Emile Deshayes de Marcère

1828 - 1918

Informations générales
  • Né le 16 mars 1828 à Domfront (Orne - France)
  • Décédé le 26 avril 1918 à Messei (Orne - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Assemblée Nationale
Législature
Mandat
Du 8 février 1871 au 7 mars 1876
Département
Nord
Groupe
Centre gauche
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
Ire législature
Mandat
Du 20 février 1876 au 25 juin 1877
Département
Nord
Groupe
Centre gauche
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IIe législature
Mandat
Du 14 octobre 1877 au 14 octobre 1881
Département
Nord
Groupe
Opportuniste
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 21 août 1881 au 3 mars 1884
Département
Nord
Groupe
Opportuniste

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 28 février 1884 au 26 avril 1918

Biographies

Représentant en 1871, ministre, député de 1872 à 1884, membre du Sénat, né à Domfront (Orne) le 16 mars 1828, d'une ancienne famille de Normandie, il étudia le droit à Caen, et fut un des lauréats de cette faculté. Attaché quelque temps au ministère de la Justice, il entra dans la magistrature sous l'Empire, et devint successivement substitut à Soissons (12 novembre 1853) et à Arras (1er janvier 1856), procureur à Saint-Pol (1861), président du tribunal d'Avesnes (1863) et conseiller à la cour impériale de Douai (1865) .

En 1871, au moment des élections de l'Assemblée nationale, il publia une Lettre aux électeurs à l'occasion des élections pour la Constituante de 1871, qui le fit entrer dans la vie politique. Elu, le 8 février 1871, le 18e sur 28, par 204 588 voix (262 927 votants, 326 440 inscrits) représentant du Nord à l'Assemblée nationale, il se rallia à la forme républicaine, siégea au centre gauche, groupe dont il fut un des fondateurs, vota pour la paix, soutint la politique de Thiers, prit plusieurs fois la parole au nom de son groupe, se prononça contre la chute de Thiers au 24 mai, se montra attaché aux idées de décentralisation, et, dans une brochure intitulée : La Répulique et les conservateurs, déclara que le maintien des institutions républicaines était indispensable au salut du pays.

« Si les Français, écrivait-il, veulent conserver et reconstituer l'héritage d'honneur et de puissance que nos pères nous ont laissé, il faut qu'ils consentent à vivre sous l'empire des institutions républicaines. Il faut que le parti conservateur se donne tout entier, sans réserve, et qu'il consente à accepter jusqu'au nom de républicain, de telle sorte qu'il ne soit plus vrai de dire qu'on fonde la République sans républicains, ce que M. Gambetta appelait naguère une impertinente théorie politique. »

On remarqua les discours prononcés par M. de Marcère, en 1871, sur les élections municipales, sur la mise à la retraite des magistrats, sur l’exercice du droit de grâce, sur l'organisation des conseils généraux, sur la fête des écoles à Lyon, sur l'absence des princes d'Orléans à l'Assemblée en 1872, sur le projet de loi qui interdit aux députés les fonctions salariées, sur l'organisation de la magistrature, sur la loi réprimant l'ivrognerie, sur le droit de réunion pour l'élection aux conseils généraux, sur le budget de l'instruction publique; en 1873 sur les conclusions de la commission des Trente, etc..

Le 27 février 1873, il fit une fois de plus, à la tribune, une formelle adhésion à la République, en disant : « Dans un pays de démocratie et de suffrage universel, la République est seule possible. »

Au mois de mai 1874, M. de Marcère fut chargé du rapport sur le projet de loi relatif à la prorogation des conseils municipaux et en attaqua habilement les dispositions : son rapport, imprimé aux frais des gauches, fut répandu à profusion dans les départements.

Il vota contre le septennat, contre la loi des maires et contribua (mai 1874) au renversement du cabinet de Broglie. En juillet, il se prononça pour les propositions Périer et Maleville ; puis il vota (1875) l'amendement Wallon et l'ensemble des lois constitutionnelles. Il fut alors nommé membre de la troisième commission des Trente, chargée d'élaborer les lois constitutionnelles complémentaires. Peu après, il opina contre la loi sur l'enseignement supérieur ; puis il défendit avec talent le scrutin de liste, et prononça, lors de la discussion de cette loi, un remarquable discours.

