Yves Le Foll
1912 - 1998
LE FOLL Yves
Né le 7 février 1912 à Pleyben (Finistère)
Décédé le 1er septembre 1998 à Saint-Brieuc (Côtes d’Armor)
Député des Côtes-du-Nord de 1967 à 1968 et de 1973 à 1978
Yves Le Foll, aîné de quatre enfants, est issu d’une famille modeste de Pleyben, commune située près de Châteaulin (Finistère). Sa mère est couturière et son père, artisan forgeron, est réformé de guerre. En janvier 1933, Yves Le Foll est reconnu pupille de la Nation.
Après des études à l’Ecole primaire supérieure (EPS) de Douarnenez, il intègre l’Ecole normale d’instituteurs de Quimper (1928-1931), avant d’accomplir une quatrième année à celle de Rennes, puis d’entrer à l’Ecole normale supérieure de l’enseignement technique (ENSET), section A1, en 1932-1934. Yves Le Foll effectue son service militaire en 1933 au poste météorologique de Saverne (Bas-Rhin). Titulaire de la première partie du professorat des écoles normales et des EPS, il réussit en 1935 l’entrée au professorat des écoles pratiques industrielles (A, sciences et mathématiques). En septembre 1935, Yves Le Foll est nommé professeur à l’Ecole des métiers de Mâcon (Saône-et-Loire), puis en décembre 1935 à l’Ecole pratique de commerce et d’industrie (EPCI) de Cherbourg (Manche). Il obtient sa mutation pour l’EPCI de Dol-de Bretagne (Ille-et-Vilaine). En janvier 1937, il épouse à Saint-Thois (Finistère) Marie-Jeanne Heydon, institutrice, décédée en août 1997, avec laquelle il a quatre enfants.
Dès 1933, Yves Le Foll adhère aux Jeunesses socialistes (JS), avant d’être affilié à la Section française de l’internationale ouvrière (SFIO) en 1936. A Paris, il participe aux manifestations en riposte aux émeutes des Ligues du 6 février 1934. Jeune militant dans la section socialiste de Cherbourg (Manche), il est candidat en 1935 aux municipales à Baguer-Morvan près de Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine), où exerce sa femme Jeanne.
Mobilisé le 1er septembre 1939, Yves Le Foll est fait prisonnier le 17 juin 1940. Envoyé en captivité en Allemagne, il est rapatrié le 2 juillet 1942 pour raisons sanitaires et familiales (il est alors père de deux enfants). Il est pensionné par la suite à 30 %. En 1944, il détient la carte du Front national, mouvement de résistance proche des filières communistes, à l’instar de nombreux socialistes du département, en raison notamment du rôle de Jean Devienne nommé au début 1943 à la tête de l’organisation dans les Côtes-du-Nord ; celui-ci diffuse France d’abord, organe national des Francs-tireurs et partisans (FTP), puis lance le journal clandestin La France combattante des Côtes-du-Nord.
En 1945, il est nommé professeur de mathématiques et de comptabilité au collège technique de Saint-Brieuc, avant de devenir sous-directeur des études en 1948, puis directeur d’études en 1952, faisant fonction de censeur.
Militant SFIO, Yves Le Foll s’affirme comme une figure incontournable de la section socialiste dirigée par Max Le Bail (conseiller général de Saint-Brieuc-Midi entre 1945 et 1951) et Antoine Mazier (député des Côtes-du-Nord entre 1946 et 1958). Entre fin 1946 et septembre 1958, Yves Le Foll assume les responsabilités de secrétaire fédéral de la SFIO des Côtes-du-Nord, écrivant régulièrement dans Le Combat Social.
En parallèle, le parcours syndical d’Yves Le Foll l’amène à assumer des responsabilités départementales. Le 12 décembre 1946, il est élu au sein du bureau départemental du Syndicat national de l’enseignement technique (SNET). En 1947-1948, il écrit plusieurs éditoriaux dans Le Combat Socialiste, à propos de la scission entre la Confédération générale du travail (CGT) et Force ouvrière (FO) et du choix de l’autonomie de la Fédération de l’éducation nationale (FEN). Il est élu secrétaire aux affaires pédagogiques de la section départementale de la FEN par la commission administrative en décembre 1949.
