Robert Lecourt

1908 - 2004

Informations générales
  • Né le 19 septembre 1908 à Pavilly (Seine-Inférieure - France)
  • Décédé le 13 août 2004 à Boulogne-billancourt (Hauts-de-Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Seine
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Seine
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Seine
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Seine
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Seine
Groupe
Mouvement républicain populaire
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 23 novembre 1958 au 8 février 1959
Département
Hautes-Alpes
Groupe
Républicains populaires et centre démocratique

Biographies



Né le 19 septembre 1908 à Pavilly (Seine-Inférieure)
Décédé le 13 août 2004 à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Seine) Député de la Seine de 1946 à 1958
Garde des Sceaux, ministre de la justice du 26 juillet au 28 août 1948, puis du 5 au 11 septembre 1948, puis du 13 février 1949 au 28 octobre 1949 et du 6 novembre 1957 au 31 mai 1958

Robert Lecourt est né à Pavilly, petite commune proche de Rouen, en 1908. Son père était commerçant. Il fait ses études secondaires au collège privé Saint-Jean-Baptiste-de-la-Salle à Rouen, puis s'inscrit à la faculté de droit de Caen. Il soutient une thèse sur « La nature juridique de l'action en réintégrande, étude de la jurisprudence française » qui a été publiée en 1931. Il s'inscrit en 1928 au Barreau de Rouen puis en 1932 à celui de Paris. Parallèlement à son activité professionnelle, Robert Lecourt fréquente les milieux catholiques. Raymond-Laurent, animateur du Club du Carrefour, confie en 1934 à Robert Lecourt le soin de mettre sur pied la Fédération des Jeunesses Démocrates Populaires. Il en devient président en 1936 et le reste jusqu'au déclenchement de la seconde guerre mondiale. Il entre en 1936 au comité directeur du PDP, collabore au journal L'aube et donne aux JDP une orientation antimunichoise (J.-C. Delbreil, Centrisme et Démocratie Chrétienne en France, le PDP, 1990). Robert Lecourt est donc un jeune responsable politique, bien introduit dans les réseaux de pouvoir, lorsque la guerre éclate.

Par opposition au nazisme, Robert Lecourt participe à la Résistance et est, à partir de 1942, membre du comité directeur du mouvement Résistance. A ce titre, et non à celui du PDP, il est délégué à l'Assemblée consultative de Paris. Il est nommé membre de la Commission des prisonniers et des déportés et de la Commission de la justice. Sa qualité de juriste l'amène à intervenir sur l'épuration. Des propositions de résolution qu'il dépose se détachent celle qui vise à assurer l'indemnisation totale des dommages de guerre affectant les biens nécessaires à la vie des sinistrés et celle qui invite le gouvernement à modifier la législation électorale en vue d'adopter la représentation proportionnelle. Il prend part au débat du 28 octobre 1944 sur la politique générale du gouvernement. Après avoir rappelé qu'« il s'agit d'abord de gagner la guerre, ensuite de reconstruire un monde qui soit fait pour l'homme et non pour son exploitation », Robert Lecourt observe que l'avenir de la France dépend de l'harmonie entre trois éléments : le gouvernement qui est légitime car il s'appuie sur le respect des droits de l'homme, la Résistance qui ne doit pas viser à être un grand parti politique mais à être l'élément de conciliation à l'intérieur des partis et enfin l'opinion publique. La politique de la France doit tendre à rentrer le plus rapidement possible dans la légalité et dans la démocratie. Aussi, propose-t-il la tenue d'élections dans un avenir proche même si elles sont provisoires compte tenu de l'éloignement d'un grand nombre de prisonniers. La Résistance doit jouer un grand rôle dans la préparation des élections : « C'est parce qu'on a mutilé son corps que la France a retrouvé son âme. » Robert Lecourt intervient à plusieurs reprises, et notamment le 21 février 1945, à propos de l'épuration qui, dit-il « a pour objet d'écarter les démolisseurs pendant qu'on va reconstruire le pays ». L'une des difficultés consiste à délimiter le cadre de l'épuration de la justice. Robert Lecourt observe que si l'épuration est radicale, la France se retrouvera avec un seul juge en exercice puisque tous les autres ont prêté serment à Pétain. Dans la mesure où cinq années sont nécessaires pour former un magistrat, Robert Lecourt propose de distinguer ceux qui, en pleine conscience, ont collaboré avec Vichy et donc avec l'Allemagne de ceux qui, pour gagner leur vie, sont restés dans les cadres de la magistrature. Pour l'avocat de la cour d'appel, la justice ne doit pas être sommaire et doit respecter les droits de la défense. « Il faut, conclut-il, une justice indulgente aux égarés. » Le 15 mars 1945, Robert Lecourt prend part à la discussion sur le projet d'ordonnance sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi. Il fait remarquer que le droit distingue les spoliés qui ont donné leur consentement de ceux qui ne l'ont pas donné, dans ce cas l'acte est nul juridiquement. Mais, observe-t-il, la réalité est plus complexe. Il ne faut pas que les spoliés soient privilégiés par rapport à d'autres catégories de populations touchées elles aussi par la guerre. En outre, Robert Lecourt souhaiterait que ce ne soit pas l'État qui indemnise les spoliés. Le 25 juillet 1945, il intervient au cours du débat sur l'élection d'une Assemblée constituante. Il se prononce clairement pour la rédaction d'une nouvelle Constitution : « la constitution de 1875 est morte le 10 juillet 1940 ». Il faut concilier le principe de la responsabilité ministérielle avec le souci de la stabilité. Robert Lecourt propose d'avoir recours à un référendum populaire et démocratique en vertu de l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789.

