Pierre Villon-Ginsburger
1901 - 1980
VILLON Pierre, (GINSBURGER Roger, Salomon, dit)
Né le 27 août 1901 à Soultz (District de Haute Alsace - Empire allemand)
Décédé le 6 novembre 1980 à Vallauris (Alpes-Maritimes)
Membre de la première et de la second Assemblée nationale constituante (Allier)
Député de l’Allier de 1946 à 1958, de 1958 à 1962 et de 1967 à 1978
Fils de Moïse Ginsburger, rabbin, et de Coralie Hecker, Roger Ginsburger fait des études d’architecture en Allemagne de 1919 à 1922. Après son service militaire, il s’établit comme architecte et décorateur à Paris, en s’inspirant des conceptions modernistes de Le Corbusier et du Bauhaus. Il épouse en 1929 Doris Niedermann, musicienne, décédée en 1939 et dont il a un fils, puis à Marie-Claude Vogel, veuve de Paul Vaillant-Couturier, le 7 novembre 1949 à Gentilly.
Roger Ginsburger aurait exercé des responsabilités au sein de l’Internationale communiste dès la fin des années vingt, mais son adhésion officielle au Parti communiste date d’octobre 1932. Quelques semaines plus tard, il est nommé secrétaire du « rayon » des Vème et VIème arrondissements de Paris. En 1934, le Parti l’envoie comme permanent à l’Internationale des marins et dockers à Anvers. Le siège de cette organisation, qui aurait été une « couverture » des services spéciaux du Komintern, est transféré à Paris en 1935. A partir de novembre 1935, il travaille directement pour le PCF, au secrétariat administratif, puis à la section de propagande (1936-1938) et, enfin, à partir de l’automne 1938, comme directeur des Editions sociales internationales.
Après la dissolution du Parti communiste, Roger Ginsburger quitte son domicile et rédige l’Humanité clandestine jusqu’en juin 1940. Resté à Paris occupé par l’armée allemande, il prend la direction d’une autre publication clandestine, Les Cahiers du Bolchévisme. Arrêté par la police française le 8 octobre 1940 et condamné à huit mois de prison, il est maintenu en détention administrative après avoir purgé sa peine. Il s’évade le 17 janvier 1942 du château de Gaillon (Eure). Caché à Paris, il succède à George Politzer, fusillé, à la tête des comités d’intellectuels du Front national, puis devient secrétaire général du Front national, mouvement de résistance créé par le PCF, qui tente alors d’encadrer l’ensemble de la Résistance intérieure. Sous le pseudonyme de « Pierre Villon », qu’il garde après la Libération, il siège au Comité de coordination des mouvements de résistance de la zone nord puis, à partir de sa constitution, le 27 mai 1943, au Conseil national de la Résistance (CNR). Membre du bureau permanent, il participe à la rédaction du programme du CNR, adopté le 15 mars 1944. A partir de février 1944, il préside le Comité militaire d’action (COMIDAC, puis COMAC), chargé de superviser l’état-major national des Forces françaises de l’Intérieur. Le 29 août, dans Paris libéré, il est reçu par le général de Gaulle. A partir du 31 août, il fait partie du Comité central du PCF et siège même, officieusement, à son bureau politique. Son ascension dans la hiérarchie du parti s’arrête rapidement. En 1945, il est écarté de la direction du Front national, à la suite de l’échec de la fusion avec le Mouvement de Libération nationale (MLN); il ne siège plus non plus au bureau politique du PCF, mais figure au comité central jusqu’en 1970. En juin 1952, il est élu secrétaire général de l’Association nationale des anciens combattants de la Résistance (ANACR) et, en 1954, il succède à Charles Tillon à sa présidence. Il est également vice-président de la Fédération internationale des résistants.
Membre de l’Assemblée consultative provisoire, Pierre Villon préside sa commission de la défense nationale jusqu’en juin 1945. Il appartient également à la commission de l’Alsace et de la Lorraine et à celle du Règlement. Il dépose, le 27 juillet 1945, une proposition de résolution invitant le gouvernement provisoire à constituer une puissante armée nationale et républicaine ; il en est le rapporteur le 1er août.
Le 21 octobre 1945, il est élu député de l’Allier à la première Assemblée nationale constituante comme tête de la liste communiste, liste qui recueille 36,9 % des suffrages exprimés et qui obtient deux sièges. Il préside la commission de la défense nationale. Il appartient également à la commission du règlement. Durant son premier mandat parlementaire, il intervient à trois reprises et défend, notamment, un amendement au projet de loi portant fixation des dépenses militaires de l’exercice 1946.
Il est réélu le 2 juin 1946, sur la liste communiste (35,3 % des suffrages exprimés et deux sièges), à la seconde Assemblée nationale constituante et siège à la commission de la défense nationale et à la commission du règlement et des pétitions. Il dépose, le 10 septembre 1946, une proposition de loi fixant le statut et le droit des combattants volontaires de la Résistance. Il intervient à trois reprises sous la deuxième Constituante.
