Théodore, Jules, Joseph Cazot

1821 - 1912

Informations générales
  • Né le 11 février 1821 à Alès (Gard - France)
  • Décédé le 27 novembre 1912 à La jasse (Gard - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Assemblée Nationale
Législature
Mandat
Du 2 juillet 1871 au 7 mars 1876
Département
Gard
Groupe
Union républicaine

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 16 décembre 1875 au 27 novembre 1912

Biographies

Représentant à l'Assemblée nationale de 1871, sénateur inamovible et ministre, né à Alais (Gard) le 11 février 1821, d'une famille de bourgeoisie peu aisée, il fit à Paris de solides études juridiques, et exerça quelque temps la profession de répétiteur de droit; puis il plaida quelques affaires à la Cour d'appel de Paris.

Après la révolution de février 1848, il se mêla assez activement au mouvement démocratique dans le Gard, se signala en 1851 par son opposition à la politique du coup d'Etat, et défendit les accusés du complot de Lyon. Son attitude le fit alors interner à Montpellier. Avocat à Nîmes en 1859, il combattit l'Empire, et posa même en 1868 et 1869 sa candidature républicaine au Corps législatif, mais il échoua contre le candidat officiel.

Le gouvernement de la Défense nationale nomma M. Cazot, le 7 septembre 1870, secrétaire général du ministère de l'Intérieur; il suivit en cette qualité la délégation du gouvernement à Tours et à Bordeaux, et s'associa à la politique et aux actes de Gambetta. Il donna sa démission de fonctionnaire pour se présenter dans le Gard aux élections de l'Assemblée nationale, le 2 février 1871; mais il n'obtint que 43,433 voix contre 49,649 accordées au dernier élu de la liste conservatrice, M. Baragnon, et ne réussit à se faire nommer représentant du Gard qu'à l'élection complémentaire du 2 juillet, en remplacement de M. Benoist-d'Azy, qui avait opté pour la Nièvre : il fut élu par 52,949 voix (97,257 votants, 134,644 inscrits), et alla siéger à gauche.

Il se fit inscrire aux deux réunions de la gauche et de l'Union républicaines et devint président de ce dernier groupe. Le canton d'Anduze l'élut conseiller général le 8 octobre suivant. Il parut plusieurs fois à la tribune, appuya la réclamation du général Carrey de Bellemare contre la commission de révision des grades (23 mars 1873), s'opposa à la demande de poursuites contre M. Ranc (20 juin), et vota :

- 22 juillet 1871, contre les pétitions des évêques;
- 30 août, contre le pouvoir constituant de l'Assemblée ;
- 3 février, pour le retour à Paris;
- 24 mai 1873, contre l'acceptation de la démission de Thiers;
- 19-20 novembre, contre la prorogation des pouvoirs du maréchal de Mac-Mahon;
- 20 janvier 1874, contre la loi des maires;
- 30 janvier 1875, pour l'amendement Wallon;
- 11 février 1875, pour l'amendement Pascal Duprat;
- 25 février, pour l'ensemble des lois constitutionnelles.

Le 16 décembre 1875, M. Cazot fut élu, par l'Assemblée nationale, avec 305 voix sur 591 votants, sénateur inamovible. Il prit place à la gauche du Sénat, opina avec la minorité contre la dissolution (1877) de la Chambre des députés, et combattit le gouvernement du Seize-Mai.

Après les élections d'octobre 1877, il soutint le ministère Dufaure, et s'associa à tous les votes des républicains du Sénat, devenus la majorité en 1879. Le 27 décembre de cette année, lors de la constitution du cabinet Freycinet, M. Cazot fut mis à la tête du ministère de la justice; puis, après la crise ministérielle du 18 septembre, provoquée par les difficultés relatives à l'application des décrets contre les jésuites et les congrégations non autorisées, il reprit le même portefeuille dans le ministère reconstitué sous la présidence de M. J. Ferry (23 septembre 1880.) Il le garda encore dans le ministère Gambetta, dit « grand ministère », formé le 14 novembre 1881; il donna sa démission au moment du renversement de ce cabinet, le 26 janvier 1882.

