Vincent, Xavier, Etienne, Eugène de Moro-Giafferri

1878 - 1956

Informations générales
  • Né le 6 juin 1878 à Paris (Seine - France)
  • Décédé le 22 novembre 1956 à Le mans (Sarthe - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XIIe législature
Mandat
Du 16 novembre 1919 au 31 mai 1924
Département
Corse
Groupe
Républicain socialiste
Régime politique
Troisième République - Chambre des députés
Législature
XIIIe législature
Mandat
Du 11 mai 1924 au 31 mai 1928
Département
Corse
Groupe
Républicain socialiste et socialiste français
Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
2e Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 2 juin 1946 au 27 novembre 1946
Département
Seine
Groupe
Radical et radical-socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 10 novembre 1946 au 4 juillet 1951
Département
Seine
Groupe
Républicain radical et radical-socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Seine
Groupe
Républicain radical et radical-socialiste
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 22 novembre 1956
Département
Seine
Groupe
Républicain radical et radical-socialiste

Biographies

Né le 6 juin 1878 à Paris.

Député de la Corse de 1919 à 1928. Sous-Secrétaire d'Etat à l'Enseignement technique du 14 juin 1924 au 10 avril 1925.

Malgré le masque romain au regard de flamme que le soleil confère aux races ardentes des bords méditerranéens, malgré l'émotion et l'orgueil d'un fils passionné avec lesquels il parlait toujours de la grande île, Vincent est né par hasard à Paris, à Montmartre, d'un père corse et d'une mère auvergnate.

Ses études, il les fit à Paris, au collège Rollin, à Louis-le-Grand, puis à la Faculté de droit. Avocat à 20 ans, il fut aussi clerc' d'avoué, secrétaire de la conférence du stage. Il préside la conférence Molé en 1900 puis s'inscrit à l'assistance judiciaire où, pendant quatre ans, il s'initie à la pratique du métier.

Il plaide le procès du « sou du soldat », des faux monnayeurs du Luxembourg et l'affaire des « bandits tragiques » qui lui vaut la notoriété.

Le 2 août 1914, mobilisé dans l'auxiliaire, il demande à être versé dans le service armé. Il est à Verdun, où il est blessé, puis il est envoyé à Salonique. Il termine la guerre capitaine d'infanterie, chevalier de la Légion d'honneur à titre militaire.

Reprenant sa profession d'avocat, il est appelé à défendre Charles Humbert, Joseph Caillaux, il plaide les affaires Bessarabo, de Rayssac, Landru (dont il déplora toujours qu'il ne se soit pas plus confié, jusqu'à l'exécution, à son défenseur qu'à ses juges) et Weiller. Grand avocat, il l'est, et même sans mesure. Le trait dominant de sa nature c'est la puissance de concentration dans le moment présent, ce qui est peut-être l'explication d'une exceptionnelle faculté verbale. Improvisateur, il le reste toute sa vie, puisant les ressources du verbe dans sa parole même, ce qui est peut-être la source des épithètes, des métaphores souvent inattendues qui étincellent dans ses plaidoiries, plus tard dans ses discours.

Si, comme chez tous les grands orateurs, sa mémoire est aussi prompte que tenace, s'il est plus un auditif qu un « éplucheur » de dossiers laborieux et consciencieux, il semble bien que sa faculté maîtresse soit le genre dramatique. Il n'est pas l'avocat qui expose froidement et clairement une thèse, il est l'artiste qui donne mouvement et vie à ses idées.

Au civil, ce talent débordant n'avait pas toutes ses aises, c'était en Cour d'assises qu'il pouvait se déployer ; tout d'ailleurs, en cette solennelle juridiction, semble fait pour lui donner une allure théâtrale. Comme un musicien virtuose sachant allier une grande variété de tons à son don du verbe, il plaide magnifiquement.

L'éloquence est la grande fête du peuple 1 Pourquoi Moro n'aurait-il pas, malgré ses idées politiques un peu flottantes, réussi dans une réunion publique à conquérir son auditoire ?

