Aloyse Warhouver

1930 - 2024

Informations générales
  • Né le 26 février 1930 à Hoff (Moselle - France)
  • Décédé le 16 juin 2024 à WALScHEID (Moselle - )

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IXe législature
Mandat
Du 13 juin 1988 au 1er avril 1993
Département
Moselle
Groupe
Non inscrit
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Xe législature
Mandat
Du 2 avril 1993 au 21 avril 1997
Département
Moselle
Groupe
République et liberté
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
XIe législature
Mandat
Du 1er juin 1997 au 18 juin 2002
Département
Moselle
Groupe
Radical, citoyen et verts

Biographies

Biographie de la Ve République

WARHOUVER (Aloyse)
Né le 26 février 1930 à Hoff (Moselle)
Décédé le 16 juin 2024 à Walscheid (Moselle)

Député de la Moselle de 1988 à 2002

Aloyse Warhouver naît le 26 février 1930 à Hoff dans une famille d’agriculteurs. Le jeune homme obtient son baccalauréat et part effectuer son service militaire comme officier honoraire en Algérie (1951-1953). À son retour, il devient instituteur et dirige parallèlement une exploitation agricole. En 1954, il épouse Jacqueline Morice, originaire de Freyming-Merlebach. Le couple aura cinq enfants.

Il débute sa carrière politique aux côtés de Pierre Messmer, ancien ministre des Armées sous le général de Gaulle (1960-1969), parachuté en 1968 dans la 4e circonscription de Moselle (Sarrebourg) après son échec l’année précédente dans le Morbihan. Obtenant 72% des suffrages exprimés, Pierre Messmer entend bien s’ancrer dans une circonscription largement rurale qui regroupe deux arrondissements, l’un agricole (Château-Salins), l’autre plus industrialisé et dialectophone autour du secteur de la chaussure (Sarrebourg). Facilement élu à la mairie de Sarrebourg en 1971, petite ville de près de 11500 habitants, le député intègre dans son réseau Aloyse Warhouver, fraîchement élu conseiller municipal, qui l’accompagne dans tous ses déplacements sur le terrain. Promu adjoint au maire, ce dernier se présente avant tout comme un homme du terroir, un défenseur des cantons dialectophones de la circonscription, qui dispose déjà de ses propres réseaux – et plus encore au lendemain de son élection comme conseiller général Divers droite du canton de Sarrebourg en 1973. Démocrate-chrétien, il représente surtout cette famille politique dont l’appui est nécessaire à Pierre Messmer pour s’imposer durablement à une époque où la majorité des élus mosellans et des parlementaires sont de droite ou du centre entre 1974 et 1983. Avec quelques nuances toutefois. Dans les cantons francophones, le vote est davantage gaulliste, tandis que dans les dialectophones, les suffrages centristes (et notamment démocrates-chrétiens) dominent. Les professions de foi pour les élections municipales sont d’ailleurs bilingues. Sarrebourg devient ainsi l’épicentre d’une lutte des droites, opposant centristes et gaullistes. Il convient enfin de noter qu’à l’exception d’Aloyse Warhouver, les grandes figures locales du réseau de Pierre Messmer appartiennent toutes à l’Union des démocrates pour la République (UDR).

Bien qu’il ait très vite des vues sur la circonscription, Aloyse Warhouver ne peut que patienter face à un Pierre Messmer solidement ancré sur le plan national (comme Premier ministre de 1972 à 1974), mais aussi local – comme président du conseil général de la Moselle (dès 1974), conseiller régional et président de ce même conseil (1978-1980). Une décennie durant, Aloyse Warhouver s’attache donc à renforcer son réseau sur le terrain comme conseiller général (réélu en 1979 et 1985), mais également comme maire de Xouaxange dès 1983 (petite commune rurale de 300 habitants), puis comme conseiller régional de Lorraine et vice-président du conseil régional (1983-1986). Une circonscription d’autant plus centrale que Pierre Messmer avait appelé l’attention sur elle avec l’aérodrome de Buhl-Lorraine, et ses pistes d’atterrissage en dur, les seules à l’échelle du département, le développement des axes routiers en Sarre, la création de zones industrielles et commerciales, ainsi que des investissements publics nombreux telle la piscine municipale de Sarrebourg. Les élections législatives de 1988 vont cependant marquer un tournant politique.