Secrétaire de la puissante section SFIO de Saint-Brieuc, il figure en 31e et dernière position, comme le veut la tradition militante, sur la liste socialiste aux élections municipales d’octobre 1947, conduite par Jean Nicolas, élu maire de Saint-Brieuc (1947-1953). Lors des élections cantonales de 1951, Yves Le Foll se présente sous l’étiquette SFIO, face au sénateur sortant radical-Rassemblement des gauches républicaines (RGR), André Cornu, alors secrétaire d’Etat dans le gouvernement Pleven. Le candidat du Parti communiste français (PCF), Joseph Folinais, syndicaliste agricole, est un transfuge de la SFIO. En 1953, il figure à nouveau sur la liste socialiste conduite cette fois par Antoine Mazier, parlementaire, qui devient adjoint dans une municipalité de Troisième force conduite par Victor Rault, ancien responsable syndical à la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC).
Secrétaire adjoint de la section Fédération de l’Education nationale (FEN) en octobre 1951, chargé des problèmes pédagogiques, Yves Le Foll devient secrétaire départemental de la FEN en 1954, prenant le relais d’André Laithier (également secrétaire de l’union départementale FO) et de Jean Le Jeune (proche de la mouvance communiste). En juin 1956, Yves Le Foll est remplacé par Louis Bocquet. Toujours membre du bureau de la FEN, il intervient lors de son congrès départemental le 15 juin 1957. Membre suppléant de la commission administrative de la FEN, au titre du SNET, en janvier 1959, Yves Le Foll reste membre du bureau départemental de la FEN en avril 1961.
Au milieu des années 1950, la section SFIO de Saint-Brieuc et la majorité de la fédération des Côtes-du-Nord s’oppose à la ligne de Guy Mollet, tant sur la Communauté européenne de défense (CED) que sur la politique suivie en Algérie par le gouvernement de celui-ci en 1956-1957. Les socialistes briochins, dont Yves Le Foll, soutiennent Antoine Mazier dans son opposition à la ligne majoritaire au plan national. La majorité de la fédération évolue vers des positions de plus en plus favorables à l’indépendance de l’Algérie. Au congrès fédéral du 17 juin 1957, lors de la préparation du congrès fédéral et du 49e congrès national, la section SFIO de Saint-Brieuc vote un blâme au groupe parlementaire, à l’unanimité, pour avoir accepté de participer au gouvernement Bourgès-Maunoury. En décembre 1957, Yves Le Foll préside une séance du Conseil national de la SFIO. Au congrès fédéral du 22 juin 1958, à l’unanimité moins une voix, la fédération des Côtes-du-Nord approuve la position d’Antoine Mazier, hostile à l’attitude de Guy Mollet sur le retour au pouvoir du général de Gaulle, et réclamant un congrès national.
En revanche, Yves Le Foll s’avère en désaccord avec Antoine Mazier sur son départ de la SFIO pour le Parti socialiste autonome (PSA), annoncé au congrès fédéral du 21 septembre 1958. Cette différence de points de vue porte davantage sur la forme que sur le fond. Yves Le Foll considère en effet qu’Antoine Mazier n’a pas suffisamment pris le temps d’expliquer les raisons de la scission pour faire basculer l’ensemble de la fédération et préserver ainsi son unité. Au congrès fédéral extraordinaire de la SFIO du 21 septembre 1958, qui entérine la scission SFIO-PSA, Yves Le Foll démissionne de ses fonctions de secrétaire fédéral, étant remplacé par l’ancien député SFIO, syndicaliste agricole, Alexandre Thomas (1951-1956), mais il reste membre du nouveau comité fédéral. Il est toujours secrétaire fédéral adjoint le 8 octobre 1958 mais, le 7 novembre 1958, il conteste la façon dont la section SFIO de Saint-Brieuc désigne son candidat, Jean Le Garzic, aux élections législatives dans la première circonscription de Saint-Brieuc, s’opposant surtout à la présence du suppléant André Laithier qui avait quitté la SFIO en 1957. Le 13 novembre 1958, il démissionne de la SFIO pour adhérer au PSA, refusant la candidature d’un socialiste contre Antoine Mazier.
