Joseph Charvet

1909 - 1994

Informations générales
  • Né le 16 août 1909 à Lyon (Rhône - France)
  • Décédé le 18 septembre 1994 à Eguilly (Côte-d'Or - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 23 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Département
Rhône
Groupe
Indépendants et paysans d'action sociale
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 25 novembre 1962 au 2 avril 1967
Département
Rhône
Groupe
Centre démocratique

Biographies

Biographie de la Ve République

CHARVET (Joseph, Marie, Jean)
Né le 16 août 1909 à Lyon (Rhône)
Décédé le 18 septembre 1994 à Eguilly (Côte-d'Or)

Député du Rhône de 1958 à 1967

Joseph Charvet est le puîné, à Lyon, d’une famille de douze enfants originaire de Tramolé en Isère. Son père, avocat, préside la Ligue des familles nombreuses de 1918 à 1940.

Après des études secondaires à l’externat Saint-Joseph de Lyon, Joseph Charvet entre à l’Ecole d’agriculture de Sandar, à Limonest, dans le Rhône. Après quelques stages pratiques, il suit une année d’études à l’Ecole d’industrie laitière du Jura. En 1933, il prend en fermage une grosse exploitation laitière à Lestra dans la Loire. En 1939, il devient gérant de la coopérative laitière dont son exploitation était adhérente. Mobilisé en août, prisonnier à l’issue de la bataille de France, il s’évade avec Jean Laborde en novembre 1940, ce qui lui vaudra la Croix de guerre, avec citation à l’ordre de la Brigade. Il s’installe à l’Arbresle, à vingt-cinq kilomètres au nord-ouest de Lyon. A la Libération, Joseph Charvet s’affirme comme une des principales figures du syndicalisme agricole régional. Il devient secrétaire général de la Fédération des producteurs de lait du Bassin lyonnais et conserve cette fonction jusqu’en 1967. Sollicité pour conduire une liste aux élections municipales à l’Arbresle en 1947, Joseph Charvet est élu maire de ce chef-lieu de canton de 3 000 habitants, ce qui ne l'empêche pas de poursuivre son activité syndicale de promotion de l’élevage laitier et de protection des éleveurs contre la variation des cours du lait. Il est à l'origine de la création de la Coopérative de l’élevage et d’amélioration de la production laitière et du Centre d’insémination. En juillet 1951, il prend la tête de la grève du lait. L'élu local est arrêté et emprisonné. Les agriculteurs du Bassin lyonnais se mobilisent et manifestent pour obtenir sa libération.

Réélu maire de l'Arbresle en 1953, Joseph Charvet est pressenti pour être candidat aux élections législatives de novembre 1958 dans la huitième circonscription du Rhône (Givors), pour succéder à son compagnon d’armes Jean Laborde, parlementaire indépendant-paysan décédé en mai précédent. Investi par le Centre national des indépendants et paysans (CNIP), Joseph Charvet bénéficie du soutien de l'Union pour la nouvelle République (UNR) et du Mouvement républicain populaire (MRP). Ce père de dix enfants s’adresse particulièrement aux agriculteurs, qu’il entend représenter à l’Assemblée nationale, en défenseur de la famille, du droit de propriété et de l’Etat face au « collectivisme, donc au marxisme, quelle que soit l'étiquette politique dont il s'affuble : communiste ou socialiste. » Il leur promet que son activité parlementaire sera « sur le plan général, conduite par les principes qui guident le Centre national des indépendants-paysans » et sur le plan agricole « strictement conforme aux directives de la Fédération nationale des exploitants agricoles. » Il est élu dès le premier tour de scrutin avec 21 865 voix sur 42 987 suffrages exprimés, soit 50,9 %, distançant son principal adversaire, Camille Vallin, député communiste sortant, conseiller général et maire de Givors, qui obtient 8 275 voix et 19,3 % des suffrages. Trois autres candidats leur disputaient la circonscription : Bernard Lataste, candidat républicain d’action paysanne et sociale (6 813 voix), le candidat du rassemblement républicain, le radical Marius Jeampierre (4 168 voix) et, enfin, Georges Fourneret, candidat sans étiquette (1 866 voix).

