Jean Taittinger

1923 - 2012

Informations générales
  • Né le 25 janvier 1923 à Neuilly-sur-Seine (Seine - France)
  • Décédé le 23 septembre 2012 à Epalinges (Suisse)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 30 novembre 1958 au 9 octobre 1962
Département
Marne
Groupe
Union pour la nouvelle République
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 18 novembre 1962 au 2 avril 1967
Département
Marne
Groupe
Union pour la nouvelle République-UDT
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 12 mars 1967 au 30 mai 1968
Département
Marne
Groupe
Union démocratique pour la V° République
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IVe législature
Mandat
Du 23 juin 1968 au 7 février 1971
Département
Marne
Groupe
Union des démocrates pour la République
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ve législature
Mandat
Du 2 avril 1973 au 5 mai 1973
Département
Marne
Groupe
Union des démocrates pour la République

Biographies

Biographie de la Ve République

Taittinger (Jean)
Né le 25 janvier 1923 à Neuilly-sur-Seine
Décédé le 23 septembre 2012 à Epalinges (Suisse)

Député de la Marne de 1958 à 1971 et en 1973

Jean Taittinger naît le 25 janvier 1923 à Neuilly-sur-Seine dans une famille de négociants en vins de Champagne. Il reçoit le goût de la politique en héritage : son père Pierre, issu d’une famille lorraine qui a quitté la Moselle en 1871 pour rester française, a été député de Charente-Inférieure puis de Paris de 1919 à 1940. Lors de l’occupation allemande, Pierre Taittinger a exercé de hautes responsabilités politiques, notamment la présidence du conseil municipal de Paris à partir de 1943. Ceci lui vaut d’être déchu de ses droits civiques à la Libération. De son côté, Jean Taittinger rejoint à l’âge de 18 ans les troupes du général Edgard de Larminat et participe à la libération de la forteresse de Royan en avril 1945. Après la guerre, le jeune homme intègre l’entreprise familiale auprès de son frère alors directeur général de la société Champagne Taittinger.

Dès 1953, Jean Taittinger obtient son premier mandat électif : il est élu maire de Gueux, petite commune viticole de la Marne située à l’ouest de Reims. Il exerce cette fonction jusqu’en 1959.

Avec le retour du général de Gaulle au pouvoir en 1958, Jean Taittinger embrasse une carrière politique nationale. Le maire de Gueux se présente alors comme candidat de l’Union pour la nouvelle République (UNR) dans la 1re circonscription de la Marne. Jugeant que de Gaulle « a fait en quatre mois ce que les parlementaires n’avaient pas réussi en douze ans », il se présente à ses électeurs comme « un homme nouveau » à « la volonté intraitable de tout changer ». Avec 35,4 % des voix, Jean Taittinger se place en tête du premier tour le 23 novembre 1958, devançant le candidat du MRP, ancien ministre de la Santé, ancien président de l’Assemblée nationale, maire de Reims et député sortant Pierre Schneiter (26,6 %) ainsi que Gaston Chappaz de la SFIO (13,2 %), Henri Humblot du Parti socialiste autonome (4,5 %) et la communiste Hélène Duran (20,3 %). Profitant d’une triangulaire l’opposant à Pierre Schneiter et Hélène Duran, Jean Taittinger est élu député de la Marne avec 44,9 % des suffrages.

Dès son arrivée dans l’hémicycle, le député de la Marne est nommé à la Commission des finances à laquelle il siège pendant toute la législature. Rapporteur spécial du budget des affaires culturelles, Jean Taittinger s’exprime surtout en cette qualité à la tribune.