La rupture entre les deux hommes est effective lorsque Aloyse Warhouver, devenu dissident Union pour la démocratie française (UDF), entend se présenter comme candidat « sans étiquette » face à son mentor, député sortant Rassemblement pour la République (RPR), constamment réélu au premier tour, et qui entend bien briguer un ultime mandat. La campagne promet d’être rude et tendue, d’autant plus que le clivage linguistique réapparaît. Les cantons dialectophones soutiennent largement Warhouver et les cantons francophones votent à nouveau pour Pierre Messmer. De même, s’il se garde bien d’attaquer publiquement le député sortant, le désistement tardif de son suppléant le pousse à désigner in extremis son épouse, lui offrant l’occasion de dénoncer les « intimidations » dont il est victime. Son positionnement lui permet de se présenter comme « le trait d’union » entre les deux arrondissements de Château-Salins et de Sarrebourg, comme fils d’agriculteur, issu du terroir, fidèle à ses convictions politiques et familiales : « J’ai repris volontairement la même étiquette qu’en 1974 pour apporter la preuve de la continuité de mon action. Je suis un homme du centre, comme l’était feu mon père, avec un esprit d’ouverture pour une action en commun » (document électoral, 1er tour, 5 juin 1988). Président du Lycée agricole de Château-Salins, le candidat s’adresse à un électorat rural qui entend pleinement profiter de la politique agricole commune (PAC), mais également à des acteurs économiques nullement épargnés par le chômage qui redoutent un enclavement du territoire (soutien du projet TGV Strasbourg-Paris). En outre, la réélection de François Mitterrand à la présidence de la République est suivie par une démarche d’ouverture en faveur d’un éventuel ralliement des centristes.

Moins présent dans sa circonscription en raison d’une présidence de groupe parlementaire accaparante dans la première période, difficile, de cohabitation, Pierre Messmer n’obtient que 43,5 % des suffrages exprimés au premier tour (contre 30,79% des voix pour son principal concurrent) et s’avère pour la première fois contraint à un second tour. C’est une campagne assez difficile pour le député sortant à laquelle s’ajoute une certaine usure après vingt années de règne de Messmer, sans oublier la présence face à lui d’un adversaire bien implanté localement, jadis son adjoint. Aloyse Warhouver bénéficie, lors du second tour, d’un excellent report des voix socialistes qui lui permet de l’emporter (de justesse) avec 50,69% des suffrages. L’homme devient ainsi « le tombeur de Messmer », avec le soutien du Parti socialiste (PS).

Il fait son entrée au Palais-Bourbon et siège parmi les non-inscrits (24 juin 1988). Le député rejoint la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (25 juin 1988, 3 avril 1991). Il est rapporteur du projet de loi relatif à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social (24 novembre 1988). Il intègre l’année suivante la commission de la défense nationale et des forces armées (4 avril 1989). S’appuyant sur son expérience de terrain, le député porte une attention particulière à trois principales thématiques. D’une part, les défis qui se posent pour les territoires ruraux lors des débats sur le plan national pour l’environnement (9 octobre 1990), l’agriculture et le développement rural (5 novembre 1992) et la lutte contre la désertification rurale (13 novembre 1992). D’autre part, l’immigration et l’intégration : notamment sur la question des rapports entre laïcité et islam, du droit de vote des étrangers ou encore de la scolarité des immigrés (22 mai 1990). Enfin, les questions mémorielles (notamment la question des incorporés de force dans l’armée allemande, 25 octobre 1991 et 14 novembre 1992) et militaires (au sujet de l’Etablissement régional du matériel sur le site de Sarrebourg, 13 novembre 1991) à proprement parler mosellanes sont également au cœur de ses nombreuses interventions. Ses engagements politiques se prolongent dans la vie publique par le biais d’associations qu’il préside, à l’instar de la société d’horticulture de Sarrebourg, de l’association d’aide aux immigrés de la Moselle ou encore du comité de sauvegarde de la vallée de la Bièvre.

Se représentant dans sa circonscription lors des élections législatives de mars 1993, le député sortant rejoint le Mouvement des réformateurs créé l’année précédente. Héritier de l’Association des démocrates portée par les ministres d’ouverture Michel Durafour, Jean-Pierre Soisson et Thierry de Beaucé entre 1989 et 1991, celui-ci regroupe des radicaux de gauche et des gaullistes, facilitant ainsi l’ouverture vers le centre, souhaitée par Michel Rocard et François Mitterrand. Face au député sortant se dresse désormais Alain Marty, maire RPR de Sarrebourg depuis 1989, héritier politique de Pierre Messmer. Orientant sa campagne sur les thématiques de « l’ouverture », du « rassemblement » et de la « réconciliation politiques », en s’adressant tout particulièrement à un électorat rural et dialectophone (document électoral bilingue du 21 mars 1993), le député sortant se garde toutefois bien de nommer ses principaux adversaires à droite comme à l’extrême droite. Si Aloyse Warhouver arrive en tête à l’issue du premier tour (35,28% des suffrages exprimés), talonné par son rival RPR (32,67%), la percée du Front national (13,17%), troisième force politique de la circonscription, inquiète les forces de gauche dont les voix se reportent sur le député sortant au second tour. Ce dernier s’impose au soir du 28 mars avec 54,65%.