Il est élu député de l’Allier à l’Assemblée nationale, le 10 novembre 1946, sur la liste du Parti communiste et d’union républicaine et résistante (36,9 % des suffrages exprimés et deux sièges). Au cours de cette législature, il est membre de la commission du suffrage universel (1946-1951) et de la commission de la défense nationale (1946-1951) dont il est vice-président (1946-1947). Il est également nommé membre de la commission spéciale chargée d’enquêter et de vérifier la gestion et les comptes de la société des éleveurs du Bourbonnais et, en particulier, de l’abattoir de Villefranche d’Allier. Il dépose quatre propositions de loi, six propositions de résolution et un rapport sur un texte d’initiative parlementaire. Le 27 décembre 1946, il présente une proposition de loi concernant les combattants volontaires de la Résistance. En dehors de la défense des éleveurs du Bourbonnais, ses propositions de loi ou de résolution concernent essentiellement les questions militaires : il s’oppose au maintien des soldats du contingent et au rappel des disponibles et des réservistes en vertu de loi dite « de défense de la République » (11 décembre 1947) ; il propose de limiter à 12 mois la durée du service militaire et de ne pas utiliser les soldats du contingent hors d’Europe et du bassin méditerranéen (4 mai 1948), d’envoyer au Vietnam une commission parlementaire chargée d’enquêter sur les atrocités commises par des éléments du corps expéditionnaire (29 juin 1949), d’assurer aux militaires le droit à la lecture des journaux de toutes les opinions (11 mai 1951). Il prend la parole à de très nombreuses reprises. En effet, il intervient en séance à soixante-cinq reprises au cours de cette première législature de la Quatrième République. Il dépose six demandes d’interpellation, défend deux motions préjudicielles, un contre-projet et fait trois rappels au règlement. Il défend cinquante-deux amendements.
Réélu le 17 juin 1951 comme tête de la liste présentée par le PCF et par le Parti socialiste unitaire qui recueille 37,4 % des suffrages exprimés et obtient deux élus, Pierre Villon siège dans les mêmes commissions : celle de la défense nationale (1951-1955) et celle du suffrage universel et des pétitions (1951-1955). Il dépose trois propositions de loi et deux propositions de résolution. Les premières portent sur les droits des vieux métayers (3 août 1951), sur un allègement du temps de service des soldats du contingent mariés et pères de famille (10 avril 1952), sur la gratuité des transports des soldats bénéficiaires de permissions (9 décembre 1952). Ses propositions de résolution s’opposent à tout renvoi de personnel de la Manufacture nationale d’armes de Saint-Etienne (18 novembre 1953). Il se prononce également pour la libération des résistants emprisonnés (7 juillet 1954). Ses interventions en séance publique sont tout aussi fréquentes que sous la législature précédente. Il prend la parole à trente reprises, en défendant notamment quatre amendements, trois rappels au règlement et un amendement indicatif. Il dépose trois demandes d’interpellation et une motion préjudicielle. Il intervient fréquemment contre le réarmement allemand, l’emprise américaine sur le gouvernement français, l’amnistie des « collabos », le révisionnisme allemand à l’œuvre en Alsace, et pour la négociation avec Ho Chi Minh.
Réélu le 2 janvier 1956 comme tête de la liste du PCF (34,3 % des suffrages exprimés et deux sièges), il est membre, à nouveau, à la commission de la défense nationale (1956-1958). Il dépose une proposition de résolution et six propositions de loi. Il prend la parole à l’occasion de six débats différents, défend deux amendements et dépose deux demandes d’interpellation. Pierre Villon continue à être le porte-parole de son groupe sur les questions militaires, en particulier à propos de la guerre d’Algérie, de l’intégration de l’Allemagne fédérale à l’organisation atlantique et de l’installation de rampes de lancement de fusées en France. Lors de l’insurrection hongroise, en novembre 1956, il défend l’intervention de l’URSS et critique l’utilisation de ces événements pour tenter de faire oublier les échecs de la politique française, ce qui lui vaut un rappel à l’ordre. Le 6 mars 1968, il dépose une demande d’interpellation sur les mesures prises pour faire cesser les crimes dénoncés par le livre d’Henri Alleg, La Question.
Sous la Cinquième République, Pierre Villon est élu, le 30 novembre 1958, député dans la troisième circonscription de l’Allier (Gannat). Battu en 1962, il est réélu en 1967, 1968 et 1973. Il refuse d’être candidat aux élections de 1978.
Chevalier de la Légion d’honneur, il a obtenu, également, les distinctions suivantes : croix de guerre 1939-1945 ; médaille de la Résistance, avec rosette ; médaille des évadés.
Il disparaît le 6 novembre 1980.