Il se fait élire député de la Corse en 1919, arrivant en tête avec 28.684 voix devant Landry, 27.731, sur la liste du parti républicain démocratique, Gavini (liste des républicains de gauche) étant élu en troisième position avec 23.472 voix.

Moro-Giafferi est élu président du Conseil général en 1920.

En 1924, Moro sera réélu député, en seconde position cette fois, avec 24.270 voix, derrière Landry, 26.317, Piétri (liste d'union républicaine), troisième élu avec 23.364 voix. Aux élections d'avril 1928, au scrutin uninominal, il sera battu dans la circonscription de Bastia par Pierangeli par 5.928 voix à 5.647.

Formant son premier cabinet - présenté le 14 juin 1924 - Herriot l'appelle au sous-secrétariat de l'Enseignement technique, ce qui dès lors lui permet de dire volontiers : « Quand je faisais partie des conseils de gouvernement... » L'année suivante, il est élu membre du conseil de l'ordre des avocats. Signalons que peu avant la seconde guerre, il plaide les affaires Weidmann et Gryjspan.

A la Chambre, Moro-Giafferi va apporter la même flamme, en ardent défenseur des libertés humaines. Membre de la commission de législation civile et criminelle pendant la durée de ses mandats, puis de la marine marchande, des affaires étrangères et des finances, il ne se cantonne pas dans les questions juridiques ou administratives, son esprit est ouvert, sa générosité en alerte et son talent disponible.

Peut-être l'éloquence de la tribune devant un auditoire quand même difficile à comparer avec celui d'une réunion populaire est-elle différente de l'éloquence du prétoire, mais il est indéniable que « Moro », comme l'appellent avec amitié les collègues, n'obtient pas d'eux des .accès aussi aisés, aussi notoires que ceux qu'il récoltait à la barre.

Certes, il joue ici, comme là, de l'ironie et parfois grinçante, de la véhémence calculée de son indignation. Ici comme là, l'improvisation l'emporte un peu vite à la façon dont son embonpoint entraîne sa démarche, mais il paraît plus gêné par les règles étroites de la procédure, par les points acquis de la jurisprudence, par la rigueur impérative des textes devant une assemblée froide, dont les membres juristes sont, ou des enseignants, ou des avocats d'affaires précis, que devant les salles d'assises trop facilement éblouies par ses effets.

C'est toutefois un compagnon de couloirs jovial, rieur, fantaisiste - ne fait-il pas une collection de bouteilles, vides - et spirituel, dispersant sans compter éloquence et rayonnement de sympathie. Vincent de Moro-Giafferi qui fit de nombreuses conférences et tournées de propagande pour son parti (républicain socialiste) a été président d'honneur des Meilleurs ouvriers de France et des Meilleurs ouvriers de Belgique.

Il est officier de la Légion d'honneur, titulaire de la croix de guerre 1914-1918.




Né le 6 juin 1878 à Paris
Décédé le 22 novembre 1956 au Mans (Sarthe)

Député de la Corse de 1919 à 1928
Membre de seconde Assemblée nationale constituante (Seine)
Député de la Seine de 1946 à 1956

Personnalité marquante du barreau parisien au XXe siècle, Vincent de Moro-Giafferri est né à Montmartre, rue Chappe, dans la nuit du 6 au 7 juin 1878. Issu d'une vieille et nombreuse famille de petits propriétaires terriens de souche montagnarde du côté de Campile (Corse), le nouveau-né à pour père Ours Joseph Giafferri « di u Moro », c'est-à-dire descendant du Maure (Henri Rossi), employé des chemins de fer à Paris.

Les parents du petit Vincent retournent en Corse en 1883, mais le laissent séjourner à Paris, aux bons soins des ses tantes. Le « poulbot corse », impétueux mais brillant, aidé par une bourse d'Etat, fait d'abord ses études au collège Rollin, puis au collège Saint-Vincent à Senlis (chez les Frères de Marie), où il devient très anticlérical, ce que son passage ultérieur à Louis-le-Grand n'atténue pas. Il se prend de passion pour la politique, fait son droit, et devient le benjamin des avocats de France : il n'a que vingt ans.

