André Picquot
1908 - 1980
PICQUOT (André, Léon, Gaston, Robert)
Né le 24 avril 1908 à Lucey (Meurthe-et-Moselle)
Décédé le 24 octobre 1980 à Lucey
Député de Meurthe-et-Moselle de 1961 à 1968 et de 1974 à 1978
André Picquot naît au début du XXème siècle au cœur de cette Lorraine restée française en 1871. La petite commune de Lucey appartient en effet au Toulois. Dans cette région, la culture de la vigne est très ancienne ; on y produit le « Gris-de-Toul ». André Picquot se destine très tôt à la viticulture et reste fidèle à son village natal tout au long de son existence. En 1942, il est nommé maire de Lucey par les autorités de Vichy, alors que le département de la Meurthe-et-Moselle se trouve dans la « zone interdite » et est occupé par les troupes allemandes. A la Libération, la confiance de ses administrés lui vaut de conserver cette responsabilité. Il devait présider aux destinées de la commune pendant trente-cinq années consécutives, jusqu’en 1977.
André Picquot prend la vice-présidence de l’association des maires du canton de Toul dans les années 1950. Il préside en outre à cette époque le comice agricole de Toul et des vignerons du Toulois et siège à la chambre d’agriculture de Meurthe-et-Moselle. Il figure en 5ème position, derrière l’ancien résistant François Valentin, sur la liste d’Union des indépendants et paysans conduite par le député sortant Pierre André pour les élections législatives du 2 janvier 1956, mais n’est pas élu. André Picquot juge favorablement le retour au pouvoir du général de Gaulle, le 1er juin 1958, et accepte de se porter candidat aux élections législatives de novembre 1958 dans la 5ème circonscription de la Meurthe-et-Moselle, en qualité de suppléant de François Valentin. Ce dernier, sénateur depuis 1956, souhaite siéger à l’Assemblée nationale pour y servir la « volonté de renouveau » qui s’est exprimée, selon lui, au moment du référendum du 28 septembre 1958. François Valentin et André Picquot reçoivent l’investiture du Centre national des indépendants et paysans (CNIP), de la Démocratie chrétienne de France, que dirige Georges Bidault, et du Centre républicain d’André Morice. La concurrence du maire socialiste de Toul Pierre Schmidt n’empêche pas François Valentin d’être élu député dès le premier tour avec 55,5% des suffrages exprimés.
Le parlementaire lorrain s’oppose très rapidement à l’exécutif au nom de l’Algérie française : il n’approuve pas la déclaration de politique générale de Michel Debré du 15 octobre 1959, après que le général de Gaulle a parlé d’ « autodétermination » pour l’Algérie, et n’accorde pas les pouvoirs spéciaux au gouvernement pour y ramener l’ordre après la Semaine des barricades (2 février 1960). Son suppléant ne partage pas l’ensemble des analyses de François Valentin. La figure de proue du combat pour l’Algérie française en Lorraine disparaît en septembre 1961. Son suppléant André Picquot est donc conduit à le remplacer sur les bancs du Palais-Bourbon à partir du 3 octobre 1961. Il appartient officiellement à la Commission de la défense nationale et des forces armées pendant quelques jours, du 10 au 18 octobre 1961, puis rejoint la Commission de la production et des échanges, que préside alors l’ancien ministre Maurice Lemaire, député des Vosges. André Picquot n’intervient pas en séance publique en 1961-1962 et ne dépose aucune proposition de loi. Contrairement à François Valentin, il se situe dans la majorité. Alors que le groupe des Indépendants et paysans d’action sociale (IPAS), auquel il appartient, se divise sur la question algérienne, André Picquot se prononce en faveur du programme du gouvernement Pompidou (27 avril 1962). S’il abstient lors du vote sur la levée de l’immunité parlementaire de Georges Bidault (5 juillet 1962), il ne s’associe pas à la motion de censure qui renverse le gouvernement Pompidou, le 4 octobre 1962.