Robert Lecourt avait été l'un des membres fondateurs du Mouvement Républicain Populaire. Il conduit, le 21 octobre 1945, la liste MRP dans le 2e secteur de la Seine. Avec 133 702 voix sur 443 058 suffrages exprimés, celle-ci arrive largement en tête devant la liste communiste et se voit attribuer quatre sièges. En revanche, le 2 juin 1946, la liste PRL conduite par Joseph Denais devance la liste de Robert Lecourt qui recueille 107 796 voix sur 452 255 suffrages exprimés et perd deux sièges. Robert Lecourt siège à nouveau à la Commission de la justice. Il s'affirme d'emblée comme un parlementaire actif et influent. Il dépose, le 17 janvier 1946, une proposition de loi qui a pour objet d'autoriser les femmes d'accéder à la magistrature. Il intervient aussi dans les dossiers de propriété commerciale et de baux d'habitation. La rédaction du deuxième projet constitutionnel retient tout particulièrement son attention. Il est, du reste, rapporteur des textes adoptés en première lecture. Il est l'un des artisans du compromis passé entre le MRP, la SFIO et le PCF.

Aux élections législatives du 10 novembre 1946, la liste de Robert Lecourt retrouve la deuxième place avec 109 407 voix sur 452 158 suffrages exprimés et obtient trois sièges. Au cours de la première législature de la IVe République, Robert Lecourt est nommé membre de la Commission de la réforme administrative et de la Commission des finances. Il est l'auteur d'un grand nombre de propositions de loi et de résolution, notamment dans les domaines qui concernent la justice ou l'administration, mais pas exclusivement. Ainsi, le 11 février 1947, dépose-t-il une proposition de loi visant à accorder aux femmes divorcées la retraite de leur ancien mari décédé. Robert Lecourt préside le groupe MRP quand il n'est pas au gouvernement. André Marie fait entrer, le 26 juillet 1948, Robert Lecourt dans son gouvernement en qualité de Garde des Sceaux, ministre de la Justice. Il conserve ce département dans le cabinet Schuman. Celui-ci, investi le 31 août, remet sa démission le 4 septembre. Vincent Auriol confie alors à Robert Lecourt une mission d'information qui vise moins à préparer sa propre investiture qu'à rapprocher les points de vue du MRP et de la SFIO. A l'issue des consultations, le Président de la République, qui n'avait pas accepté la démission de Robert Schuman, lui demande de la reprendre. Le 5 septembre, le gouvernement est constitué mais renversé dès le 7. A la suite de la démission d'André Marie, le 13 février 1949, du ministère de la justice, Robert Lecourt redevient Garde des Sceaux dans le gouvernement Queuille. En cette qualité, il dépose de nombreux projets de loi, notamment pour réformer le code d'instruction criminelle. Le 24 février 1949, Il dépose un projet de loi portant création de « France Presse » et, le même jour, un texte qui annule la loi du 26 juin 1941 et institue le certificat d'aptitudes à la profession d'avocat. Il fixe, en outre, au 31 juillet 1949 la suppression des cours de justice et le transfert aux tribunaux militaires des affaires en cours. En juin 1949, il présente devant le Conseil des ministres un projet de loi d'amnistie qui fait l'objet de discussions assez vives. Le 29, Robert Lecourt présente un nouveau projet qui ne fait pas davantage l'unanimité de ses collègues. Henri Queuille lui demande de rédiger un nouveau texte pour la rentrée. Quant au MRP, il fait savoir qu'il pourrait reprendre le projet de Robert Lecourt sous la forme d'une proposition de loi. Le radical Vincent Badie choisit ce moment pour interpeller le Garde des Sceaux sur l'affaire Joanovici, trafiquant notoire du marché noir. Or, il se trouve que Robert Lecourt avait été amené, en 1944, à délivrer un certificat de résistance à un dénommé Spass qui n'était autre que Joanovici. Vincent Badie demande au gouvernement s'il faut y trouver la cause de la lenteur de l'instruction de l'affaire Joanovici. Robert Lecourt répond avec habileté et conviction en rappelant ce qu'était la réalité de la lutte clandestine. Lorsqu'en octobre 1949 Georges Bidault remplace Henri Queuille à la tête du gouvernement, Robert Lecourt accepte d'abandonner la Place Vendôme et retrouve la présidence du groupe MRP et, à ce titre, intervient dans les grands débats de l'heure pour exposer la position de son parti.