Après avoir été secrétaire de la conférence du stage, il ouvre bientôt son propre cabinet et devient un avocat célèbre et admiré pour ses convictions et ses prouesses rhétoriques, qui va plaider de multiples affaires qui défraient la chronique, comme celle des faux-monnayeurs du Luxembourg et celle de Landru.

Au cours de la première guerre mondiale, à sa demande, il est envoyé au service actif, à Verdun (où il est blessé) et à Salonique, et c'est à titre militaire qu'il obtiendra la Légion d'honneur, ainsi que la Croix de guerre et la Croix des blessés de Verdun. Il est élu député de Corse en 1919, réélu en 1924, mais battu en 1928. En 1940, Vincent de Moro-Giafferri se réfugie en zone Sud, puis en Corse.

Après la Libération, la dernière partie de sa carrière sera essentiellement parlementaire, cette fois au service des Parisiens et non plus des Corses. Le 2 juin 1946, pour les élections à la seconde assemblée nationale constituante, il prend la tête d'une liste de rassemblement des gauches républicaines dans la première circonscription du département de la Seine (rassemblant les 5e, 6e, 7e, 13e, 14e et 15e arrondissements), où dix sièges sont en jeu. Sa liste ne recueille que 35 908 des 434 358 suffrages exprimés, soit 8,26 %, mais cela suffit à en faire le dernier élu à la plus forte moyenne.

A l'assemblée nationale, Jean de Moro-Giafferri est nommé membre de la Commission de la Justice et de législation générale. Il dépose, le 17 septembre 1946, trois propositions de loi sur les problèmes de logement : la première tend à permettre au propriétaire ou locataire principal d'un local réquisitionné de donner congé au locataire jouissant d'une double résidence ; la troisième tend à réglementer la location des locaux devenus vacants.

En à peine plus de trois mois, il intervient à de très nombreuses reprises à la tribune, non seulement sur des questions urgentes telles que le ravitaillement, le logement ou encore le rapatriement des prisonniers de guerre français, mais aussi sur le projet de constitution. Il s'intéresse de près aux problèmes dont il est le plus familier, ceux du pouvoir judiciaire et, en qualité de rapporteur de la Commission de la justice, il est entendu sur la question de l'organisation de la Haute Cour. Il expose également ses idées sur le Conseil supérieur de la magistrature, les 10 et 13 septembre 1946. Un échange animé l'oppose à Paul Ramadier le 10 septembre : l'avocat défend l'idée du « dosage » dans la composition du Conseil, « qui est encore le meilleur moyen d'arriver à une mesure », et s'explique : « Il est exact que la magistrature est un peu impatiente du régime sous lequel elle a vécu longtemps, qui la met sous la domination immédiate du pouvoir. Elle jugerait plus odieux un autre abus, celui qui consisterait à la placer sous la domination d'une assemblée politique. » Il participe à la discussion du projet de loi fixant le régime des allocations familiales, ainsi qu'aux interpellations sur la politique générale du gouvernement en Algérie.

Le 10 novembre 1946, pour les élections à la première législature de la Quatrième République, il se présente à nouveau aux suffrages des Parisiens sur une liste RGR, et, s'il ne dispose pas d'une forte marge, il améliore néanmoins son score, avec 46 889 des 433 260 suffrages exprimés (10,8 %). Aux élections du 17 juin 1951, sa liste passe à nouveau de justesse avec 27 712 des 397 358 suffrages exprimés (moins de 7 %) ; mais Vincent de Moro-Giafferri - signe de sa popularité acquise au prétoire - rassemble sur son nom 30 379 voix. Enfin le 2 janvier 1956, il présente avec Pierre Clostermann une liste conjointe radicale et radicale-socialiste, caractérisée par son soutien sans faille à Pierre Mendès France, liste qui rassemble 80 245 des 457 266 suffrages exprimés (17,5 %), permettant la dernière élection de l'avocat dejà âgé - il a près de quatre-vingt ans- et de son jeune colistier gaulliste.

