Ernest, Louis, Joseph Picard

1821 - 1877

Informations générales
  • Né le 24 décembre 1821 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 13 mai 1877 à Paris (Seine - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IIe législature
Mandat
Du 9 mai 1858 au 4 novembre 1863
Département
Seine
Groupe
Opposition
Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 31 mai 1863 au 27 avril 1869
Département
Seine
Groupe
Opposition
Régime politique
Second Empire - Corps législatif
Législature
IVe législature
Mandat
Du 6 juin 1869 au 4 septembre 1870
Département
Hérault
Groupe
Centre gauche
Régime politique
Assemblée Nationale
Législature
Mandat
Du 8 février 1871 au 7 mars 1876
Département
Meuse
Groupe
Centre gauche

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 10 décembre 1875 au 13 mai 1877

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny)

Député au Corps législatif de 1858 à 1870, membre de la Défense nationale, ministre, représentant en 1871, sénateur de 1875 à 1877, né à Paris le 24 décembre 1821, mort à Paris le 13 mai 1877, il étudia le droit au sortir du collège Rollin, se fit recevoir licencié (1844), puis docteur (1846), et s'inscrivit au barreau de Paris. Liouville, dont il épousa la fille un peu plus tard, favorisa ses débuts.

La facilité de sa parole, la souplesse de son talent lui valurent bientôt une importante clientèle, à laquelle il se consacra entièrement pendant les premières années de l'Empire. Libéral à la façon de la bourgeoisie orléaniste, il manifesta peu de goût pour le régime issu du 2 décembre, se lia avec Havin et les hommes du Siècle, devint un des actionnaires de ce journal, fit partie de son conseil de surveillance, et contribua, en 1858, à constituer le comité chargé de désigner à Paris les candidats de l'opposition pour les élections complémentaires au Corps législatif : au refus de M. Peyrat, M. Ern. Picard accepta la candidature indépendante dans la 5e circonscription de la Seine, en remplacement de Carnot, démissionnaire par refus de serment : élu député, le 9 mai, par 10 404 voix (19 526 votants, 30 503 inscrits), contre 8 982 à M. Eck, candidat officiel, M. E. Picard donna aussitôt sa démission de membre du conseil de surveillance du Siècle, qui avait montré peu d'empressement à l'appuyer, et alla compléter à l'assemblée le petit groupe des « Cinq ». Il ne tarda pas à attirer par sa verve piquante l'attention de la Chambre et du pays. Le « spirituel député de la Seine », comme on l'appelait, se fit le tirailleur de l'opposition, et s'attacha, dans des discours pleins d’une humeur railleuse et légère qui plaisait surtout aux Parisiens, à traiter spécialement les questions de finance et d'administration.

Il s'éleva avec force, en 1859, contre l'annexion de la banlieue à la capitale, et, le 1er juin 1863, fut réélu député par 17 044 voix (23 870 votants, 30 742 inscrits), contre 6 530 au général Perrot. Il maintint sa position à la Chambre, mena d'ardentes campagnes contre M. Haussmann, préfet de la Seine, réclama pour Paris un conseil municipal élu, revendiqua la liberté de la presse, et se sépara de M. Emile Ollivier, son ami personnel, lorsque celui-ci commença son évolution vers le pouvoir. Multipliant les amendements, les demandes d'interpellation, il se signala aussi en maintes circonstances par la vivacité de ses interruptions. Le 28 mars 1864, M. d'Havrincourt ayant fait à la tribune l'apologie du coup d'Etat, M. Ernest Picard s'écria de sa place : « Le 2 décembre est un crime ! » Ces paroles, qui soulevèrent les protestations de toute la droite, furent supprimées du compte rendu officiel de la séance. M. Picard parla encore sur le choix des maires parmi les conseillers municipaux, sur la politique de l'Empire, sur le droit de réunion, sur le budget et les transformations de Paris, sur la situation faite aux usiniers par l'octroi, etc. En juin 1868, il devint avec son frère, M. Arthur Picard, et M. Ed. Portalis, un des fondateurs du journal l'Electeur libre, dont le premier numéro fut saisi.

Aux élections du 24 mai 1869, le député de la 5e circonscription de la Seine fut réélu avec une très forte majorité, 24 444 voix (33 097 votants, 42 458 inscrits), contre 7 929 à M. Denière, et 280 à M. Lefrançais.

Le même jour il se présentait dans la 1re circonscription de l'Hérault, où il obtenait 8 100 voix contre 12 458 à M. Pagézy et 7 973 à M. de Larcy sur un total de 28 600 suffrages exprimés; un second tour était nécessaire qui le vit être élu par 15 798 voix (28 999 votants, 36 039 inscrits), contre 13 067 au député officiel, sortant, M. Pagézy. Il opta pour ce département, afin de réserver à un membre de l'opposition l'élection à Paris.

