Yves Guyot

1843 - 1928

Informations générales
  • Né le 6 septembre 1843 à Dinan (Côtes-du-Nord - France)
  • Décédé le 22 février 1928 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IVe législature
Mandat
Du 18 octobre 1885 au 14 octobre 1889
Département
Seine
Groupe
Extrême-gauche
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
Ve législature
Mandat
Du 6 octobre 1889 au 14 octobre 1893
Département
Seine
Groupe
Extrême-gauche

Biographies

Député de 1885 à 1889 et ministre, né à Dinan (Côtes-du-Nord) le 6 septembre 1843,il fit ses études au lycée de Rennes, et vint à Paris à l'âge de vingt ans pour s'occuper de navigation aérienne.

Secrétaire de la rédaction du journal l'Aéronaute, et agent général de la Société de locomotion aérienne, il consigna le résultat de ses observations personnelles dans un volume intitulé l'Inventeur, où se trahissaient des tendances républicaines (1867). Cet ouvrage n'en fut pas moins cité comme autorité au Sénat, dans la séance du 22 juin 1867, par M. Lefebvre-Duruflé. M. Yves Guyot collabora, vers la fin de l'Empire, au Courrier français et à la Pensée nouvelle.

Occupé de questions économiques, il sollicita, sans l'obtenir, en 1868, l'autorisation d'aller faire en province une série de conférences sur les Sociétés coopératives; puis il fonda à Nîmes un journal démocratique, l'Indépendant du Midi, dont les polémiques lui valurent deux condamnations, dont l'une à un mois de prison, à l'occasion de la souscription Baudin. La ligne politique du journal ayant été modifiée par ses directeurs, M. Yves Guyot se retira et contribua à la fondation d'un journal radical, les Droits de l'homme, de Montpellier. De retour à Paris, il fit campagne contre le plébiscite, dans le comité de la rue de la Sourdière, dont il était le secrétaire, et dans plusieurs réunions publiques . Poursuivi pour un discours très vif contre l'Empire, il fut condamné d'abord à six mois de prison par défaut, et obtint ensuite la réduction de sa peine à 1,000 fr. d'amende. Il entra alors à la rédaction du Rappel, fut arrêté le 9 août, jour de l'ouverture des Chambres, et rendu à la liberté par le 4 septembre, continua de jouer dans la presse démocratique un rôle assez actif.

Il collabora à diverses feuilles pendant la guerre et la Commune, fit partie de la Ligue d'Union républicaine des Droits de Paris, fonda en octobre 1871 la Municipalité, et devint un des principaux rédacteurs du Radical, dirigé par M. Mottu. Son goût pour l'économie politique et sa compétence dans ces questions spéciales lui firent confier par M. Ménier, qui aspirait à devenir député de Seine-et-Marne, la rédaction de plusieurs brochures parues sous la signature du célèbre industriel, et dans lesquelles des idées intéressantes étaient exprimées, notamment touchant l'impôt sur le capital et la réforme financière. M. Ménier ayant fondé, en 1875, une revue intitulée la Réforme économique et étant devenu, d'autre part, propriétaire du journal quotidien le Bien public, M. Yves Guyot fut le principal rédacteur de ces deux publications. Il y soutint la politique modérée de M. Thiers, pour la statue duquel le Bien public organisa une souscription, et combattit le gouvernement du Seize-Mai.

Ardent polémiste, il se montra plus radical, par la suite, dans sa collaboration aux Droits de l'Homme, puis à la Lanterne. Partisan de l'abolition des mesures réglementant la prostitution, il publia contre la police des mœurs et en général contre la préfecture de police, sous la signature: Un vieux petit employé, une série d'articles à sensation dont s'émurent successivement MM. Albert Gigot et Andrieux, préfets de police, et qui passionnèrent l'opinion. Les révélations du rédacteur anonyme déterminèrent l'institution par la Chambre d'une commission d'enquête, dont le rôle fut d'ailleurs annulé par l'attitude de la plupart des fonctionnaires qu'elle interrogea et qui se renfermèrent derrière le secret professionnel. D'autre part, un procès en diffamation intenté à la Lanterne par M. Ansart, chef de la police municipale, mit en lumière des faits scandaleux qui entraînèrent la démission de M. Albert Gigot comme préfet de police (1879).

