Victor, Luis Reoyo

1917 - 2005

Informations générales
  • Né le 22 avril 1917 à Toulouse (Haute-Garonne - France)
  • Décédé le 30 janvier 2005 à Bordeaux (Gironde - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Gironde
Groupe
Union et fraternité francaise

Biographies

Biographie de la IVe République

RÉOYO (Victor, Luis)
Né le 22 avril 1917 à Toulouse (Haute-Garonne)
Décédé le 30 janvier 2005 à Bordeaux (Gironde)

Député de la Gironde de 1956 à 1958

Victor, Luis, Réoyo fait partie des petits commerçants que rien ne destinait à une carrière politique et qui sont devenus députés à la faveur de la vague poujadiste, aux élections du 2 janvier 1956. Au moment où le mouvement Poujade apparaît en Gironde, au début de l’année 1955, Victor Réoyo est mandataire en fruits et légumes aux halles de Bordeaux. Il devient président départemental de l’Union de défense des commerçants et artisans (UDCA), en avril 1955. Le 2 janvier 1956, il est élu député Union et fraternité française (UFF) de la première circonscription de la Gironde, avec 9,2 % des inscrits ; les cantons du Médoc et la ville d’Arcachon ont permis son élection, avec des scores supérieurs à 15 % des inscrits.
Bon orateur, il adhère à certaines prises de position conservatrices de l’UDCA, sur le problème colonial ou la nécessité d’un sursaut populaire de toutes les catégories sociales pour régénérer les institutions de la Quatrième République. Pour autant, il entretient une certaine distance à l’égard de la ligne du mouvement de Saint-Céré, qui est articulée autour de trois thèmes principaux.
D’abord, il ne reprend pas à son compte la xénophobie exprimée à diverses reprises par Pierre Poujade et de nombreux dirigeants nationaux. Fils d’un père espagnol et d’une mère qui serait portugaise, Victor Réoyo a acquis la nationalité française à l’âge de 21 ans. Ses origines ont sans doute joué dans son hostilité à tout antisémitisme, à une époque où le papetier de Saint-Céré fustige “Mendès-Portugal” et les “Français de fraîche date”.
Ensuite, Victor Réoyo est en désaccord avec la soumission du groupe parlementaire UFF au bureau national.
Victor Réoyo est membre de la commission des affaires étrangères et de la commission de la presse, à partir du 31 janvier 1956. De 1956 à 1958, il dépose quatre propositions de loi et deux propositions de résolution. A bien des égards, Victor Réoyo se fait le porte-voix, à l’Assemblée nationale, des mots d’ordre du mouvement Poujade, en ce qui concerne la politique étrangère exclusivement. Après avoir fait part de ses interrogations sur les conditions dans lesquelles le colonel Nasser a procédé à la nationalisation du canal de Suez, sans que la France ne riposte, il vote contre l’expédition de Suez, le 31 octobre 1956, conformément aux consignes de Pierre Poujade. Le 30 novembre suivant, il dépose une proposition de loi tendant à la création d’une commission d’enquête sur les événements de Hongrie. Il exprime très nettement, et à plusieurs reprises, son rejet de la construction européenne. A cet égard, il dénonce « le rôle occulte de M. Jean Monnet et de sa secte de technocrates » dans son intervention du 5 juillet 1956, au moment du débat sur l’Euratom. Ses propos, qui visent à « préserver l’héritage de la France », sont volontairement courroucés à l’égard des « européistes » qui souhaitent la constitution d’un pouvoir politique supranational, « revanche de la CED ». Le 6 juillet 1957, lors des débats sur la ratification des traités instituant la CECA, il renouvelle ses critiques sur l’Europe en gestation dans laquelle « toute la réalité du pouvoir est partagée entre des organismes apatrides ». Peu de temps avant, il a souligné les « abandons unilatéraux consentis par la France » sur la question de la Sarre, le 11 décembre 1956. A la fin de la législature, la question algérienne tient une part majeure dans les interventions du député de la Gironde, qui voit dans le projet de loi-cadre sur les institutions en Algérie une atteinte à l’unité et à l’indivisibilité de la France et de ses départements d’outre-mer. Il parle d’une « atteinte portée par le projet à l’immutabilité de la République française ». Par ailleurs, il prend part à la discussion sur le procès-verbal de la séance du 2 octobre 1957, en soulignant le droit du groupe parlementaire UFF à une vice-présidence de l’Assemblée nationale. Le 22 janvier 1958, il interroge le gouvernement sur sa politique étrangère relative à la Tunisie et sur les prises de position de Robert Schuman sur la défense de la frontière algéro-tunisienne. Le 15 avril 1958, il dépose une demande d’interpellation sur les bons offices qui, à son avis, dénotent une internationalisation « inadmissible » du conflit algérien très préjudiciable à la souveraineté française. Il souhaite que la France contrôle seule les frontières de l’Algérie.