Pendant les vingt-cinq mois qu'il passa au pouvoir, M. Cazot eut une part considérable aux affaires publiques. Il prit très fréquemment la parole dans l'une et l'autre Chambre : au Sénat pour combattre (17 février 1880) un amendement de M. Cazagne relatif aux obligations des tuteurs, relativement à la gestion de la fortune des mineurs; pour répondre (22 avril) à une interpellation de M. Henry Fournier touchant les conditions du concours pour l'auditorat au Conseil d'Etat, etc.; à la Chambre, pour se mêler activement à la discussion sur les projets de réforme judiciaire. A ce sujet il déclara (novembre 1880) que tout le monde reconnaissait « la nécessité de mettre notre organisation judiciaire en harmonie avec notre état social, l'esprit de notre magistrature avec celui des institutions républicaines que le pays s'est données. » Défendant le projet de loi du gouvernement sur la réorganisation du personnel de la magistrature, il se prononça pour le principe de l'inamovibilité. « Mais, ajouta-t-il, ce principe ne peut pas être un obstacle à la réalisation des réformes, et lorsque la nécessité de ces réformes se présente, la suspension de l'inamovibilité en devient la condition nécessaire, indispensable, sauf, lorsque ces réformes sont accomplies, à ce que l'inamovibilité reprenne son empire. » En terminant, il convia les députés à voter, avec la suspension de l'inamovibilité, « la rédaction du personnel, la suppression de certains tribunaux, l'acheminement vers l'unité de classe, la suppression de la limite d'âge... »

A la date du 29 mars 1880, le gouvernement publia deux décrets dont l'un prononçait la dissolution de l'ordre des Jésuites et dont l'autre donnait aux congrégations non-autorisées un délai de trois mois pour se mettre en règle avec les lois. Ces décrets signés par M. Grévy, président de la République, étaient contre-signés par le ministre de l'intérieur, M. Ch. Lepère, et par le garde des sceaux, M. Jules Cazot. Ils s'appuyaient sur un rapport des deux ministres rappelant les dispositions de la loi organique du Concordat du 18 germinal an X. Dans la séance de la Chambre des députés du 2 mai, M. Cazot fut interpellé par M. Lamy sur la légalité des décrets ; il répondit que les lois visées, loin d'avoir été abrogées, comme le prétendait l'interpellateur, avaient été appliquées depuis 1790 sous tous les gouvernements.

En 1881, l'intervention du ministre de la justice dans les débats parlementaires fut aussi très fréquente. Il prit part aux discussions sur la législation de la presse, d'abord devant la commission, puis à la tribune de la Chambre, réclamant diverses dispositions restrictives qui, pour la plupart, se trouvèrent rejetées. Puis, M. Naquet ayant renouvelé sa proposition, plusieurs fois présentée et qui ne devait être votée définitivement que trois ans plus tard, sur le rétablissement du divorce, M. Cazot se montra opposé à ce rétablissement, pour des raisons d’opportunité. « Ne faut-il pas sacrifier certaines souffrances individuelles à l'intérêt social ? Au surplus, le divorce serait sans doute exploité contre les républicains dans les élections générales : mieux valait, si l'on tenait à le rétablir, agir au commencement qu'à la fin d'une législature. »

Enfin, en mai 1881, M. Cazot combattit la révision de la Constitution, proposée par M. Barodet. D'autre part, il lutta, dans la Chambre haute, contre M. Baragnon qui proposait de retirer au ministre de la justice la présidence du tribunal des conflits. Il affirma que les droits des particuliers ne pouvaient être lésés en aucune façon par ce tribunal, et que la magistrature administrative offrait toutes les garanties d'indépendance et d'impartialité. Quand il eut déposé le portefeuille de la justice, M. Cazot fut nommé aux fonctions de premier président à la Cour de cassation. Il conservait en même temps son siège de sénateur. Peu de temps après, il fut l'objet d'accusations très vives, à propos des opérations de la société du chemin de fer d'Alais au Rhône dont il était un des administrateurs. Ces attaques, que parut justifier la faillite de cette société, l'obligèrent à donner sa démission de président de la Cour de cassation, le 14 novembre 1884. Depuis lors, M. Cazot a gardé au Sénat un rôle modeste, a continué de voter avec la gauche, et s'est prononcé, dans la dernière session,