Durant cette décennie parlementaire, de 1946 à 1956, Vincent de Moro Giafferri va déployer une activité considérable à l'Assemblée nationale, activité nettement supérieure à la moyenne de ses collègues députés. Au cours de la seule première législature par exemple, il ne dépose pas moins de quatre propositions de résolution, sept propositions de loi et quinze rapports, dont neuf au nom de la commission des immunités parlementaires, sur des demandes en autorisation de poursuites contre des collègues de l'Assemblée, et intervient à d'innombrables reprises à la tribune, pour défendre ses amendements ou rapporter un projet de loi. Orateur remarqué, n'ayant pas peur d'interpeller le gouvernement ou de répliquer fermement à ses collègues communistes, son aisance de ténor du barreau lui est précieuse pour faire valoir ses points de vue.

Sa Commission de prédilection est celle de la justice et de législation, dont il est membre dès 1946, et qu'il préside de 1951 à sa mort. Il est aussi membre de la commission des immunités parlementaires, et, à partir de 1951, de la commission du suffrage universel, des lois constitutionnelles, du règlement et des pétitions. Au cours de la première législature seulement, il y ajoute d'autres nominations, à la commission de la marine marchande et des pêches, à celle de l'éducation nationale, et à celle de la défense. Enfin, il est nommé, le 11 mars 1947, procureur général à la Haute cour de justice, et retrouve plus tard cette institution dont il est nommé président le 15 mai 1956 (en cette qualité, il préside les audiences consacrées au général Nogues).

Son activité parlementaire est si vaste et diverse qu'il est difficile d'en rendre compte de manière exhaustive. Sur une décennie, quelques centres d'intérêt constants ressortent néanmoins : la politique du logement, l'organisation et le budget de la justice en France, les affaires constitutionnelles, l'actualité politique intérieure et internationale, les affaires locales (parisiennes et corses) ou sectorielles, enfin les conditions du travail parlementaire (immunités, ordre du jour, règlement, etc.).

Vincent de Moro-Giafferri porte une attention constante aux problèmes de logement, et participe activement à toutes les discussions sur le sujet, en particulier celles qui concernent des rapports entre propriétaires et locataires. De février à juin 1948, il intervient des dizaines de fois à la tribune dans le débat sur le projet de loi relatif aux loyers. Le 17 avril 1951, par exemple, lors d'une discussion sur une proposition de loi relative aux expulsions de locataires, il conteste les statistiques du garde des sceaux, soulignant qu'il s'agit d'expulsions effectivement réalisées, et non d'autorisations délivrées par les tribunaux, lesquelles sont infiniment plus nombreuses et font vivre dans l'angoisse des milliers de locataires souvent honnêtes - c'est la raison pour laquelle il soutient une réforme de la législation existante sur ce point. Il intervient à nouveau sur ce sujet durant l'hiver 1954, en tant que président de la Commission de la Justice, opposant, dans une envolée rhétorique, l'humanité au droit dans les problèmes d'expulsion. Il s'intéresse également aux discussions portant sur les baux commerciaux ou industriels, et sur les rentes viagères.

L'avocat célèbre qu'est Vincent de Moro-Giafferri porte également une attention soutenue aux problèmes judiciaires et à l'organisation de la justice en France. En 1947, il est ainsi rapporteur du projet de loi relatif au Conseil supérieur de la magistrature. Le 21 septembre 1948, il dépose une proposition de loi tendant à interdire que la peine capitale soit exécutée par des soldats du contingent. Il prend une part active aux débats successifs sur l'organisation puis la réforme de la Haute cour de justice (à laquelle il est nommé en 1947 et qu'il préside en 1956, comme il a été indiqué) et aux très longs débats sur la loi d'amnistie en 1952 -1953. Il est aussi rapporteur du projet de loi relatif à l'assainissement des professions commerciales, artisanales et industrielles en 1947. Intervenant dans le débat du projet de loi portant statut du personnel de la police, le 21 septembre 1948, il tient à préciser sa position sur l'interdiction du droit de grève aux policiers : « Dans l'instant précis où l'on enlève à certains citoyens la possibilité accordée à tous les autres de faire entendre leur voix avec la sanction et la contrainte du droit de grève, il faut que ceux que l'on démunit ainsi obtiennent la garantie d'une sollicitude plus grande du Gouvernement et du Parlement. » Le 4 mars 1955, il suggère de d'assurer l'indépendance des juges d'instruction par l'abrogation des textes qui soumettent ces magistrats à la surveillance du procureur général.