Le député retrouve les bancs de l’Assemblée nationale, s’inscrit dorénavant au sein du groupe République et liberté (30 avril 1993) créé pour faire bénéficier les non-inscrits d’un groupe politique, et rejoint la commission des affaires étrangères (8 avril 1993). Par ses nombreuses interventions, il démontre un champ d’expertise complet qui s’étend des questions agricoles à la programmation militaire, de l’aménagement du territoire à la fiscalité. Ses liens avec son terroir mosellan demeurent au centre de ses préoccupations et de ses interventions, qu’il s’agisse de la question des langues régionales (27 octobre 1993, 3 mai 1994), du régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle (24 novembre 1993), des conséquences du tracé du TGV-Est (7 décembre 1994), des « Malgré nous » durant la Seconde guerre mondiale (4 novembre 1994, 15 novembre 1996), des aides de l’Etat à l’industrie de la chaussure (20 décembre 1995 , 11 mars 1997) ou encore de la question de l’emploi et de l’apprentissage en Moselle (6 février 1996). Après la dissolution du 21 avril 1997, le député sortant doit à nouveau affronter le verdict des urnes lors des législatives prévues les 25 mai et 1er juin 1997.

A l’image des précédentes législatives, le premier tour de scrutin est riche d’enseignements et de rebondissements. Au-delà du nouveau duel que se livrent Aloyse Warhouver (30,85% des suffrages exprimés), désormais étiqueté Divers gauche, et son rival RPR Alain Marty (25,73%), ou encore de l’éparpillement des forces gauches qui échouent à profiter d’un mécontentement national qui leur est favorable, il convient de noter l’ancrage du Front national (FN) qui, fort des 20,44% des suffrages recueillis par Bernard Drion, se maintient au second tour et traduit un essor national, particulièrement dans la France de l’Est et du Sud, avec une très forte dynamique qui touche notamment la Lorraine. Face au péril annoncé, les forces de gauche appellent à nouveau à un sursaut républicain. Aloyse Warhouver bénéficie donc, une fois encore, d’un report favorable des votes de gauche sur son nom qui lui permet de l’emporter avec 48,03% des suffrages exprimés.

Réélu député de la Moselle pour la circonscription de Sarrebourg, il s’inscrit au groupe Radical, citoyen et vert (13 juin 1997), alliance de la gauche et des écologistes qui soutient le gouvernement de Lionel Jospin. À nouveau membre de la commission des affaires étrangères, il siège également au sein de la commission centrale de classement des débits de tabac. Il est nommé rapporteur du projet de loi autorisant la ratification de la convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est (1er octobre 1997).

Aloyse Warhouver quitte cependant la commission des affaires étrangères pour celle de la défense nationale des forces armées (1er octobre 1999). Il intervient à ce titre d’une part dans le volet « forces armées » du projet de loi de finances pour 2002 (11 octobre 2001), et propose d’autre part une loi établissant le statut du réfractaire des Alsaciens et Mosellans (21 novembre 2001).

Si le député renonce à se représenter aux élections cantonales en mars 1998 et n’hésite pas, lors de ses vœux en janvier 1999, à fustiger « un arrondissement qui sombre progressivement dans la léthargie » où les « débatteurs sont devenus silencieux et trop d’élus s’inclinent devant la pensée unique » (Le Républicain lorrain, 17 juin 2024), les élections législatives (juin 2002), au lendemain du séisme politique du 21 avril, promettent un changement d’éclairage total.

En ballottage défavorable (29,13% des suffrages exprimés) au soir du premier tour, face à son rival RPR Alain Marty (35,64%) qui lui avait succédé comme conseiller général du canton de Sarrebourg (mars 1998) et un Front national en embuscade (Bernard Brion échoue cependant aux portes du second tour), le député sortant s’incline une semaine plus tard avec 47,22% des suffrages exprimés face à l’héritier de Pierre Messmer.

Aloyse Warhouver quitte alors définitivement la vie politique – l’homme ne s’était d’ailleurs pas représenté dans sa commune de Xouaxange lors des élections municipales de 2001 – mais il demeure investi dans la vie publique locale au sein de nombreuses associations, d’événements littéraires et artistiques, manifestant ainsi sa passion pour l’art et l’architecture.
Il décède le 17 juin 2024, à Walscheid, à l’âge de 94 ans.