Aux élections générales du 20 février 1876, M. de Marcère fut élu député de la 2e circonscription d'Avesnes (Nord), par 10 202 voix (17 413 votants, 20 782 inscrits), contre 7 169 à M. Bottieau, ancien représentant. Il avait dit dans sa profession de foi :

« Aujourd'hui la République est fondée ; il faut la garder. Tout changement serait une cause de révolutions nouvelles et successives. »

Il reprit sa place au centre gauche, et, lors de la formation du premier ministère républicain, fut nommé sous-secrétaire d'Etat au ministère de l'Intérieur (11 mars). Il seconda activement M. Ricard, rédigea plusieurs des circulaires adressées par ce ministre aux fonctionnaires du gouvernement, et se vit désigné à la mort de ce dernier pour le remplacer au département de l'Intérieur (15 mai 1876). Malgré de nombreuses difficultés venues en partie de l'entourage du maréchal, M. de Marcère tenta quelques modifications dans le personnel de l'administration départementale. Il aborda fréquemment la tribune, parla notamment :

- sur la révocation des maires pris en dehors des conseils municipaux ;
- sur l'intention du gouvernement de laisser la plus grande liberté dans les élections (7 juillet) ;
- sur la nomination de certains maires (22 juillet), etc.

Au mois d'août, pendant les vacances parlementaires, il se rendit à Domfront ; là, il prononça une harangue qui eut du retentissement et dans laquelle il renouvela ses déclarations républicaines, ce régime étant le seul qui « s'adapte exactement à l'état social, aux intérêts, aux idées issues de la Révolution française », le seul qui « donne la sécurité aux classes possédantes, l'espérance d'un meilleur sort aux classes ouvrières, etc. » Ce langage produisit un grand effet dans le pays : les républicains en furent en majorité satisfaits ; mais les conservateurs monarchistes s'en irritèrent, et M. de Marcère se trouva dès lors en butte à de violentes attaques. Dans un nouveau discours qu'il prononça à Maubeuge (octobre 1876), le ministre répondit indirectement à ces attaques. Bientôt un incident relatif aux obsèques de Félicien David, à qui l'autorité militaire avait refusé de rendre les honneurs parce qu'il était enterré civilement, provoqua de la part de la gauche une interpellation et décida le ministère à présenter un projet de loi relatif aux honneurs militaires. Ce projet, très combattu dans les bureaux, n'ayant aucune chance d'être adopté, M. de Marcère le retira le 2 décembre. Alors M. Laussedat proposa à la Chambre un ordre du jour motivé, demandant que le principe de l'égalité de tous devant la loi fût rigoureusement maintenu, et M. de Marcère déclara se rallier à cet ordre du jour. La droite se récria ; on accusa M. de Marcère d'avoir agi sans consulter ses collègues, et le ministre de l'Intérieur dut donner sa démission.

Il fut remplacé par M. Jules Simon le 12 décembre 1876. À quelques jours de là, le centre gauche choisit M. de Marcère pour son président, Le député d'Avesnes soutint le gouvernement de ses votes, se prononça, le 4 mai 1877, pour l'ordre du jour contre les « menées cléricales », et se montra l'adversaire déclaré de la politique inaugurée le 16 du même mois. Le 18, comme président du centre gauche, il la combattit dans un discours énergique. Le 19, il proposa à la Chambre, de concert avec les présidents des autres groupes républicains, MM. Devoucoux, de la gauche, et Louis Blanc, de l'extrême gauche, le célèbre ordre du jour de défiance qui fut voté par les 363.

Après la dissolution de la Chambre, M. de Marcère se représenta devant les électeurs d'Avesnes, et fut réélu, le 14 octobre 1877, par 9 526 voix (18 748 votants, 22 283 inscrits) contre 8 945 à M. Bottieau, candidat officiel. Nommé, dès la rentrée, membre du comité directeur des gauches (comité des dix-huit), il contribua en cette qualité à faire adopter la formation d'une commission d'enquête parlementaire sur les agissements de l'administration du 16 mai (15 novembre). Il interpella (24 novembre) le cabinet Rochebouët, et exposa que ce cabinet ne représentait que le pouvoir personnel, et qu'il n'était pas une solution, mais une menace.

