Albert, Charles, Louis Bignon
1910 - 1977
Né le 28 février 1910 à Groix (Morbihan)
Décédé le 10 janvier 1977 à Rochefort-sur-Mer (Charente-Maritime
Député de la Charente-Maritime de 1951 à 1955
Albert Bignon était fils le de J. Bignon, administrateur de l'Inscription maritime et de Madame, née Stéphan. Il effectue ses études au Prytanée militaire de la Flèche et au lycée de Lorient avant de s'inscrire à la faculté de droit de Rennes. Il y préside la fédération des étudiants républicains et socialistes et quitte l'université titulaire de la licence et du diplôme d'études supérieures de droit civil et commercial.
A 23 ans, en 1933, il se marie avec Melle Dalmont et s'installe comme avocat à Rochefort. Il sera à six reprises bâtonnier de l'ordre des avocats de la Rochelle et Rochefort.
Acquis à la Résistance dès l'appel du 18 juin, Albert Bignon prend une part active à la lutte contre l'occupant comme chef du sous-secteur du réseau Navarre et chef de groupe de l'O.C.M. (Organisation civile et militaire) de Rochefort. Mais le 21 septembre 1943, il est arrêté par la Gestapo, incarcéré et torturé à la Rochelle et Poitiers et il gardera de cet épisode douloureux de graves séquelles. A la Libération, Albert Bignon fait partie du Comité départemental de Libération et devient maire de Rochefort. Il n'hésite pas cependant à démissionner pour s'engager dans le 6e régiment d'infanterie et participer à la fin des combats contre l'Allemagne. Il termine la guerre titulaire de la Croix de guerre 1939-1945, de la médaille de la Résistance et de la Légion d'honneur.
En 1947, Albert Bignon retrouve son siège au conseil municipal de Rochefort et le gardera jusqu'en 1971. En 1949, il est également élu conseiller général de Rochefort-sud, mandat qu'il conservera jusqu'à son décès. Plus que jamais gaulliste, il devient le candidat du R.P.F. en Charente-Maritime aux élections de 1951. Sa profession de foi dénonce les partis de la troisième force, le régime des partis et la loi électorale des apparentements. Elle réclame aussi la fin du dirigisme, des économies massives sur le budget de l'Etat afin de ranimer la confiance et la production. La liste du R.P.F. arrive en tête en Charente-Maritime avec 65 527 voix (34,7 %) contre 22,1 % au parti communiste, 19,9 % au Rassemblement des gauches républicaines, 13,3 % à la S.F.I.O et 9,9 % au M.R.P.
Aussi le parti gaulliste compte-t-il deux élus, Max Brusset, député sortant, et Albert Bignon, second de la liste. Ce succès s'explique par le reflux du M.R.P. qui perd la moitié de ses voix par rapport en 1946 et dont les électeurs se sont en grande partie reportés sur la liste du R.P.F.
Pendant son mandat, Albert Bignon est un parlementaire actif. Il est nommé membre de la Commission de la marine marchande et des pêches et de celle des pensions, dont il est le vice-président. Il ne dépose pas moins de trente et un rapports ou propositions de loi, consacrés soit aux problèmes des pensions militaires et civiles, soit à la marine marchande. Il intervient également régulièrement en séance, notamment lors de la discussion du budget du ministère de la marine marchande et de celui des anciens combattants et victimes de guerre.
Mais, dès le 30 août 1951, Albert Bignon montre aussi qu'il reste avocat en défendant un amendement au projet de loi relatif au redressement financier de la Sécurité sociale. Il y demande que les débiteurs puissent faire appel des décisions des juridictions contentieuses de la Sécurité sociale, sinon celle-ci sera juge et partie et les débiteurs, de bonne comme de mauvaise foi, seront également frappés sans recours possible. Or bien souvent, selon lui, les retards de paiement des cotisations par les employeurs sont dus en fait aux délais de paiement de l'Etat lui-même. Le 31 décembre 1953, Albert Bignon intervient dans une discussion du même type en donnant l'explication du vote positif de son groupe à propos du projet de loi relatif au renouvellement des baux commerciaux, amendé par le Conseil de la République. Il souhaite à cette occasion que le Parlement tire les conséquences de la notion de propriété commerciale, apparue en 1926, et reconnaisse que le « bail commercial est un contrat sui generis auquel les règles traditionnelles du Code civil de 1804 ne peuvent plus s'appliquer (...). Il faudra par conséquent que, dans un proche avenir, un projet d'ensemble, issu de négociations entre le monde du commerce et les représentants de la propriété bâtie, soit mis à l'étude. Ainsi prendra fin une querelle stérile dont nos discussions d'aujourd'hui ont été encore une fois l'exemple ». (Assemblée nationale, débats p. 7115).