Lors des élections législatives du 17 juin 1951, la liste de Robert Lecourt perd deux sièges. Avec 26 511 voix sur 416 592 suffrages exprimés, la liste MRP arrive loin derrière les listes RPF, communiste, RGR et socialiste. Elle fait sensiblement jeu égal avec la liste conduite par Jacques Isorni. Le député de la rive droite de Paris est nommé membre de la Commission des finances et rédige, à ce titre, de nombreux rapports. Au cours de la législature, il ne siège pas au gouvernement de sorte que son œuvre législative est abondante. Comme sous la précédente législature, Robert Lecourt intervient pour réformer l'administration, améliorer la Constitution et plus particulièrement les relations entre le gouvernement et le parlement. Il s'affirme comme le spécialiste des questions constitutionnelles du MRP. Ainsi, le 25 et 27 mars 1952, propose-t-il de réduire le nombre de commissions à seize, constituées de 32 membres chacune, et d'améliorer le travail parlementaire. Le 22 décembre 1952, Robert Lecourt annonce que le groupe MRP a décidé de s'abstenir lors du scrutin sur la question de confiance posée par Antoine Pinay. Le 6 janvier 1953, au nom du MRP, il prend part au débat sur l'investiture de René Mayer. Il attire son attention sur l'inflation et les difficultés du logement et lui demande des éclaircissements sur sa position concernant la Communauté européenne de défense (CED). Le 21 mai 1953, il fait connaître son avis sur le projet de redressement financier du gouvernement. Il souhaite que l'État fasse des économies supplémentaires et que la délimitation entre le domaine législatif et le domaine réglementaire soit plus clairement affirmée. Pour le MRP, Robert Lecourt intervient, en 1953, dans les débats d'investiture de Paul Reynaud et Pierre Mendès France. Il ne se montre guère favorable à la proposition faite par le leader indépendant de procéder à une révision de la constitution qui vise à procéder à une dissolution automatique dans l'hypothèse où un gouvernement serait renversé dans les dix-huit mois qui suivent sa formation. Robert Lecourt demande à Paul Reynaud s'il accepte des amendements à son projet. Au cours du débat d'investiture de Pierre Mendès France, Robert Lecourt rappelle la position du MRP : indépendance des trois États associés à la République française, fidélité aux populations qui ont fait confiance à la France, négociation à Genève avec l'accord et la participation des États associés. Quant à la politique européenne du député de l'Eure, il craint qu'elle ne remette en cause la continuité de la politique étrangère de la France. Il s'inquiète des relents neutralistes et demande au président désigné s'il signera les protocoles additionnels au projet de CED. A nouveau, le 27 novembre, il insiste sur la nécessité de construire une Europe supranationale. Robert Lecourt n'encourage pas la tentative d'Antoine Pinay de former un nouveau gouvernement et soutient Joseph Laniel investi le 28 juin 1953. Au moment le plus dur des grèves d'août 1953, le député de la Seine s'entremet pour rétablir le contact entre le gouvernement et les syndicats. Au nom du groupe MRP, Robert Lecourt fait pression sur le gouvernement pour que le débat de ratification du projet de CED soit inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée le plus rapidement possible. Pour autant, il fait tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir le gouvernement malmené par l'affaire indochinoise. Il essaie encore, le 13 mai 1954 après la chute de Dien-Bien-Phu, de sauver le gouvernement Laniel-Bidault en attirant l'attention de la représentation nationale sur le danger qu'il y aurait à provoquer une crise au moment où des négociations sont engagées à Genève.