Aux élections municipales de mars 1959, Yves Le Foll figure en 9e position sur la liste d’union des gauches PSA-PCF-Action travailliste-Jeune république à Saint-Brieuc, formée au second tour (13 élus sur 31). Conseiller municipal, Yves Le Foll est membre du bureau fédéral du PSA des Côtes-du-Nord en 1959, conservant ses fonctions à partir de juin 1960 au sein du Parti socialiste unifié (PSU). En 1961, il est candidat du PSU aux élections cantonales à Châtelaudren. L’annulation des élections municipales de Saint-Brieuc par le Conseil d’Etat en juillet 1962, aboutit à la victoire de la grande coalition, s’étendant des communistes aux chrétiens sociaux, forgée par Antoine Mazier. Simple conseiller municipal, Yves Le Foll est propulsé sur le devant de la scène politique briochine par le décès d’Antoine Mazier le 6 décembre 1964. Sollicité par ses camarades, il accepte de se présenter aux élections municipales de mars 1965 et conduit à la victoire la liste d’union de la gauche (PSU-PCF-SFIO), ratant l’élection au premier tour de 172 voix. Le panachage étant interdit dans les villes de plus de 30 000 habitants, la liste de gauche est élue en entier au second tour, le 21 mars 1965, avec 51,5 % des voix contre une liste centriste.
L’établissement dans lequel enseigne Yves Le Foll devient le lycée technique Curie. Il assure l’intérim de la direction du lycée technique en 1965, avant d’être nommé cette année-là censeur, jusqu’à sa retraite administrative en 1967.
Lors des élections législatives des 5 et 12 mars 1967, le maire PSU de Saint-Brieuc obtient 18 165 voix au premier tour (27,14 % des voix), avant de créer la surprise en battant de 35 voix, au second tour (50,02 % des voix), le maire sortant Robert Richet, présenté par l’Union pour la nouvelle république (UNR). Yves Le Foll propose une ouverture aux électeurs catholiques comme l’atteste sa circulaire électorale : « Sachez que de nombreux militants du PSU sont catholiques. Nous pensons que les choix religieux sont affaire personnelle, que la liberté totale doit être laissée à chacun d’aller à la messe s’il le désire, de rester chez soi s’il le préfère. Entre hommes de bonne volonté, l’entente est possible et nous l’avons prouvé à Saint-Brieuc où des militants catholiques bien connus siègent dans un conseil municipal de gauche. ». Epaulé par Pierre Lanoë, maire PSU de Lamballe (1960-1971), il devient ainsi l’un des cinq députés bretons de gauche, et le premier des Côtes-du-Nord sous la Ve République. Mais l’élection est invalidée par le Conseil constitutionnel le 12 juillet 1967. Après une campagne acharnée, véritable test national, Yves Le Foll est réélu au premier tour dans un duel avec Robert Richet avec 6 416 voix d’avance (34 993 voix contre 28 577 pour son adversaire), le 24 septembre 1967. Michel Rocard (PSU) et François Mitterrand (FGDS) sont venus le soutenir, alors que Maurice Schumann et Edmond Michelet ont apporté leur concours à son adversaire.Yves Le Foll, député du PSU, est alors apparenté Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS) au Palais-Bourbon.
A l’Assemblée nationale, Yves Le Foll s'apparente au groupe de la FGDS, car le PSU ne dispose au total que de quatre députés : Roger Prat à Morlaix et Yves Le Foll à Saint-Brieuc, Pierre Mendès France à Grenoble et Guy Desson à Sedan. Membre de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (1967-1968), il dépose durant ce premier mandat une proposition de loi relative à la place des langues et cultures régionales dans l'éducation et l'information (24 avril 1968). Ses interventions se concentrent aussi sur la protection du littoral, après l’accident du Torrey Canyon (26 avril 1967), navire pétrolier sous pavillon libérien dont l’échouage provoque une marée noire sur les côtes bretonnes. Il insiste ainsi sur « l’étendue du désastre pour les départements des Côtes-du-Nord et du Finistère » ; « la nécessité de protéger certains estuaires et de sauvegarder la réserve d'oiseaux des Sept-Iles ; » et « d'envisager une législation internationale plus efficace à l'encontre des pavillons de complaisance et réglementant les rejets en mer de déchets d'hydrocarbures ». Il réclame, outre le déclenchement du plan ORSEC, « une indemnisation totale des dépenses occasionnées par cette catastrophe ». Le 18 octobre 1967, il prend part au débat sur les questions orales relatives aux problèmes de l'élevage et de la viande, évoquant le mécontentement des agriculteurs bretons.
En mai 1968, Yves Le Foll s’efforce de contrôler les turbulences qui agitent le PSU des Côtes-du-Nord, participant volontiers aux manifestations, notamment à la grande manifestation régionale intersyndicale du 8 mai 1968 pour la défense de la région. Mais lors de la grève générale du 13 mai 1968, quand le service d’ordre du PCF et de la Confédération générale du travail (CGT) déchire une banderole favorable au Mouvement du 22 mars, Yves Le Foll quitte ostensiblement la manifestation, au nom de la défense de la liberté d’expression.