Par ailleurs, Jean Taittinger approuve le programme du gouvernement de Michel Debré (16 janvier 1959), le nouveau règlement de l’Assemblée nationale (3 juin 1959), la déclaration de politique générale du Premier ministre, le 15 octobre 1959, quelques semaines après le discours du général de Gaulle évoquant l’« autodétermination » de l’Algérie, la loi Debré sur les rapports entre l’État et les établissements d’enseignement privés (23 décembre 1959), les pouvoirs spéciaux au Gouvernement pour ramener l’ordre en Algérie après la semaine des barricades (2 février 1960), le programme du gouvernement Pompidou (27 avril 1962). Aussi, ne vote-t-il pas la motion de censure du 4 octobre 1962. En revanche, le député de la Marne ne prend pas part au vote sur la levée de l’immunité de Georges Bidault (5 juillet 1962).

En 1962, Jean Taittinger qui a été élu maire de Reims trois ans auparavant, se présente comme candidat à sa succession. Dressant un bilan de son action parlementaire et municipale, il dit avoir mis toutes ses forces au service de la Marne et de Reims : « Il ne se passe pas un seul jour sans que je soutienne l’effort du plus important au plus humble d’entre vous, n’épargnant ni mon temps, ni mon travail ». Ce discours porte ses fruits car le député sortant est réélu dès le premier tour, le 18 novembre 1962, ayant obtenu 21 742 voix sur 42 360 suffrages exprimés.

À son retour au Palais-Bourbon, Jean Taittinger retrouve les rangs du groupe gaulliste et ceux de la Commission des finances au nom de laquelle il produit chaque année, à l’occasion des projets de loi de finances, un rapport spécial sur les crédits de la construction. Député de la majorité, il souligne souvent l’effort fait par le gouvernement face à la crise du logement mais appelle « à procéder d’urgence à de profondes réformes » afin d’y remédier efficacement, notamment par la création de davantage de logements HLM et par la rénovation de l’habitat ancien. En novembre 1964, Jean Taittinger intervient en qualité de rapporteur pour avis sur le projet de loi instituant le bail à construction et relatif aux opérations d'urbanisation.

Lors des scrutins publics, le député de la Marne soutient avec constance l’action du gouvernement. Ainsi, il se prononce notamment en faveur de la ratification du traité de l’Elysée le 13 juin 1963, du projet de loi encadrant les grèves dans les services publics le 26 juillet 1963, de la révision constitutionnelle relative à la modification des dates des sessions parlementaires le 20 décembre 1963, de la réforme du mode d’élection des conseillers municipaux le 17 juin 1964 et de la réforme du service national le 26 mai 1965.

En janvier 1967, c’est en présence de Jean Taittinger que le Premier ministre Georges Pompidou inaugure la faculté de médecine de Reims. Au mois de mars suivant, Jean Taittinger se présente une nouvelle fois aux électeurs de la 1re circonscription de la Marne. Il lui manque 302 voix pour être élu dès le premier tour du scrutin. Il l’emporte largement (56,17 % des voix) au second tour face au communiste Michel Delaitre.

Lors de cette législature écourtée par la dissolution de 1968, Jean Taittinger assume des responsabilités plus importantes. Inscrit au groupe gaulliste de l’Assemblée, il devient membre du bureau politique du groupe UD-Ve République (Union des démocrates pour la Ve République) et du secrétariat national de l’UNR-UDT en 1967. Dès son arrivée à l’Assemblée, le député de la Marne prend la vice-présidence de la Commission des finances dont le président est alors Valéry Giscard d’Estaing. Il prend la parole, le 26 octobre 1967, à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 1968 en tant que rapporteur spécial pour l’éducation nationale. Il se félicite à la tribune des crédits accordés par le gouvernement à l’enseignement : « Tradition, innovation, rénovation, telles sont donc les trois caractéristiques du budget ». Député gaulliste, Jean Taittinger ne s’associe évidemment pas aux trois motions de censure de mai et juin 1967 sur les ordonnances relatives à la sécurité sociale.

Parallèlement à ses activités parlementaires, le député de la Marne fonde, en mars 1968, l’association des maires, conseillers généraux et conseillers municipaux pour la Ve République.