André Picquot est député depuis moins d’un an lorsqu’il se présente aux élections législatives de novembre 1962. La Meurthe-et-Moselle a approuvé l’élection du chef de l’Etat au suffrage universel à 72,8% le 28 octobre 1962. Le maire de Lucey choisit une femme, Claire Leclerc, comme suppléante. Il ne risque pas d’allusion à François Valentin dans sa profession de foi électorale et justifie son soutien à l’exécutif. « Partisan convaincu de la stabilité gouvernementale », il rejette tout retour au « système des partis ». Il insiste sur le bilan positif des premières années de la Vème République mais reconnaît volontiers que « des failles demeurent » et que « de nombreux problèmes restent à résoudre ». André Picquot se montre très attaché à la construction européenne et à la liberté de l’enseignement dans ses documents électoraux. Il prône en outre « l’intéressement des ouvriers » dans les entreprises et « la défense de l’exploitation familiale » en matière agricole, sans nier qu’il faille lui donner « des structures mieux adaptées et une meilleure rentabilité ». Le 18 novembre 1962, la participation au premier tour des élections législatives est en baisse de plus de 7% par rapport à novembre 1958 dans la 5ème circonscription de Meurthe-et-Moselle : 72% contre 79,2% quatre ans plus tôt. André Picquot est toutefois réélu député grâce au soutien de 50,2% des électeurs, sans attendre le second tour de scrutin. Il rassemble jusqu’à 61,2% des suffrages exprimés dans le petit canton d’Haroué.
L’élu lorrain s’inscrit au groupe des Républicains indépendants à l’Assemblée nationale. Membre de la Commission des affaires culturelles familiales et sociales au début de la 2ème législature, il retrouve la Commission de la production et des échanges à partir du printemps 1965. Il intervient à six reprises en séances publiques entre 1962 et 1967. Deux sujets retiennent tout particulièrement son attention : la fermeture des dépôts américains de l’OTAN situés sur le territoire français et le problème de la condition paysanne. A l’automne 1963, il dépose une première question orale sans débat pour s’informer de l’avenir des bases de Nancy et de Toul, alors que le commandement américain a décidé de réorganiser le système de communication de son contingent installé en France dans le cadre de l’OTAN. Pierre Messmer, ministre des armées, assure André Picquot que seuls 11% du personnel civil de la base de Nancy seraient concernés, mais ces explications ne rassurent pas le député de Meurthe-et-Moselle. La réorganisation des bases qui embauchent, depuis le début des années 1950, plusieurs milliers de travailleurs en Lorraine, menace selon lui d’autres dépôts américains, à Verdun ou à Metz-Woippy. Il reprend les mots d’un de ses collègues lorrains pour dénoncer les « graves illusions » que nourrit l’opinion publique quant à la prospérité économique de la Lorraine et souligne la nécessité d’y implanter de nouvelles industries (15 novembre 1963). Le 7 avril 1966, le général de Gaulle adresse au président des Etats-Unis une lettre, dans laquelle il indique que la France entend se retirer du commandement intégré de l’OTAN. Cette décision doit conduire au retrait de toutes les bases américaines en France. André Picquot pose une nouvelle question orale sur ce sujet en juin 1966. Il souligne à cette occasion que 3 400 personnes sont employées par les services américains en Meurthe-et-Moselle et souhaite qu’elles puissent obtenir une indemnité de renvoi calculée sur la base d’un mois de salaire par année de présence. Elu d’une circonscription rurale, le maire de Lucey se fait à plusieurs reprises l’interprète du malaise des milieux agricoles dans les années 1960. Le 5 novembre 1964, soit peu après la grève du lait, il prend ainsi la parole pour regretter l’insuffisance des prix agricoles déterminés récemment par le gouvernement. L’élu lorrain demande alors à l’exécutif de « reprendre le dialogue » avec la profession agricole. Le 28 octobre 1965, il s’interroge sur l’opportunité des accords conclus par la France avec des pays de l’Est qui lui expédient des fruits « à des prix défiant toute concurrence ».
André Picquot soutient le gouvernement de Georges Pompidou entre 1962 et 1967. Il autorise la ratification du traité de l’Elysée, qui consacre la réconciliation franco-allemande (13 juin 1963) et vote en faveur de l’encadrement du droit de grève dans les services publics (26 juillet 1963) ou de la réforme du mode d’élection des conseillers municipaux (17 juin 1964).