Le raz-de-marée gaulliste n’épargne pas Yves Le Foll aux élections législatives des 23 et 30 juin 1968. Au premier tour, sur 67 073 suffrages exprimés, Arthur Charles obtient 31 963 voix (47,65%). Yves Le Foll, député sortant PSU, maire et conseiller général de Saint-Brieuc, obtient 20 236 voix soit 30,17 % des suffrages exprimés. Ce dernier bénéficie du désistement de plusieurs candidats de gauche : Edouard Quemper pour le PCF (10 027 voix) ; André Laithier pour la FGDS (1 132 voix) et Emile Boutbien (Horizon 72, adjoint d’Antoine Mazier en 1962, 3 714 voix). Soutenu par les gaullistes de l’Union des démocrates pour la République (UDR), Arthur Charles, ex-Mouvement républicain populaire (MRP), présenté dans la presse locale comme un notable du monde agricole, l’emporte assez largement au second tour (6 257 voix d’écart) avec 37 106 voix, contre 30 849 voix pour le député sortant.
En mars 1970, Yves Le Foll est en revanche réélu conseiller général PSU de Saint-Brieuc et, en mars 1971, il est réélu dès le 1er tour avec 55,8 % des voix, contre une liste centriste conduite par l’ancien socialiste SFIO Jean Le Garzic et dans laquelle figurent des personnalités de droite. A la tête d’une ville en pleine expansion économique et démographique (56 282 habitants en 1975), Yves Le Foll gère la création de nouveaux quartiers et d’une seconde zone industrielle dans une commune voisine, faute d’espace à Saint-Brieuc. Il soutient les grévistes du Joint Français en 1972 et réalise la construction d’un hôpital. Il est tête de liste PSU aux élections sénatoriales du 26 septembre 1971, obtenant personnellement 307 voix au premier tour, sur 1 407 délégués sénatoriaux. La liste PSU (270 voix de moyenne soit 19,2 %) est composée d’Yves Le Foll, Simone Darcel, maire de Plessala 1959-1989 et conseillère régionale PS 1981-1992, et Claude Guillou, conseiller général de Bégard entre 1970 et 1976. Les deux autres listes de gauche, celle du PCF, avec Edouard Quemper, Marcel Hamon, Auguste Le Coënt qui obtiennent entre 254 et 271 voix, et celle du PS, avec Alexandre Thomas, René Régnault et Emile Le Petit qui recueillent entre 67 et 109 voix, montrent la division des gauches, face aux candidats de droite Marzin, Lemarié, de Bagneux qui, avec 777 800 voix, remportent les 3 sièges dès le premier tour.
Lors de la grève du Joint Français à Saint-Brieuc au printemps 1972, qui mobilise toute la région, le maire de la cité joue un rôle actif dans le soutien moral et financier des grévistes, interpellant René Pleven, président du Conseil général et ministre de la Justice du gouvernement Chaban-Delmas.