Lorsque le maréchal de Mac-Mahon se fut décidé à modifier sa politique, M. de Marcère rentra aux affaires (13 décembre 1877), avec le portefeuille de l'Intérieur, dans la combinaison parlementaire à laquelle présida M. Dufaure. Il se remit alors à l'œuvre, remplaça, dès le 18 décembre, 83 préfets installés par le gouvernement du 16 mai, et manifesta l'intention d'aller « non jusqu'au bout de la légalité, mais jusqu'au bout de la liberté ». Ses instructions aux fonctionnaires placés sous ses ordres, relativement aux élections municipales et aux élections complémentaires de la Chambre des députés, furent empreintes d'un esprit vraiment libéral. Il modifia également le personnel des maires dans le sens républicain ; puis, il appuya devant le parlement, avec ses collègues, les trois projets de loi sur les délits de presse, le colportage et sur les atténuations à apporter au régime de l'état de siège. Il conserva son portefeuille dans le cabinet Waddington (4 février 1879). Mais il eut à répondre à deux interpellations dans lesquelles les bonnes intentions de la gauche à son égard parurent se démentir : l'une, à propos du vote par le conseil municipal d'un crédit de 100 000 francs pour les amnistiés : le ministre répondit que cette délibération était inspirée par un sentiment d'humanité, mais qu'il se voyait forcé de l'annuler comme illégale ; cette réponse provoqua diverses protestations. L'autre difficulté naquit de la révélation par le journal la Lanterne de certains actes de la préfecture de police : un procès intenté à ce journal, quoique ayant abouti à une condamnation, mit au jour plusieurs abus des plus graves. M. de Marcère nomma une commission d'enquête, que réclamait le préfet de police lui-même, M. Gigot ; mais les travaux de la commission furent à peu près nuls, la plupart des fonctionnaires cités par elle s'étant retranchés derrière le secret professionnel. Le 1er mars 1879, M. Lisbonne interpella le ministère, et, au cours d'une discussion où M. Clemenceau intervint, la Chambre vota l'ordre du jour pur et simple au lieu de l'ordre du jour demandé par M. de Marcère. Le ministre donna sa démission (3 mars 1879) et fut remplacé par M. Lepère. Il revint siéger au centre gauche et se mêla encore à plusieurs discussions. Au mois de février 1881, il prit la parole comme rapporteur en faveur de la proposition de l'établissement du divorce.

Le 21 août suivant, M. de Marcère fut réélu député par 10 173 voix (16 007 votants, 22 598 inscrits), contre 5 012 à M. Lecomte, radical. Il vota avec les opportunistes les plus modérés, fut, en 1882, rapporteur du projet d'organisation municipale, dirigea pendant quelque temps le journal le Soir.

Le 28 février 1884, il fut élu, par le Sénat, sénateur inamovible, en remplacement de M. Gauthier de Rumilly décédé, par 130 voix (167 votants), contre 7 à M.Leroy-Beaulieu, et 18 bulletins blancs. M. Lecomte lui succéda comme député le 6 avril 1884. Dans la Chambre haute, M. de Marcère, devenu président du centre gauche, suivit la même ligne politique que précédemment ; il fut (juin 1885) rapporteur du traité conclu avec la Chine, et (juin 1886) du projet Loustalot sur l'augmentation du nombre des conseillers généraux. Bien que favorable à la politique générale des ministères républicains, il a voté en juin 1886 contre l'expulsion des princes ;

en dernier lieu, il s'est prononcé :
- pour le rétablissement du scrutin d'arrondissement (13 février 1889),
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse,
- pour la procédure à suivre devant le Sénat contre le général Boulanger.

Le 12 avril 1889, il a été élu, le 6e, par 187 voix, membre de la commission sénatoriale des Neuf chargée de l'instruction et de la mise en accusation dans le procès Boulanger devant la Haute Cour.


Né le 16 mars 1828 à Domfront (Orne), mort le 26 avril 1918 à Messei (Orne).

Député du Nord de 1876 à 1884.

Sénateur inamovible du Nord de 1884 à 1918.

(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. IV, p. 256).

Après s'être intéressé, au début de sa carrière, aux divers régimes politiques qui se sont succédé et avoir participé d'une façon active à la vie nationale, il ne prend plus qu'une part secondaire aux discussions agricoles et budgétaires. Les affaires judiciaires retiennent un peu son attention.

Le 16 mars 1899, il dépose 765 pétitions portant 32.360 signatures de membres du syndicat économique agricole de France, au moment du dépôt du projet relatif aux banques régionales de crédit agricole mutuel.

En 1900, il s'occupe de la réorganisation de l'inspection générale et du conseil supérieur des prisons et prend la parole dans la discussion générale de la proposition de loi relative à l'amnistie. En 1901, il refuse de voter l'adoption du budget par suite de l'introduction dans la loi de finances de dispositions fiscales concernant les droits de succession. En 1905, il rapporte le projet de loi concernant la séparation des Eglises et de l'Etat le 18 novembre, après s'être élevé véhémentement contre le gouvernement, qui avait déposé ce texte, il vote contre.

À partir de cette période, en raison de son grand âge, son activité parlementaire est des plus réduites. Il prend quelquefois la parole au moment des discussions budgétaires et siège au sein de plusieurs commissions.

Il meurt le 26 avril 1918 à Messei âgé de 90 ans.

Marcère est l'auteur d'études historiques:
- Le cardinal de Bonnechose et la société contemporaine,
- Entretiens et souvenirs politiques, etc...

Il collabora à plusieurs revues littéraires, dont :
- La nouvelle revue,
- La revue bleue.