Prosper, Léon Duvergier de Hauranne
1798 - 1881
- Informations générales
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- Né le 3 août 1798 à Rouen (Seine-Inférieure - France)
- Décédé le 19 mai 1881 à Herry (Cher - France)
1798 - 1881
Député de 1831 à 1848, représentant du peuple à l'Assemblée constituante de 1848, et à l'Assemblée législative de 1849, fils du député Jean-Marie Duvergier, Député de 1815 à 1824 et de 1830 à 1831, né à Rouen (Seine-Inférieure) le 3 août 1798, mort au château d'Herry (Cher) le 19 mai 1881, Prosper Léon Duvergier de Hauranne fit ses études sous la direction de son père et voyagea pendant une année en Angleterre.
Il débuta dans le journalisme par une série de lettres remarquables, insérées dans le Globe en 1826, sur la situation électorale de la Grande-Bretagne et sur l'Irlande. Il passa ensuite, avec MM. Guizot et Rossi, à la Revue Française, et fit partie de la société libérale Aide-toi, le Ciel t'aidera. M. Duvergier de Hauranne appartenait alors au groupe des « doctrinaires ». Son nom ne se trouva point au bas de la protestation des journalistes contre les ordonnances de juillet 1830, soit qu'il fût alors absent de Paris, soit qu'il jugeât cette manifestation inutile.
Toutefois il donna une entière adhésion à la monarchie de Louis-Philippe, et, ayant été élu, le 5 juillet 1831, député du 4e college électoral du Cher (Sancerre), par 152 voix sur 240 votants et 307 inscrits, il prit place tout d'abord dans la majorité qui soutenait le ministère de Casimir Perier. Il vota alors et appuya de sa parole toutes les mesures de conservation et de répression dont ce ministère prit l'initiative. En mainte occasion, et notamment à propos d'un discours de la couronne, il se fit dans cette législature le défenseur du gouvernement dans sa lutte contre les républicains. Lorsque le journal la Tribune fut appelé (1833) à la barre de la Chambre des députés, sur la dénonciation de M. Viennet, pour rendre compte de ses attaques contre l'Assemblée, M. Duvergier de Hauranne monta à la tribune et opina en faveur des conclusions du rapporteur, M. Persil, concluant à la mise en jugement des journalistes incriminés.
Lui-même fut dès lors chargé de plusieurs rapports importants. Son activité et son talent l'avaient mis en évidence, et il ne tarda pas à prendre parmi ses collègues une situation considérable. Tout en prêtant à la dynastie un concours sans réserve, il lui arriva bientôt de se séparer des ministres dans certaines circonstances. À la mort de Casimir Perier, M. Duvergier de Hauranne s'était rapproché de Thiers, avec qui il marcha constamment d'accord par la suite, et il était devenu l'un des chefs du parti « parlementaire » pur.
« Aux avant-postes de ce parti, a écrit Louis Blanc (Histoire de Dix Ans), était M. Duvergier de Hauranne, remarquable par une grande netteté d'idées, un penchant marqué pour la lutte, une éloquence substantielle, et une finesse d'esprit qu'ennoblissait l'élévation de son cœur. Né dans une famille qui avait donné l'abbé de Saint-Cyran au jansénisme, M. Duvergier de Hauranne avait des qualités qui rappelaient parfaitement son origine. Ennemi des gens de cour, l'indépendance des vieux parlements à l'égard de la couronne, et leur dédain à l'égard du peuple, revivaient en lui également. Du reste, il s'obstinait plus que personne dans des illusions vraiment étranges... Il aurait désiré que la majorité des Chambres gouvernât par le moyen des ministres, à l'ombre d'une royauté au repos. »
Réélu, le 21 juin 1834, député de Sancerre, par 148 voix (182 votants, 237 inscrits), contre 29 voix à M. de Montreuil, il prêta son appui à la politique de Thiers, et vota avec les centres toutes les mesures que sollicita le pouvoir, sans en excepter les lois de septembre 1835. Mais à l'avènement du ministère Molé (15 avril 1837), il prit une attitude qui, sans être encore celle de l'opposition, n'avait déjà plus rien de bienveillant. Chargé du rapport sur les fonds secrets, il s'en acquitta avec une redoutable habileté et mêla, à des conclusions en apparence favorables au cabinet, des avertissements d'une gravité menaçante. Puis il se décida à entrer avec Thiers, Rémusat, etc., dans la coalition des diverses oppositions de la Chambre contre le ministère Molé.
Après avoir obtenu sa réélection, le 4 novembre 1837, avec 184 voix (221 votants, 299 inscrits), contre 32 voix à M. de Montreuil, ce fut lui qui donna à la Chambre le signal de la reprise des hostilités. Son écrit intitulé : Des principes du gouvernement représentatif et de leur application, résuma nettement la thèse favorite des parlementaires : « Le roi règne et ne gouverne pas. » En même temps, il ressuscitait, avec MM. Guizot et Rossi, la Revue Française, qui avait disparu après 1830, et y publiait une série d'articles où il s'attachait à prouver que les ministres étaient insuffisants et qu'ils compromettaient le gouvernement représentatif par une outrageante affectation de dédain à l'égard de la Chambre. Vaincue au commencement de la session de 1838, la coalition eut plus de succès à l'ouverture de celle de 1839, et M. Duvergier de Hauranne, comme membre et secrétaire de la commission chargée de la rédaction du projet d'adresse, eut une grande part au renversement du ministère Molé.
