Georges Turines
1895 - 1979
TURINES (Georges, Victor)
Né le 26 janvier 1895 à Lautignac (Haute-Garonne)
Décédé le 4 juillet 1979 à Villefranche-de-Lauragais (Haute-Garonne)
Député de la Haute-Garonne de 1951 à 1955
Le père de Georges Turines, Joseph, exerce le métier d'instituteur ; sa mère, Marie Taulet, est sans profession. Son frère aîné, Maxime, est maire de Fonsorber et conseiller général communiste de la Haute Garonne. Georges obtient son brevet élémentaire au lycée de Saint-Gaudens en juillet 1910, puis entre à l'Ecole normale de Toulouse le 1er octobre 1912. Titulaire du brevet supérieur en juillet 1914, il est nommé instituteur intérimaire à Auterive le 1er octobre 1914. Mobilisé quinze jours plus tard comme deuxième classe, il est promu sous-lieutenant et entre à l'école des cadres de Cousances-aux-Forges en Champagne. Le jeune officier est fait prisonnier la dernière année de la guerre. Libéré, il est démobilisé le 30 juillet 1919. Nommé instituteur stagiaire le 1er octobre suivant, titularisé le 1er janvier 1921, il devient directeur d’école, puis directeur de cours complémentaires à Villefranche de Lauragais. Il exerce jusqu'à sa retraite le 1er octobre 1950.
Enseignant laïque, Georges Turines est chef de la chorale Les Chanteurs du Laurageois. Militant au Parti radical depuis 1931, il est élu conseiller d’arrondissement en 1937.
En septembre 1939, de nouveau mobilisé comme officier d’état-major dans le secteur fortifié du Haut Rhin, Georges Turines échappe aux troupes allemandes lors de la débâcle de l’armée française, mais il est interné en Suisse jusqu'au 23 décembre 1940. De retour en France, il contacte la Résistance, probablement en 1942. L'ancien officier est désigné comme responsable de l’Armée secrète pour le secteur du Lauragais.
Président du comité de Libération de Villefranche-de-Lauragais, commune rurale d’environ 2 000 habitants, Georges Turines préside la délégation municipale de la ville avant d’en devenir le premier magistrat, en avril 1945. Il est reconduit à la tête de la municipalité en 1947 et exerce les fonctions de maire jusqu'en 1965. À cette date, bien qu'en ballottage favorable, il ne se maintient pas au deuxième tour.
Par contre, Georges Turines échoue dans la conquête du canton en septembre 1945, étant devancé de 71 voix par le socialiste Berseille. Mais cette défaite est d’abord celle de son parti. En effet, la Libération venue, le parti radical et radical-socialiste auquel appartient toujours Turines connaît une défaite historique en Haute-Garonne à l’automne 1945. Après avoir été supplanté par les socialistes qui ont pris le contrôle du conseil général en septembre 1945, la liste conduite par Hippolyte Ducos pour l’élection à la première Assemblée nationale constituante ne rassemble que 17 308 suffrages sur 229 719 exprimés (7,5 %) et n’obtient aucun élu. Au discrédit frappant alors le parti radical considéré comme le parti de la Troisième République, s’est ajouté localement une division féroce entre « jeunes radicaux » et anciens radicaux, voire « radicaux résistants ».
Ducos provisoirement écarté, le parti se reconstruit difficilement sous l’égide de militants dynamiques issus de la Résistance. Pour les élections à la deuxième Assemblée nationale constituante, le 2 juin 1946, ils choisissent comme tête de liste « radicale-socialiste et du Rassemblement des gauches républicaines (RGR)», un homme qui n’est pas originaire du département, Maurice Bourgès-Maunoury, ancien commissaire de la République à Bordeaux et Compagnon de la Libération. Ce dernier entreprend de constituer une liste d’union et prend à ses côtés un vétéran, ancien conseiller général et membre honoraire de la Chambre de commerce, Lucien Sarraute, et Georges Turines enseignant laïque et résistant. A ce groupe se joint une femme résistante et un artisan maçon, membre des jeunesses radicales. Les radicaux arrivés au quatrième rang, derrière les représentants du tripartisme, triplent leurs suffrages avec 50 353 voix sur 248 280 suffrages exprimés et surtout retrouvent un député avec Maurice Bourgès Maunoury.
Georges Turines ne figure pas sur la liste radicale pour l’élection de la première Assemblée de la Quatrième République, le 10 novembre 1946. Bourgès-Maunoury, toujours tête de liste, a tenté de renouveler encore plus les candidatures en associant de jeunes étoiles radicales comme Maurice Faure. La liste RGR recule, avec 41 519 suffrages.