Inscrit au groupe Indépendants et paysans d'action sociale (IPAS), Joseph Charvet siège à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, qui le désigne comme rapporteur spécial du budget annexe des Monnaies et médailles. Il est nommé membre du Comité central du lait (29 juin 1959) et du Conseil supérieur de la coopération (30 novembre 1960). Parlementaire actif, il intervient dans l'hémicycle à une quarantaine de reprises pour défendre les agriculteurs et les éleveurs. Le 23 juin 1959, lors de la discussion d’un projet de loi de programme relatif à l’équipement agricole, il dénonce l’insuffisance de la loi de programme et demande une politique de lutte contre l’exode rural, qui développe des activités complémentaires de l’agriculture permettant de relever le niveau de vie des acteurs de la ruralité. Joseph Charvet critique la concurrence des partenaires du Marché commun et défend la nécessité d’un meilleur accès aux capitaux pour les agriculteurs. Le 13 novembre 1959, le député du Rhône, dans une question orale relative à l'expansion économique régionale, demande au gouvernement d'arrêter la « désertion de nos villages » par une politique rurale. Le 29 octobre 1959, lors de l’examen du projet de loi portant réforme fiscale, il défend le maintien des avantages accordés aux mutuelles agricoles en raison de la spécificité du risque qu’elles assurent. Le 29 novembre 1960, il propose d’amender le projet de loi relatif aux assurances sociales pour épargner aux agriculteurs les contrôles inopinés. Le 5 décembre 1960, dans la discussion du projet de loi de finances pour 1961, il propose l'institution par amendement d'une taxe sur la margarine. Les 11 et 12 octobre 1961, à l’occasion d’un projet de loi relatif à la fixation des prix agricoles, il rappelle le désir des paysans d’obtenir une hausse des prix immédiate et soutient l’indexation des prix. Le 19 juillet 1961, lors de la discussion du projet de loi relatif au droit de préemption, il demande que les terrains agricoles soient exclus du dispositif des zones d’aménagement différé (ZAD), afin de permettre leur préemption par les fermiers. Les 3 et 4 juillet 1962, dans le débat sur le projet de loi de programme sur l’enseignement agricole, le député se félicite du budget alloué à cet enseignement mais critique une répartition budgétaire, jugée trop rigide et défend des crédits supplémentaires pour l’enseignement agricole privé.

Le député du Rhône n’oublie pas sa circonscription. Il intervient, lors de l’examen du projet de loi portant approbation du IVe plan, le 19 juin 1962, pour défendre un aménagement de l’axe Rhin-Rhône qu’il déclare « nécessaire à l’expansion industrielle des vallées du Rhône et de la Saône ». Il critique la longueur insuffisante des nouvelles écluses en construction sur le fleuve, qui ne peut concurrencer le trafic rhénan.

A l’occasion des grands scrutins de la législature, le député-maire de l'Arbresle ne soutient pas toujours l’exécutif. Il vote la déclaration de politique générale du gouvernement Debré ainsi que le nouveau règlement de l’Assemblée nationale (3 juin 1959), mais il s'abstient volontairement, lors du scrutin public du 15 octobre 1959, sur la déclaration de politique générale du gouvernement. Rapporteur spécial, il s’abstient encore de voter, le 17 décembre 1959, le projet de budget pour 1960, tandis que la grande majorité de son groupe le rejette. Le 23 décembre 1959, il se prononce en faveur du projet de loi concernant l’enseignement privé. Par la suite, les événements algériens le détournent du gouvernement. Le 2 février 1960, il désapprouve les pouvoirs spéciaux réclamés pour ramener l’ordre, après la Semaine des Barricades. Il refuse la modification de la Constitution le 11 mai 1960 et s'abstient volontairement lors du vote du 27 avril 1962 sur la déclaration de politique générale du gouvernement. Absent lors du scrutin sur la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault (5 juillet 1962), il figure au nombre des 280 députés qui votent la motion de censure du 4 octobre 1962, provoquant la chute du gouvernement Pompidou et la rupture entre la majorité des députés Indépendants et le général de Gaulle.

En novembre 1962, à l’issue d’un premier mandat écourté, le député CNIP du Rhône sollicite à nouveau les suffrages de ses administrés. Cette fois-ci, Joseph Charvet se voit opposer un candidat gaulliste en la personne de Paul Chenevat. Le député sortant arrive en tête à l'issue du premier tour avec 13 182 voix, soit 35,2 % des suffrages exprimés, devançant le communiste Paul Vallon et le candidat de l’UNR Paul Chenevat qui récoltent chacun un peu moins d’un quart des suffrages. Au second tour, le maintien du candidat gaulliste n’empêche pas Joseph Charvet d’emporter la triangulaire par 43 % des suffrages contre 29,8 % au candidat gaulliste et 27,1 % au candidat communiste.

