Théodore Steeg
1868 - 1950
Né le 19 décembre 1868 à Libourne (Gironde). Décédé le 10 décembre 1950.
Député de la Seine de 1904 à 1914.
Sénateur de la Seine de 1914 à 1944.
Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts du 2 mars 1911 au 14 janvier 1912, du 21 janvier au 22 mars 1913 et du 20 mars au 12 septembre 1917.
Ministre de l'Intérieur du 14 janvier 1912 au 21 janvier 1913, du 12 septembre au 16 novembre 1917 et du 20 janvier 1920 au 16 janvier 1921.
Ministre de la Justice du 17 avril au 11 octobre 1925 et du 21 février au 2 mars 1930.
Président du Conseil et Ministre des Colonies du 13 décembre 1930 au 22 janvier 1931.
Ministre des Colonies du 18 janvier au 13 mars 1938.
Ministre d'Etat du 13 mars au 10 avril 1938.
Fils de Jules Steeg qui fut député de la Gironde de 1881 à 1889, inspecteur général de l'Instruction publique et directeur de l'Ecole normale primaire supérieure de Fontenay-aux-Roses, Théodore Steeg appartenait à une vieille famille de souche protestante. Il fit ses études secondaires au collège de Libourne, puis au lycée Henri IV à Paris. Il poursuivit de brillantes études supérieures à la Sorbonne et à la Faculté de droit, lauréat de cette dernière en 1887. Il obtint les diplômes de licencié en droit et de licencié ès lettres en 1890. En 1895, il fut classé premier à l'agrégation de philosophie.
Après avoir été professeur à l'Ecole alsacienne de 1892 à 1894, il fut nommé professeur de philosophie au collège de Vannes, puis au collège de Niort. Puis il revint à Paris où il enseigna la philosophie à l'Ecole alsacienne et au lycée Charlemagne jusqu'en 1904. En 1897, il fonda avec Ferdinand Buisson, Maurice Bouchor, Emile Duclaux et Madame Kergomard l' « Union populaire » dont il fut pendant deux ans le secrétaire général.
Dès lors, il entra activement dans la politique. Une élection législative partielle eut lieu pour pourvoir au remplacement d'Emile Dubois, député de la Seine, décédé le 7 mai 1904. Théodore Steeg se présenta et fut élu le 24 juillet 1904, comme radical-socialiste, député de la 2e circonscription du XIVe arrondissement de Paris. Au premier tour de scrutin, il arrive en tête avec 3.385 voix sur 7.766 votants contre 3.380 au docteur Doyen, 688 à Courtois, 127 à Laberderque et 50 à Montreux. Au second tour, il l'emporta par 4.203 voix contre 5.320 à Doyen, sur 7.805 votants.
Théodore Steeg, qui se fit inscrire en 1905 comme avocat au barreau de Paris, fut réélu à des majorités croissantes en 1906 et en 1910. En 1906, il recueillit 4.930 suffrages sur 9.880 votants contre 3.831 à Poirier de Narçay et 907 à Courtois. En 1910, il obtint 5.097 voix sur 10.147 votants contre 3.392 à Nolent, 1.190 à Courtois, 157 à Koch et 3 à Mersch.
A peine élu, Théodore Steeg marqua sa place au parlement, notamment dans une campagne très vive en faveur de la protection et de l'éducation de l'enfance. Elu en 1906 membre de la commission du budget, il se vit confier le rapport du budget des postes et télégraphes. En 1907, trois ans après être entré à la Chambre, il fut nommé rapporteur du budget de l'Instruction publique.
Désigné en quelque sorte pour le portefeuille de l'Instruction publique, Théodore Steeg devint le grand maître de l'Université le 2 mars 1911, lors de la formation du cabinet Monis. Il le demeurera jusqu'au 14 janvier 1912 car il conserve son poste dans le cabinet Caillaux qui, le 27 juin 1911, succéda au cabinet Monis, maintenu dans ces hautes fonctions par la sympathie confiante du parlement et l'attachement dévoué des maîtres de l'Université tout entière à tous les degrés de la hiérarchie.
Le 14 janvier 1912, Théodore Steeg devint ministre de l'Intérieur dans le premier cabinet Poincaré. Il le restera jusqu'au 21 janvier 1913, avant de revenir pour un court passage ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts dans les 3e et 4e cabinets Briand qui durèrent, l'un du 21 janvier au 18 février 1913, l'autre du 18 février au 22 mars 1913.
Théodore Steeg reprit alors son siège de député, ayant participé pendant deux ans aux Conseils du gouvernement sans avoir connu un échec parlementaire au cours de cette longue période. Avec Violette, il fit modifier dans un sens humanitaire l'article 331 du code civil en ce qui concerne la législation des enfants adultérins (lois des 7 novembre 1907 et 30 décembre 1915).
A la veille de la guerre, Théodore Steeg quitta le Palais Bourbon pour le Luxembourg. Le 12 mars 1914, une élection sénatoriale eut lieu dans le département de la Seine pour pourvoir au remplacement de Bassinet, décédé le 12 février. Steeg se présenta et fut élu au second tour de scrutin par 557 voix sur 1.012 votants contre 279 à Caron.
Inscrit au groupe de la gauche démocratique, Théodore Steeg entra dès 1915 à la commission des finances et siégea dans de nombreuses commissions spéciales.
Le 20 mars 1917, quand se forma le 5e cabinet Ribot, il y reprit pour la cinquième fois le portefeuille de l'Instruction publique. Il y fit adopter la loi sur les pupilles de la Nation.