C'est par le biais de la Justice qu'il s'intéresse aux questions familiales. Ainsi, le 22 mai 1947, il dépose une proposition de loi tendant à accorder un droit de représentation aux enfants naturels reconnus dans la succession de leurs grands-parents morts ab intestat. A partir de 1954, il reprend ce combat, en demandant à ses collègues de voter une révision du code civil facilitant la légitimation des enfants adultérins.

Le représentant de la Seine, qui fut député de la Corse dans les années 1920, est favorable à une réforme de la Constitution de 1946, et à un retour aux lois de 1875 fondatrices de la Troisième République. Comme constituant, il s'oppose, le 28 septembre 1946, au second projet qui sera finalement adopté par l'Assemblée nationale et par les Français. Le 8 juillet 1952, il dépose une proposition de résolution tendant à réviser les articles premier à 106 de la Constitution du 27 octobre 1946 en vue de rétablir la Constitution de la Troisième République ; en juillet 1953, soulignant les bienfaits de ce régime constitutionnel, il pointe les problèmes présents (notamment l'investiture) et appelle de ses voeux le rétablissement du décret de clôture, une réduction de la « navette » entre l'Assemblée et le Conseil de la République et la possibilité d'une dissolution. C'est surtout au moment de ce qui sera appelé plus tard la « réformette » initiée par Pierre Mendès France que Vincent de Moro-Giafferri intervient, pour soutenir la révision qui marque, « par rapport à la Constitution de 1946, un important progrès dans le sens à la fois de la démocratie et de l'autorité gouvernementale. »

Un autre aspect de l'organisation des affaires publiques lui tient à cœur : la représentation politique dans les territoires français d'outre-mer, qu'il s'agisse de la Côte des Somalis (juillet 50), ou de la représentation des Français de Tunisie au Conseil de la République (10 avril 1952).

L'intérêt de Vincent de Moro-Giafferri pour les affaires constitutionnelles s'accompagne d'une attention de tous les jours à la vie politique, française ou internationale, qu'il lui arrive souvent de commenter à la tribune, sur des sujets très divers. En février 1950 par exemple, il prend part aux débats sur le projet de loi relatif aux conventions collectives et au règlement des conflits du travail. En juin, lors du débat sur le budget des Anciens combattants et victimes de guerre, il défend les droits à pension des veuves de morts pour la France. En juillet 1952, il intervient dans la discussion du projet de loi relatif au contrôle des ententes professionnelles, par un amendement tendant à ne pas créer de juridiction d'exception pour le tribunal des ententes. Dernier exemple : en avril 1956, débattant avec ses collègues des problèmes de la propriété littéraire et artistique, il dépose un amendement tendant à réduire à deux le nombre de manuscrits refusés par un éditeur pour que l'auteur soit libéré du « droit de préférence » que peut exercer son éditeur.

En matière internationale, Vincent de Moro-Giafferri intervient souvent à la tribune ; il prend ainsi part aux interpellations relatives aux événements de Madagascar (9 mai 1947), ou d'Indochine (1950) ; lors de l'affaire des piastres (octobre 1953), il défend la levée du secret professionnel afin de dissiper les calomnies, et démonte, textes à l'appui, les objections pseudo-juridiques du ministère des finances. C'est surtout au moment de la CED - qu'il contribue à faire rejeter (30 août 1954) - et des accords de Paris et de Londres qu'il fait entendre ses positions. S'il accepte les accords de Londres (qui mettent un terme à l'occupation de l'Allemagne, le 12 octobre 1954), il s'oppose résolument, mais en vain, le 29 décembre, à la ratification des accords de Paris, qui permettent le réarmement de la RFA et son entrée dans l'OTAN. Il dénonce notamment l'illusion d'une interdiction des armements atomiques à l'Allemagne, tandis que toute armée allemande « revancharde » poserait un « péril immense et immédiat ».