Georges Turines, responsable départemental du parti radical, est élu conseiller général de Villefranche-de-Lauragais en mars 1949. Au premier tour, il dépasse le sortant socialiste de 400 voix et, bénéficiant du retrait des candidats indépendant et gaulliste, il est élu dans une triangulaire, contre les candidats du PC et de la SFIO. Après avoir appelé au premier tour à la suppression totale du dirigisme et à des économies par le renvoi des « fonctionnaires inutiles », il a invité « tous les partisans de l'ordre de la liberté » à le soutenir au second tour. Il a proposé, par ailleurs, la fondation d'une coopérative cantonale de « labours et de battages » et la construction d'une cité ouvrière déjà amorcée par son conseil municipal. Par cette victoire, il participe ainsi activement à la reconquête d’une partie de l’influence du parti radical aux dépens des socialistes en reprenant à ces derniers un siège à l’assemblée départementale.
Pour les élections législatives du 17 juin 1951, Bourgès-Maunoury, alors jeune secrétaire d’Etat à la présidence du Conseil, tirant le bilan de l’insuccès de novembre 1946, choisit d’associer à sa liste d’anciens élus ou vétérans des luttes locales, comme Hippolyte Ducos et Georges Turines ; ce dernier est placé pour la deuxième fois en troisième position sur la liste RGR, présentée par le parti radical et radical-socialiste et l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR). Elle progresse de 17 000 voix et arrive en tête avec 58 953 suffrages sur 307 312 inscrits et 228 534 exprimés (25,8 %). Le facteur décisif de ce succès selon le préfet est La Dépêche du Midi tirée à 250 000 exemplaires.
Georges Turines, militant chevronné du parti radical-socialiste, devient député de la Haute-Garonne, le 17 juin 1951, à soixante et un ans. Il est élu grâce à l’apparentement qui, majoritaire avec la SFIO et le Mouvement républicain populaire (MRP), a emporté tous les sièges : trois vont aux socialistes, trois aux radicaux socialistes et un au MRP.
L’activité parlementaire du nouvel élu est peu soutenue sur le plan législatif. Nommé membre de la commission du suffrage universel, du règlement et des pétitions (1951-1954), il est aussi désigné à la commission du travail et de la sécurité sociale (1951-1955) et, en fin de mandat, le 18 janvier 1955, à la commission de l’éducation nationale. Il ne dépose aucun texte, ni n'intervient à la tribune en plus de quatre années. Cependant, il s'occupe très activement de ses administrés, multipliant les interventions en leur faveur.
Les votes de Georges Turines sont conformes, dans un premier temps, à ceux de la majorité du parti radical et surtout à ceux de ses colistiers, Bourgès-Maunoury et Ducos. Il vote contre les lois Marie et Barangé favorables à l’enseignement privé (septembre 1951), approuve la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) et la Communauté européenne de défense (CED) en 1951 et 1952, soutient, jusqu’au cabinet Laniel, les gouvernements sur leur politique de réforme (échelle mobile des salaires ou instauration de la TVA) et leur politique coloniale, notamment celle de Laniel sur l’Indochine. Mais il abandonne ce dernier lors du vote de confiance du 13 mai 1954 après Diên Biên Phu – contrairement à Bourgès-Maunoury qui s’abstient volontairement et à Ducos qui vote pour le gouvernement – et contribue à son renversement le 12 juin suivant. Le député radical de la Haute-Garonne soutient ensuite le gouvernement Mendès France jusqu’au bout. Il s’abstient volontairement sur la question préalable opposée par le général Aumeran à la ratification du projet de Communauté européenne de défense (CED) dont l’adoption, le 30 août 1954, vaut rejet du traité. Il approuve les accords de Londres relatifs à la fin de l'occupation de la République fédérale d’Allemagne (RFA), le 12 octobre 1954, mais s’oppose à la ratification de ceux de Paris autorisant l'entrée de ce pays dans l'OTAN et son réarmement (29 décembre 1954). En février 1955, il vote l'investiture d'Edgar Faure, approuve sa demande d’instauration de l’état d’urgence en Algérie, mais contribue à sa chute le 29 novembre.
Georges Turines est de nouveau placé en troisième position sur la liste radicale, derrière Bourgès-Maunoury et Ducos pour l’élection législative du 2 janvier 1956. Un nouvel apparentement conclu entre les partenaires du Front républicain (SFIO, radicaux-socialistes et Républicains sociaux) écarte cette fois le MRP qui a participé à la majorité sortante combattue par les radicaux du Sud-Ouest ralliés à Pierre Mendès France. Faute de moins de 2 % des voix, cette alliance n’atteint pas la majorité absolue. Le PC retrouve deux députés et les radicaux et la SFIO perdent chacun un siège, respectivement ceux de Rey et de Turines.
Georges Turines est éloigné définitivement de l’Assemblée après avoir échoué comme candidat radical socialiste en novembre 1958 dans la cinquième circonscription de la Haute-Garonne (Muret Villefranche). Avec 3 500 suffrages sur 40 869 exprimés, il arrive en cinquième et dernière position.
Officier de la Légion d’honneur, il a reçu de nombreuses distinctions à titre militaire : croix de guerre 1914-1918 et 1939-1945, médailles des évadés et de la Résistance, croix des services militaires volontaires. Il était officier de l’Instruction publique et médaillé de l’éducation physique. Il disparaît le 4 juillet 1979.