Dans la nouvelle Chambre, M. Picard vit diminuer le rôle qu'il avait joué jusque-là. Le Corps législatif se trouva divisé en plusieurs groupes, et l'opposition elle-même ne tarda pas à se partager en deux courants opposés, dont l'un, selon l'expression de M. Picard, voulut rester « l'aile droite de la gauche », admettant la possibilité de s'accommoder de l'Empire, par opposition au parti irréconciliable qui formait la « gauche fermée ». M. Ernest Picard se fit le chef de la « gauche ouverte » dont les membres ne furent qu'au nombre de dix-sept. Vers la même époque, il présenta un amendement important à la loi sur la responsabilité des fonctionnaires (23 mai 1869), amendement qui ne fut repoussé qu'à une majorité de 3 voix, et il demanda instamment la dissolution de la Chambre « issue des candidatures officielles et ne représentant plus l'opinion du pays ». À l'occasion du plébiscite (avril 1870), M. Picard et son groupe refusèrent de délibérer avec la gauche, se réunirent à part, et passèrent dès lors pour aspirer à succéder au pouvoir à M. Emile Ollivier. Le député de l'Hérault vota contre la déclaration de guerre à la Prusse.

Devenu, au 4 septembre 1870, membre du gouvernement de la Défense nationale, et ministre des Finances, il contresigna, à ce titre, l'abolition de l'impôt du timbre sur les journaux et publications périodiques, non sans avoir protesté, dans le conseil, contre une mesure qui lui semblait contraire aux « intérêts du pouvoir». Il fit aussi son possible pour que le nouveau gouvernement maintînt en fonctions les maires nommés par l'Empire. Le 7 septembre, il proposa de convoquer les conseils généraux ; le 21, il réclama contre l'allocation de 1 fr. 50 par jour à tous les gardes nationaux. Lorsque, au 31 octobre, les membres du gouvernement furent retenus prisonniers à l'Hôtel de Ville par les chefs du mouvement insurrectionnel, M. Picard parvint un des premiers à s'échapper, se rendit au ministère de la Guerre, fit jouer le télégraphe, organisa la résistance, et contribua à délivrer ses collègues. Le 25 janvier 1871, il accompagna Jules Favre à Versailles auprès de M. de Bismarck, pour traiter de la capitulation ; puis il s'occupa d'obtenir des banquiers de Paris les 200 millions de la contribution de guerre.

Au scrutin du 8 février 1871 pour l'Assemblée nationale, M. Ernest Picard échoua à Paris, avec 39 000 voix sur 328 970 votants ; mais il fut élu représentant dans deux départements :
- dans la Meuse, le 5e sur 6, par 19 914 voix (40 190 votants, 89 314 inscrits) ;
- et dans Seine-et-Oise, le 6e sur 11, par 20 739 voix (53 390 votants, 123 875 inscrits).

Il opta pour la Meuse, se rendit à Bordeaux, et donna sa démission de ministre ; mais il fut appelé aussitôt par Thiers à prendre le portefeuille de l'Intérieur dans le premier cabinet constitué par le nouveau chef du pouvoir exécutif (19 février 1871). M. Ernest Picard procéda à un remaniement préfectoral considérable, prit une part active aux mesures contre la Commune de Paris et contre le soulèvement de plusieurs villes de province, et fut attaqué très vivement par le parti républicain avancé, en même temps que par les membres royalistes de l'Assemblée nationale, auxquels il s'était efforcé pourtant de donner des gages, par exemple en proposant le rétablissement du cautionnement. Aussi fut-il obligé, après la défaite de la Commune, de donner sa démission de ministre ; il eut pour successeur M. Lambrecht (31 mai). Le 5 juin suivant, un décret de Thiers le nomma gouverneur de la Banque de France en remplacement de M. Rouland ; mais M. Picard refusa, préférant le poste de ministre de France à Bruxelles. Il quitta d'ailleurs fréquemment sa résidence, pour venir assister à Versailles aux séances de l'Assemblée. Membre du centre gauche, il se montra partisan de la politique de Thiers et de l'établissement d'une république constitutionnelle.

Au 24 mai 1873, il se démit de ses fonctions de ministre plénipotentiaire, et fut remplacé, le 7 juin, par le baron Baude. Au mois d'août, il fut élu membre du conseil général pour le canton de Montiers-sur-Saulx (Meuse). Hostile à la politique du duc de Broglie, il vota presque constamment contre le ministère de « l'ordre moral », parla contre l'urgence de la loi des maires (8 janvier 1874), et contribua à sa chute. Sous le cabinet Cissey de Fourtou, il dénonça à la tribune les menées bonapartistes ; puis il se prononça en faveur des propositions Perier et Malleville, vota pour l'amendement Wallon, pour l'ensemble des lois constitutionnelles, et fut membre de la dernière commission des Trente.

Elu sénateur inamovible, le 10 décembre 1875, par l'Assemblée nationale, le 16e sur 75 (348 voix sur 690 votants), il fit partie du centre gauche de la Chambre haute et vota le plus souvent avec la minorité.

Il mourut moins de deux ans après, à 56 ans.

Date de mise à jour: novembre 2016