Au cours des trois législatures auxquelles il participe, le député de la Seine défend parfois directement les intérêts de ses administrés parisiens, mais aussi ceux de ses compatriotes corses. Ainsi, en mars puis en janvier 1951, il dépose des demandes d'interpellation sur l'organisation des transports publics à Paris. A partir de 1950, et notamment au cours de l'année 1951, il dépose de nombreux rapports sur les moyens de réprimer la contrefaçon des créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure Concernant la Corse, il dépose une proposition de loi tendant à accorder un délai de route de six jours aux travailleurs corses des administrations publiques et privées résidant sur le continent et se rendant en Corse pour y passer leur congé annuel (7 juillet 1948).

Enfin, Vincent de Moro-Giafferri consacre une large part de son temps aux questions internes à l'Assemblée nationale. Lors de la première législature, il a la charge de présenter de nombreux rapports sur les demandes en autorisation de poursuites contre ses collègues. Son expérience en la matière le conduit plus tard, en 1951, en tant que président de la Commission de la justice, à souhaiter une révision des textes en vigueur sur un point précis : il souligne, lors de la séance du 8 novembre, qu'il existe à ce moment 350 demandes de levée d'immunité, dont beaucoup concernent des députés qui sont aussi directeurs de journaux, et dont leur qualité de parlementaire les soustrait aux règles régissant les affaires de diffamation, au détriment de citoyens.

Il est très fréquemment entendu sur les propositions de la conférence des présidents, c'est-à-dire l'agenda des débats de l'Assemblée nationale, et intervient à plusieurs reprises lors de la discussion portant sur les propositions de modification du règlement de l'Assemblée nationale, en mars 1952.

Les votes de Vincent de Moro-Giafferri sous la Quatrième République reflètent généralement les orientations de son groupe parlementaire radical et radical-socialiste, dont il est premier vice-président à partir de 1948. Au cours de la première législature, le député de la Seine vote pour la question de confiance au Gouvernement le 4 mai 1947, vote à la suite duquel Paul Ramadier se sépare de ses ministres communistes ; il vote aussi pour le projet de loi sur le statut de l'Algérie (27 août 1947). Il se prononce en faveur du plan Marshall (juillet 1948) et de la constitution du Conseil de l'Europe le 9 juillet 1949. Il autorise la ratification du Pacte de l'Atlantique quelques jours plus tard. Avec son groupe, il se prononce en faveur de loi sur les apparentements le 7 mai 1951, loi modifiant les règles électorales en faveur de la Troisième Force.

Lors de la seconde législature, Vincent de Moro-Giafferri s'oppose à la loi Barangé- Marie sur la question de l'école privée, qui divise la troisième force d'entrée de jeu, le 21 septembre 1951. Il soutient le projet de communauté européenne du charbon et de l'acier (13 décembre 1951). Il vote la confiance à Antoine Pinay, le 6 mars 1952, de même qu'à Joseph Laniel, le 26 juin 1953. Il vote en faveur de l'investiture de Pierre Mendès France, le 17 juin 1954, et lui maintient sans hésitation sa confiance le 4 février 1955, le jour où le Président du Conseil doit abandonner son poste. Enfin, le 23 février 1955, il accorde la confiance à Edgar Faure, mais la lui retire, à l'instar de la majorité de ses pairs, le 29 novembre 1955, ce qui autorise le président du Conseil à dissoudre l'Assemblée. Au cours des quelques mois de mandat parlementaire qu'il reste à Vincent de Moro-Giafferri avant son décès soudain le 22 novembre 1956, le député de la Seine accorde sa confiance à Guy Mollet (31 janvier 1956).

Membre du groupe parlementaire France- Espagne libre, président d'honneur des meilleurs ouvriers de France et de Belgique, président de l'Exposition permanente du travail, Vincent de Moro-Giafferri est resté lors de la dernière phase de sa carrière une figure familière et appréciée des Français. Il disparaît brusquement au Mans, durant l'automne 1956.