Ses deux dernières interventions importantes ont trait à la défense des intérêts des anciens combattants. Le 6 août 1954, il obtient du ministre des finances, Edgar Faure, l'assurance formelle que le plan quadriennal visant à résoudre les problèmes des anciens combattants et victimes de guerre ne sera pas affecté par la demande de pouvoirs spéciaux en matière économique et financière faite par le Gouvernement Mendès-France. Le 11 mars 1955, alors qu'Edgar Faure est devenu président du conseil, il revient à la charge et se félicite que celui-ci tienne les promesses faites en dépit des velléités d'économies sur ce chapitre qu'il avait eues comme ministre des finances. Il conclut en annonçant que les républicains sociaux voteront le budget. Hostile à la CECA et à la CED, Albert Bignon avait déjà rallié la majorité lors du vote de confiance au gouvernement Mendès-France, qui s'était soldé par la chute de ce dernier.
Aux élections du 2 janvier 1956, Albert Bignon est à nouveau second sur la liste des « républicains sociaux », nouveau nom des gaullistes après la dissolution du R.P.F. Mais la multiplication des listes et l'apparition d'un assez fort courant poujadiste en Charente-maritime entraînent un émiettement de l'électorat qui fait fortement régresser le score de la liste où figure Albert Bignon. Celui-ci ne recueille que 25 178 voix (11,3 %) contre plus de 65 000 cinq ans plus tôt.
Ainsi, seul Max Brusset est-il réélu de 1956 à 1958. Albert Bignon retrouve son cabinet d'avocat et ses mandats locaux, mais l'avènement de la Cinquième République va lui permettre de poursuivre une carrière politique.
BIGNON (Albert, Charles, Louis)
Né le 28 février 1910 à Groix (Morbihan)
Décédé le 10 janvier 1977 à Rochefort-sur-Mer (Charente-Maritime)
Député de la Charente-Maritime de 1951 à 1955 et de 1958 à 1977
Le nom d’Albert Bignon est durablement associé à l’histoire du gaullisme en Charente-Maritime, du RPF au lendemain de la Seconde Guerre mondiale au RPR à la fin des années 1970. Bignon s’est installé dans ce département lors de son mariage en 1933 et y exerce la profession d’avocat. Si son premier engagement politique remonte au début des années 1930, pendant ses études à la faculté de droit de Rennes, sa carrière politique est directement issue d’un beau parcours dans la Résistance. Membre du CDL à la Libération, nommé maire de Rochefort, il est élu conseiller municipal en 1947 et réélu jusqu’en 1971 puis conseiller général de Rochefort-sud de 1949 et réélu jusqu’à son décès. Cette carrière s’effectue, sans interruption, sous l’étiquette gaulliste : ayant adhéré au gaullisme de guerre dès 1940, Bignon s’engage dans le gaullisme politique dès la fondation du Rassemblement du Peuple Français en 1947. Ainsi, il figure en seconde position lors des élections législatives de 1951 sur la liste du RPF conduite par le député sortant, Max Brusset et il est élu pour la première fois député. Battu en 1956, Bignon reçoit, sans surprise, l’investiture du nouveau mouvement gaulliste, l’UNR, pour la 2e circonscription de Charente-Maritime, celle de Rochefort, pour les élections législatives de 1958.