Robert Lecourt est l'un des principaux opposants du gouvernement Mendès France et contribue à sa chute le 5 février. Dans le gouvernement présenté par Christian Pineau le 18 février, et qui n'a pas été investi, Robert Lecourt s'était vu confier le ministère de la défense nationale. Tout en étant l'un des plus fermes soutiens du gouvernement Edgar Faure, Robert Lecourt, consacre l'essentiel de l'année 1955 à défendre l'idée d'une nécessaire réforme de la constitution et fait des propositions qui ont été pour certaines reprises sous la dernière législature de la IVe République.

La liste conduite par Robert Lecourt, le 2 janvier 1956, recueille 20 274 voix sur 491 457 suffrages exprimés et obtient un seul siège.

Robert Lecourt intervient, le 31 janvier 1956, au cours du débat sur la composition du gouvernement Guy Mollet qu'il présente comme un gouvernement de minorité. « Les majorités possibles ne sont pas innombrables : ou bien une majorité tournante suivant les questions, ou bien une majorité de Front populaire, plus exactement de démocratie populaire. » Et Robert Lecourt ajoute : « M. Duclos veut faire une démonstration arithmétique, nous allons l'en empêcher. (...) Aujourd'hui, nous ne signons pas, nous laissons faire une expérience. » Le leader MRP demande aussi au président du Conseil de préciser ses intentions concernant la loi Barangé. A la suite de cette intervention, il rencontre le chef du gouvernement à Matignon le 17 février. Depuis plusieurs années, Robert Lecourt réfléchissait aux moyens, par une négociation avec le Saint-Siège, de mettre un terme à la querelle scolaire. Des contacts avaient été pris à titre personnel sous la précédente législature. Robert Lecourt rencontre, à nouveau le 8 mars, le chef du gouvernement qui lui annonce son attention d'envoyer à Rome un émissaire personnel en vue d'ouvrir des négociations. Le 2 avril, Robert Lecourt est reçu par Pie XII et par le Secrétaire d'Etat. Robert Lecourt a relaté dans un livre publié en 1978 ces négociations qui n'aboutirent pas (Entre l'Eglise et l'Etat. Concorde sans concordat, 1952-1957, Hachette, 1978).

Robert Lecourt est nommé Garde des Sceaux, ministre de la justice dans les gouvernements Gaillard et Pflimlin. Il s'attache à réformer la Constitution et dépose plusieurs projets de loi dans ce sens. Une disposition prévoit que tout texte, à propos duquel le gouvernement a posé la question de confiance, est adopté si une motion de censure présentée par l'opposition n'est pas votée. Ce texte, qui annonce l'article 49-3 de la Ve République, a été retiré car il suscite trop d'oppositions.

Robert Lecourt vote l'investiture du gouvernement de Gaulle le 1er juin 1958, les pleins pouvoirs et la loi constitutionnelle le 2 juin. Il est élu, le 30 novembre, au second tour député de la première circonscription des Hautes-Alpes. Robert Lecourt poursuit sous la Ve République une carrière brillante.



LECOURT (Robert)

Né le 19 septembre 1908 à Pavilly (Seine-Maritime)
Décédé le 9 août 2004 à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)

Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale constituante (Seine)
Député de la Seine de 1946 à 1958
Député des Hautes-Alpes de 1958 à 1959
Garde des Sceaux, ministre de la justice du 26 juillet au 28 août 1948, puis du 5 au 11 septembre 1948, du 13 février 1949 au 28 octobre 1949 et du 6 novembre 1957 au 31 mai 1958
Ministre d'État du 8 janvier au 27 mars 1959
Ministre d'État, chargé de la Coopération avec les états africains et malgaches, du 27 mars 1959 au 5 février 1960
Ministre d'État, chargé du Sahara, des départements et territoires d'outre-mer, du 5 février 1960 au 24 août 1961