La campagne qui s’ouvre en mars 1967 permet à André Picquot de défendre la position des Républicains indépendants au sein de la majorité. Il se réfère explicitement de Valéry Giscard d’Estaing dans sa profession de foi et souhaite « un fonctionnement plus libéral des institutions ». Le maire de Lucey, qui préside depuis peu les Caisses de mutualité sociale et agricole de Meurthe-et-Moselle, s’efforce de traduire dans ses documents électoraux le double caractère - à la fois urbain et rural - de la circonscription. Il y revient sur l’évacuation des bases alliées de Nancy et de Toul pour rappeler qu’il a obtenu la mobilisation du Fonds national de l’emploi et le classement de Toul en zone critique d’emploi. Un contexte moins favorable à la majorité et un plus grand nombre de candidats (cinq contre quatre) expliquent qu’André Picquot affronte un second tour en mars 1967. Le sortant est en effet concurrencé chez les modérés par Jean Quenette, candidat du Centre démocrate, ancien député sous la IIIème République, préfet régional sous Vichy et cependant résistant. Avec 40,6% des suffrages exprimés, André Picquot devance le maire socialiste de Toul Pierre Schmidt (24,98%). Il est réélu député de la Meurthe-et-Moselle avec une majorité de 53% des électeurs, le 12 mars 1967.
André Picquot travaille au sein de la Commission de la production et des échanges sous la 3ème législature. D’avril 1967 à mai 1968, il se consacre surtout à la défense du personnel des bases militaires du secteur Toul-Nancy et prend la parole à deux reprises dans l’hémicycle à ce sujet. Le 9 juin 1967, il ne vote pas la motion de censure déposée par l’opposition contre le gouvernement de Georges Pompidou.
Pour sortir de la crise de mai 1968, le général de Gaulle décide de dissoudre l’Assemblée nationale à la fin du mois. Des élections législatives sont organisées les 23 et 30 juin 1968. Dans la 5ème circonscription de Meurthe-et-Moselle, la majorité est représentée par Christian Fouchet. Ce diplomate de carrière a fait partie des gouvernements de Georges Pompidou comme ministre de l’éducation nationale, puis comme ministre de l’intérieur en 1967-1968. Ses hésitations face aux événements de mai lui valent de ne pas faire partie du nouveau gouvernement Pompidou. Elu dans la 1ère circonscription de la Meurthe-et-Moselle en mars 1967, il se présente un an plus tard aux suffrages des électeurs dans ce Toulois qui est « terre de patriotes et de soldats », comme il l’écrit dans sa profession de foi électorale. Député sortant, André Picquot accepte de s’effacer devant Christian Fouchet, dont il devient le suppléant. Seules 40 voix leur manquent pour un succès au premier tour. Le 30 juin 1968, Christian Fouchet est élu député de la Meurthe-et-Moselle par 60,6% des suffrages exprimés.
L’ancien ministre du général de Gaulle prend progressivement ses distances avec l’exécutif à partir de l’élection de Georges Pompidou comme chef de l’Etat, en 1969. Le 24 mai 1972, il ne prend pas part au vote sur la politique générale du gouvernement Chaban-Delmas, par exemple. En mars 1973, il se présente sans étiquette aux élections législatives, avec André Picquot comme suppléant. Les deux hommes bénéficient toutefois du soutien de la majorité. L’ancienne suppléante d’André Picquot, Claire Leclerc, est également candidate. Elle se réclame d’Edgar Faure. Le 11 mars 1973, Christian Fouchet est réélu. L’ancien ministre décède le 11 août 1974 et André Picquot est appelé à le remplacer, comme il l’avait fait pour François Valentin en 1961.
Le maire de Lucey retrouve l’Assemblée nationale plus de six ans après l’avoir quittée. Il y siège comme non inscrit d’août à octobre 1974, puis rejoint le groupe des Républicains indépendants. Il appartient à la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales. André Picquot s’affirme surtout comme un défenseur des intérêts de ses électeurs au Parlement. Le 6 novembre 1974, une séance de « questions au gouvernement » lui permet d’interroger le ministre de l’équipement sur le tracé de la route nationale n°4 à proximité du village lorrain d’Ecrouves.
André Picquot appartient à la majorité sous la 5ème législature. Il se prononce en faveur de l’extension de la saisine du Conseil constitutionnel (10 octobre 1974), mais refuse de légaliser l’interruption volontaire de grossesse (28 novembre 1974). Il soutient la création du divorce par consentement mutuel (4 juin 1975) comme le programme du gouvernement Barre (28 avril 1977).
Conseiller régional de Lorraine depuis 1972, André Picquot n’est pas candidat aux législatives de 1978. A cette date, c’est le général Marcel Bigeard qui devient député de la 5ème circonscription de Meurthe-et-Moselle.
C’est dans son village natal que décède André Picquot, à l’âge de 72 ans.