Jeannette Vermeersch-Thorez
1910 - 2001
VERMEERSCH (Julie, dite Jeannette, épouse THOREZ)
Née le 26 novembre 1910 à Lille (Nord)
Décédée le 5 novembre 2001 à Callian (Var)
Députée de la Seine de 1945 à 1958
Sénateur de la Seine de 1959 à 1968
Jeannette Vermeersch est née le 26 novembre 1910 dans une famille populaire du Nord : son père était docker et sa mère ouvrière du textile. Elle est la dernière d’une famille de neuf enfants. Dès l’âge de onze ans, elle fait des ménages et devient servante. A treize ans, elle devient ouvrière du textile.
Sa vie militante commence dès l’année 1927 : ses premières grèves, puis son adhésion à la CGTU (le syndicat lié au parti communiste), à la Jeunesse communiste, puis au parti communiste. Devenue l’une des responsables des jeunesses communistes du Nord, elle se rend en URSS en 1929. Elle y séjourne pendant plusieurs mois en travaillant à l'Internationale syndicale rouge. Elle rencontre alors Maurice Thorez pour la première fois. Après son retour, en juillet 1930, ses responsabilités s’accroissent ; membre du secrétariat de la Jeunesse communiste (JC) du Nord, puis de la direction nationale de la JC en 1932, elle devient permanente du parti et se lie sentimentalement avec Maurice Thorez, leur couple ne se formalisant qu’en 1934. Jeannette Vermeersch et Maurice Thorez auront trois fils : Jean, né en 1936, Paul, né en 1940 à Moscou, et Pierre, né en 1946. Le 17 septembre 1947, Maurice Thorez et Jeannette Vermeersch légalisent leur union.
À partir de 1933, Jeannette Vermeersch appartient au secrétariat national de la Jeunesse communiste ; elle devient une des principales dirigeantes, avec Danielle Casanova et Claudine Chomat, de l’organisation communiste de masse : l’Union des jeunes filles de France.
En octobre 1939, elle aide Maurice Thorez à déserter de son unité militaire, à Chauny (Aisne), et à rejoindre Bruxelles, puis Moscou. Ils passent la guerre en Union soviétique. À partir de son retour en France — elle rentre avec Maurice Thorez, le 27 novembre 1944 —, elle devient une des principales dirigeantes communistes françaises. Elle est élue membre suppléant du Comité central en juin 1945, puis membre titulaire lors du congrès suivant, en juin 1947. Trois ans plus tard, elle intègre le bureau politique, d’abord comme suppléante, puis comme titulaire en 1954.
Parallèlement, le PCF confie à Jeannette Vermeersch des fonctions parlementaires. En effet, le parti la place en deuxième position — toujours derrière Marcel Cachin — dans cette deuxième circonscription de la Seine qui regroupe les 1er, 2ème, 8ème, 9ème, 16ème, 17ème et 18ème arrondissements parisiens. Les scores obtenus de 1945 à 1956 — oscillant entre 19% et 23% — permettent l’obtention systématique de deux sièges (toujours pour Marcel Cachin et Jeannette Vermeersch) et parfois d’un troisième, conquis par Henri Wallon lors de la Constituante de 1945, puis par Gaston Auguet, lors des législatives de 1946. Concrètement, la liste communiste obtient 100 192 voix (22,6% des suffrages exprimés) en octobre 1945, 98 866 voix (21,9%) en juin 1946, 105 120 voix (23,3%) en novembre, 80 440 voix (19,3%) en juin 1951 et 102 621 voix (20,88%) en janvier 1956. Sous la Cinquième République, elle est sénateur de la Seine, de 1959 à 1968.