Au Palais-Bourbon, le député du Rhône s’inscrit au groupe des Républicains indépendants, constitué par la minorité des élus du CNIP favorables à la poursuite de l'alliance avec les gaullistes. Constatant le manque de considération de l'UNR vis-à-vis de ce groupe, réduit à une force d'appoint de la majorité, il le quitte le 16 mai 1963 et s’en explique : « Qui dit parti de la majorité suppose une adhésion globale à une politique véritablement et contradictoirement définie. Or on nous la déroule au jour le jour sans que nous en apercevions la finalité ni même les contours. » Le parlementaire, qui a réaffirmé sa fidélité au CNIP et à sa doctrine dans une lettre adressée aux dirigeants du parti, rejoint la dizaine de députés indépendants-paysans rescapés du scrutin de 1962 au sein du groupe du Centre démocratique, présidé par Pierre Abelin (MRP). Il quitte alors la commission des finances pour celle de la production et des échanges où il siège jusqu’à la fin de la législature. Il demeure membre du Conseil supérieur de la coopération.

Il dépose une proposition de loi tendant à rétablir le Mérite social (13 avril 1966) et intervient très fréquemment à la tribune de l'Assemblée pour défendre le monde agricole, en particulier lors des débats budgétaires. Le 11 janvier 1963, il évoque l’urgence des mesures à prendre en matière d'enseignement agricole, le caractère trop exclusif des critères retenus pour l'attribution des bourses ou encore les subventions de fonctionnement aux établissements d'enseignement agricole privé. Le 5 novembre 1964, il plaide pour que la majoration des charges sociales supportées par l’agriculture se répercute sur les prix agricoles. Le 12 décembre 1963, il intervient dans l’examen des articles de la proposition de loi d'Edmond Bricout tendant à définir les principes et les modalités de l'économie contractuelle en agriculture. En octobre 1966, il soutient des amendements au projet de loi d'orientation et de programme sur la formation professionnelle, et d’autres encore, en novembre, sur le projet de loi sur l'élevage. En trois occasions néanmoins, Joseph Charvet prend la parole sur des sujets sans lien avec l’agriculture. Le 22 janvier 1963, il évoque le sort des anciens combattants pour se féliciter de l’amélioration des budgets qui leur sont alloués. Le 15 octobre 1963, à l’occasion de l’examen d’un projet de loi d’amnistie pour les objecteurs de conscience de la guerre d’Algérie, il défend une amnistie plus large qui engloberait les anciens partisans de l’Algérie française : « Il y a aussi dans les prisons et dans les camps des hommes, des femmes, des jeunes gens qui, eux, ne savent ni pourquoi ni pour combien de temps ils y sont, qui n’ont pas été entendus ni jugés, qui sont encore en prévention, qui sont privés de liberté sans que l’on ait prouvé leur culpabilité, pour lesquels il s’est posé aussi, en toute bonne foi, des cas de conscience tragiques et douloureux. […] Cela constitue une tare pour un pays qui, dans le monde, a toujours été le champion de la liberté, qui, conformément aux accords d'Evian, a rendu cette liberté aux détenus du Front de libération nationale (FLN) et qui ne l'a pas encore rendue à ses propres détenus. » Le 24 novembre 1966, dans la discussion du projet de loi modifiant le statut des agents de change, Joseph Charvet évoque la situation des bourses de province et la nécessité de ranimer le marché financier, notamment en facilitant les possibilités de fusions.

Lors des grands scrutins de la législature, son indépendance à l’égard de la politique gouvernementale s’affirme. Si Joseph Charvet vote en faveur de la ratification du traité de l’Elysée, le 13 juin 1963, et de la modification de la Constitution qui change les dates des sessions parlementaires, le 20 décembre 1963, il s’oppose au projet de loi relatif à certaines modalités de grèves dans les services publics le 26 juillet 1963, à la réforme du mode d’élection des conseillers municipaux le 17 juin 1964 et à celle du service national, les 25 et 26 mai 1965.

Joseph Charvet choisit de ne pas se représenter aux élections législatives de mars 1967 et Pierre Morison est élu député de la huitième circonscription du Rhône sous l’étiquette des Républicains indépendants. 1967 marque également son retrait du secrétariat général de la Fédération des producteurs de lait du Bassin lyonnais. Il entame une seconde carrière professionnelle dans la distribution. Il devient président de la Société économique d’alimentation (SEA), une organisation commerciale à succursales. A la suite d’une fusion de la SEA et de la Société laitière moderne en 1969, il prend la présidence de la société Cofradel, qu’il conserve jusqu’en 1976. Cette société gère d’abord des magasins de détail, puis des supermarchés, les hypermarchés Mammouth, et enfin, à partir de 1970, Paridoc, une société de groupement d'achats et de services. Joseph Charvet demeure maire de l’Arbresle jusqu’en 1983. Il se retire alors à Tramolé, village de ses racines familiales, et meurt à Eguilly le 18 septembre 1994, à l’âge de 85 ans. Il était officier de la Légion d’honneur, chevalier du Mérite agricole, chevalier des Palmes académiques, médaillé du département du Rhône.