Aux élections législatives des 4 et 11 mars 1973, Arthur Charles, candidat de l’Union des Républicains de progrès (URP), est cette fois battu par le maire de Saint-Brieuc, même si le redécoupage électoral de la circonscription briochine rend toutes les consultations législatives difficiles pour la gauche. Au premier tour, sur 72 130 voix, Arthur Charles qui obtient 30 741 voix devance nettement Yves Le Foll, candidat du PSU, qui recueille 19 017 voix. Le candidat du PS, Michel Réquiem, dirigeant départemental de FO, recueille quant à lui 3 792 voix. Edouard Quemper, pour le PCF, obtient 15 841 voix et les autres candidats G. Gautier pour Stroliadar vro-Parti fédéraliste européen (SAV-PFE), régionaliste, 2 274 voix et Edouard Renard, Ligue Communiste, 462 voix. Un reportage du journal télévisé de Patrick Champetier, diffusé peu avant le second tour, comparant les profils des deux principaux candidats dresse le portrait du député sortant, Arthur Charles, « la cinquantaine enveloppée » possédant « de la bonne terre », président de la Chambre d’Agriculture des Côtes-du-Nord, et rappelle que nettement en tête au premier tour il « trouve ses appuis les plus solides à la campagne et chez les modérés ». Son adversaire Yves Le Foll, interrogé devant son bureau de maire, est en revanche présenté comme le candidat d’un « parti révolutionnaire » : « Petit, austère, ancien professeur de mathématiques, les dorures du grand bureau de la mairie ne lui ont rien fait perdre de sa passion politique. Bon gestionnaire, il conserve jalousement l'héritage que lui a laissé Antoine Mazier ». En réponse à Arthur Charles indiquant qu’il est membre d’un parti révolutionnaire, Yves Le Foll réplique : « Révolutionnaires, nous le sommes dans la mesure où nous souhaitons et où nous luttons pour un changement de société, c'est-à-dire pour libérer l'économie de l'emprise des trusts capitalistes. Pour assurer une meilleure répartition du revenu national, et en même temps d'ailleurs pour donner à tous les citoyens, à tous les travailleurs une part de responsabilité dans les décisions qui les concernent. C'est un projet ambitieux et qui, évidemment, s'intègre assez mal dans la société actuelle. ». Au second tour, l’écart entre les deux candidats n’est que de 67 voix, Arthur Charles recueillant 36 850 voix, face à Yves Le Foll, 36 917 voix, qui peut compter sur un suppléant issu du monde agricole Eugène Guéno (1911-1991), conseiller municipal (1947-1965), maire de Langueux (1965-1983), syndicaliste de la Confédération générale agricole (CGA) puis de la FDSEA, fondateur d’une coopérative dans la capitale de l’oignon et militant laïque et associatif, SFIO-PSU-PS.
Seul élu du PSU à l’échelle nationale aux législatives de 1973, Yves Le Foll siège parmi les députés non-inscrits jusqu’au 14 mars 1975, date à laquelle, quelques mois après son adhésion au Parti socialiste (PS), il rejoint à l’Assemblée le groupe du Parti socialiste et des radicaux de gauche. En effet, suivant l’orientation de Michel Rocard, Yves Le Foll, ainsi que la plus grande partie du PSU des Côtes-du-Nord, avait intégré le PS dans le cadre des Assises pour le socialisme, débat organisé les 12 et 13 octobre 1974 à la suite de l’important score obtenu par François Mitterrand à l’élection présidentielle.
Membre de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales durant son second mandat, il dépose trois propositions de loi : l’une relative à l'action civile des associations représentatives de consommateurs devant les juridictions répressives (25 avril 1973) ; une autre portant sur les charges locatives (25 avril 1973) ; et une dernière concernant la contraception et l'avortement (14 juin 1973).
Lors d’une intervention en séance publique, le 21 mai 1973, Yves Le Foll conteste le projet de loi modifiant le code du travail en ce qui concerne la résiliation du contrat de travail à durée indéterminée, dénonçant le caractère non obligatoire de la réintégration du salarié, les restrictions apportées au champ d'application du projet de loi ; le freinage des petites entreprises ; l’inégalité des parties dans le contrat de travail ; la non-reconnaissance du droit au travail ; la situation des ouvriers spécialisés (OS) ; le pouvoir patronal discrétionnaire.
Durant le second semestre 1973, ses prises de position reflètent les idées défendues à l’extrême-gauche. Ainsi, le 12 juin 1973, Yves Le Foll, s’exprimant encore au nom du PSU, évoque la question du service national. Il critique tour à tour les conditions de la répression contre les appelés, l’attitude de l'armée à l'égard des insoumis, l’utilisation de l'armée comme briseuse de grève, comme défense de l'ordre social existant, le lavage des cerveaux, le recours à l’armée comme réponse aux besoins du patronat en cadres moyens (officiers), l’embrigadement idéologique de la jeunesse. Il défend la nécessité de la mobilisation des travailleurs et des jeunes pour un service de six mois ; la liberté de choix d'incorporation ; l’introduction des libertés