Maurice, Joseph, Henri Lenormand

1913 - 2006

Informations générales
  • Né le 15 janvier 1913 à Mâcon (Saône-et-Loire - France)
  • Décédé le 8 septembre 2006 à Southport (Australie)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Nouvelle-Calédonie
Groupe
Indépendants d'outre-mer
Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 2 janvier 1956 au 8 décembre 1958
Département
Nouvelle-Calédonie
Groupe
Non-inscrit
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 28 mai 1959 au 9 octobre 1962
Département
Nouvelle-Calédonie
Groupe
Républicains populaires et centre démocratique
Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 25 novembre 1962 au 17 mars 1964
Département
Nouvelle-Calédonie
Groupe
Centre démocratique

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 15 janvier 1913 à Mâcon (Saône-et-Loire)

Député de la Nouvelle Calédonie de 1951 à 1958

Maurice Lenormand est né le 15 janvier 1913 à Mâcon, dans le département de la Saône-et Loire. Il est le fils de Maurice Lenormand, organiste à la cathédrale Saint-Vincent de Mâcon et professeur à l'Ecole de musique de la ville. Après des études secondaires à Mâcon, au collège Ozanam puis au lycée Lamartine, il rejoint l'Institut agricole d'Algérie, dont il sort en 1933 avec le titre d'ingénieur. L'année suivante est celle de sa découverte, en tant que jeune appelé du contingent, de la Nouvelle-Calédonie ; il se prend de passion pour la langue et la culture de ce territoire lointain, pauvre et miné par les tensions sociales et raciales. Embauché comme analyste-chimiste dans les mines de nickel de l'île, il épouse en 1936 Simone Wapata Soot, petite-fille du grand chef Boula, de l'île de Li-fou, qui lui donnera huit enfants.

Jeune chef de famille, Maurice Lenormand rejoint la métropole en 1938. Il y mène simultanément plusieurs activités, qui vont de la création d'une société de production de programmes radiophoniques à la rédaction d'un ouvrage consacré aux problèmes d'organisation professionnelle et syndicale (Manuel pratique du corporatisme, 1938) ; il est en outre un élève assidu de l'Institut d'Ethnologie, dont il sort diplômé en 1939, et un visiteur régulier du département d'Océanie du Musée de l'Homme.

Lorsque la guerre éclate, Maurice Lenormand est affecté à Nouméa, au Bataillon du Pacifique ; il obtient cependant sa mutation, et part combattre en métropole. De retour à Paris à la fin de l'année 1940, il s'inscrit à la Faculté de pharmacie ; simultanément, il prend des cours à l'Ecole des hautes études et à l'Ecole des Langues orientales. Hostile à l'occupant, il participe en 1944 aux combats pour la Libération de Paris (réseau Libération-Nord) ; l'année suivante, il obtient le titre de docteur en pharmacie de la Faculté de Paris.

Maurice Lenormand repart alors à Nouméa, où il crée sa propre officine ; il devient en outre exploitant d'une plantation à Sarabo. Membre d'un grand nombre de sociétés savantes (Société des études mélanésiennes, Société des océanistes, Société des études polynésiennes de Papeete, Polynesian Society de Nouvelle-Zélande), il devient l'un des promoteurs les plus actifs de la culture mélanésienne. Son intérêt ethnographique se double d'un engagement politique en faveur de la cause canaque.

Il se présente, candidat sans étiquette, contre le député sortant, l'UDSR Roger Gervolino, aux élections législatives du 17 juin 1951, qui sont les premières pour lesquelles des Mélanésiens d'origine se voient reconnaître le droit de vote. Dans le texte qu'il adresse alors aux électeurs de Nouvelle-Calédonie et des Nouvelles-Hébrides, il érige en priorité l'amélioration du « statut des autochtones », au travers notamment de l'établissement d'un droit coutumier indigène et de la reconnaissance de la « liberté pour les évolués de renoncer au statut spécial indigène et de demander individuellement le statut commun ». Avec 5 034 voix sur 13 643 suffrages exprimés, Maurice Lenormand, qui devance de huit cents voix Roger Gervolino, fait son entrée à l'Assemblée nationale ; l'autre représentant de la Nouvelle-Calédonie au Parlement français est le caldoche Henri Lafleur, élu au Conseil de la République.