À l’Assemblée, Jeannette Vermeersch appartient à la commission du travail et de la sécurité sociale lors des deux Constituantes et de la première année de la première législature de la Quatrième République (1946-1947). En outre, à partir de 1948 et jusqu’à la fin de la législature en 1951, elle fait également partie de la commission de la famille, de la population et de la santé publique, appartenance à laquelle elle se limite dans les deuxième et troisième législatures (1951-1958). L’activité parlementaire de Jeannette Vermeersch est double. Son principal travail consiste à prendre position — par des interventions, le dépôt de propositions de résolution ou de propositions de loi — sur les questions sociales. Elle prend à cœur de défendre ainsi les intérêts des domestiques, n’oubliant pas qu’elle le fut dans sa jeunesse, et la cause de l’égalité hommes-femmes. Dans le même temps, elle prend parfois la parole dans l’hémicycle, cette fois-ci en tant que dirigeante communiste, pour participer aux débats de politique générale ou intervenir dans les grandes questions de politique extérieure. Sous les deux Assemblées constituantes, elle dépose deux propositions de loi et une proposition de résolution ; elle intervient à trois reprises en séance, en posant au ministre du Travail une question sur l’égalité des salaires masculins et féminins. Durant son premier mandat, elle dépose trois propositions de loi et deux propositions de résolution ; elle intervient à quatre reprises en séance, pour soutenir notamment, le 14 juin 1950, une demande d’interpellation sur les poursuites engagées contre 24 femmes de France qui ont voté pour la paix. Entre 1951 et 1955, son activité parlementaire est plus soutenue encore, en ce qui concerne les textes déposés par ses soins. Elle rédige quinze propositions de loi et trois propositions de résolution. En revanche, elle n’intervient à aucune reprise en séance. Au cours de la dernière législature de la Quatrième République, elle dépose à nouveau de nombreux textes : huit propositions de loi et deux propositions de résolution. Comme sous son mandat précédent, elle n’intervient que rarement en séance, en l’occurrence qu’une fois, le 17 octobre 1956. Elle expose alors ses observations sur le résultat des élections du 2 janvier 1956, sur les promesses du Front républicain concernant le problème algérien ou sur les poursuites engagées contre les communistes et le journal L’Humanité.
En effet, Jeannette Vermeersch est rapidement devenue l’un des principaux dirigeants du PCF, position renforcée pendant l’absence de son mari puisque, étant tombé malade, Maurice Thorez était parti se faire soigner en URSS, de novembre 1950 à avril 1953. Pendant cette période, Jeannette Vermeersch assure la liaison entre son mari et le bureau politique, et joue un rôle de premier plan dans la dénonciation des rivaux, réels ou supposés, de Thorez : André Marty et Charles Tillon. A la direction du PCF, même si son statut particulier la fait intervenir dans de multiples domaines, son principal thème de spécialisation reste celui des femmes, puisqu’elle demeure la vice-présidente de l’Union des femmes françaises. À ce titre, elle se fait remarquer en dénonçant, en 1956, les procédés contraceptifs qu’elle désignait, afin de les connoter négativement, sous le terme de « Birth control ». Malgré les remous suscités par ses propos, qui vont contre la tradition et les coutumes des médecins communistes, son point de vue est soutenu sans réserves par Maurice Thorez. Il est vraisemblable que cette campagne massive, qui survient au lendemain du XXème congrès du parti soviétique, cherche à faire diversion pour détourner l’attention des débats sur le contenu du rapport contre Staline prononcé à huis-clos par Khrouchtchev, en février 1956.
En tout état de cause, après la déstalinisation, Jeannette Vermeersch, en compagnie de son mari jusqu’en 1964, puis seule après la mort de celui-ci, apparaît comme la gardienne vigilante de l’orthodoxie communiste. Elle participe à la campagne semant le doute sur la véracité du rapport Khrouchtchev. Elle dénonce violemment les révoltes qui surviennent dans les démocraties populaires. Elle soutient ainsi avec vigueur l’intervention des troupes du Pacte de Varsovie contre la révolution hongroise d’octobre-novembre 1956. De même, lorsque l’intervention soviétique contre le printemps de Prague en août 1968 est désapprouvée par la direction du PCF, Jeannette Vermeersch démissionne du bureau politique et du Comité central en octobre 1968. Entre-temps, de 1959 à 1968, elle est sénateur de la Seine.
Désormais en retraite militante, elle n’intervient publiquement dans le débat politique qu’à de rares occasions, toujours pour défendre les principes révolutionnaires du communisme et pour prendre ses distances avec les directions effectives du PCF. En revanche, à la fin de sa vie, elle prend une réelle distance avec Staline et l’expérience soviétique. Mais, jusqu’à son décès, elle conserve sa carte du PCF et maintient son attachement à l’idéal communiste.
Jeannette Vermeersch est l'auteur des ouvrages Vers quels lendemains ? De l’internationalisme à l’eurocommunisme (Paris, Hachette, 1979) et de La vie en rouge (Paris, Belfond, 1998). Elle disparaît le 5 novembre 2001.