Auguste Blanqui

1805 - 1881

Informations générales
  • Né le 7 février 1805 à Puget-théniers (Alpes-Maritimes - France)
  • Décédé le 1er janvier 1881 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
IIe législature
Mandat
Du 20 avril 1879 au 3 juin 1879
Département
Gironde
Groupe
Extrème-gauche

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Frère d'Adolphe Blanqui (1798 -1854), député de 1846 à 1848, Auguste Blanqui, député en 1879, né à Puget-Theniers (Alpes-Maritimes), le 7 février 1805, mort à Paris, le 1er janvier 1881, débuta de très bonne heure, par l'insurrection, dans la politique militante. « Pendant le combat qui eut lieu rue Saint-Denis en 1827, à propos des élections, dit M. Hippolyte Castille, on releva presque mourant un jeune étudiant en droit de vingt et un ans, qu'une balle venait de frapper au cou. Ce jeune homme pâle, maigre et d'apparence chétive, guérit si bien que, trois ans après, à la révolution de Juillet, il prenait une seconde fois les armes et contribuait à renverser la dynastie des Bourbons. » Avant d'arriver à Paris, le jeune Auguste Blanqui avait été précepteur, à 19 ans, des enfants d'un général de cavalerie. Il étudia tour à tour le droit et la médecine, et lorsque éclata la révolution de 1830, il se rendit, le 28 juillet, dans les bureaux du journal le Globe, où Cousin, Villemain, Sainte-Beuve, etc., s'entretenaient de la situation, que chaque minute rendait plus grave :

« Que faire ? demanda l'un d'eux.

« Pour moi, s'écria Blanqui, je prends mon fusil..

« Prenez garde à ce que vous allez faire, monsieur, interrompit Cousin, le drapeau blanc est le drapeau de la France ! »

Auguste Blanqui prit les armes en effet, et se battit sur les barricades. Irrité de l'issue de la révolution, il n'en redoubla pas moins de confiance dans l'efficacité des moyens violents, et recommença contre la branche cadette la même lutte que contre la branche aînée. Dès lors, chaque fois que l'émeute gronda dans Paris, Blanqui fut la, soufflant la révolte, et se multipliant dans une dévorante activité. Au milieu des jours de trouble qui suivirent l'avènement de Louis-Philippe, un noyau de démocrates s'était formé sous le nom de Société des Amis du peuple. Blanqui, membre du comité de rédaction du journal que cette Société publia pendant quelques semaines, fut bientôt compromis, et traduit devant la cour d'assises : ce fut le procès des Dix-Neuf. Il refusa le ministère d'un avocat et exposa lui-même avec une amère éloquence ses doctrines et ses revendications :

« Qui aurait pu penser, s'écria-t-il, que les bourgeois appelleraient les ouvriers la plaie de la société ? Les privilégiés vivent grassement de la sueur du peuple. Qu'est-ce que votre Chambre des députés ? Une machine impitoyable qui broie vingt-cinq millions de paysans et cinq millions d'ouvriers pour eu tirer toute la substance, qui est transvasée dans les veines des privilégiés. »

Il parla des ouvriers « grands de six pieds dont on baisait à l'envi les haillons » ; il évoqua les « ombres magnanimes » des prolétaires décédés et montra pour récompense leurs enfants « au fond des cachots ». « Chaque soir, dit-il, je m'endormais sur mon grabat au bruit de leurs gémissements, aux imprécations de leurs bourreaux et au sifflement du fouet qui faisait taire leurs cris. »

Le jury acquitta Blanqui; mais la cour lui infligea pour délit d'audience un an de prison et deux cents francs d'amende.

Quand vint, le procès d'avril, il reparut sur la scène politique, et figura à la Chambre des pairs parmi les défenseurs des accusés. Il fut aussi impliqué, en 1836, dans le procès des poudres, et condamné à deux ans de prison et trois mille francs d'amende. Amnistié en 1837, il se retira avec sa femme et ses enfants à Pontoise, mais cette retraite n'était qu'apparente. Pendant les débats du procès d'avril 1833, une société secrète s'était formée sous le nom de Société des Familles ; en 1838, elle s'était transformée en Société des Saisons par les soins d'Auguste Blanqui, de Raisant, de Lamieussens et de Martin Bernard. On recruta des adhérents jusqu'en 1839, époque à laquelle la Société compta 850 membres.

Vers le commencement du mois de mai, Blanqui jugea la situation propice à une prise d'armes. La classe moyenne semblait se désaffectionner du roi, le commerce souffrait, une longue crise ministérielle augmentait le mécontentement. Le 12, tandis que la famille royale assistait aux courses du Champ-de-Mars : « Marchons ! » s'écria Blanqui, un pistolet à la main, suivi de Barbes, de Martin Bernard et de ses autres compagnons, Un instant après, la troupe envahissait les magasins de l'armurier Lepage.