Les événements de mai 1968 ayant conduit le général de Gaulle à dissoudre l'Assemblée nationale, Jean Taittinger se porte candidat à sa succession en juin 1968. Son principal adversaire est l’ancien député communiste, René Tys. En 1964, ce dernier avait battu le maire de Reims aux cantonales dans le troisième canton de la ville. Il ne recueille cependant que 21,2 % des voix contre 58,3 % à Jean Taittinger qui l’emporte donc largement au premier tour le 23 juin 1968.

À ce nouveau retour au Palais-Bourbon, le député de la Marne redevient membre du bureau politique du groupe gaulliste Union des démocrates pour la République (UDR). Jean Taittinger déploie une intense activité parlementaire. Il est élu président de la Commission des finances en juillet 1968. Intervenant souvent à la tribune en cette qualité, Jean Taittinger ne manque pas de souligner à de nombreuses reprises la nécessité de moderniser l’économie française. Profondément marqué par les mouvements de mai 1968, le maire de Reims entend en tirer les leçons : « La révolution avortée n'a fait qu'ouvrir les yeux sur les difficultés qu'éprouve notre pays à édifier une économie moderne. […] Les événements récents ont agi comme un révélateur sur la conscience de bien des Français qui, d'une situation d'optimisme tranquille, se sont trouvés brutalement plongés dans un état de profonde perplexité » déclare-t-il à la tribune, le 22 octobre 1968, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 1969. Se réjouissant de l’expansion économique française en 1970, le président de la Commission des finances explique, à la tribune, lors de la discussion générale du projet de loi des finances pour 1971: « Cette amélioration de la qualité de notre économie, parce qu'elle nous rassure sur l'avenir, permet au gouvernement de répondre à notre désir d'améliorer les conditions de vie des Français, en particulier celles des moins favorisés, c'est-à-dire des personnes âgées, des handicapés physiques, des personnes disposant de revenus insuffisants. J’y vois une nouvelle preuve que le progrès économique est la condition du progrès social » (20 octobre 1970).

Le député de la Marne soutient avec constance le gouvernement en votant pour les grands projets de lois de la IVe législature : loi d’orientation de l’enseignement supérieur en octobre 1968, loi relative à l’exercice du droit syndical dans les entreprises en décembre 1968, renforcement de la garantie des droits individuels des citoyens en mai 1970, loi Pleven dite « anticasseurs », abaissement du service national à douze mois en juin 1970. Il vote pour la déclaration de politique générale du gouvernement Chaban-Delmas, le 15 octobre 1970.

Devenu un spécialiste des questions économiques et s’étant rapproché de Valéry Giscard d’Estaing lors de ses années à la vice-présidence de la Commission des finances, Jean Taittinger est appelé en janvier 1971 au gouvernement de Jacques Chaban-Delmas en qualité de secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des finances chargé du Budget. En juillet 1972, il conserve cette fonction dans le gouvernement de Pierre Messmer.

En 1973, Jean Taittinger sollicite le renouvellement de son mandat parlementaire. Au premier tour, il recueille 44,4 % des voix contre 32,5 % au communiste René Tys, 18,8 % au socialiste André Gazeau et 10,2 % au réformateur Jean-Noël Lesellier. Au second tour, le 11 mars 1973, Jean Taittinger est réélu avec 57,3 % des suffrages exprimés face à René Tys.

En avril, il est nommé garde des Sceaux du deuxième cabinet de Pierre Messmer. À cette fonction, Jean Taittinger incarne une droite oscillant entre un conservatisme assumé et un réformisme modéré. Le ministre de la Justice est ainsi, avec le Premier ministre Pierre Messmer et le ministre de la Santé Michel Poniatowski, à l’origine du premier projet de loi relatif à l’interruption volontaire de grossesse visant à autoriser l’avortement dans certains cas (risque pour la femme, malformation de l’enfant ou grossesse consécutive à un acte de violence). Le projet avait été annoncé, en janvier 1973, à Provins, par Pierre Messmer, Premier ministre, alors en campagne pour des élections législatives. À la tribune, le 14 décembre 1973, le ministre fustige une « législation archaïque inspirée par une politique nataliste et revêtant un caractère extrêmement répressif ». Il défend une voie moyenne indiquant qu’il s’agit d’« un moyen terme entre des thèses extrêmes » : la solution laxiste de la liberté totale de l’avortement, et une situation « qui aurait pour effet de rejeter presque systématiquement les femmes qui veulent à tout prix faire interrompre leur grossesse ». Le projet de loi, renvoyé en commission par 225 voix contre 212 en décembre 1973, est ajourné. Mais cette situation n’est que temporaire car le dépôt du projet de loi a ouvert la voie à celui présenté, l’année suivante, par Simone Veil.