syndicales et politiques à la caserne. Le 19 octobre 1973, intervenant dans la discussion de la motion de censure, il souligne l’absence de réaction du gouvernement français face au renversement de Salvador Allende au Chili. Le 13 décembre 1973, dans la discussion d’un premier projet relatif à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) présenté par Jean Taittinger, garde des Sceaux dans le gouvernement de Pierre Messmer, Yves Le Foll met en exergue dans le prolongement de sa propre proposition de loi sur les questions de contraception et d’avortement, « le côté intolérable de la situation actuelle ; la dignité de la personne humaine et le droit pour la femme d'assumer sa propre responsabilité ». Il poursuit en demandant « la liberté de choix pour toutes les femmes donnée aujourd'hui aux femmes des classes aisées ; la mise en place d'une législation cohérente rendant les avortements inutiles et accordant des aides à la mère et à la famille ; l’organisation de l'éducation sexuelle, avec une information sur la contraception ». Fustigeant « la mise en sommeil de la loi Neuwirth », il prône « le remboursement des contraceptifs par la sécurité sociale » et s’appuie sur « la proposition de loi déposée par le PSU » autorisant un avortement « jusqu'à la vingt-quatrième semaine ». Il insiste aussi sur « la nécessité d'une politique efficace de la natalité et [la] mise en place des services médicaux nécessaires à la mère et à l'enfant ». Le 27 novembre 1974, intervenant dans la discussion du projet de loi relatif à l’IVG présenté par Simone Veil, ministre de la Santé, Yves Le Foll conclut son intervention, en félicitant « le ministre d'avoir eu le courage de présenter le texte », même si « le projet conserve malheureusement la trace d'une certaine suspicion à l'égard de la femme ». Pour lui, « le remboursement par la sécurité sociale est inévitable, immédiatement ou à court terme : car garantir la natalité exige que soient garantis les revenus ». Il intervient aussi dans la discussion du projet de loi de finances pour 1974 et 1975.
Réélu conseiller général en 1976, Yves Le Foll, membre du Bureau régional d’étude et d’information socialiste (BREIS), devient symboliquement président du groupe socialiste lors du basculement du conseil général et l’élection à la présidence de Charles Josselin, qui avait battu René Pleven aux élections législatives de 1973. Il mène son dernier combat aux élections municipales de Saint-Brieuc en mars 1977. Le PCF ayant revendiqué la tête de la liste de l’Union de la gauche, le Parti socialiste refuse de s’incliner. Trois listes s’affrontent à gauche : celle du PS et du Mouvement des radicaux de gauche (MRG), celle du PCF avec Edouard Quemper, et celle du PSU avec Jacques Galaup face à une liste unique des centristes et de la droite conduite par Jean-Pierre Morin. Au premier tour, la liste Le Foll distance la liste communiste de 88 voix seulement, l’emportant toutefois au second tour, avec 57, 2 % des voix en raison d’un bon report des voix communistes.
Yves Le Foll commence alors à préparer sa succession politique. Il encourage son premier adjoint Claude Saunier, mitterrando-poperéniste, à s’apprêter à devenir maire aux prochaines élections. Celui-ci prend la tête d’une liste d’union de la gauche reconstituée, élue au 1er tour le 6 mars 1983 avec 53,97 % des voix. Yves Dollo, deuxième adjoint, venu également du PSU, vise le mandat de député.
Aux élections législatives des 12 et 19 mars 1978, Yves Le Foll ne se représente pas et apporte son soutien à Yves Dollo, mais celui-ci est distancé au premier tour des élections de 1978 par Edouard Quemper, PCF, conseiller général de 1967 à 1982. C’est finalement Sébastien Couépel, figure du syndicalisme agricole, qui l’emporte au second tour sous l’étiquette Union pour la démocratie française (UDF). Cependant, aux législatives suivantes de 1981 et 1988, Yves Dollo sera élu député.
Leader laïque du courant Rocard, attirant de nombreux chrétiens de gauche issus du PSU, Yves Le Foll s’active afin d’empêcher ce qu’il considère comme des empiétements des mitterrandistes. Aussi, à l’automne 1981, proteste-t-il vigoureusement contre la tentative de réduire la représentation des rocardiens au sein des instances départementales du parti. L’année suivante, il reçoit la légion d'honneur des mains de Michel Rocard, son ami, qui venait régulièrement le voir en Bretagne. En 1983, Yves Le Foll décide, à l’issue de son dernier mandat municipal, de renoncer à tous ses mandats publics pour prendre sa retraite et se consacrer à la pêche, son passe-temps favori, non sans avoir contribué, pendant près de 40 ans de militantisme, à ancrer à gauche Saint-Brieuc et les Côtes-du-Nord.
Il décède, le 1er septembre 1998, dans sa ville dont les habitants gardaient encore en mémoire l’homme de convictions qu’était Yves Le Foll, réputé pour son franc-parler et le gestionnaire municipal proche des milieux populaires. L’hôpital de la Beauchée, ouvert en 1979, prend son nom peu après sa disparition.