(Voir première partie de la biographie dans le Dictionnaire des parlementaires français, 1940-1958, tome V, p. 117-120)

Aux élections législatives du 23 novembre 1958, le MRP investit l'ancien ministre dans les Hautes Alpes, où Jean Aubin fut élu en 1951. Robert Lecourt est donc candidat dans la première circonscription (Gap) de ce département. Il y affronte un député sortant, Gaston Julian (PCF), un homme d'appareil, Ernest Cazelles, alors secrétaire général-adjoint de la SFIO, et trois notables locaux étiquetés à droite. L'ex-député de la Seine arrive en tête avec 21,6 % des suffrages exprimés et 275 voix d'avance sur le candidat communiste, qui en a recueilli 4 406. Joseph Richaud, conseiller général d'Aspres-sur-Buëch, largement en tête dans son canton, et Édouard Lambert, conseiller général et maire de Serres, ont obtenu plus de 3 000 suffrages et se maintiennent également au second tour. Le 30 novembre 1958, Robert Lecourt sort vainqueur de cette quadrangulaire : il totalise 7 355 voix (31,2 % des suffrages exprimés), devant Édouard Lambert (5 718 voix), Gaston Julian (5 424 voix) et Joseph Richaud (4 994 voix).

Le 8 janvier 1959, Robert Lecourt entre dans le gouvernement formé par Michel Debré, qui compte quatre ministres du MRP. Ministre d'État, il est chargé de la Coopération avec les États africains et malgache à partir du 27 mars, puis du Sahara, des Départements et Territoires d’outre-mer à partir du 5 février 1960. Il se consacre à cette tâche avec ardeur, défendant six projets de loi devant l'Assemblée. Comme député, Robert Lecourt n'a pris part à aucun vote ni débat majeur et a cédé son siège à son suppléant, Armand Barniaudy, exploitant agricole et maire de Lagrand. Le général de Gaulle ayant renoncé à garder le Sahara sous souveraineté française, Robert Lecourt considère que sa mission n'a plus de justification : le ministre du Sahara était en effet chargé de l'application de la loi du 10 janvier 1957, qui a mis en place l'Organisation commune des régions sahariennes (OCRS), en vue de la mise en valeur, l'expansion économique et la promotion sociale des zones sahariennes de la République française. Robert Lecourt présente donc sa démission le 24 août 1961. Il aura été le dernier ministre du Sahara, portefeuille créé en juin 1957 et occupé avant lui par le socialiste Max Lejeune, à deux reprises, et le gaulliste Édouard Corniglion-Molinier.

Après son départ du gouvernement, l'ancien président du groupe parlementaire MRP ne sollicite pas le renouvellement de son mandat de député. Armand Barniaudy est réélu dans la première circonscription des Hautes-Alpes en 1962, mais est battu en 1967 par Émile Didier (Radical FGDS).

Européen convaincu, Robert Lecourt intègre la Cour de justice des communautés européennes en 1962 et préside cette instance de 1967 à 1976. Durant cette période, l'avocat se consacre aussi à l'écriture : il publie notamment Le juge devant le Marché commun (Genève, IUHEI, 1970) et L'Europe des juges (Bruxelles, Bruylant, 1976). Avec son livre intitulé Entre l'Église et l'État : concorde sans concordat (Paris, Hachette, 1978), l'ancien député démocrate-chrétien signe un témoignage sur la querelle scolaire des années cinquante et les négociations secrètes engagées par le gouvernement français et le Vatican – dont il fut un des principaux protagonistes – entre 1952 et 1957.

Le Conseil constitutionnel constitue la dernière étape de la carrière publique de Robert Lecourt. Il y est nommé en 1979 par Alain Poher, président du Sénat, en remplacement de Paul Coste-Floret, décédé. Il est reconduit dans cette fonction en 1980 et contribue notamment à l'adaptation de cette institution au droit communautaire européen. En 1989, son mandat prend fin et il met un terme à une carrière longue et très complète.

Robert Lecourt s'éteint le 9 août 2004 dans une clinique de Boulogne-Billancourt, à l'âge de 95 ans. Il était commandeur de la Légion d'honneur, avait été décoré de la Rosette de la Résistance et de la Croix de Guerre 1939-1945. Il fut l'un des principaux hommes d'État et l'une des principales figures parlementaires du MRP.