La tentative des insurgés fut promptement réprimée. Blanqui, après avoir, pendant six mois, échappé à toutes les recherches, fut arrêté au moment où il allait s'embarquer et traduit, en janvier 1840, devant la Chambre des pairs, constituée en Haute Cour ; il fut condamné à mort sans avoir voulu se défendre. Cette condamnation, comme celle de Barbes (V. ce nom) fut commuée en détention perpétuelle. Le 6 février 1840, Blanqui arriva au Mont-Saint-Michel. Barbès et Martin Bernard l'y avaient déjà précédé. La situation des prisonniers et les traitements exercés contre eux prirent bientôt un caractère grave : un d'eux, nommé Delsade, fut même frappé d'un coup d'épée. L'air des grèves bretonnes, « pointu, a écrit Blanqui, comme une ode en losange de M. Victor Hugo », déchirait les poitrines affaiblies par le mauvais régime, par l'humidité et par la fièvre. Une évasion fut tentée ; elle avorta. La captivité devint encore plus dure. Le pouvoir redouta peut-être l'effet moral que la mort de Barbes et de Blanqui pourrait produire dans l'opinion : il envoya Barbès à Nîmes et Blanqui à Tours. C'est là que Blanqui apprit la révolution de 1848.

Le 25 février, il était à Paris, et le soir même, à huit heures, plusieurs centaines d'hommes armés se pressaient autour de lui dans la salle du Prado, pour l'aider à renverser le gouvernement provisoire. Blanqui opina d'abord pour l'expectative, organisa son club, la Société républicaine centrale, qui tenait ses séances dans la salle de spectacle du Conservatoire, rue Bergère, essaya en vain d'influer sur la marche des événements, puis se décida à l'action. Il inspira et dirigea la manifestation du 17 mars à l'Hôtel de Ville pour l'ajournement des élections, et celle du 16 avril, à l'issue de laquelle la majorité du gouvernement eût fait arrêter Blanqui, sans l'opposition, assez inattendue, de Lamartine. C'est vers la même époque que fut publiée dans la Revue rétrospective, par M. Taschereau, une pièce non signée, adressée au ministre de l'Intérieur de Louis-Philippe, et contenant des détails circonstanciés sur l'affaire du 16 mai 1839. Il semblait résulter de sa rédaction que Blanqui seul pouvait en être l'auteur. « Vous seul, lui dit plus tard Barbès, pouviez savoir les détails contenus dans ce l'apport. » On nomma un jury, on fit une enquête, les tribunaux furent saisis: en dehors de l'action judiciaire, des conciliabules se formèrent. Blanqui refusa toujours de répondre, dédaignant l'accusation. Bref, aucun résultat décisif. ne fut obtenu, et l'affaire demeura toujours sans solution.

Bianqui joua un des principaux rôles au 15 mai 1848, jour où l'Assemblée fut envahie par le peuple. Il avait décide son club à se joindre aux corporations qui devaient manifester en faveur de la Pologne. Il entra lui-même un des premiers dans l'Assemblée et après la lecture de la pétition par Raspail, monta à la tribune, demanda un vote immédiat sur les conclusions de la pétition réclama justice au nom du peuple à 1'occasion des événements de Rouen et, parlant de la misère du peuple, somma l'Assemblée de s'occuper, sans désemparer, des moyens de donner de l'ouvrage aux millions de citoyens qui en manquaient. Le nom de Blanqui figura sur les listes du nouveau gouvernement provisoire que voulaient instituer les insurgés. Blanqui, après l'insuccès de la journée, se réfugia à Maisons-Laffitte, puis rentra dans Paris, travesti en officier de la garde nationale ; le 28 mai, il fut arrêté rue Montholon, 14, avec ses amis Flotte, Lacambre, etc. Traduit devant la Haute Cour de Bourges, il rompit, en audience publique, le silence qu'il avait, gardé dans l'instruction, déclina la compétence de la Cour, et eut dans la dernière audience, avec Barbès devenu son irréconciliable ennemi, les plus violentes altercations, Il fut condamné cette fois à dix ans de prison, et subit cette peine à Belle-Isle, puis à Corte en Corse.

Rendu à la liberté par l'amnistie générale de 1859, il ne tarda pas à être englobé de nouveau, en mars 1861, dans une accusation de société se jète; une nouvelle condamnation de ce chef, à quatre ans de prison, cinq cents francs d'amende et cinq ans de privation des droits civiques le frappa, le 16 juin. Il fut incarcéré à Sainte-Pélagie, et plus tard, dans une maison de santé, ou il resta jusqu'au 4 Septembre 1870. Aussitôt la République proclamée, il accourut à Paris, et y fonda, pour combattre les tendances, « rétrogrades, » du gouvernement de la Défense nationale, le journal la Patrie en danger. Il y réclama l'institution de la commune, l'enrôlement et l'armement des prêtres, la construction des barricades et le retour au régime révolutionnaire avec toutes ses conséquences. Chef du 169e bataillon de la garde nationale, à Montmartre, il fut mêlé à toutes les tentatives hostiles au gouvernement, et particulièrement à l'insurrection du 31 octobre ; désigné comme. membre du comité de Salut public par les soldats de l'insurrection, il occupa pendant quelques heures l'Hôtel de Ville, essaya de prendre ses dispositions en vue de s'emparer de la préfecture de police et de faire surveiller les commandants des secteurs, mais, à l'arrivée des gardes nationaux de l'ordre, fut arrêté par le 17e bataillon; relâché le lendemain, il se déroba pendant quelque temps, puis reprit la direction de son journal, qui parut jusqu'au 6 décembre 1870.