Au cabinet Ribot succéda, le 12 septembre 1917, le premier cabinet Painlevé : c'était le moment le plus difficile de la guerre. Théodore Steeg y accepta le portefeuille de l'Intérieur, si lourd à cette époque d'angoissantes responsabilités. Il le garda jusqu'au 16 novembre 1917.
En 1918 et 1919, il rentra dans le rang et se fit remarquer par une activité parlementaire intense.
Théodore Steeg sollicita le renouvellement de son mandat de sénateur lors des élections du 11 janvier 1920. Il fut réélu au premier tour de scrutin par 552 voix sur 1.017 votants.
Du 20 janvier 1920 au 16 janvier 1921, il fut ministre de l'Intérieur dans le cabinet Millerand, puis dans le cabinet Leygues. Il fit voter la loi du 25 janvier 1920 relative à l'extension des fonds communs des communes et des départements sur le chiffre d'affaires, sur les automobiles. Il assura aussi des ressources nouvelles aux communes dont la situation financière était particulièrement difficile.
De retour à son fauteuil de sénateur, il fut élu président de la nouvelle commission d'administration générale, départementale et communale.
Les lois d'affranchissement votées en faveur des indigènes algériens rencontraient dans la colonie une opposition très vive qui suscitait par contre-coup, dans la masse indigène, des agitations inquiétantes. Le rapporteur de ces lois parut au gouvernement l'homme indiqué pour en assurer l'application. Théodore Steeg devint gouverneur général de l'Algérie le 28 juillet 1921. Il trouva ce pays tout frémissant encore des angoisses de la guerre, en proie aux crises de l'après-guerre. Quatre années d'une administration pratique, libérale dans ses méthodes, attentive à stimuler les énergies de tous vers une activité solidaire et féconde, ranimèrent en Algérie avec l'apaisement des esprits le goût du labeur, la confiance dans l'avenir et, par là même, une prospérité dont chaque année marqua les surprenants progrès.
Le 17 avril 1925, Steeg se vit brusquement appelé à prendre, dans le cabinet de conciliation à gauche, formé par Painlevé, le ministère de la Justice. Il quitta donc l'Algérie après avoir jeté les bases indispensables de l'œuvre à accomplir. Il eut pour successeur Violette
Mais en ce moment, que la situation financière rendait déjà critique, une rude surprise nous vint du Maroc : l'agression foudroyante des tribus du Nord menaçait jusqu'à l'existence du protectorat. Atteint par la maladie, le maréchal Lyautey allait quitter son poste. Le gouvernement, faisant fonds sur l'expérience des choses africaines acquise par Steeg en Algérie, lui demanda d'accepter la redoutable mission d'assurer au Maroc, en même temps que le rétablissement de la paix, la substitution du régime civil au régime militaire.
Le 11 octobre 1925, ayant donné sa démission de garde des sceaux, Théodore Steeg fut nommé commissaire résident général au Maroc jusqu'à la fin de l'année 1928. La loi sur les incompatibilités le fit alors rentrer en France.
Dès son arrivée à Rabat, Steeg mit toute son ingéniosité à épargner à nos jeunes soldats les aléas redoutables d'une campagne nouvelle. Sa diplomatie dissocia les forces adverses, réduisit l'ennemi à solliciter la paix et, finalement, à se soumettre sans amertume. Steeg joua un rôle très adroit et particulièrement efficace lorsque se posa la question de la succession à l'empire chérifien lors de la reddition d'Abd-el-Krim.
Entre temps, en 1927, il s'était représenté aux élections et avait été confirmé dans son mandat de sénateur. Au premier tour de scrutin, il obtint 258 voix sur 1.064 votants et au second tour 555 voix sur 1.071 votants.
De 1929 à 1936, il fut membre de la commission des colonies - dont il devint président -, de la commission des affaires étrangères et de la commission de l'Algérie. Puis il appartint également à la commission de l'enseignement. En 1929, avec Mounié, il déposa un amendement au projet relatif aux rapports entre bailleurs et locataires de locaux d'habitation.
Le 21 février 1930, il redevint garde des sceaux dans l'éphémère premier cabinet Chautemps : en effet, il cessa ses fonctions dix jours après, le 2 mars 1930.
Le 13 décembre de cette même année, Théodore Steeg accepta la présidence du Conseil et forma un cabinet dans lequel il se réserva le portefeuille des Colonies. Appuyé par le Sénat, il ne pouvait compter sur une majorité stable dans une Chambre à « tendance modérée » et, le 22 janvier 1931, il était renversé à propos d'une interpellation sur la politique agricole et la spéculation sur les blés. En cette période de crise aiguë, Steeg rendit au pays un nouveau grand service en constituant un ministère qui, malgré sa courte durée, eut une grande influence sur les esprits.
Le 14 janvier 1936, Steeg fut réélu sénateur dès le premier tour de scrutin, avec 696 voix sur 1.249 votants. Il garda ses fonctions de président de la commission des colonies et continua d'appartenir à celles des affaires étrangères, de l'enseignement et de l'Algérie.
En 1938, il accepta encore patriotiquement d'être ministre des Colonies dans le 5e cabinet Chautemps (18 janvier au 13 mars 1938), puis ministre d'Etat dans le 2e cabinet Léon Blum (13 mars 1938 au 10 avril 1938).
Le 10 juillet 1940, au Congrès de Vichy, Théodore Steeg s'abstint volontairement lors du vote des pouvoirs constitutionnels.
Publiciste, il fit paraître des ouvrages importants : Edgar Quinet, l'œuvre, le citoyen, l'éducateur (1903) ; La réforme électorale et l'union des républicains (1912) ; 1914-1918, recueil d'articles et de discours ; La paix française en Afrique du Nord (1926). Il collabora à nombre de revues et de journaux.