En avril 1974, après le décès du président Pompidou, Jean Taittinger signe « l’appel des 43 » avec Jacques Chirac, prônant une candidature unique de la majorité, affaiblissant alors la candidature du gaulliste Jacques Chaban-Delmas et renforçant ainsi celle de Valéry Giscard d’Estaing.

En 1977, Jean Taittinger ne se représente pas à la mairie de Reims et quitte la vie politique invoquant des « raisons personnelles ». Resté maire pendant 18 ans, il a joué un rôle essentiel dans le développement de la ville. En obtenant qu’elle soit desservie par l’autoroute, il a fait de Reims un carrefour dynamique. Il a modernisé son urbanisme, en créant de nouveaux quartiers, et ses infrastructures, la dotant notamment du centre hospitalier universitaire Robert Debré, de la maison de la culture André Malraux, dont Robert Hossein a été le directeur emblématique, de la cour d’appel de Reims et de nombreux équipements sportifs et familiaux. Dès lors, Jean Taittinger se consacre à l’entreprise familiale et prend notamment la présidence de la Société du Louvre qui connaît, sous son autorité, un grand développement. Ainsi, le groupe rénove ses principaux hôtels (le Lutetia, le Crillon) et se porte acquéreur de grands hôtels (l’Ambassador à Paris ou le Martinez à Cannes) et de sociétés françaises comme la cristallerie de Baccarat ou les sociétés ELM-Leblanc et Deville. Jean Taittinger développe également le groupe Envergure qui comprend en particulier les hôtels Campanile, Kyriad et Première Classe. Il investit également dans le parc hôtelier de Disneyland Paris exploité par la société Euro Disney. De 1989 à 1994, il en préside le Conseil de surveillance.

Il quitte le monde des affaires en 2000.

En 2005, le groupe est vendu par la famille à un fonds de pension américain. Mais en 2006, Pierre-Emmanuel Taittinger, l’un des fils de Jean Taittinger, reprend, en association avec la caisse régionale Nord-Est du Crédit agricole, la prestigieuse maison de champagne. Un autre de ses cinq enfants, son fils aîné Frantz, est élu député des Hauts-de-Seine, sous l’étiquette du Rassemblement pour la République (RPR) en 1993 puis réélu en 1997, tout en exerçant les fonctions de maire d’Asnières de 1994 à 1999. Il est également le demi-frère de Pierre-Christian Taittinger (1926-2009), sénateur de Paris de 1968 à 1995, élu sous la bannière des Républicains indépendants, vice-président du Sénat de 1980 à 1992 et maire du 16e arrondissement de Paris de 1989 à 2008.

Le 23 septembre 2012, Jean Taittinger s’éteint à l’âge de 89 ans. La maire socialiste de Reims, Adeline Hazan lui rend un hommage appuyé : « Jean Taittinger s’inscrivait dans la tradition de ces grands « maires-bâtisseurs » qui, parce qu’ils ont une vision unique de leur territoire, en marquent durablement la vie et les évolutions. Pendant 18 ans, la Ville de Reims a connu, sous son impulsion incessante, un développement sans précédent, devenant ainsi une métropole régionale ». Le président de la République François Hollande salue, quant à lui, « un grand serviteur de l’État et un grand entrepreneur ».