En revanche, sur un certain nombre de problèmes qui ont trait à l’activité parlementaire, Victor Réoyo marque ses distances à l’égard du bureau national du mouvement. Quand est posée la question d’une démission éventuelle des parlementaires poujadistes, Victor Réoyo s’exprime en faveur du maintien des députés, car leur action est, selon lui, un grain de sable qui contribue à enrayer l’entreprise gouvernementale. Il manifeste, à plusieurs reprises, le souci de conserver au groupe parlementaire UFF, dont il devient président le 28 janvier 1957, une marge de manoeuvre par rapport aux dirigeants nationaux de l’UDCA. Pendant la session de 1957-1958, le groupe éponyme, à la suite des dissidences et du départ voulu par Pierre Poujade de certains élus vers le groupe paysan de Paul Antier, est réduit à trente membres. Le 24 avril 1957, Victor Réoyo conteste la volonté de Pierre Poujade de décider seul de l’exclusion des députés Demarquet, Parrot et Luciani. Selon lui, il appartient au groupe parlementaire d’émettre un avis. En l’occurrence, il se prononce en faveur de leur réintégration. En juin, il laisse entendre qu’il souhaite voir le groupe UFF sortir de l’opposition stérile dans laquelle il se cantonne. Dans le prolongement de ses prises de position, Victor Réoyo n’est pas convaincu par la formation, en mai 1957, de l’intergroupe parlementaire Antier-Dorgères-Poujade, car les députés paysans refusent de suivre leur leader Paul Antier. Il conteste ainsi ouvertement le bien-fondé des directives données par Pierre Poujade dans le domaine parlementaire.
Il y a un troisième aspect des divergences de Victor Réoyo avec Pierre Poujade : le député girondin n’adhère pas pleinement à l’orientation politique du mouvement. Il joue certes son rôle de député UFF. A ce titre, il participe en personne à des oppositions à contrôles ou à saisies, comme le 12 avril 1956 à Arcachon, tout en se faisant, au cours des réunions de militants, le relais des slogans du mouvement : il en est ainsi de la dénonciation des invalidations ou du maintien indispensable de la présence française en Afrique du Nord. Néanmoins, son attitude politique relève d’un conservatisme pondéré qui contraste avec certaines orientations de l’Union. Il désapprouve les tendances par trop droitières, selon lui, d’un Jean-Marie Le Pen. Il conçoit le grand rassemblement des militants poujadistes prévu en octobre, puis en novembre 1956 devant le Palais-Bourbon - le « rendez-vous d’octobre » - comme une démonstration pacifique, et non comme un nouveau 6 février. Progressivement, Victor Réoyo en vient à envisager explicitement un soutien poujadiste à la constitution d’un gouvernement, notamment lors de ses conversations avec le député-maire d’Angoulême Henri Thébault. Il y met seulement des conditions : amnistie et réforme fiscale, maintien de la présence française en Algérie et refonte des traités du Marché commun et de l’Euratom. Ainsi le député de la première circonscription de la Gironde se rapproche-t-il de la position de certains indépendants et prend-t-il peu à peu ses distances à l’égard de l’opposition radicale du poujadisme au régime en place.
La rupture entre Victor Réoyo et l’UDCA est consommée en juin 1958, à l’occasion du retour au pouvoir du général de Gaulle. Victor Réoyo, supposé organiser une réunion entre de Gaulle et le président de l’UDCA qui n’a finalement pas lieu, est accusé par ce dernier d’avoir voulu manoeuvrer pour son propre compte et d’avoir entraîné les députés UFF dans un vote gaulliste qu’il réprouve. Le 1er juin 1958, Victor Réoyo salue à l’Assemblée nationale les possibilités nouvelles de paix en Algérie apparues après le 13 mai ; il vote pour la confiance au président du Conseil, Charles de Gaulle. Le 2 juin 1958, comme la plupart des députés poujadistes, il ne prend pas part au vote sur les pleins pouvoirs, alors que les fidèles de Poujade votent contre. Il se prononce le même jour en faveur de la révision constitutionnelle. Son intégrité est mise en cause par Pierre Poujade en première page de l’hebdomadaire poujadiste Fraternité Française, dans le numéro du 4 juin 1958. La rupture entre les deux hommes est désormais consommée. Le lendemain, Victor Réoyo démissionne de ses fonctions de président départemental et de membre de l’UDCA. Il tente également de ménager, au Parlement et dans le pays, un espace politique afin d’exprimer une position nuancée à l’égard du général de Gaulle, en créant l’Union et Action Libérale et Sociale (UALS). Cependant, cette formation, essentiellement constituée de dissidents poujadistes, ne parvient pas à s’implanter en Gironde et a peu d’écho dans le pays. Candidat aux législatives de novembre 1958 en Gironde, Victor Réoyo recueille moins de 3 % des inscrits.
Victor Réoyo, devenu directeur régional d’une compagnie d’assurances, prolonge son engagement politique au centre droit, en étant candidat dans le Tarn aux élections législatives de 1967 (2ème circonscription, 2,2 % des inscrits au premier tour). En 1973, il est candidat dans la deuxième circonscription du même département et obtient 5,7 % des inscrits, sous l’étiquette « Mouvement réformateur centre démocrate ». Il est également battu en 1978, dans la même circonscription, avec 1,9 % des inscrits. Il est président du Centre démocrate toulousain en 1966, vice-président du Centre des démocrates sociaux (CDS) girondin dans les années 1980, et responsable régional de ce même mouvement pour Midi-Pyrénées. Cependant, il n’exerce plus de fonctions électives.