Madeleine Léo-Lagrange Née Weiller

1900 - 1992

Informations générales
  • Née le 23 novembre 1900 à Saint-dié (Vosges - France)
  • Décédée le 12 avril 1992 (Lieu de décès inconnu)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Nord
Groupe
Socialiste

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Née le 23 novembre 1900 à Saint-Dié (Vosges)
Décédée le 12 avril 1992 à Paris

Membre de la première Assemblée nationale constituante (Nord)

Madeleine Weiller est née le 23 novembre 1900 à Saint-Dié, dans le département des Vosges. Elle appartient, par son milieu, à la bonne bourgeoisie juive et laïque ; son père, médecin, occupe un temps la présidence de la Société française des praticiens.

Après des études au lycée Molière, à Paris, elle entre à la Faculté de Droit de la Sorbonne. Elle y décroche une licence, puis s'inscrit, en 1924, au Barreau de Paris ; elle est alors l'une des premières femmes, en France, à exercer la profession d'avocat.

Madeleine Weiller milite dès le début des années vingt au sein de la SFIO ; elle y rencontre en 1922 un jeune étudiant en droit, Léo Lagrange, qu'elle épouse deux ans plus tard. Pendant dix ans, Madeleine et Léo Lagrange offrent l'image d'un couple moderne, passionnément impliqué dans la vie culturelle parisienne, qui partage le même idéal de progrès et de justice sociale.

Leur vie prend une autre tournure avec l'entrée en politique de Léo Lagrange. Elu député du Nord en 1932, réélu en 1936, Léo Lagrange est désigné par Léon Blum pour prendre la tête du sous-secrétariat d'Etat à l'organisation des loisirs et des sports ; à ce titre, il est le principal architecte de l'une des politiques les plus ambitieuses du Front Populaire, qui vise à démocratiser l'accès aux loisirs, et à favoriser l'émergence d'une culture populaire qui prenne en considération aussi bien l'enrichissement intellectuel que l'épanouissement physique de l'individu. Chargée de mission au cabinet de son mari, Madeleine Léo-Lagrange prend une part importante à la mise en place de la loi sur les congés payés et de la loi sur les quarante heures. L'expérience prend fin en janvier 1937, mais elle continue par la suite à participer activement au débat sur les loisirs, en en faisant en particulier le thème central d'une série d'émissions radiophoniques qu'elle produit et anime en 1937 et en 1938.

Madeleine Léo-Lagrange devient veuve en juin 1940, quand son mari tombe au front sous les balles allemandes. Quelques mois plus tard, les lois raciales du régime de Vichy la contraignent à interrompre son activité professionnelle : l'accès aux prétoires lui est désormais interdit.

A la Libération, Madeleine Léo-Lagrange est sollicitée par Henri Frenay, ministre des prisonniers, déportés et réfugiés, pour prendre la direction de son cabinet : elle jouit d'une expérience politique dont peu de femmes peuvent alors se targuer, et son nom reste aux yeux de l'électorat populaire un symbole des conquêtes sociales du Front Populaire. C'est aussi pour ces raisons que Madeleine Léo-Lagrange est choisie par la SFIO pour figurer en troisième position sur la liste socialiste aux élections du 21 octobre 1945 pour la première Assemblée Constituante dans la 3e circonscription du Nord.

Avec 133 674 voix sur 430 182 suffrages exprimés, la liste socialiste remporte trois des neuf sièges à pourvoir, mais c'est au système de la répartition des restes à la plus forte moyenne que Madeleine Léo-Lagrange doit de faire son entrée à l'Assemblée, aux côtés d'Eugène Thomas et de Raymond Guernez. Les six sièges restants échoient à la liste communiste de Henri Martel (quatre élus) et à la liste MRP de Paul Gosset (deux élus).

Madeleine Léo-Lagrange est membre de la Commission de l'éducation nationale et des beaux-arts, de la jeunesse, des sports et des loisirs, de la Commission de la presse, de la radio et du cinéma, et du Conseil provisoire de la jeunesse ; elle est en outre nommée jurée à la Haute Cour de justice. Son activité parlementaire, pendant les huit mois que dure l'Assemblée Constituante, se limite au dépôt, le 20 décembre 1945, d'une proposition de résolution tendant à inviter le gouvernement à « prendre une série de mesures concernant la formation physique, civique et morale de la jeunesse française ». Le 29 décembre, Madeleine Léo-Lagrange revient sur ce thème au cours de la discussion sur le budget de l'année 1946, et appelle le gouvernement à ne pas sacrifier le budget des loisirs sur l'autel de la reconstruction : « nous savons évidemment que les finances du pays sont dans un état difficile, mais vous savez aussi que si les efforts de tous les Français doivent être tendus vers la reconstruction du pays, il n'y a pas de travail sans repos, pas de tension sans détente. La reconstruction doit se faire dans l'enthousiasme et dans l'espoir. Poser les bases d'une réorganisation saine du repos des travailleurs, montrer à ceux-ci qu'après les durs travaux viendront des conditions meilleures et plus humaines, c'est contribuer à la reconstruction du pays en même temps que faire preuve d'émancipation sociale ». Plus ambitieuse, elle invite le lendemain le gouvernement à lancer « une première tranche substantielle » d'un « plan grandiose de l'équipement sportif du pays ».

Madeleine Léo-Lagrange soutient le programme de nationalisations du GPRF et approuve, le 19 avril 1946, le premier projet de Constitution de la IVe République. Le texte est cependant rejeté par le référendum du 5 mai, ce qui entraîne la convocation d'une seconde Assemblée Constituante. Madeleine Léo-Lagrange choisit alors de ne pas présenter de nouveau sa candidature, et de mettre un terme à son expérience parlementaire.

Elle retrouve alors les cabinets ministériels en tant que chargée de mission, d'abord auprès de la secrétaire d'Etat à la jeunesse et aux sports, Andrée Pierre-Viénot, puis auprès de Paul Ramadier à la Présidence du Conseil. Elle est appréciée pour sa connaissance de la question des loisirs, sur laquelle elle s'exprime au travers de nombreux articles et d'un rapport qu'elle présente en 1946 à la 1ère conférence mondiale de l'UNESCO.

Madeleine Léo-Lagrange renoue à la fin de l'année 1948 avec le droit, cette fois non en tant qu'avocate mais en tant que juge. Magistrate à Lille puis à Versailles et enfin à Paris, elle y manifeste une indépendance d'esprit et une vigilance dans la défense des droits de l'homme qui la conduisent parfois à la limite de la rupture avec l'appareil judiciaire ; pendant la guerre d'Algérie, elle demande ainsi à être mise en disponibilité, estimant que « son rôle dans une chambre correctionnelle est incompatible avec ses convictions ». Madeleine Léo-Lagrange demande sa réintégration dans la magistrature après la signature des accords d'Evian ; dès juillet 1963, toutefois, elle sollicite et obtient une mise à la retraite anticipée.

Elle décède le 12 avril 1992 à Paris.