Membre du conseil municipal de Paris depuis 1874 pour le quartier de Notre-Dame, M. Yves Guyot y fut avec son ami, M. Sigismond Lacroix, un des fondateurs du groupe de l'autonomie communale, et se mêla activement à plusieurs discussions importantes.

Après diverses tentatives infructueuses comme candidat à la Chambre des députés, M. Yves Guyot y entra lors des élections générales d'octobre 1885: porté dans le département de la Seine sur la liste dressée par la presse radicale et patronnée par M. Clemenceau, il fut élu au second tour de scrutin (18 octobre), le 27e sur 34, par 283,452 voix (416,886 votants, 564,338 inscrits).

Il prit place à la gauche radicale, vota avec ce groupe, et intervint surtout dans les débats économiques et financiers. Partisan déterminé du libre-échange, il parla en 1886 contre l'augmentation des droits sur le blé que réclamaient MM. Paul Deschanel, de Roys, Sevaistre, etc. Membre de la commission du budget, il y défendit ses idées personnelles, et lorsque les projets d'impôt sur le revenu furent examinés (novembre 1886), il déclara cet impôt tyrannique, parce qu'il frappait les personnes et non les choses, et conclut à l'établissement d'un impôt sur le capital. Au cours de la discussion générale sur le budget, il s'associa d'ailleurs à l'apologie de la politique financière du gouvernement. Rapporteur, en mars 1887, de la commission du budget qui repoussait une demande de crédit supplémentaire demandée par M. Dauphin, ministre des Finances, pour le personnel de son administration, il fut encore en juin l'organe de cette commission contre M. Rouvier, le nouveau ministre, à propos du projet de loi relatif aux contributions directes de 1888; mais ses conclusions furent repoussées par la Chambre à la majorité de 341 voix contre 168. Enfin, le 4 novembre de la même année, il fut élu rapporteur général de la commission du budget. En cette qualité il élabora, d'accord avec ses collègues, un projet portant sur deux points principaux: 1° distraction du passif dans les successions pour la fixation des droits de mutation et élévation du tarif des droits, avec échelle progressive, surtout pour les successions en ligne collatérale; 2° suppression de tous les droits sur les boissons ; élévation considérable des licences; droit de 180 francs sur l'alcool perçu à la fabrication. M. Tirard demanda l'ajournement de la première proposition et opposa à la seconde un contre-projet, que la commission écarta. Etendant aux bières le bénéfice du programme de M. Yves Guyot, la commission mit la dernière main à son projet de budget, dont la discussion vint à la Chambre le 26 janvier; malgré les efforts du rapporteur général, soutenu par MM. Peytral, Camille Pelletan, etc., il n'obtint pas l'agrément de la majorité. Lorsque M. Tirard, président du Conseil, annonça à son tour (mars 1888) de nouvelles propositions du gouvernement, la commission, par l'organe de M. Yves Guyot, refusa de les accepter : M. Tirard retira alors ses propositions et le budget des recettes fut voté le 16 mars, tel qu'il l'avait été en 1887. Enfin, sur un rapport oral de M. Yves Guyot, la Chambre eut à statuer définitivement, le 30 mars, sur les modifications votées par le Sénat. Le député de la Seine donna encore son avis sur la loi concernant le travail des mineurs et des femmes dans les manufactures, et fit de vains efforts pour que la Chambre renonçât à limiter la liberté absolue dont les femmes majeures jouissent aujourd'hui. La même année, sous le ministère de M. Peytral et à propos du budget de 1889, M. Yves Guyot reprit, avec M. Blatin, au sein de la commission du budget, un amendement tendant à transformer en impôt de quotité l'impôt foncier sur les propriétés bâties ; mais ce projet ne fut pas agrée par le gouvernement. M. Yves Guyot s'est prononcé en dernier lieu:

- pour le rétablissement du scrutin d'arrondissement (11 février 1889),
- contre l'ajournement indéfini de la révision de la Constitution,
- pour les poursuites contre trois députés membres de la Ligue des patriotes,
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse,
- pour les poursuites contre le général Boulanger.

