Jean Binot
1911 - 1982
Né le 2 août 1911 à Fleury sur Andelle (Eure) Décédé le 9 novembre 1982 à Nice (Alpes-maritimes)
Membre de la première et de la seconde Assemblée nationale Constituante (Seine-inférieure)
Député de la Seine-Inférieure (puis Seine-Maritime) de 1946 à 1958
Fils de Henri Abdon Binot et de Marie Fournier, Jean Binot est né le 2 août 1911 à Fleury-sur-Andelle (Eure). A l'issue de ses études, il embrasse la carrière enseignante. D'abord instituteur, il est ensuite professeur de français au collège moderne du Havre, puis au lycée de cette même ville. Ses activités professionnelles l'amènent à s'intéresser de très près aux problèmes de l'enseignement et, plus largement, de la famille, auxquels il consacrera l'essentiel de son travail d'homme politique. Très vite, il se rapproche du mouvement socialiste, et donne de nombreuses conférences, sur les questions scolaires notamment.
Libérée par les troupes anglaises le 12 octobre 1944, la ville du Havre est en ruines à la fin de la guerre et les Allemands, avant de se retirer, ont rendu le port inutilisable. Les problèmes posés à la gestion municipale sont donc très importants. Jean Binot, militant socialiste, est élu au conseil municipal du Havre, et désigné comme adjoint au maire, chargé de l'instruction publique (1944). Il collabore alors régulièrement au quotidien Havre Libre, lancé dès 1944, et dont il est également co-actionnaire.
Lors des élections du 21 octobre 1945 pour la Première Assemblée nationale Constituante, Jean Binot conduit la liste S.F.I.O. dans la seconde circonscription de la Seine-inférieure. Avec 30 450 voix sur 175 648 suffrages exprimés, sa liste obtient l'un des six sièges à pourvoir dans cette circonscription, et Jean Binot est donc envoyé à l'Assemblée. Il est nommé membre de la Commission de l'éducation nationale et des beaux-arts, de la jeunesse, des sports et des loisirs, de la Commission de la presse, de la radio et du cinéma, et, enfin, de celle du ravitaillement. Au cours des discussions parlementaires, il intervient à deux reprises à propos des questions scolaires, demandant notamment le reclassement de la fonction enseignante.
Jean Binot conduit à nouveau la liste socialiste dans la même circonscription lors des élections du 2 juin 1946 pour la seconde Assemblée nationale Constituante. Les 34 122 voix obtenues sur 187 288 suffrages exprimés lui permettent de conserver son siège. Louis Boisson, conseiller général et maire du Tréport, qui figurait en seconde position sur la liste, n'est pas élu. A l'Assemblée, Jean Binot est à nouveau nommé membre de la Commission de l'éducation nationale, des beaux arts, de la jeunesse, des sports et des loisirs.
Jean Binot conduit toujours la liste du parti socialiste S.F.I.O. dans la seconde circonscription de la Seine-inférieure lors des élections du 10 novembre 1946 pour la première législature. Sa liste obtient 24 899 voix sur 177 815 suffrages exprimés, et il est à nouveau réélu. Député fort actif, il est membre de plusieurs commissions parlementaires. Ses activités professionnelles expliquent qu'il siège toujours à la Commission de l'éducation nationale (1946, 1948, 1949, 1951), et sa qualité de député d'un grand port, à celle de la marine marchande (1947). Il est également membre de la Commission de la famille, de la population et de la santé publique (1946), de celle de la presse (1949), ainsi que de la Commission créée en application de la loi du 31 août 1946 et chargée d'enquêter sur les événements survenus en France de 1933 à 1945 (1947). Enfin, il est juge à la Haute Cour de justice (1948).
Au cours de cette législature, Jean Binot dépose six textes et intervient à plusieurs reprises dans les discussions. Dans sa proposition de résolution du 5 juin 1947, il demande que le Gouvernement renonce à appliquer au budget de l'éducation nationale la réduction de 7 % prévue pour tous les autres départements ministériels, et dépose, le 18 juin suivant, le rapport correspondant de la Commission de l'éducation nationale. En 1948, il intervient très longuement sur le problème de la nationalisation des écoles des houillères, et précise notamment la position du parti et du groupe socialistes à cet égard (séances des 13 et 14 mai). Il aborde particulièrement le problème des constructions scolaires, considéré par lui comme fondamental, et déclare ainsi : « l'école que nous défendons est celle où peuvent se réunir les enfants de toutes les confessions, tandis que celle que vous préconisez est celle d'une minorité (...). Lorsque la IIIe République a laïcisé l'école primaire, l'Eglise réformée de France a donné ses écoles à la République. Je ne sache pas qu'elle ait eu à s'en repentir... »
Le 22 avril 1948, Jean Binot avait déposé une proposition de loi tendant à transformer les écoles privées des houillères nationalisées en écoles publiques. Le 9 juin 1949, il dépose une demande d'interpellation sur le retard pris par le Gouvernement à déposer son projet portant réforme générale de l'enseignement, et une nouvelle demande, le 26 avril 1950, sur la politique suivie par le Gouvernement en matière d'éducation nationale. Jean Binot vote pour la candidature de Léon Blum comme président du Gouvernement provisoire (12 décembre 1946), pour la question de confiance au Gouvernement (4 mai 1947) vote à la suite duquel Paul Ramadier se séparera de ses ministres communistes, et pour le projet de loi sur le statut de l'Algérie (27 août 1947).