Et l’ancien député ouvre ainsi sa profession de foi : « pendant douze ans, sans me lasser, contre vents et marées, je n’ai jamais cessé de proclamer que le mauvais régime imposé à la France par les Constituants de 1946 conduisait le Pays au désastre (…) et que, seul, le Général de Gaulle – recours suprême de la Nation – pouvait écarter de nous les périls et prendre la tête d’un grand mouvement de renaissance nationale » avant d’écrire : « de tous les candidats, je suis le seul qui ai toujours été fidèle à la pensée gaulliste ». Le candidat gaulliste doit affronter six autres candidats : un député sortant, le radical-socialiste Roger Gaborit, un communiste, Armand Salle, un socialiste, André Boucher, un radical, Gérard Noël, un indépendant, Jean Monglond et François Pillon (UFF). Au 1er tour, AlbertBignon mène nettement (10963 voix sur 30168 suffrages exprimés) loin devant trois candidats presque à égalité, Noël (4630), Salle (4517) et Monglond (4245). Au 2e tour, il l’emporte avec 15912 voix, dans une triangulaire, face à Monglond (8696) et Salle (4737). En 1962, toujours désireux de « servir d’abord mon pays et le Général de Gaulle qui l’incarne », Bignon retrouve deux de ses adversaires de 1958 (Salle et Gaborit) et affronte trois nouveaux candidats : un républicain démocrate de gauche (Michel Fort), un MRP (Joseph Deplanne) et un indépendant paysan (Claude Peninque). En tête au 1er tour (11427 voix sur 24610), il l’emporte sur Salle le 25 novembre avec 16241 voix contre 8485. En 1967, seuls trois candidats affrontent Albert Bignon : le communiste Salle, Josy Moinet (FGDS) et Joseph Deplanne (centre démocrate). Bignon, malgré le contexte difficile pour la majorité, frôle la victoire au 1er tour (14470 voix sur 31793) avec plus du double des voix de ses rivaux (6984 pour Moinet et 6822 pour Salle) mais il est élu moins confortablement au 2e tour (16616 voix contre 15439 à Moynet). En 1968, la réélection du député gaulliste est acquise dès le 1er tour avec 16536 voix sur 32236 devant Moinet (7620) et Salle (6170) et un quatrième candidat, Gilles Santeix (1910). En 1973, le nombre de concurrents augmente à nouveau et tous les candidats sont des nouveaux : Raphaël Sistane (PCF), Yves La Neelle (LO), Maurice Remontet (PS), Jean Morin, maire de Rochefort (réformateur). Bignon partage sa profession de foi entre programmes national et local mais il l’ouvre par : « les Français vont avoir à faire un choix de société » et commence par le bilan gouvernemental pour la conclure par : « en souvenir du général de Gaulle et pour soutenir le Président Georges Pompidou, c’est en toute confiance que je me présente à vos suffrages ». Le 4 mars, Bignon arrive très largement en tête (12587 voix sur 34222) devant le réformateur (7657), le communiste (6605) et le socialiste (5398).Pour le 2e tour, il bénéficie du retrait du candidat réformateur et il insiste sur la nécessité de « barrer la route au communisme ». Le 11 mars, il est réélu avec 18750 voix face à Sistane (13657).
Tout au long de ces dix-neuf ans de mandat au Palais-Bourbon sous la Ve République, Albert Bignon siège dans le groupe gaulliste (UNR en 1958, UNR-UDT en 1962, UD-Ve République en 1967, UDR en 1968 et 1973). Il se montre, comme sous la IVe République, un député actif. Durant tous ses mandats, il est membre de la Commission de la défense nationale et des forces armées dont il est élu vice-président à compter de 1962, sans cesse confirmé jusqu’à sa mort. En plus des rapports qu’il présente au nom de cette Commission, il dépose de nombreuses propositions de loi (deux en 1959, quatre en 1963, quatre en 1967, deux en 1968, une en 1969, une en 1970, 6 en 1973) : parmi les sujets qui le mobilisent, la volonté d’interdire le cumul d’une pension militaire proportionnelle avec un traitement aux anciens militaires inscrits au registre de l’aéronautique civile ; la création d’un ordre des experts comptables et une compagnie nationale des comptables agréés et l’organisation de la profession d’expert en automobiles. Durant la 5e législature, il propose d’instituer le contrôle des véhicules accidentés et le contrôle obligatoire périodique de tous les véhicules. Ses interventions dans la discussion sont nombreuses, largement consacrées à l’amélioration et à la revalorisation de la condition militaire et celle d’anciens combattants. Au-delà de sa fonction au sein de la Commission de la défense nationale, cette attention portée au sort des militaires s’explique certainement par son passé de résistant : à compter de novembre 1973, Albert Bignon est président de l’Amicale des députés anciens combattants. Mais il ne faut pas non plus négliger les liens historiques de Rochefort avec la Marine et plus récents avec l’Armée de l’Air pour comprendre l’intérêt du député de l’Aunis pour ces questions.
Dans ses votes, Albert Bignon se montre d’une totale discipline et fidélité à la majorité à laquelle il appartient entre 1958 et 1977. Quand les gaullistes se divisent, par exemple, face au projet de loi présenté par Simone Veil sur l’interruption volontaire de grossesse en 1974, il suit la consigne du Premier ministre Jacques Chirac venu soutenir la ministre de la Santé. L’homme se présentait lui même comme un gaulliste inconditionnel, ne cessant d’un bout à l’autre de son parcours politique de rendre hommage à Charles de Gaulle. Quand Bignon meurt, en cours de mandat, victime d’une longue maladie qui l’a affaibli durant la dernière législature, laissant une veuve et deux enfants, Edgar Faure lui rend ainsi hommage dans son éloge funèbre : « cet homme affable et modeste se faisait du mandat parlementaire une idée qui n’était point médiocre. Il en accomplissait les devoirs avec un scrupule exemplaire ».