Après la chute du cabinet Floquet, M. Yves Guyot a été désigné pour faire partie, le 23 février 1889, avec le portefeuille des Travaux publics, du ministère constitué sous la présidence de M. Tirard.


M. Yves Guyot appartient, depuis 1885, à la Société des Gens de lettres. Outre les publications déjà citées, on lui doit un certain nombre d'ouvrages : une Histoire des prolétaires, écrite en collaboration avec M. Sigismond Lacroix, plusieurs brochures, des romans, etc.

Né le 6 septembre 1843 à Dinan (Côtes-du-Nord), mort le 22 février 1928 à Paris.

Député de la Seine de 1885 à 1893.

Ministre des Travaux Publics du 22 février 1889 au 18 février 1892.

(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. III, p. 299.)

Il conserva son siège aux élections générales de 1889 où, candidat dans le Ier arrondissement de Paris, il fut élu par 6.133 voix contre 5.407 à M. Turquet, boulangiste, au deuxième tour de scrutin, le 22 septembre.

Ayant pris, dès son arrivée à la Chambre, une part active aux travaux des commissions, il fut appelé au ministère des Travaux publics dans le cabinet formé par son ancien concurrent, Tirard, le 22 février 1889, après la chute du ministère Floquet. II conserva son portefeuille dans le cabinet Freycinet qui demeura au pouvoir jusqu'au 18 février 1892.

Pendant les trois années qu'il passa au ministère des Travaux publics, il réalisa le dégrèvement de la grande vitesse en chemin de fer, qui réduisait de 27 % le prix des places en 3e classe. Ses inaugurations multiples et la fréquence de ses voyages officiels lui valurent le surnom de « ministre inaugurateur » ou de « ministre juif-errant », surnom qu'il revendiquait d'ailleurs volontiers.

Mais cette brillante carrière fut interrompue par le renouvellement législatif du 20 avril 1893. En effet, membre de l'extrême-gauche radicale, Yves Guyot s'était progressivement empreint d'une modération qui devait lui coûter son siège. Il fut battu par le candidat radical Goblet après s'être désisté à l'issue du premier tour en faveur de l'autre candidat modéré Muzet.

De nouveau, aux élections du 27 avril 1902, sa candidature comme représentant des Indes françaises fut repoussée par les électeurs. Eliminé par 1995 suffrages contre 30.541 à son concurrent radical Henrique-Deluc, il devait rentrer définitivement dans la vie privée tout en continuant à défendre ses idées par sa collaboration active avec la presse.

Le 14 avril 1892, il avait pris la direction du Siècle qu'il conserva jusqu'en 1903. Il y mena d'actives campagnes contre le nationalisme, défenseur infatigable de la révision du procès Dreyfus. Il y assura également la défense des thèses libres échangistes, s'élevant à la fois contre le protectionnisme et le socialisme. Il devait continuer sa collaboration au Siècle avant de devenir rédacteur en chef du Journal des Economistes, puis de l'Agence économique et financière.

Les nombreux ouvrages qu'il publia parallèlement à ses activités journalistiques révèlent ses préoccupations (essentiellement politiques et économiques) : La tyrannie socialiste, La propriété, son origine, son évolution (réfutation de la thèse de Paul Lafargue), Protectionnisme et socialisme, L'affaire Dreyfus (analyse de l'enquête), Etc.

Son activité de propagandiste (il était président de la Ligue du libre échange) ne se limitait d'ailleurs pas aux articles de journaux et de revues. Fidèle à son idéal de « juif errant », il fit de nombreuses conférences dans divers congrès internationaux. Le nombre de ses présidences était d’ailleurs presque aussi important que celui de ses ouvrages.

C'est au terme d'une longue carrière publique dont le mandat parlementaire et ministériel n'avait constitué qu'un des fleurons que s'éteindra à l'âge de 85 ans, le 22 février 1928, ce militant infatigable qui consacra sa vie à la défense de ses idées.