La dissolution de la Chambre avait amené la réélection des coalisés. M. Duvergier de Hauranne fut renvoyé à la Chambre, le 2 mars 1839, par 153 voix sur 215 votants et 298 inscrits ; il soutint alors de toutes ses forces le cabinet du 1er mars 1840, et partagea notamment ses vues dans la question d'Orient. Mais lorsque Guizot vint prendre, le 29 octobre, la succession de Thiers, pour faire prévaloir une politique tout opposée, M. Duvergier de Hauranne rompit avec son ancien ami, dont il dénonça la conduite dans la Revue des Deux-Mondes, et se trouva rejeté dans l'opposition.
Il fit, par la parole et par la plume, une guerre sans merci aux ministres nouveaux, fut réélu, le 9 juillet 1842, par 152 voix (240 votants, 307 inscrits), contre 51 voix à M. de Vogüé et 32 à M. Duranty, obtint, à la suite de certaines décisions du bureau de la Chambre, très contestées, l'abolition du scrutin secret (1845), et intervint dans un grand nombre de discussions d'affaires, par exemple pour défendre les principes de la liberté commerciale et l'exécution des chemins de fer par les compagnies. Il prit aussi plusieurs fois la parole sur l'Algérie et n'épargna pas les critiques aux administrateurs de la colonie depuis la conquête.
M. Duvergier de Hauranne, qui avait obtenu encore le renouvellement de son mandat, le 1er août 1846, avec 179 voix (223 votants, 328 inscrits) contre 14 voix à M. Duranty, suivit dans la dernière législature du règne la même ligne de conduite. Il s'était fait le patron d'un projet de réforme électorale, que la majorité avait repoussé. Alors il devint un des promoteurs de l'agitation réformiste et de la campagne des banquets. Dans celui qui fut tenu à la Charité-sur-Loire, le 17 octobre 1847, il but « à la souveraineté nationale et au roi constitutionnel », et insista sur la nécessité de sauver le gouvernement représentatif par des réformes sérieuses et profondes. Il signa, en 1848, la demande de mise en accusation du ministère Guizot ; lors de la chute de cet homme d'Etat, à la veille de la révolution, M. Thiers lui réserva un portefeuille dans l'éphémère cabinet du 23 février. Mais, vingt-quatre heures après, la République était proclamée. Elle n'excita pas l'enthousiasme de M. Duvergier de Hauranne.
Devenu, le 23 avril 1848, représentant du Cher à l'Assemblée constituante, le 3e sur 7, par 45 884 voix, il s'y fit le champion des idées les plus conservatrices, et vota :
- pour le rétablissement du cautionnement,
- pour les poursuites contre Louis Blanc et Caussidière,
- pour le rétablissement de la contrainte par corps,
- contre la réduction de l'impôt du sel,
- pour la proposition Rateau,
- contre l'amnistie,
- pour l'interdiction des clubs
- pour les crédits de l'expédition de Rome.
Dans la séance du 27 septembre 1848, il proposa sans succès un amendement à l'article 20 de la Constitution en ces termes : « Le peuple français délègue le pouvoir législatif à deux Chambres. » Cet amendement fut rejeté à la majorité de 530 voix contre 289. Il fit partie de la commission chargée d'examiner la demande de crédits pour l'expédition romaine.
Non réélu à la Législative, aux élections générales de 1849, il profita d'une élection partielle, motivée par le décès de M. Poisle-Desgranges et la démission de M. Louriou, pour y entrer, le 24 novembre 1850, comme représentant du Cher, avec 17 154 voix (27 405 votants, 55 768 inscrits), malgré la vive opposition que lui firent le Constitutionnel et le Journal des Débats. Nous trouvons dans une lettre d'Audry de Puyravault, du 12 juillet 1850, cette appréciation sur M. Duvergier de Hauranne : « C'est un homme qui a une certaine réputation politique. On l'a vu un peu partout, depuis la société Aide-toi, le Ciel t'aidera, dans toutes les opinions ; il a été ministériel, doctrinaire, conservateur, dans l'opposition, dans les banquets, où il a joliment contribué à la révolution de février. Il est malheureux qu'il n'ait pas aussi contribué à la conserver. »
À la Législative, M. Duvergier de Hauranne siégea dans la majorité monarchique dont il devint un des membres les plus influents, et, s'étant séparé, au dernier moment, de la politique de l'Elysée, fut inquiété pendant quelque temps, à l'époque du coup d'Etat de 1851.
Après une courte détention à Mazas et à Sainte-Pélagie, il fut éloigné, par un décret du 9 janvier 1852, mais, le 7 août de la même année, un autre décret l'autorisa à rentrer en France. M. Duvergier de Hauranne passa les années de l'Empire à écrire une Histoire du gouvernement parlementaire en France (10 volumes, 1857-1873), et se tint à l'écart de la politique active.
Rallié, après 1870, à la suite de son ami Thiers, aux doctrines de la « République conservatrice », il accepta une candidature dans le Cher, lors des élections sénatoriales de 1876, mais ne fut pas nommé. Il vécut, à dater de cette époque, dans une retraite absolue, et refusa, en octobre 1877, de se laisser porter candidat à la Chambre des députés à la place de son fils, M. Ernest Duvergier de Hauranne (V. ce nom), mort pendant la période électorale. Il mourut en 1881, dans son château d'Herry (Cher), aveugle et presque paralytique, laissant un fils, M. Emmanuel Duvergier conseiller général du Cher, et une fille mariée à M. Target, ancien représentant, ancien consul général à la Haye.
Outre les ouvrages cités plus haut, on a attribué à M. Duvergier de Hauranne des vaudevilles de jeunesse : Le Jaloux comme il y en a peu, Un Mariage à Gretna-Green, etc.; ils n'ajoutent rien à la réputation de l'écrivain dont le bagage littéraire se compose surtout de nombreux articles de revues et de journaux, de discours, de rapports tirés à part, publiés en brochure et pour la plupart extraits de la Revue des Deux-Mondes, dont il fut longtemps un des publicistes ordinaires.
Date de mise à jour: novembre 2015