- pour le rétablissement du scrutin uninominal (13 février 1889),
- pour le projet de loi Lisbonne restrictif de la liberté de la presse (18 février),
- pour la procédure à suivre devant le Sénat pour juger les attentats commis contre la sûreté de l'Etat (29 mars, affaire du général Boulanger).

Le 12 avril 1889, M. Cazot a été élu, par 194 voix sur 230 votants, membre de la commission des Neuf chargée de l'instruction et de la mise en accusation du général Boulanger.


Né à Alès (Gard) le 11 février 1821, mort à La Jasse, près d'Alés (Gard), le 27 novembre 1912.

Représentant du Gard à l'Assemblée Nationale de 1871 à 1875.
Sénateur inamovible de 1875 à 1912.
Ministre de la Justice du 28 décembre 1879 au 30 janvier 1882.

(Voir première partie de la biographie dans ROBERT ET COUGNY, Dictionnaire des Parlementaires, t. II, p. 5.)

Après 1889, Théodore Cazot demeura, au Sénat, dans la réserve où il s'était cantonné depuis 1884 et que son âge grandissant ne fit qu'accentuer. Il n'intervint que très rarement en séance publique, deux fois pour présenter un rapport sur des opérations électorales et deux fois seulement à titre personnel ; en 1891 sur un projet de loi relatif aux douanes et en 1897 sur une proposition de loi tendant à donner à la femme majeure le droit d'être témoin. Mais il exerça ses compétences de juriste dans ses travaux de commissaire et présida en particulier plusieurs commissions spéciales chargées d'examiner des textes juridiques concernant notamment la propriété immobilière et le régime hypothécaire (1896), le jury criminel (1900), les règlements d'administration publique (1906).

Il demeura membre de la Commission d'instruction de la Haute Cour, à laquelle il avait appartenu dès sa création, en 1889, jusqu'en 1904, date où il déclina cette fonction. En cette qualité, il eut à connaître, en 1899 et 1900, de l'affaire Déroulède.

Le Sénat le choisit comme Questeur le 16 janvier 1890 et le maintint à ce poste jusqu'au 14 janvier 1904.

Dans les toutes dernières années de sa vie, la vieillesse le tint de plus en plus souvent éloigné du Sénat, et comme le dit le Président Antoine Dubost, en prononçant le 29 novembre 1912 son éloge funèbre, depuis que « l'inévitable action du temps avait diminué la vigueur de son corps, il avait, dans la famille républicaine, la situation d'un grand aïeul qui, s'étant démis du soin des affaires, ne conserve plus que la haute fonction d'idéaliser le passé, d'en symboliser les efforts et le devoir accomplis et d'en imposer la noble obsession aux nouvelles générations. »

Jusqu'à son dernier souffle, qu'il rendit le 27 novembre 1912, à l'âge de 91 ans, il était resté fidèle au groupe de l'Union républicaine. Le 10 janvier 1911, il avait inauguré au Sénat, comme Président d'âge, la session ordinaire du Parlement; dans le discours qu'il avait prononcé à cette occasion, il avait rappelé les événements qui avaient précédé et consacré la fondation de la Troisième République, et affirmé que « si l'âge héroïque du parti républicain était clos, son idéal n'avait pas changé ; il éclairait d'autres horizons, un vaste mouvement où s'agitaient des idées, des sentiments, des besoins nouveaux et des questions sociales, tourment et gloire de ce temps.» Ce discours avait été son chant du cygne.