représente dans la même circonscription de l’Yonne sous l’étiquette MDR. Aidé par son nouveau suppléant, le médecin urgentiste Jean-Louis Hussonnois, vice-président du Conseil régional de Bourgogne, et profitant de l’absence d’un candidat RPR ou UDF, il obtient 31,6 % au premier tour, devant son principal rival, le socialiste Guy Ferez qui se contente de 19,1 % des suffrages exprimés. Au second tour, le député sortant confirme son avance avec 53,3 % des voix.
Au Palais-Bourbon, il s’apparente au groupe UDF (amorçant ainsi un retour vers sa famille politique d’origine), devenu en juin 1998 le groupe UDF-Alliance, puis n’appartient à aucun groupe à partir de septembre 1998 avant de rejoindre le groupe Démocratie libérale et indépendants en novembre 1999 issus de la scission de l’UDF. Il s’inscrit à la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, qu’il quitte en septembre 2000 pour la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il est membre de la commission d’enquête sur les causes, les conséquences et la prévention des inondations (à partir de mars 2001). Durant cette législature, il dépose une proposition de loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la Guerre d’Algérie et des combattants du Maroc et de Tunisie (mars 2000). Il participe aux débats concernant les textes de loi relatifs au développement d’activités pour l’emploi des jeunes (septembre 1997), à la réduction du temps de travail (janvier 1998), au mode d’élection des conseillers régionaux et des conseillers de l’Assemblée de Corse et au fonctionnement de ces conseils régionaux (juin et décembre 1998), à la chasse (mars 2000), à la contraception d’urgence (octobre 2000), à la Corse (mai 2001), à l’autorité parentale (juin 2001). Il vote contre le projet de loi d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail (35 heures) (la loi du 13 juin 1998). Il est opposé à la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (PACS) (la loi du 15 novembre 1999). Il approuve le projet de loi constitutionnelle relative à l’égalité entre les femmes et les hommes (la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999).
Après les régionales du printemps 1998, Jean-Pierre Soisson est de nouveau élu le 20 mars président du Conseil régional de Bourgogne au troisième tour de scrutin par 29 voix contre 24 au candidat de la gauche plurielle, l’ancien député socialiste de la Nièvre Eugène Teisseire. Dans la mesure où la gauche détient dans l’hémicycle une majorité relative avec 24 sièges sur 57 alors que l’alliance RPR-UDF ne compte que 20 élus (auxquels s’ajoutent deux Divers droite), dans la mesure aussi où le FN dispose de neuf sièges et que les deux élus « chasseurs » ont systématiquement voté pour l’un des leurs, Jean-Pierre Soisson a très probablement bénéficié de l’appui de l’extrême droite. Quatre autres présidents de région ont également été élus avec les renforts du FN. Le bureau politique de l’UDF demande à Jean-Pierre Soisson et aux autres présidents de région élus dans les mêmes conditions de démissionner dans la semaine et Jacques Chirac fait savoir au maire d’Auxerre qu’il ne peut y avoir de « compromission avec le FN ». Soumis à une intense pression politique, Jean-Pierre Soisson annonce en direct sur TF1, le 25 mars, qu’il démissionne et se représentera à la reprise de la session de l’Assemblée générale au titre de l’ensemble des élus de l’opposition. Dans la foulée, il fait aussi savoir qu’il quitte la mairie d’Auxerre pour se concentrer sur ses fonctions de député et de conseiller régional. Le 7 avril 1998, Jean-Pierre Soisson est réélu président du Conseil régional, bénéficiant sans doute de voix FN, comme trois autres responsables UDF (Charles Millon en Rhône-Alpes, Jacques Blanc en Languedoc-Roussillon et Charles Baur en Picardie). Dans une « lettre aux Bourguignons », l’ancien maire d’Auxerre avait expliqué la semaine précédente que « la seule majorité existante » était « celle formée par l’addition de la droite républicaine et de l’extrême droite ». Il est soutenu dans cette stratégie par Dominique Perben, député-maire RPR de Chalon-sur-Saône qui, au sein du mouvement gaulliste, défend aussi Charles Millon. Le président Jacques Chirac appelle en revanche solennellement la droite et le centre à ne pas s’allier avec l’extrême droite. Si François Léotard menace les dissidents d’une exclusion de l’UDF, Jean-Pierre Soisson, qui n’est adhérent d’aucune des cinq composantes de l’UDF et qui se contente à l’Assemblée d’être apparenté au groupe UDF, est peu concerné par ces menaces. Il se voit néanmoins exclu du groupe UDF du Palais-Bourbon, le 2 septembre 1998, et siège par la suite avec les non-inscrits. En octobre 1999, il s’apparente au groupe Démocratie libérale (DL) de l’Assemblée, présidé par José Rossi (il rejoint ainsi Jacques Blanc qui s’était apparenté au groupe DL dès août 1998 tandis que Charles Millon reste parmi les non-inscrits). Pour fuir l’agitation politique, Jean-Pierre Soisson se réfugie dans l’écriture de biographies historiques. Celui qui avait déjà pu publier en 2007 une biographie de Charles Le Téméraire chez Grasset, commet ainsi début 2000 chez le même éditeur une étude sur Charles Quint. A partir des sources connues, il brosse un portrait de celui qu’il estime être le « premier Européen des Temps modernes ».