Maurice Lenormand choisit de siéger parmi les non-inscrits. Il est nommé membre de plusieurs commissions : Commission de la justice et de la législation (1951, 1953), Commission de l'intérieur (1954), Commission des affaires économiques (1954, 1955), dont il est nommé secrétaire, et Commission du suffrage universel, des lois constitutionnelles, du règlement et des pétitions (1955), dont il est aussi nommé secrétaire. Il est l'auteur de plusieurs propositions de loi ou de résolution, au travers desquelles il s'attache à aligner la législation applicable en Nouvelle-Calédonie sur celle de la métropole (code de la nationalité, code électoral, code de la santé publique,...).

Au cours de la législature, Maurice Lenormand consolide son enracinement électoral, devenant conseil général de la Nouvelle-Calédonie après les élections cantonales du 6 février 1953 ; il crée au sein de cette assemblée un groupe politique, l'Union calédonienne, qui est à l'origine du combat indépendantiste calédonien. Vice-président du conseil général en 1954, Maurice Lenormand en est élu président deux ans plus tard.

Candidat au renouvellement de son mandat aux élections législatives du 2 janvier 1956 sous l'étiquette de l'Union calédonienne, Maurice Lenormand obtient 12 906 voix sur 21 088 suffrages exprimés, devançant de près de cinq mille voix son rival le plus sérieux, l'indépendant Georges Chatenay. Il siège à la Commission de la marine marchande et des pêches. Son activité parlementaire est nettement plus intense qu'au cours de la précédente législature, mais elle se concentre sur les mêmes questions, et reprend souvent les mêmes propositions de texte. Ses interventions à la tribune de l'Assemblée, fort nombreuses elles aussi, privilégient les questions institutionnelles et électorales ; elles posent en outre à plusieurs reprises le problème de l'organisation des services publics dans les territoires d'outre-mer. En juin 1958, s'il ne prend pas part au vote d'investiture du général de Gaulle, il lui accorde les pleins pouvoirs et approuve la révision constitutionnelle.

Au cours de cette législature, la Nouvelle-Calédonie semble progresser à grands pas sur la voie de l'indépendance : un statut d'autonomie est adopté en juillet 1957, et une loi-cadre, promulguée le même mois, accorde le droit de vote à tous les Canaques ; trois mois plus tard se tiennent les élections pour l'Assemblée territoriale, qui accordent une majorité à l'Union calédonienne. Le contexte politique se tend brusquement à l'été 1958. Le 18 juin, les colons prennent la tête d'une révolte armée, et réclament une reprise en main du territoire par la métropole ; le 30 octobre, le général de Gaulle dissout l'Assemblée territoriale et nomme un nouveau gouverneur, nettement plus répressif.

Le combat de Maurice Lenormand pour l'égalité des droits civils et politiques prend alors une tournure plus radicale. Sa popularité demeure considérable : il est porté, le 24 décembre 1958, à la présidence de l'Assemblée territoriale de la Nouvelle-Calédonie ; il est en outre élu au premier tour des élections législatives du 24 mai 1959 et du 18 novembre 1962. Déchu de son mandat un an et demi plus tard à la suite d'une condamnation pénale qu'il avait subie en raison de l'action qu'il avait menée lors d'échauffourées à Nouméa, il doit céder son siège à son suppléant, M. Pidjot.

Maurice Lenormand prend alors progressivement du recul vis-à-vis du jeu politique calédonien. Il devient à son tour le suppléant de M. Pidjot aux élections législatives de 1973 et 1978, et tente en vain de se faire élire sénateur en 1974. S'il cesse, dès lors, de présenter sa candidature aux différents scrutins, il reste une référence intellectuelle et morale pour les jeunes générations de Kanaks, qui peinent toujours à trouver leur place au sein de la communauté politique calédonienne.