Jean Binot est toujours à la tête de la liste du parti socialiste S.F.I.O. dans la même circonscription de. la Seine-inférieure aux élections du 17 juin 1951 pour la seconde législature. Il obtient 23 080 voix sur 181 862 suffrages exprimés, et est à nouveau réélu. Ses engagements électoraux insistaient notamment sur la nécessité des apparentements, en l'occurrence entre les listes de la S.F.I.O., du parti radical et radical-socialiste, du Mouvement républicain populaire et de l'Union des indépendants, des paysans et des républicains nationaux. Seuls ces apparentements permettraient en effet de rassembler les défenseurs de « l'Etat républicain, du Gouvernement parlementaire qui en est l'expression, du Parlement lui-même. Le vieux mot de Thiers reste vrai : la République est le Gouvernement qui nous divise le moins ».
A la Chambre, Jean Binot est membre de la Commission de l'éducation nationale (1951, 1954-1955), et de celle de la reconstruction et des dommages de guerre (1953-1954). Il est également membre suppléant de la Commission des immunités parlementaires (1954- 1955), et juge titulaire de la Haute Cour de justice (28 août 1951). Il dépose, au cours de cette législature, deux rapports au nom de la Commission de l'éducation nationale, et une proposition de résolution, mais, surtout, intervient très fréquemment dans les discussions, en particulier à propos de la situation des enseignants. Lors de l'examen du budget de l'éducation nationale, dans la séance du 31 août 1951, il évoque le problème de l'école confessionnelle et la position de la communauté réformée française à la fin du XIXe siècle : elle a « accompli un acte de confiance et d'intelligence politique dans le destin de la démocratie républicaine (...). La laïcité (...) est l'expression moderne de la liberté religieuse... ». Il est rapporteur, le 1er juillet 1952, du projet de loi relatif à l'enseignement du français en Alsace-Lorraine. Le 6 octobre 1953, il dépose une demande d'interpellation à la suite de la fermeture de l'usine de la S.N.C.A.N. (constructions aéronautiques) du Havre, demande qu'il développe dans la séance du surlendemain. Il reviendra sur ce problème à propos des interpellations sur la situation sociale, le 9 octobre.
Jean Binot vote pour l'adoption du projet relatif au pool charbon-acier (13 décembre 1951) et pour l'ordre du jour gouvernemental à la suite des interpellations sur l'Indochine (27 octobre 1953). Ne suivant pas les consignes de son groupe à l'occasion du vote sur la C.E.D. (Communauté européenne de défense), il vote pour la question préalable opposée à la discussion du projet de ratification du traité de Paris (30 août 1954, vote équivalant au rejet du traité), ce qui lui vaudra de faire l'objet d'une menace d'exclusion du parti socialiste S.F.I.O., mesure qui finalement ne sera pas prise. Enfin, il vote pour la politique gouvernementale en Afrique du Nord (18 décembre 1954), et pour la question de confiance à Pierre Mendès-France (4 février 1955). Il s'oppose en revanche à la loi sur l'état d'urgence en Algérie (31 mars 1955), et vote contre la question de confiance à Edgard Faure (29 novembre 1955).
A la tête de la liste du parti socialiste S.F.I.O. dans la même circonscription aux élections législatives du 2 janvier 1956, il recueille 27 228 voix sur 217 707 suffrages exprimés, et est à nouveau réélu député de la Seine-maritime pour la troisième législature. Ses engagements électoraux insistent sur la place des socialistes dans l'opposition, et regrettent la dissolution de l'Assemblée nationale intervenue le 2 décembre précédent.
Jean Binot est nommé à nouveau membre de la Commission de l'éducation nationale (1956- 1957), et, de celle de la marine marchande et des pêches (1956-1957). Il est en outre membre de la Commission d'enquête sur les opérations électorales de la Réunion (1958), et, enfin, juge titulaire de la Haute Cour de justice (1956). Il dépose, au cours de cette brève législature, six textes : sa proposition de loi du 15 février 1956 tend notamment à l'instauration d'un service civil pour les objecteurs de conscience. Il intervient en outre à plusieurs reprises, en particulier lors de la discussion du projet de réforme de l'enseignement public (25 juillet 1957).
Jean Binot vote la confiance au Gouvernement Guy Mollet (25 octobre 1956), de même qu'il soutient le programme de M. Bourgès-Maunoury (12 juin 1957). Il vote pour la ratification des traités instituant la Communauté économique européenne et la Communauté européenne de l'énergie atomique (9 juillet 1957), et pour la loi sur les institutions de l'Algérie (30 septembre 1957) (le rejet de ce texte provoquera la chute du gouvernement Bourgès-Maunoury). Il soutient l'investiture de Pierre Pflimlin (13 mai 1958), vote pour l'état d'urgence (16 mai 1958), et la révision de la Constitution (27 mai 1958) et s'oppose à l'investiture du général de Gaulle (1" juin 1958). Le 2 juin 1958 il refuse les pleins pouvoirs au gouvernement et ne prend pas part au vote sur la loi de révision constitutionnelle.
Il est décédé à Nice le 9 novembre 1982.