Après la présidentielle du printemps 2002, où Jean-Pierre Soisson a soutenu la candidature du président sortant, Jacques Chirac, l’ancien maire d’Auxerre est candidat lors des législatives de juin à sa réélection dans la 1ère circonscription de l’Yonne, sous l’étiquette du nouveau parti Union pour la majorité présidentielle (UMP). Avec l’aide de son nouveau suppléant, le membre du Conseil d’Etat, Guillaume Larrivé, il réalise un excellent score au premier tour avec 43,9 % des voix, devant sa rivale socialiste, Florence Parly (29,6 %). Il s’impose nettement au second tour avec 57,1 % des suffrages exprimés. Il rejoint le groupe UMP (qui devient l’Union pour un mouvement populaire en novembre 2002) et la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il intègre en mars 2005 la commission d’enquête sur l’évolution de la fiscalité locale. Durant cette législature, il dépose en octobre 2002 une proposition de loi relative à l’indemnisation de la communauté harki. Il participe activement aux débats portant sur des textes de loi relevant de thématiques très variées : salaires, temps de travail et développement de l’emploi (octobre 2002), aggravation des peines punissant les infractions au caractère raciste et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale (décembre 2002), sécurité intérieure (janvier 2003), initiative économique (février 2003), sécurité financière (avril 2003), contribution nationale en faveur des Français rapatriés (juin 2004), réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise (février 2005), égalité des chances (février 2006), programme pour la recherche (mars 2006), accès des jeunes à la vie active en entreprise (avril 2006), immigration et intégration (mai 2006), secteur de l’énergie (septembre 2006), fonction publique territoriale (octobre 2006), prévention de la délinquance (novembre 2006), modernisation du dialogue social (décembre 2006), égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives (février 2007), droit opposable au logement (février 2007), protection de l’enfance (février 2007). Il approuve le projet de loi constitutionnelle relatif à l’organisation décentralisée de la République (la loi constitutionnelle du 28 mars 2003). Il vote en faveur du projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution sur la Constitution européenne (la loi constitutionnelle du 1er mars 2005).
Aux élections régionales de 2004, la liste présentée par Jean-Pierre Soisson est battue par celle emmenée par François Patriat et qui rassemble une coalition PS-PC-Verts, marquant le déclin de l’influence politique locale de l’ancien « duc de Bourgogne ». Lors de la présidentielle de mai 2007, Jean-Pierre Soisson soutient la candidature de Nicolas Sarkozy. Les législatives de juin 2007 sont l’occasion d’une dernière campagne électorale pour l’ancien maire d’Auxerre qui se présente pour sa réélection dans la 1ère circonscription de l’Yonne sous l’étiquette UMP. Il obtient 39,4 % des voix au premier tour face à la socialiste Mireille Le Corre (21,9 %) et s’impose au second tour avec 54,5 %. Il reste fidèle au groupe UMP et siège à la commission de la défense nationale et des forces armées. Il fait partie du groupe d’études sur les biocarburants et préside le groupe d’amitié France-République tchèque. Il est membre titulaire du comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (février 2008) et de la mission d’information sur les questions mémorielles (avril 2008). En décembre 2008, il dépose une proposition de loi visant à taxer les revenus issus de la spéculation boursière afin d'endiguer la seule logique financière dans la conduite des entreprises. Durant cette législature, il reste un député actif, s’impliquant dans l’examen de nombreux textes de loi portant sur le travail, l’emploi et le pouvoir d’achat (juillet 2007), les libertés et responsabilités des universités (juillet 2007), la création d’une délégation parlementaire au renseignement (juillet 2007), la maitrise de l’immigration, l’intégration et l’asile (septembre 2007), les organismes génétiquement modifiés (avril 2008), la rénovation de la démocratie sociale et la réforme du temps de travail (juillet 2008), les revenus du travail (septembre 2008), la généralisation du revenu de solidarité active et la réforme des politiques d’insertion (septembre 2008), la police et la sécurité (mars 2011), le rapprochement familial pour les détenus condamnés (janvier 2012).
Dès janvier 2011, Jean-Pierre Soisson annonce qu’il ne briguera pas un nouveau mandat lors des législatives de l’année suivante qui voit l’élection de son suppléant, Guillaume Larrivé. Il abandonne la vie politique active, se contentant de quelques prises de positions publiques comme lorsqu’il soutient les candidatures d’Emmanuel Macron aux présidentielles de 2017 et 2022. De 2003 à 2017, il continue de publier des ouvrages, alternant les biographies historiques faisant souvent écho à la Bourgogne (Marguerite, princesse de Bourgogne en 2003, Philibert de Chalon, prince d’Orange en 2005, Paul Bert l’idéal républicain en 2008, Saint Germain d’Auxerre en 2011, Sainte Geneviève de Paris en 2011, Jacques Amyot en 2013) et les mémoires (Hors des sentiers battus, chronique d’une vie politique en 2015) ou essais (Les Polars d’Edgar, Edgar Faure en ses romans en 2017). Jean-Pierre Soisson décède dans sa ville natale d’Auxerre le 27 février 2024 à 89 ans. Cette figure importante de la vie politique française des années 1970, 1980 et 1990 a été député de l’Yonne pendant plus de 19 ans, maire d’Auxerre pendant 27 ans, président du Conseil régional de Bourgogne pendant 6 ans et plusieurs fois secrétaire d’Etat ou ministre dans des gouvernements de droite ou de gauche. En politique, il n’a jamais choisi l’attendu, que ce soit en quittant le gouvernement pour créer le PR en 1977, en rejoignant Raymond Barre dès 1984, en s’enrôlant derrière Michel Rocard en 1988, en étant un centriste d’appui auprès de Pierre Bérégovoy en 1992, ou en acceptant de facto les voix du FN au Conseil régional de Bourgogne en 1998 au risque, in fine, de brouiller son image. Mais ce barriste de conviction, mitterrandien de raison et radical de tempérament, avait su, grâce à un sens politique aigu et à un ancrage local solide, dépasser les clivages partisans. Commandeur des Palmes académiques et des Arts et Lettres, commandeur du Mérite agricole, il était aussi titulaire de la Croix de la valeur militaire et de la Croix du combattant.