Il quitta Paris après l'armistice, fut porté dans la Seine, le 8 février 1871, sur quelques listes dressées par le parti socialiste révolutionnaire, mais n'obtint que 52 389 voix sur 328 970 votants. En même temps, il réunissait, sur la liste socialiste du Rhône, 36 030 voix, sans être élu

Il fut nommé lors de l'insurrection du 18 mars, membre de la Commune de Paris, par le 18e arrondissement, mais il ne put y siéger. Il se trouvait alors dans le Midi, et Thiers en profita pour le faire arrêter comme otage, et incarcérer au fort du Taureau, sur les côtes de Bretagne. Après être resté quatre mois au secret, il fut condamné par le 4e conseil de guerre pour « excitation à la guerre civile », à la déportation dans une enceinte fortifiée (février 1872). Le mauvais état de la santé de Blanqui fit retarder son départ pour la Nouvelle-Calédonie; on l'interna provisoirement au fort de Quélern, et enfin on l'envoya à la maison centrale de Clairvaux : ce fut sa dernière prison. Il y écrivit un livre, le seul qu'il ait jamais publié, intitulé l'Eternité dans les astres, hypothèses astronomiques (1872, in-18).

Plusieurs fois le nom de Blanqui avait été mis en avant dans des élections législatives partielles, à Paris, à Marseille, etc., par des comités socialistes ; mais il n'avait obtenu, par exemple, le 3 mars 1878, dans la 2e circonscription de Marseille, en remplacement de F.-V. Raspail, qu'un nombre très restreint de suffrages, lorsque la campagne menée à cette époque par la presse radicale et intransigeante en faveur de la mise en liberté des condamnés de la Commune vint rappeler sur le vieux conspirateur l'attention du parti républicain.

Quand le président de la République eut signé les premiers décrets d'amnistie partielle, la presse démocratique et extrême gauche de la Chambre des députés insistèrent en faveur de l'élargissement de Blanqui. C'est alors que sa candidature, posée dans la 1ere circonscription de Bordeaux, triompha au second tour de scrutin (20 avril 1879) avec 6 801 voix sur 12 334 votants et 24 429 inscrits, contre 5 330 à M. Lavertujon, opportuniste. Il s'agissait de remplacer M. Simiot, décédé. Blanqui était toujours à Clairvaux. Aux termes de la loi qui l'avait frappé, il n'était pas éligible à la Chambre. Le gouvernement s'abstint de proclamer l'élection de Bordeaux au Journal officiel, et quand la validation de ses pouvoirs vint en discussion devant la Chambre, elle fut rejetée à une très grande majorité. Seuls, quelques membres de l'extrême gauche, et parmi eux, M. Louis Blanc qui n'était pas des amis personnels de Blanqui, votèrent pour la validation.

L'élection « annulée », M. Grévy se borna à gracier Blanqui, le 9 juin de la même année, afin de lui conserver la situation d'inéligible. L'amnistie plénière ne vint qu'ensuite.

Aussitôt libre, Blanqui se rendit à Bordeaux pour soutenir en personne une nouvelle candidature qui échoua le 14 septembre, au scrutin de ballottage, avec 4 542 voix contre M. Achard (V. ce nom), élu par 4 703 suffrages. Le 23 mai 1880, Blanqui obtint encore dans la 1re circonscription de Lyon 5 947 voix : le candidat élu, M. Ballue, opportuniste, réunit 8 280 voix, en remplacement de M. Ed. Millaud, nommé sénateur.

« Il n'est pas facile, a dit un historien, de définir la manière dont M. Blanqui conçoit l'idée républicaine. Depuis que la question sociale est venue compliquer ce vaste problème gouvernemental, cinq ou six écoles ont surgi. À laquelle M. Blanqui donne-t-il la préférence ? on l'ignore. Soit habileté, soit dédain de la plume à une époque où l'on est si pressé d'écrire, il a toujours évité de formuler une doctrine. » On peut croire cependant, d'après le témoignage de ses partisans et de ses amis les plus directs, que Blanqui était favorable à l'établissement d'un système communiste, avec la l'évolution, on plutôt avec l'insurrection pour moyen.